• Aucun résultat trouvé

En outre, deux éléments donnent la légitimité à la coutume, l’élément matériel et l’élément

B. La législation du crime d’honneur : les articles 98 et 340

IV. Les intérêts et les enjeux du sujet

99. En outre, deux éléments donnent la légitimité à la coutume, l’élément matériel et l’élément

psychologique ou moral. L’élément matériel se concrétise par l’existence d’un usage général, cet usage doit être constant et uniformément répété, spontanément exécuté et doit entraîner des effets juridiques. Ce sont les mœurs qui créent la coutume, mais dans certains cas, il n’est pas aisé de déterminer la limite entre l’usage et la coutume. Alors que l’usage est une pratique dont la violation n’entraîne aucune sanction, la coutume, comme c’est le cas pour le crime d’honneur, est également une pratique généralisée et suivie, mais dont la

123. A. AL SAHARIF AL-JURJANI, Kitab Al t’arifat, le livre des définitions, éd de la librairie du Liban- Beyrouth, 1990, p.154.

124. P-C. TIMBAL, A. CASTALDO et Y. MAUSEN, Histoire des institutions publiques et des faits sociaux, 11ème ed, Précis Dalloz, 2004, p. 272.

125. Cf. Infra §2.

126. C’est d’ailleurs à cette continuité que la coutume doit sa dénomination par orf, qui désigne en langue arabe la crête du coq et la crinière du cheval.

violation est sanctionnée128. La sanction peut provenir de la collectivité elle-même, notamment par sa désapprobation publique de la conduite d’une personne plaçant cette personne en marge du groupe, ou par l’élimination de celle-ci, comme dans le cas du crime d’honneur. C’est la nécessité d’appliquer la règle coutumière de conduite qui détermine le passage d’une simple pratique à une règle de droit.

L’élément moral est un élément psychologique, son application doit être dictée par le sentiment d’une obligation juridique et non par la courtoisie ou par des raisons d’opportunité politique.129

B. L

E FONDEMENT DU CRIME D

HONNEUR PAR LE DROIT COUTUMIER

100. La Jordanie est une société clanique, les différents clans n’étant pas soumis aux lois

étatiques jordaniennes dans nombre de cas ; même les bédouins devenus sédentaires font davantage appel à la loi du clan qu’à celle de l’Etat.130

101. La tribu s’en remet toujours à l’autorité de son chef cheikh, qui se réfère souvent aux

règles coutumières : tous les membres de la tribu sont solidaires devant toutes les difficultés et ils sont tenus d’obéir aux ordres et cela pour l’intérêt général de la tribu.131 Cette abdication de tous les pouvoirs en faveur du chef de la tribu et ensuite du chef de famille, s’explique par le respect dû aux plus âgés. Le cheikh de la tribu est à la fois le gardien des traditions et des coutumes, le juge, le porte-parole et le protecteur (physique et moral). L’atteinte à la protection implique l’atteinte à la tradition morale de la collectivité. Cette tradition morale ancienne est sauvegardée grâce à un système hiérarchique qui s’établit et dont dépend aussi l’équilibre tribal : le cheikh, ses adjoints, les membres influents, les protégés : enfants, femmes et hommes.132

128. La sanction est souvent morale, mais peut prendre une autre dimension, comme l’exclusion sociale par exemple.

129. Ch. NTAMPAKA, Introduction aux systèmes juridiques africains, ed Presse Universitaire de Namur, n°26, 2004. pp. 11-13.

130. Cf. sur ce point J. CHELHOUD, op.cit.

131. B. BOULOC, Droit pénal général, op.cit., p. 47.

102. Dans ce système, toute atteinte à l’honneur est une atteinte à la collectivité, elle détruit

donc l’équilibre tribal. La vengeance de celui qui a été lésé dans son honneur rétablit l’équilibre et restitue à la protection son pouvoir et sa valeur morale.133 S’il ne lave pas « la honte », le lésé est un élément à éliminer, il est mis au ban de la tribu : sa fréquentation devient « mauvaise » ; sa réputation s'est largement dégradée. En conséquence, les membres de la famille atteinte ne peuvent plus avoir de relation avec les autres familles de la tribu, ce qui exclut les mariages avec des membres d’une autre famille. Mais une question se pose : comment le crime d'honneur acquiert-t-il sa force ?

