INFLUENCE DE L’INTRODUCTION DE GRAISSE (SAINDOUX)
DANS LA RATION SUR LA PRODUCTION
ET LA COMPOSITION DU LAIT DE TRUIE
E. SALMON-LEGAGNEUR
J. RETTAGLIATI, A. GRUDE, Hélène MOUTEL, Colette BAUDRILLART la participation de C. ZANNETOS
Station de Recheyches sur
l’Élevage
des Poycs,Centre national de Recherches
zootechniques,
Jouy-en-Josas(Seine-et-Oise)
SOMMAIRE
Une
expérience
portant sur 4o truiesLarge
White,réparties
en 4lots, a étéentreprise
pour étu- dier l’effet sur laproduction
laitière del’incorporation
de i 7 p. 100de saindoux aurégime
de lactation.On observe une
augmentation
d’environ z5 p. 100de laquantité
delipides
sécrétés dans le lait,qui apparaît
mêmelorsque
lerégime
estisoénergétique
avec celui d’animaux témoins. On note, en outre, une certaine modification de la répartition des acides gras du lait(augmentation
des acidesinsaturés)
et une diminution de la perte depoids corporel
au cours de la lactation.Le
poids
au sevrage desporcelets
estaugmenté
d’environ 10p. ioo.INTRODUCTION
Il est souvent difficile de faire
ingérer
à une truie en lactation laquantité
d’ali-ment
qui
conviendrait à ses besoins. En cequi
concernel’énergie
notamment, il n’estplus possible,
dès que laproduction
laitièrejournalière
excède 6kg
delait,
de couvrirles
dépenses
par la seuleingestion
d’un aliment concentré dutype classique (L ODGE , 10
6 1
).
Cecicomporte plusieurs conséquences :
tout d’abord la truie doitprélever
sur sespropres tissus les nutriments
qui
lui sont nécessaires pour couvrir ses besoins de lactation. Il s’ensuit uneperte
depoids
souventimportante
que l’animal doit combler par la suite et surtout unedélipidation qui peut
atteindre undegré
considé-rable
(SALMON-LEGAGNEUR, ig6i b).
Enfin il n’est pasimpossible
que la truie limite alors saproduction,
enqualité
et enquantité,
à un niveau inférieur à celuiqui pourrait
être réalisé si sa ration était suffisante(SAr,MON-I,!GAGN!ux,
1957 ; LOD GE,I959) !
’I,’une des solutions
auxquelles
onpeut
penser pour remédier à cet état de choses réside dansl’incorporation
dans laration,
de substancesplus
riches enénergie
que les alimentsusuels,
etprincipalement,
desgraisses.
Peu
d’expériences
ont étéentreprises jusqu’à présent
sur l’influence desgraisses
sur la
production
laitière des Truies.Mais, depuis que WU,ETT (i 9 q.6),
NORMAN(1955)
et nous-mêmes
( 19 6 0 )
ont montré quel’adjonction
des différentesgraisses
animalesau
régime pouvait
provoquer des modificationsimportantes
du taux delipides
dulait de
Truie,
on est venu à se demander si celle-ci nepourrait
constituer un facteur d’amélioration de laproduction
laitière et,au-delà,
de la croissance desporcelets.
Nous avons
entrepris
dans ce but uneexpérience portant
sur 40truies,
pour étudier l’influence d’unrégime
contenant 17 p. 100 de saindoux sur laquantité
delait
produite,
lacomposition
du lait etplus particulièrement
lacomposition
en acidesgras, la croissance des
porcelets
et les variations depoids
des mères.I,’influence
de cerégime
a été testée parrapport
à unrégime
sansgraisse
dans les trois cas suivants :1
0 avec un niveau
isoazoté,
2
° avec un
rapport énergie/protéine égal,
3° avec un niveau
isoénergétique
et isoazoté.MATÉRIEL
ETTECHNIQUES
a) Animaux. Mesures
effectuées
4lots de 10truies de race Y orhshire
Large
lihiie ont été constitués avec des animaux provenant de notre troupeauexpérimental.
