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Chapitre II : Les facteurs déterminants la nutrition de la personne âgée

A. Les trajectoires socioculturelles :

3. La personne âgée seule à domicile

intestinaux et aux craintes qu’ils suscitent. Ces thèmes sont l’unique source des rares propos qu’ils échangent avec leur entourage. Enfin en institution, des personnes dépendantes, voire grabataires, refusent l’aliment. Il convient d’interpréter cette attitude comme la condamnation de l’institution elle-même ou de l’équipe soignante, revendication d’une certaine autonomie suicidaire, abandon du dernier lien social.

3. La personne âgée seule à domicile

Si la personne âgée vit seule à son domicile, hormis le cas assez rare de celle qui se mijote des plats pour maintenir une filiation culturelle, la logique d’une alimentation égotique se met en place. Cela peut prendre la forme de grignotages permanents ou celle d’empiffrements ponctuels suivis de phases de culpabilité…

Avec la solitude, le modèle du refus progressif de l’aliment se développe. Après la disparition de l’autre, on simplifie de plus en plus l’acte culinaire. A part les pâtisseries (pour elles), les charcuteries (pour eux) et les légumes frais venant « de son jardin » ou « de chez son marchand », l’aliment fait moins plaisir. Il renvoie à la monotonie de la solitude, à un repli sur soi annonciateur de dilution du lien social. On ressent de moins en moins d’intérêt pour le repas dont le cérémonial ne subsiste qu’en s’imbriquant dans une autre activité, écoute d’une émission, prises de médicaments signifiant et prolongeant l’importance de la relation au médecin. Au fil du temps, l’observation de la qualité et de l’importance des selles balise la quotidienneté au point qu’elle paraît parfois structurer toutes les formes d’incorporations alimentaires ou médicamenteuses la précédant.

L’étude SOLINUT[16] a analyse les relations entre lefait de vivre seul et le statut nutritionnel des personnesâgées. Les personnes qui vivent seules sont plus dénutries(21,3 %) que celles qui ne vivent pas seules (4-7,5 %) et cela s’aggrave avec l’âge [9]. Les causes en sontnombreuses, difficultés à faire les courses, dépression,moindre envie de manger quand on est seul…

Il existe d’autres causes des insuffisances d’apports alimentaires chez une personne âgée isolée à domicile qu’on peut les rassembler en grands chapitres.

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Difficultés d’approvisionnement ou de préparation des aliments.

 Les troubles de la marche qui empêchent d’aller loin en sont la première cause, surtout lorsque les magasins de proximité ont disparu.

 L’absence de véhicule personnel ou de transport en commun n’arrange pas la situation.

 Les difficultés de l’épaule, qui gênent pour porter les paquets.  Les troubles de la vision qui rendent les parcours périlleux.

 Faire les courses dans les grandes surfaces est parfois difficile, surtout quand on craint ou qu’on n’a plus envie de se mêler à la foule.

 Devant ces difficultés, certaines personnes âgées se contentent des produits de leur jardin, ou de ce que leur donnent leurs voisins.

 Souvent le mode de stockage des denrées périssables est assez aléatoire[9].  Difficultés pour préparer sa nourriture.

 Difficultés du bras qui gênent pour porter les ustensiles ou préparer les légumes.  Table de travail qui n’est plus a la bonne hauteur car on s’est voute.

 Emballage difficile à ouvrir.

 Difficulté à rester debout pendant le temps de préparation.  Oubli du lieu où l’on a range le matériel ou les denrées.

 Difficultés à régler les outils, comme le micro-onde ou utilisation de matériel vétuste, quand il existe. Souvent les réfrigérateurs sont très anciens et leur température est loin d’être optimale quand elle n’est pas dangereuse.

 Équipement de la cuisine inadéquat ou vétuste[9].  Difficultés à manger [9].

 Non-envie de manger, parce qu’on est déprime, qu’on supporte mal sa solitude, ou simplement parce qu’on est fatigue.

 Mauvaise connaissance de ses besoins. De nombreuses personnes âgées sont persuadées qu’elles ont besoin de très peu parce qu’elles sont vieilles, qu’elles font peu de choses et que le soir un potage-dessert est suffisant.

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 Difficultés à couper les aliments, à les porter à la bouche, à les mastiquer (surtout si on a mal aux dents ou si le dentier « branle »), voir à les déglutir si on a des troubles de la déglutition ou de simples difficultés à avaler.

 Idées reçues « pas besoin de manger de la viande quand on fait peu », souvent les hommes n’ont pas l’habitude de se faire à manger ce qui conduit à des repas déséquilibres, auto-prescription de régime, éviction de ce qui est « dur » en cas de problèmes de mastication, conduisant à l’éviction de certains aliments , viandes, fruits et légumes…

 Redondance régulière des plats voire des repas qui peuvent être les mêmes plusieurs jours de suite, parfois pour ne pas jeter. On peut alors donner au chat…  Difficultés liées à l’habitat [9].

 Vivre au 3ième ou au 4ième étage sans ascenseur implique que l’on hésite parfois à sortir et qu’on se contente de ce qui reste.

 Si la chambre est à l’étage et qu’on est remonte s’allonger parce qu’on était fatigue, il n’est pas évident qu’on va redescendre le soir pour pendre son repas.  Difficultés financières [9].

 De nombreuses personnes âgées ont de très petites retraites (agriculteurs, artisans, transplantes…) qui ne permettent pas d’acheter à manger assez. Les fruits et les légumes, si l’on n’a pas de jardin, sont souvent omis quand ce n’est pas la viande ou le fromage. L’alimentation devient alors très monotone et souvent carencée.  L’augmentation du prix du gaz fait que certaines personnes âgées n’en achètent

plus et mangent donc toujours froid.

Au final, les difficultés financières, la solitude et l’isolement, les dépendances physiques et psychiques conduisent toutes à une insuffisance de prise alimentaire et c’est donc l’ensemble de ces données qu’il faut évaluer pour qu’une prise en charge correcte puisse être mise an place, encore faut-il qu’elle soit acceptée. Les circonstances qui augmentent encore le risque de dénutrition sont la pathologie aigue voire une exacerbation d’une pathologie chronique et le retour à domicile après une hospitalisation. Il faut aussi savoir y penser devant un état de fatigue, une simple réduction des activités quotidiennes, notamment une diminution

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des sorties hors du domicile. Un coup d’œil à la personne (flotte-t-elle dans ses vêtements ?), voire dans le réfrigérateur (est-il plein ou au contraire vide ? aliments avaries ?), permet souvent d’évoquer le diagnostic. Quelques questions simples (quand avez-vous mange hier ? qu’avez-vous mange hier soir ?) permettent souvent de poser la réalité d’une alimentation insuffisante. En effet, le fait d’avoir saute un repas (ou que le repas du soir se compose uniquement d’un fromage-dessert) suffit à évoquer une insuffisance de prise alimentaire.

Chez les personnes âgées isolées à mobilité réduite, les visites à domicile permettront d’évaluer les capacités d’approvisionnement, de préparation des repas et d’alimentation et le statut nutritionnel avec des outils simples. La mesure du poids est possible s’il existe un pèse-personne à la maison et que la station debout est possible.

Les aides à domicile peuvent être informées de l’importance de surveiller l’alimentation de la personne âgée, la surveillance alimentaire peut être précisée dans le plan de soin. L’infirmière qui passe le matin pour donner les médicaments ou l’aide soignante qui vient faire la toilette devrait demander tous les jours comment était le repas du soir de la veille. Cela permettrait un signalement rapide.

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Partie II :