En effet, le droit coutumier, contrairement à la règle de droit votée et promulguée, procède d’une suite de pratiques qui acquièrent valeur de règle de droit. La force de ces règles dérive de trois sources : l’ancienneté, le consentement et la rationalité.134

103. La société jordanienne est en général de tradition orale. Rares sont les coutumes dont on

connaît l’origine. Certaines règles s’imposent sans explication objective, les anciens se contentant de dire « on a toujours fait comme ça » et toute pratique contraire est désapprouvée socialement.

L’ancienneté de la loi clanique ajoutée à son caractère sacré, parce qu’elle émane des ancêtres vénérés, constitue une sorte d’héritage culturel et fonde la force obligatoire du crime d’honneur. Le fait que personne ne peut établir l’origine de cette coutume, que tous croient qu’elle a été instituée pour une meilleure organisation de la société, permet à toute pratique obligatoire de s’imposer sans nécessité de recours à des sanctions.

104. L’ancienneté du crime d’honneur peut être prouvée par un poème inscrit et répété jusqu'à

nos jours « l’honneur souillé ne peut être lavé que par le sang », issu du fameux vers d’Al Mutanabbi « L’honneur suprême ne peut être à l’abri d’attaques que si le sang, à ses alentours, est versé»135.

Ensuite, le crime d’honneur n’est admis comme règle coutumière que s’il est admis par la collectivité (l’ensemble des tribus) ; en effet le consentement général, motivé par la nécessité d’une règle qui convienne à tous, fonde la force de cette coutume, car la coutume

133. J. CHELHOD, « Le prix du sang dans le droit coutumier jordanien », rev de l’occident musulman et de la Méditerranée, n°5, 1968, pp. 42 et 43.

134. Ch. NTAMPAKA, Introduction aux systèmes juridiques africains, Op.cit. pp.11-13.

135. A. AL-MUTANABBI, né en 915 et mort en 965 en Irak, l'un des plus grands poètes de langue arabe (Eddine Bencheikh, 2000).

ne peut devenir et ne devient obligatoire qu’avec le consentement de la collectivité. Ainsi, la société étant fortement hiérarchisée, le consentement peut être réalisé par les chefs des tribus sans hésitation, puisque la coutume est l’héritage des ancêtres et que tout ce qui vient d’eux est considéré comme bon, utile et licite.

Enfin, le meurtre pour l’honneur ne devient coutume que dans le cas où il est jugé rationnel par la collectivité. Celle-ci le considère comme rationnel car il permet d’absorber les désordres momentanés, de corriger les écarts et de rétablir l’équilibre social. C’est en ce sens qu’il est rationnel, parce qu’il impose des comportements ou parce qu’il en interdit d’autres avec l’assentiment de la collectivité entière, qu’un tel meurtre répond à ses besoins.136

105. En d'autre termes, l’honneur sharaf taché par la personne adultère crée le déshonneur de sa

famille. C’est la raison pour laquelle on considère le crime d’honneur comme collectif, car la famille poussera un de ses membres à commettre le crime, ceci étant la seule réponse du groupe face au déshonneur provoqué par l’adultère. Plus clairement, c’est le seul moyen capable de rétablir les dégâts causés par l'adultère : la mauvaise réputation, le manque de respect et l’exclusion sociale.

§ 2. L’INFLUENCE DU DROIT COUTUMIER

106. De nombreux criminels justifient leurs actes par la tradition et par la coutume ada ou orf ;

ils citent à l’appui ce proverbe tribal arabe : « prendre vengeance et éliminer la honte », se référant ainsi à leur mentalité tribale.137 Cette déclaration conduit à admettre qu'une grande partie des crimes d'honneur est commise au nom d’adah ou d’orf, mais peut-on considérer ce crime comme légitime et le crime d’honneur est-il admis par le droit musulman et par le droit jordanien ?

107. Pour répondre à cette question, il faut avoir une idée suffisante de la place accordée aux

règles coutumières dans le droit musulman (A), puis de la place accordée aux règles coutumières dans le droit jordanien (B).