Les truies avaient toutesdéjà accompli
au moins une lactation etreçu au cours de leur
gestation
une alimentationéquilibrée
convenable. Lepoids
moyen, les antécé- dents et les résultats de parturition étaientidentiques
pour chacun de ces lots.La lactation durait 8 semaines. Pendant toute la durée de
l’expérience,
les animaux étaientlogés
en cases individuelles dans uneporcherie
conditionnée( 2 o°C,
1,’! 65 p. ioo) et recevaient uneration
journalière
constante, exactement mesurée, sous forme d’une pâtée humide(i/;
aliment, z/3 eau) répartie en deux repas égaux.A la naissance, les portées étaient égalisées à 9 porcelets. Pendant la lactation, ces derniers avaient libre accès à un aliment de type courant pour
porcelets.
Une fois par semaine, la
production
laitière dechaque
truie était déterminée et uu échantillon de laitprélevé
pourl’analyse (S ALMON -L EGAGNEUR ,
r959 a). Le poids des truies, la croissance desporcelets
etl’épaisseur
du tissuadipeux
sous-cutané dorsal(déterminée
auxultra-sons)
faisaient égalementl’objet
de mesures hebdomadaires à heures fixes.En outre, sur 5 truies de
chaque
lot, on a déterminé la digestibilité apparente des aliments(énergie, protéines)
par la méthode àl’oxyde
de chrome. Pour cela i p. 100 enpoids
secd’oxyde
dechrome était
mélangé soigneusement
à la ration et,après
unepériode
de mise enrégime
de 5jours,
on
prélevait
sur la totalité des fècesquotidiennes
un échantillon moyenjournalier pendant
une période de iojours.
La comparaison des teneurs moyennes, pour lapériode
considérée, euoxyde
dechrome dans l’aliment et les excreta permettait de connaître la
digestibilité
durégime.
b) Régimes
alimentairesQuatre régimes
ont étéutilisés, correspondant
chacun à un lotexpérimental :
I
: Régime
de base sansgraisse ;
II :
Régime
de base -f- saindoux(isoazoté
-!- 20p. ioo calories) ;III :
Régime
de base -!- saindoux !- farine de poisson(-f-
20p. 100azote + 20p. 100calories,même rapport
énergie/N
queI).
IV :
Régime
II réduit de 20p.ioo(isoazoté, isoénergétique,
mais 30 p. 100del’énergie
provientdes
lipides).
Pour
parvenir
à ce résultat, on aremplacé
unepartie
de l’amidon durégime
de base par lesaindoux,
ou la farine depoisson (tableau i).
Les aliments avaient les
caractéristiques
suivantes :Les rations
journalières
distribuées étaient les mêmes pour les 3premiers
lots : 4,2kg
d’alimentsec ; le ¢e lot recevait une ration
plus
faible de 20p. 100, soit 3,5kg.
c)
Méthodesd’analyse
L’azote des aliments était dosé selon la méthode
Kjeldhal
et les valeurscalorifiques
étaient déter- minées à la bombecalorimétrique
deFerry. L’oxyde
de chrome était doséaprès
fusion alcaline et pardosage
dupouvoir oxydant
enprésence
d’iodure depotassium (RAYMOND
et MINSON,1955 ).
Les
principaux
constituants du lait(matières
azotées,lipides,
lactose,cendres)
étaient dosés selon nostechniques
habituelles(S ALMON -L EG AGN EU R,
i959b).
Les acides gras
polyéniques
étaient dosésspectrophotométriquement après
isomérisation alca- line(PnQuo’r
et al.,19 6 2 ).
La teneur en acideoléique
était calculéeaprès
détermination de l’indice d’iode et celle en acides gras saturés par différence.RÉSULTATS
10
Digestibilité
Le tableau 2
indique
les coefficients moyens dedigestibilité apparente
que nousavons trouvés pour l’azote et
l’énergie
dechaque
aliment. Apartir
de cescoefficients,
nous avons
également
calculé lesquantités
de matière azotée etd’énergie digestibles
ingérées.
Comme on
peut
le constater, ladigestibilité apparente
a été assez peu affectée par laprésence
degraisse
dans certainsrégimes,
surtout en cequi
concerne ladigestibi-
lité de la matière azotée.
