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Émission en sens inverse

6. Laser sans épissure en fibre optique à large mode (LMA)

6.3 Caractérisation du laser en contra-propagation

6.3.3 Émission en sens inverse

Lors de la discussion du chapitre 5.4, il a été déterminé qu’une cavité laser en contra-propagation permet de minimiser la puissance émise à travers le HR-FBG, car le segment de fibre parasite est moins fortement pompé. Le segment de fibre de gain hors de la cavité du côté du LR alors fortement pompé agira seulement comme un amplificateur laser sur le signal, effet qui peut même être bénéfique à l’émission laser. Toutefois, les mesures effectuées ont plutôt révélé une puissance émise en sens inverse très élevée de 27,4 W pour 538 W de puissance émise en sortie. Les spectres mesurés du côté HR de la Figure 6.12 révèlent un phénomène très intéressant concernant la nature de cette puissance inattendue. On peut voir qu’à faible puissance, seul un pic correspondant à la longueur d’onde du laser est transmis à travers le HR-FBG. À puissance intermédiaire, un second pic apparait vers les grandes longueurs d’ondes et à forte puissance, ce second pic est très dominant. Cette puissance correspond à la portion de signal qui n’est pas réfléchie par le HR-FBG. Cette portion de signal non-réfléchie augmente avec la puissance en raison de deux phénomènes combinés, soit l’élargissement spectral et le décalage de la longueur d’onde centrale du laser causé par l’échauffement du LR-FBG, discuté à la section précédente. Puisque la différence de température entre le LR-FBG et le HR-FBG, de ΔT = 43,1 °C, est plus grande que dans la cavité en co-propagation, une proportion beaucoup plus importante de signal n’est pas réfléchie par le HR, causant une importante perte de puissance dans la cavité, ce qui explique la baisse d’efficacité laser à haute puissance observée à la section 6.3.1.

Afin de confirmer que l’effet est causé par la différence de température entre les réseaux, des plaques d’acier inoxydable ont été déposées sur le polymère entourant les FBG pour augmenter quelque peu la dissipation thermique et réduire leur température. L’emploi de cette technique empêche toutefois la mesure de température des FBG, mais il est possible d’assumer que leur température sera légèrement inférieure que lorsque les plaques ne sont pas utilisées. À la Figure 6.13, on peut voir qu’il est possible de retarder le débordement spectral en utilisant judicieusement les plaques refroidissantes pour minimiser la différence de température entre les FBG.

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Figure 6.12 : Spectre de l’émission du côté du HR-FBG pour le laser LMA (Nufern 20/400) en contra- propagation.

Figure 6.13 : Puissance émise par la cavité laser du côté du HR-FBG en fonction de la puissance signal totale. On remarque une augmentation non-linéaire, signe d’un débordement en longueur d’onde du HR-

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Sur la Figure 6.13, un FBG est dit « froid » lorsque la plaque de refroidissement est utilisée et il est dit « chaud » lorsque la plaque n’est pas utilisée. L’utilisation de la plaque sur le HR-FBG fera augmenter la différence de température, faisant ainsi apparaitre le débordement à plus faible puissance, confirmant ainsi cette hypothèse hors de tout doute.

6.3.4 Diffusion Raman stimulée (SRS)

Tel qu’il a été démontré par Brown-Dussault dans [24], l’architecture laser en contra-propagation est optimale pour limiter la diffusion Raman, on peut donc s’attendre qu’il y ait un niveau de réjection Raman plus faible que pour la cavité en co-propagation. En effet, on peut observer à la Figure 6.14 qu’aucun effet Raman notable n’a pu être mesuré à la puissance maximale de 538 W. Une résolution de 1 nm a été utilisé à l’OSA pour maximiser la plage dynamique, qui atteint 45 dB.

Figure 6.14 : Aucune réjection Raman n’a pu être mesurée du laser LMA (Nufern 20/400) en contra- propagation à 538 W. Mesuré à l’OSA avec une résolution de 1 nm.

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Discussion

Les FBG inscrits dans la fibre LMA-YDF-20/400 de Nufern ont permis de faire une cavité laser sans épissure qui a été pompée en co-propagation et en contra-propagation. La cavité en contra- propagation a atteint une puissance de 538 W avec une efficacité record de 77% alors que la cavité en co-propagation a atteint une puissance de 472 W avec une efficacité de 65%. Les deux cavités étaient limitées en puissance par la pompe disponible. Il serait donc possible d’augmenter la puissance émise en utilisant des combinateurs de meilleure qualité, ou en pompant la cavité en bi-propagation.

