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Les éléments dits « γ-gènes » sont des éléments qui se trouvent préférentiellement en solution solide dans la matrice γ. Il s’agit principalement des éléments Co, Cr, Mo, W ou Fe dont le rayon atomique est comparable à celui de Ni (Figure 1-21).

Figure 1-21 : Variation du diamètre atomique des éléments en fonction de leur numéro atomique. Les pourcentages représentent la solubilité maximale de chaque élément dans le Ni pur CFC. Les lignes

horizontales en pointillé correspondent à une déviation de + ou – 15 % par rapport au diamètre atomique du Ni [2]

Les éléments qui vont se substituer au Ni dans la matrice γ vont renforcer la matrice en augmentant la résistance au mouvement des dislocations par distorsion de la maille cubique de la phase γ. Les solutés qui ont une solubilité élevée dans la solution solide de Ni et un haut coefficient de durcissement sont préférables (le coefficient de durcissement est élevé quand l’élément permet d’augmenter significativement le paramètre de maille de la matrice). La matrice, renforcée par ces éléments, voit sa limite d’élasticité augmenter [3] et ses propriétés en fluage s’améliorer [4].

Plus la température de fusion du soluté pur est haute, plus sa diffusivité dans le nickel est faible (Figure 1-22). Donc les éléments à haute température de fusion sont préférables. Le Tableau 1-4 regroupe à la fois les températures de fusion des éléments d’alliage, mais également l’influence de leur substitution au Ni dans la maille cubique de Ni pur sur le paramètre de cette maille. Plus cette valeur est élevée, plus le pouvoir durcissant de cet élément en solution dans la matrice est élevé. Le W, le Mo et le Ti ont de hauts points de fusion et de hauts coefficients de durcissement (Tableau 1-4) mais leur solubilité dans le Ni reste modeste (Figure 1-21). À l’inverse, le Cr a un faible coefficient de durcissement, mais une haute solubilité dans le Ni, impliquant que le durcissement par cet élément a son intérêt seulement si il est ajouté en grande quantité [4].

29 Figure 1-22 : Coefficient de diffusion des solutés dans le Ni à 1000 °C en fonction de leur température

de fusion [4]

Tableau 1-4 : Température de fusion et paramètres de durcissement par effet de solution solide (influence sur le paramètre de maille du Ni pur et différence de diamètres atomiques avec le Ni) des

éléments ayant une solubilité significative dans le Ni [4] Element Melting temperature (K)

% Change in the lattice parameter of nickel per atom %

solute W 3650 0,135 Ta 3269 - Mo 2890 0,116 Nb 2740 0,169 Cr 2176 0,032 Ti 1940 0,095 Fe 1809 0,031 Co 1768 0,005 Ni 1725 - Al 932 0,048

Le cobalt

Le Co est connu pour diminuer l’énergie de faute d’empilement dans la phase γ et, en conséquence, augmenter la résistance en fluage (Figure 1-23(a)) des superalliages polycristallins. Il est en général ajouté également pour diminuer la température de solvus de la phase γ’ et ainsi augmenter la largeur de la fenêtre de remise en solution (Figure 1-23(b)). L’augmentation de la teneur en Co, élément γ-gène, engendre une diminution de la teneur en Al et en Ti dans la matrice, ce qui résulte en une augmentation de la fraction volumique de la phase γ’ [1].

Le désavantage du Co est son prix élevé. C’est la raison principale qui avait mené à le remplacer par du Fe au cours de l’étude qui a mené à la définition de l’alliage Inconel 718.

Le Co est également connu comme stabilisateur des phases η et δ et a tendance à augmenter la température de solvus de la phase δ [35].

(a) (b)

Figure 1-23 : Influence de la teneur en Co sur (a) la tenue en fluage à 732 °C / 552 MPa du Waspaloy et (b) la température de solidus et la température de solvus de la phase γ’ de l’alliage

Udimet 700 [1]

Le chrome

Le rôle principal du chrome est de former une couche passivante de Cr2O3 afin de créer une barrière protectrice contre l’oxydation et la corrosion à chaud jusqu’à 900 °C. Les superalliages base nickel classiques contiennent au minimum 10 % at. de Cr. Une augmentation de la teneur en Cr mène à une légère diminution de la densité de l’alliage et de la température de solvus de la phase γ’ [1]. Comme mentionné précédemment, le Cr a une solubilité élevée dans le Ni et un diamètre atomique quasiment identique à celui du Ni, ce qui se traduit par une faible distorsion de la maille de la matrice γ. Mais ajouté en forte concentration il participe au durcissement de la matrice par effet de solution solide [1]. Le Cr forme également des carbures aux joints de grains, ce qui permet d’éviter le glissement des joints de grains en fluage [36].

Néanmoins, une teneur trop élevée en Cr engendre la formation d’un trop grand nombre de carbures aux joints de grains et favorise la formation de phases TCP lors d’exposition de longue durée à haute température [4],[6].

Le molybdène et le tungstène

Le Mo et le W sont ajoutés principalement pour durcir la matrice γ. Leurs diamètres atomiques respectifs étant bien supérieurs à celui du Cr, leur effet durcissant est plus efficace pour une teneur identique. De plus, leurs coefficients de diffusion dans le Ni sont inférieurs à celui du Cr, ce qui fait que leur effet durcissant se maintient à plus haute température que celui du Cr [4]. Ils améliorent également le temps à rupture en fluage de l’alliage et la limite d’élasticité en traction [37] (Tableau 1-5) ainsi que la résistance à l’oxydation dans certains alliages [4].

Le Mo et le W ont tendance à augmenter la température de solvus de la phase γ’ (Figure 1-24 avec le Mo comme exemple). Le Mo augmenterait également le paramètre de maille de la phase γ et, dans une moindre mesure, de la phase γ’, entraînant une augmentation de la valeur absolue du désaccord paramétrique, ce qui se traduit par un durcissement plus prononcé de l’alliage [38].

Le Mo est en général ajouté en concentration supérieure à celle du W car ce dernier est plus lourd que le Mo. En revanche, une légère substitution du Mo par le W améliore la stabilité de l’alliage car le W empêche la formation de carbures et de phases TCP riches en Mo [1].

31 Tableau 1-5 : Effet de la teneur en Mo et en W sur la durée de vie à rupture en traction

(704 °C / 552MPa) d’un alliage basé sur la composition du 718Plus [37]

Mo (% at.) W (% at.) Durée de vie à

rupture (heures) 0 0 29,3 0 4 0,4 0 6 141,2 2,9 0 113,1 2,9 1 154,7 2,9 2,3 138,3

Figure 1-24 : Influence de la teneur en Mo sur la température de solvus de la phase γ’ [39]

Le fer

Le Fe a pour rôle principal de renforcer la matrice γ par effet de solution solide, en remplacement du Co pour diminuer les coûts. Des calculs thermodynamiques prédisent que le Co et le Fe ont le même effet sur un superalliage base nickel : ils augmentent légèrement la fraction volumique de précipités de phase γ’, entrainent la précipitation de phases TCP (phase σ pour le Co et phases de Laves pour le Fe). Les estimations des paramètres de maille indiquent que le Co, contrairement au Fe, augmente la valeur absolue du désaccord paramétrique γ/γ’ [37].

Expérimentalement, il a été prouvé que le Fe peut avoir un effet néfaste sur les propriétés mécaniques car il est responsable de la formation des phases de Laves et autres phases TCP, mais il semble également favoriser la formation des phases η et δ [1,30].