Toutefois,
il semble quel’énergie
totale ait été un geu moins biendigérée
dans lesrégimes
contenant du saindoux(différence
nonsignificative).
Il en a résulté que les consommations d’azote
digestible
ont été les mêmes dansles lots I, II et IV et
plus
élevées de 20 p. 100 dans le lot III.Comme,
parailleurs,
les
quantités
de caloriesdigestibles
consommées par les lots II et III ont étésupé-
rieures de z9,5 p: 100à celles du lot I, les lots I et III ont eu à leur
disposition,
commenous le
désirions,
des aliments de mêmerapport calories/M.
A. D. Par contre, le lot IVa
disposé
d’un peu moins de calories queprévu ( 3
p. ioo de moins que le lotI).
2
°
Quantités
de Laitproduites
Les
quantités
totales de laitproduites
en moyenne par les truies dechaque lot,
au cours des 8 semaines de
lactation,
ont été les suivantes :&dquo;T J ... <
Seules,
les truies du lot II,qui
recevaient unsupplément
de saindouxseul,
ontproduit
un peuplus
de lait que les autres(différence significative
à P =0 , 05 ).
Parcontre, celles du lot III,
qui reçevaient
autantd’énergie
etdavantage d’azote,
ontproduit
moins de lait que ces dernières.I,’évolution des
quantités produites
au cours de la lactation estindiquée
à lafigure
I et neprésente
pas de caractèrespécial.
3
0
Composition
du laitI,e tableau 3
rapporte,
pourchaque lot,
la teneur moyenne du lait en sesprinci-
paux constituants et les
figures
2 à 5 l’évolution de ces constituants au cours de la lactation.Les différences les
plus importantes
concernent les teneurs enlipides :
les truiesdes lots recevant du saindoux ont
produit
un lait contenant io à i5p. ioo degraisse
de
plus
que celles du lot I.La
figure
2 montre que ce résultat a été obtenu surtout en fin de lactation. Au début de lalactation,
les taux delipides
sont semblables dansles 4 lots,
mais alorsque, dès la 2e
semaine,
le taux de matière grasse du lot I baisse d’unefaçon
clas-sique,
celui des trois lots recevant de lagraisse
se maintient à une valeur anormale- ment élevée.Si les teneurs moyennes en matière azotée ne révèlent aucune différence notable entre les
lots,
onpeut
remarquer, par contre, que le taux de lactose estlégèrement plus
élevé(non significativement)
dans le lot témoin et diminue moins vite au coursde la lactation que dans les trois autres lots
(figure q.). Inversement,
la teneur en minéraux totaux estsignificativement plus
élevée dans le lait des truiessupplémen-
tées en
graisse (figure 5).
Compte
tenu desquantités
delait,
lesproductions
totales de chacun desprin- cipaux
constituants s’établissent ainsi(tableau 4 ) :
q.!
Composition
deslipides
du laitLe tableau 5
rapporte
les valeurs moyennes trouvées pour les indicesd’iode,
et larépartition
des acides gras du lait des 4 lots de truies.Ces résultats font
apparaître
dans tous les lotsayant
reçu dusaindoux,
uneaugmentation
notable des teneurs en acides gras insaturés. Cetteaugmentation porte
sur tous les acides gras
insaturés,
maisplus spécialement
sur l’acidelinoléique (lot III).
5° Variations
corporelles
Même dans les lots recevant de la
graisse,
les truies de notreexpérience
ontperdu
du
poids. Toutefois,
cespertes
depoids
et les variations del’adiposité qui
en ont résul-té ont affecté différemment les truies de
chaque lot,
comme le montrent le tableau 6 et lesfigures
6 et 7.Le lot témoin a
perdu significativement plus
depoids
que les lots au saindoux II et III. Il semblequ’il
en aitperdu plus également
que le lot IV(même
niveau azotéLa
perte
delipides (diminution
du tissuadipeux sous-cutané)
a été sensiblement la même dans les 3premiers
lots etsignificativement plus importante
dans le dernier lot. Lafigure 7 montre
que cephénomène
s’est manifesté dès lapremière
semainede lactation.