Malgré les efforts effectués pour limiter la puissance émise du côté du HR-FBG, des puissances élevées ont été mesurées par ce côté, soit de 5,91 W pour le laser en co-propagation et de 27,4 W pour le pompage en contra-propagation. Ces puissances élevées peuvent causer des bris sur les combinateurs pompés par le bout, qui pourraient éventuellement être utilisés pour augmenter la puissance d’émission du laser. Qui plus est, la puissance qui fuit de la cavité ne peut être amplifiée et limite l’efficacité laser pour l’architecture en contra-propagation. On peut s’attendre à ce que le même phénomène se produise pour l’architecture en co-propagation à des puissances plus élevées, puisque cette puissance provient du décalage en λ des FBG, qui dépend de la différence de température des réseaux, donc de la puissance dans la cavité laser. Néanmoins, cet effet, ici limitatif, peut être contourné avec un traitement différent des FBG. Premièrement, il a été mentionné qu’une erreur sur la platine de translation est survenue lors de l’inscription du LR- FBG, faisant en sorte que ce réseau n’est pas de largeur spectrale optimale et possède potentiellement un échauffement trop élevé en raison des conditions d’irradiation mal contrôlées. Deuxièmement, il est possible de contrôler la position spectrale du LR-FBG, de manière à anticiper sa position à puissance maximale. Ainsi, un faible décalage initial des deux réseaux permettrait de centrer leur position lorsque la différence de température est maximale, limitant ainsi le décalage spectral. Pour envisager cette option, il est toutefois nécessaire que les FBG soient spectralement superposés en tout temps pour assurer une stabilité d’utilisation. Finalement, il est possible de placer les deux FBG dans des conditions de refroidissement différentes afin d’obtenir une différence de température nulle. Ceci étant dit, le décalage spectral des FBG est un effet qui peut limiter la réalisation de lasers sans épissures, mais ce problème peut être facilement contourné.

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Par ailleurs, la qualité de faisceau n’a pas été mesurée, mais on peut voir avec les spectres émis que l’émission est principalement monomode. Qui plus est, dans le cas d’un laser à vocation industrielle, le manufacturier sera en mesure de s’assurer que l’émission soit monomode et il pourra modifier le diamètre d’enroulement de la fibre au besoin. Une cavité sans épissure monomode est toutefois impossible à réaliser avec une fibre de haute luminosité en raison du guidage des modes supérieurs. Puisqu’il n’est pas possible de filtrer ces modes avec une courbure de la fibre et qu’il est nécessaire d’utiliser une fibre d’une autre géométrie pour effectuer le filtrage modal [51], l’inscription de FBG dans une fibre de gain de haute luminosité génère une cavité laser multimode, tel que démontré au chapitre 5.

Dans un autre ordre d’idées, les mesures présentées à la section 6.3 démontrent que l’architecture en contra-propagation génère les meilleures performances en termes de puissance émise, d’efficacité laser, de largeur de spectre et d’émission Raman. Ses désavantages principaux sont le décalage spectral des FBG et la limitation en puissance des combinateurs par le côté. Comme le démontrent les simulations numériques de la section 4.1.2, l’architecture en contra-propagation a un gain laser plus fort près de la sortie du signal (près du LR-FBG), faisant en sorte que la majorité de la puissance signal est générée près de la sortie, impliquant donc qu’un signal de puissance élevée se propage sur une longueur de fibre plus courte que dans une architecture en co-propagation. La puissance élevée génère les effets non-linéaires responsables de l’élargissement spectral et de la réjection Raman, alors il n’est pas surprenant que ces effets soient plus faibles dans une architecture en contra-propagation qu’en co-propagation.

Pour effectuer une comparaison, la Figure 6.15 présente le spectre d’émission à une puissance de 200 W normalisé pour chaque cavité laser réalisée au cours du projet, soit la cavité en fibre de haute-luminosité, la cavité en fibre LMA pompée en co-propagation et celle en fibre LMA pompée en contra-propagation. L’élargissement spectral de la cavité en contra-propagation est le plus faible en raison de plus faibles effets non-linéaires, discuté ci-avant. Toutefois, la cavité laser en fibre de haute-luminosité émet sur différents modes, à deux longueurs d’onde, et sa largeur spectrale est nettement plus grande à cause de l’élargissement spectral, contrairement à ses deux rivales. Néanmoins, l’élargissement spectral de chacun de ses pics ne peut être négligé, puisqu’il s’agit d’une architecture en co-propagation et que la fibre de haute luminosité implique une

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intensité dans le cœur de la fibre plus élevée pour la même puissance, ce qui favorise les effets non-linéaires.

Figure 6.15 : Spectres normalisés de chaque cavité laser assemblée à une puissance émise de 200 W. Pour terminer, la puissance obtenue est limitée par la puissance pompe disponible, signe très encourageant pour les travaux futurs. En considérant une émission laser de 1000 W, le HR-FBG atteindrait une température de seulement 55,2 °C, alors que le LR-FBG atteindrait une température de 112,8 °C, il serait donc nécessaire d’augmenter la dissipation thermique au LR- FBG, ou de réduire ses pertes, pour atteindre cette marque. Les travaux de Bernier et al. ont révélé que le principal élément limitatif de l’utilisation des FBG dans la fibre de gain est l’échauffement et les résultats obtenus avec le HR-FBG prouvent qu’il est possible de réaliser des FBG dans la fibre de gain pouvant supporter une émission kilowatt. D’ailleurs, la pente thermique du HR-FBG nous indique que ce réseau pourrait supporter une puissance de 1,7 kW avant d’atteindre la marque des 80 °C. La température élevée au-delà de la valeur critique de 80 °C extrapolée pour le LR-FBG est atteinte avec un réseau qui n’a pas été inscrit selon les conditions optimales. Les résultats obtenus avec le HR-FBG indiquent qu’il est possible d’inscrire un FBG générant un échauffement moindre que la valeur critique. En pratique, il est probable que le pompage en co-propagation soit l’architecture à préconiser pour atteindre la puissance maximale, en raison des combinateurs end-pumped, qui peuvent injecter une puissance

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nettement supérieure à leur contrepartie side-pumped, mais qui ne peuvent pas être utilisés en contra-propagation.

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Chapitre 7

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