136. Ch. NTAMPAKA, op.cit. p.15.

137. Dans l’affaire n°474/99 de la Cour criminelle jordanienne, les meurtriers et les complices ont estimés la nécessité d’éliminer la victime pour reconstituer l’honneur bafoué de la famille.

A. L’

INFLUENCE DU DROIT COUTUMIER DANS LE DROIT MUSULMAN

108. Avant l’Islam138, il n’existait même pas un embryon de droit musulman. Il semble bien que la communauté arabe ait vécu sous l’empire du droit coutumier qui était alors en vigueur dans les diverses régions où elle se trouvait, notamment au Hedjaz et en Irak.139 Le crime d’honneur tire probablement son origine d'une culture arabe ancestrale qui a pris naissance dans le désert bien avant l’islam.

109. Au Vème siècle, bien avant la naissance du prophète Mohammad, les familles arabes

étaient organisées selon le mode tribal, réunissant les descendants mâles et leurs familles. Ce système impliquait d’une part l’absence de toute protection de l’individu en dehors de sa tribu et, d’autre part, l’absence d’une conception évoluée de la justice criminelle140.

110. Le Coran éclaire le problème posé par le terme orf , bien plus complexe. Ce vocable est

entré dans la langue de la doctrine musulmane faqîh à travers quelques versets coraniques, où il est employé dans un contexte qui ne permet aucun doute sur son acception. Dieu dit : « Pardonne, ordonne ce qui est bon, ‘mr bi-l-ma’rourf ; détourne-toi des ignorants »141. AL JURJANI142 en donne une définition explicite : « l’action ou la croyance dans laquelle des personnes persistent avec le concours des puissances de raisonnement et que leurs disposition naturelles consentent à accepter comme juste ». 143

111. Les juristes musulmans classiques considèrent la coutume orf comme valide en tant que

source opposable en cas d’absence de référence dans le Coran ou dans la Sunnah. Ils légitiment le recours à la coutume par le Coran, la Sunnah et le raisonnement. La coutume

138. L'Islam est la religion principale de tous les pays arabes sans exception ; l’art II du Chapitre I de la constitution jordanienne du 1er janvier 1952 prévoit que : « l’Islam est la religion de l’Etat et l’arabe est sa langue officielle ».

139. Ch. CHEHATA, Études de droit musulman, PUF 1971, p, 16.

140. J. SCHACHT, Islam d’hier et d’aujourd’hui, introduction au droit musulman, op, cit., p. 17. 141. La sourate (7) Les Murailles Al Ar’af, verset 199.

142. AL-JURJANI, op.cit.

143. M. GRIGNASCHI, « Le problème du droit coutumier dans l’empire Ottoman, la coutume », Recueils de la société Jean Bodin pour l’histoire comparative des institutions, Bruxelles, 3ème partie, De Boeck-Wesmael 1992, p. 288.

est justifiée par le Hadith du prophète Mohammed : « Ce que les croyants ont considéré comme beau est beau devant Allah ». On estime que ces termes désignent la coutume.144

112. Il existe un argument rationnel supplémentaire, qui est que la coutume assure le bien de la

communauté et met fin à son trouble ; ceci est un principe enseigné par le Coran : « […]

Dieu n’entend vous imposer aucune gêne […] »145. Par conséquent le droit musulman intègre la coutume orf comme source du droit, ce qui expliquerait la permanence du respect des coutumes originelles dans les communautés musulmanes disséminées de par le monde. La question se pose toutefois de savoir si le droit musulman autorise le crime d’honneur en tant que coutume.

113. Revenons d’abord à une époque antérieure. Le monde arabe et le nomadisme ont toujours

eu des rapports étroits à travers l’histoire, tant au Moyen-Orient qu'au Maghreb. Pour tous, toute la vie s'organise autour du dromadaire, animal reconnu pour son caractère vengeur. Sachant l'individu essentiellement intégré à son groupe, conservateur des vertus morales, où l'honneur a la première place, la vie sociale se déroule selon une logique implacable. Chez les Bédouins l'individu n'est rien, la société est tout ; le clan défend ses membres et répond de leurs actes146. Ainsi l’honneur est-t-il toujours chèrement défendu et pratiquement toujours assimilé au meurtre : dès que l’honneur est atteint, il doit y avoir immédiatement réparation selon les coutumes traditionnelles : si le sang a coulé ou si l’adultère est consommé, l'honneur doit être lavé dans le sang du clan coupable. Le vengeur frappe exclusivement les mâles de la parenté agnatique du meurtrier, jusqu'au cinquième degré ; c'est le groupe des cinq khamsà : le grand-père du meurtrier, son père et ses oncles paternels, le meurtrier lui-même, ses frères et ses cousins germains, ses enfants mâles et ceux de ses frères, ses petits-fils. 147