6 0
Cvoissance des
porcelets
Le
tableau 7 rapporte
lesprincipales caractéristiques
desportées
deporcelets
dechaque
lot à5 6 jours
et lafigure
8 l’évolution dupoids
moyen de cesporcelets
aucours de la lactation. Les différences de
poids
à5 6 jours
entre le lot I et les autres lots sontsignificatives
à P = 0,05.On remarque sur la
figure
8 que la différence de vitesse de croissance entre lesporcelets
du lot I et ceux des autres lotsapparaît
surtoutaprès
la 3esemaine de lactation.DISCUSSION
i°
Quantités de
taitproduites et composition
du lccitS’il était
logique
de s’attendre à une variation desquantités
de constituants sécrétés dans le lait sous l’effet d’uneaugmentation
del’apport
alimentaire(lots
II etIII),
lafaçon
dont ce résultat a été obtenu est un peu étonnante. Bienplus
quel’augmentation
de laquantité
de lait dans le lot II(saindoux seul),
le fait leplus important qui demeure,
estl’augmentation
du taux de sécrétion de la matière grasse dans le lait des trois lotsqui
recevaient des calorieslipidiques.
Cephénomène prend
d’ailleurs un relief
particulier
dans le lot IV pourlequel
la seule modification du ré-gime portait
sur la nature descalories, l’apport
total de nutriments étant le même que celui du lot témoin.On ne
peut
manquer de trouver ici unedifférence
avec cequi
se passe dans d’autresespèces,
chez les Ruminants parexemple,
où comme lerapportent JaRRrG!
et
J OURNET ( 1959 )
l’effet de l’introduction degraisse
dans laration, lorsqu’il existe, porte plus
sur laquantité
de laitproduite
que sur une modification du tauxbutyreux (LoosW
etal., rg 44 ).
Chez laTruie,
aucontraire,
àl’exception
de notre lot II, c’estle taux de matière grasse
qui
est modifié et non laquantité
delait,
cequi
confirmenos résultats antérieurs
(Snr,MON-I,!G!Grr!uR, 19 6 0 )
et a faitdire,
en d’autres cir- constances, à SHEFFY( 1952 )
que le mécanisme derégulation
de la sécrétion deslipides
dulait,
dans le cas d’uneaugmentation
del’apport alimentaire,
ne serait pas le même chez ces différentesespèces.
Bienqu’on
aitsignalé
aussi chez des vaches laitières des casanalogues
à ce que nous avons observé(Ar,!,!x, ig 4 z), l’explication
d’un tel
phénomène paraît possible,
si l’on admet que chez la Truie lagraisse
durégime peut participer plus
ou moins directement à l’élaboration deslipides
dulait,
alorsque chez les Ruminants la
graisse
ne serait utilisée engénéral qu’après
des remanie- mentsimportants
et n’aurait mêmeparfois qu’un
rôleénergétique
banal.Dans notre
expérience
eneffet,
comme le montre le tableau 4, seule laproduction
de
lipides
du lait a été notablement modifiée. Tout auplus peut-on
noter, àcôté,
unelégère augmentation,
difficilementexplicable d’ailleurs,
de la sécrétion des matières minérales(-!
io p.zoo),
maisqui
va depair
avec une très faible diminution de la teneur en lactose. Nous avonsdéjà
eu l’occasion desouligner
les relations étroites que l’onpouvait
trouver chez la Truie entre les teneurs de certainsconstituants,
comme le
lactose,
et lesquantités
de lait sécrété(SAI,MON-I!EGAGNEUR, 19 6 1 a).
Iln’est donc pas étonnant ici que les
quantités
de lait aient peuvarié, puisque
la sécré-tion du lactose n’a été elle-même que peu affectée.
I,’évolution
au cours de la lactation de la teneur du lait en matière grasse n’est pas sans intérêt. Onpeut
en effet trouver deuxinterprétations
au fait que l’effet de la matière grasse durégime
n’est visiblequ’après
la fin de lapremière
semaine(figure 2 ).
Onpeut
penser à uneorigine
nonalimentaire, importante,
deslipides
dulait au début de la
lactation)
parexemple
àpartir
deslipides corporels,
cequi
rédui-rait d’autant l’influence du
régime (S AEMON -L E & AGNEUR , z 9 6 3 ).