114. Le droit musulman a d’une part défendu cette logique de la défense tribale en admettant la

vengeance comme un principe, mais il a d’autre part fait un premier pas vers l’amélioration du droit pénal, en substituant la peine de mort à la vengeance privée. En outre, l’homicide

144. S.-A. ABU-SALIEH, Introduction à La Société Musulmane, op.cit., p. 138. 145. La Sourate (5), La Table Al-Mâ’ida, verset (6).

146. J. CHELHOD, Le droit dans la société bédouine, recherches ethnologiques, op.cit., p. 88.

147. J. CHELHOD, « Le prix du sang dans le droit coutumier jordanien », Rev De l’Orient musulman et de la Méditerranée, n°5, 1968, pp.41-67.

volontaire est puni de la peine de mort par le droit musulman, à moins que l’héritier du défunt n’accepte le prix du sang.

115. À travers une étude approfondie du système juridique coutumier jordanien et de celui de

quelques pays arabes (l’Arabie Saoudite, la Syrie, l’Egypte..) il est apparu que le prix du sang figure parmi les institutions empruntées à l’Arabie préislamique acceptées par le droit musulman et encore couramment pratiquées par les Bédouins, peuple nomade en voie de sédentarisation et par les citadins en Jordanie.148 Pourtant certaines de ces coutumes sont entièrement opposées à l’esprit, ou à la lettre du droit musulman, car elles permettaient des choses interdites, ou interdisaient des choses permises par le droit musulman, telles la vengeance tha’r en général et le crime d’honneur en particulier, plus communément nommé « lavage de la honte », Gasl Al A’ar149. On peut remarquer la similitude de pensée

entre la honte et l’honneur, plus précisément la honte provoquant le déshonneur, le concept d’honneur tel qu’on l’entend aujourd’hui n’apparaîtra cependant que plus tard. Toutefois une norme coutumière contraire à un principe de droit musulman peut se trouver imposée par la nécessité, comme la vengeance de l’ennemi pendant la guerre par exemple. Elle peut alors être admise en tant qu’exception. Par contre, si cette coutume n’est pas pratiquée par nécessité, mais simplement à cause de mauvais penchants, elle doit être rejetée150.

116. Récemment, avec la disparition de l’ijtehad151, les gens reviennent peu à peu à des pratiques coutumières et ceci pour deux raisons. D’une part le nombre d’oulémas (docteurs de la loi musulmane juristes et théologiens)152, capables d’interpréter le droit musulman est en nette diminution, d’autre part les pays arabes ont créé de nouvelles normes juridiques, à l’instar de l’occident. Le musulman s’est ainsi éloigné de la vraie religion, ce qui survient fatalement quand les divers porteurs de message viennent à manquer et sous l’influence d’une société ayant une culture, des coutumes et des lois étrangères. L’introduction de la codification ottomane n’a fait qu’amplifier le phénomène de déstabilisation du monde

148. Ibid.

149. Cf. Supra les sources principales de droit musulman. Le droit de la vie est un principe général de droit musulman.

150. Pour plus de détails sur ce point, voir S.-A. ABU-SALIEH., op. cit. p. 137-141.

151. L’ijtehad signifie la liberté de pensée et de réflexion ; cette pratique appelait constamment à adapter le Droit musulman aux impératifs du temps historique ; I. TOUALBI, « Le droit islamique face aux enjeux du temps historique », rev de Jurisdoctoria, n°3, 2009, p. 114. Art consultable sur le site http://www.jurisdoctoria.net/pdf/numero3/aut3_TOUALBI.pdf

arabo-musulman. Alors des phénomènes tels que le crime d’honneur, la violence intrafamiliale, en particulier la violence contre les femmes, ou le mariage forcé, sont apparus dans les sociétés arabo-musulmanes. Il apparaît donc que le crime d’honneur a été perpétré dans plusieurs pays arabes bien avant l’islam et qu’il ne trouve pas sa justification dans le droit musulman153.