Oubien, jusqu’à
lafin de la
première semaine,
le niveau de laproduction
est tel que lesglucides
de la ra-tion suffisent à assurer la
lipogenèse
à son taux leplus
élevé sansqu’un supplément
degraisse
soitcapable
d’améliorer ce taux. Par lasuite,
leslipides corporels peuvent
fairedéfaut,
ou le niveau de laproduction
s’élever au-delà despossibilités
desglucides :
à ce moment, seuls les
régimes supplémentés
engraisse permettent
le maintien dela secrétion des
lipides
du lait à un haut niveau.La
comparaison
des différents lots recevant de la matière grasse fait aussi appa- raîtrequelques points
intéressants : parexemple,
lesupplément
deprotéines
alimen-taires donné au lot III n’a eu que peu
d’effet,
mis àpart
unelégère augmentation
dutaux de matière azotée du lait
(tableau 5 ) qui
ne s’est pasrépercutée
au niveau de laproduction, puisque
cette dernière a baissé. Tout sembleindiquer
que le niveauénergie/protéine
du lot II s’est montréplus
favorable que celui des lots I, III et IV, cequi signifierait
que dans ces derniers lesprotéines
sont en excès parrapport
àl’énergie
et
qu’une partie
de cesprotéines
est doncdégradée
et malutilisée,
cequi provoquerait
une baisse de la
production.
Sur unplan analogue,
les résultats du lot IVpeuvent surprendre :
ils montrent toutd’abord, qu’à
tauxd’énergie égal,
leslipides
semblentprésenter
une meilleure efficacité commeprécurseurs
et comme sourced’énergie
que lesglucides
pour lalipogenèse
dulait,
cequi
a étéparfois
contestéjusqu’à présent (F
p ENCH
, m!52),
Mais il est curieux de constater que l’améliorationqui
en a résultéest la même que celle des rations
plus
abondantes contenant elles-mêmes deslipides,
comme celles des lots II et III. Ceci semblerait
indiquer
que,quel
que soit le niveauénergétique
de laration,
lesgraisses
durégime
sont utilisées enpriorité
par la mamelle.Toutefois,
cephénomène reçoit plus
loin une autreexplication, compte
tenu des variationscorporelles
destruies,
car les truies du lot IV sedélipident plus
que les autres au cours de la lactation.2
°
Composition
en acides gvasL’examen du tableau 5 montre bien que la modification subie par les
lipides
dulait dans les lots
supplémentés
en saindoux n’a pas été seulementquantitative,
maisaussi
qualitative.
Ceci constitue une nouvelle peuve du passageplus
ou moins direct de certains acides gras durégime
dans le lait : l’enrichissement relatif deslipides
dulait en acide
linoléique
nepeut s’expliquer
que si celui-ci a étéprélevé
dans lerégime, puisque
l’animal n’ensynthétise
normalement pas. Il est vraisemblable quel’augmen-
tation de la teneur en acides
oléique
etarachidonique procède
du même mécanisme.Ce
phénomène n’est
pas nouveau, il adéjà
étésignalé
à desdegrés
divers dans d’autresespèces,
notamment chez la Vache(Kuzvz.!r,-SevoW, r 959 ),
chez la Ratte(B EARE , ig6i)
et chez la Femme(INSU!,!&dquo; z 959 ),
maisjamais
encore chez la Truie.Mais un fait demeure curieux dans notre
expérience,
c’est que les teneurs des différents acides gras insaturés dans le lait deviennentsupérieures
à celles dans lamatière grasse de
départ ( 1 ).
Un telphénomène
avaitdéjà
été rencontré par FEVRIER( 1959
)
sur des porcs en croissance. Onpeut
avancerplusieurs hypothèses
pour l’ex- (i) Le saindoux que nous avons utilisé avait la composition suivante : ac. saturés : 37,9p. 100, ac, oléiquc:51
,6 p. 100, ac. nucléique : 5,6 h. ioo, ac. arachidonique : o,3 p. 100.
pliquer.