117. Cependant, un nombre impressionnant de rites, de mythes, de techniques, d'institutions,

sont la résultante non pas des croyances religieuses telles qu'elles ont été révélées ou telles qu'elles ont existé dans leur état brut et originel, mais telles qu’elles ont été façonnées par l'action humaine, c'est à dire par la tradition, la coutume et la culture154.

B. L’

INFLUENCE DU DROIT COUTUMIER DANS LE DROIT JORDANIEN

118. Le droit consiste en l'ensemble des règles juridiques socialement sanctionnées qui

s'appliquent au fonctionnement des institutions d'un État et fixent les rapports entre les citoyens qui le composent.155

119. Le droit en Jordanie est essentiellement composé de règles orales et écrites, que l'on

appelle les sources du droit. Il peut s'agir, bien sûr, des règles adoptées par les États ou entre États, au plan national, mais aussi de la jurisprudence des juridictions nationales et internationales, ou bien des règles fixées au plan local, tels les arrêtés municipaux, ou bien encore par des organismes professionnels, tel l'ordre des avocats ou des médecins, ou bien des règles conclues par les citoyens entre eux, tels les conventions collectives ou les contrats, ou bien enfin de la simple coutume.

120. Le code civil jordanien précise que la coutume doit être générale, ancienne, constante et

ininterrompue ; elle ne doit pas être contraire aux normes de la loi, à l'ordre public ou aux bonnes mœurs. Lorsque la coutume est propre à un pays particulier, son application se

153. Cf. Supra, l’avis de l’imam AL-QARADAOUI, section I, §2, A.

154. A. AMOR, Droits civils et politiques, et notamment : intolérance religieuse, rapport de la commission des droit de l’homme, 58è session, E/CN.4/2002/73/Add.2, 5avril 2002, p.6 : Selon AMOR : « il n'y a pas de religion à l'état pur. Toutes les religions influencent et sont influencées par l'action humaine, et les expériences historiques, culturelles, traditionnelles et coutumières. Font partie intégrante de la définition des religions ou du moins des pratiques religieuses ».

limitera à ce dernier.156 L’article II, alinéas II et III, du Code civil jordanien de 1978 (qui a remplacé la madjella157) énonce qu’à défaut de texte, le juge applique le fiqh158 le plus approprié ; à défaut, les principes de la loi musulmane chari’a et à défaut : la coutume. Pour comparaison, l’article I du code égyptien prévoit que la coutume est la première source de droit à défaut de texte. Concernant le code pénal jordanien, il contient des dispositions relatives à la coutume et aux traditions, c'est par exemple le cas des articles concernant le blasphème ou la profanation.159

121. Par conséquent, la coutume en Jordanie est une source autonome par délégation générale

de la loi, à laquelle on fait appel en dernier recours. Elle est, selon la majorité des auteurs, une source supplétive160, ayant pour rôle de compléter la loi et si besoin de combler les lacunes. Pratiquement, quand ni l’État, ni les juridictions nationales, ni les juridictions municipales ne sont en mesure de permettre de résoudre le problème de façon adéquate, pas plus que l’ordre des avocats ou des médecins, on a recours à la coutume.

122. En outre, la coutume, en ce qu’elle résume l’ensemble des mœurs d’un peuple ou d’une

société donnée, générale, ancienne, constante et ininterrompue comme définie ci-devant, intègre et protège les valeurs primordiales de cette société. L’honneur est sacré pour le Jordanien et totalement intouchable, tout assaut contre l'honneur étant considéré comme une agression, une guerre contre l'intégralité du groupe tribal, il est donc naturel que la coutume ait conduit à la naissance de trois règles fondamentales/importantes : maintenir et protéger l'honneur, défendre son propre honneur avec tous les moyens possibles et appliquer des sanctions à ceux qui le violent.

Documents relatifs