Toutd’abord,
onpeut
penser que seule la fraction laplus
insaturée desgraisses
dont une
partie
n’est passynthétisée
parl’animal,
est affectée par cephénomène
etqu’il
en résulte une sorte de concentration de cette fraction dans lelait,
avec corréla- tivement une diminution de la fraction saturée. Onpeut imaginer aussi, qu’au
coursde l’utilisation
métabolique
desgraisses,
et notamment dusaindoux,
il survient cer- taines modifications de structure et que desglycérides
ou des acides gras insaturés soient mis enplus grand
nombre à ladisposition
de la mamelle et utilisés enpriorité
Mais il faut retenir aussi que,
quel
que soit le mécanismeenvisagé,
la compo- sition desgraisses
du lait de Truie a tendance à serapprocher
de celle desdépôts adipeux maternels, plus
insaturés que le saindoux de notreexpérience (S ALMON -
LI!GAG-;tUR,m!63).
Ceci montre que lalipogenèse
du lait et celle desdépôts procè-
dent des mêmesphénomènes
chez cetteespèce
etqu’il
y a au cours de la lactation des interrelations entre lagraisse
durégime,
lagraisse
desdépôts
et leslipides
dulait, qui
rendent ceproblème particulièrement complexe.
3
° l ’aviations
corporelles
des truiesLe fait que les truies
supplémentées
en saindoux aientperdu
moins depoids
aucours de la lactation que les truies
témoins, peut s’interpréter
comme l’indication d’une intervention desgraisses
durégime
sur cetteperte
depoids.
Ceci sembleraitmontrer que la carence alimentaire
supportée
habituellement par la truie en lactation est essentiellementénergétique,
ce que confirmel’importance
de la mobilisation desdépôts adipeux.
Il faut toutefois remarquer que la variation de
poids
laplus
faible a étéenregis-
trée dans le lot III
qui recevait,
enplus
de lagraisse,
unsupplément
deprotéines.
Ceci
indique
bien que ces dernières excercentégalement
un effetprotecteur
vis-à-vis de laperte
depoids
et que, dans certains cas, une mobilisation desprotéines corporelles peut
s’effectuer au bénéfice de la lactation.Que
cesprotéines
soient utilisées en tant que source d’azote oud’énergie,
c’est ce que nous ne savons pas encore. Mais il est bien certainqu’une augmentation
du niveauénergétique
seul de laration,
ne suffitpas pour arrêter le catabolisme de lactation.
Il n’est pas sans intérêt de
souligner
que dans le lotIV, qui
recevait la mêmequantité d’énergie
et d’azote que le lot I, l’effet deprotection
deslipides
sur laperte
depoids
a été moins net que dans les autres lots. On remarqueégalement
que la mobilisation du tissuadipeux
a été par contrebeaucoup plus importante
que dans les autreslots,
cequi
entraînerait par déduction un catabolisme azoté moinsimportant.
Dans ce lot
donc,
laprésence
degraisse
dans la ration aurait eu un effetd’épargne plus
sensible sur lesprotéines
tissulaires que sur lesgraisses
de réserve. Il y a uneexplication
à cephénomène : l’augmentation
de la sécrétion deslipides
dans lelait,
aussiimportante
dans ce lot que dans les lots II etIII,
n’a pu sefaire,
sanssupplé-
ment
alimentaire, qu’au prix
d’une mobilisationplus importante
des tissus de réserve.Ou,
cequi
revient aumême,
toutes lesgraisses
durégime
ont été utilisées pour lalipogenèse
dulait,
alors que dans les autres groupes unepartie
de cesgraisses parti-
cipait
au maintien des réservescorporelles.
Comme le montre lafigure 6,
ceci s’estpassé
surtout au cours des dernières semaines de lactation. Il est vraisemblable que, dans ce cas, lesgraisses corporelles
ontparticipé,
directement ou non, à lalipogenèse
du lait. Nous trouvons ici un nouvel
exemple
des relationsqui
se créent chez la truie entrel’aliment,
lesdépôts
et le lait.q.!
Croissance desporcelets
Il est manifeste que la
présence
de saindoux dans l’alimentation de la truie a eupour effet secondaire une amélioration de la croissance des
porcelets,
etplus spéciale-
ment du
poids
au sevrage, que l’onpeut
évaluer suivant les cas à II à 16 p. ioo de laperformance
des témoins.Doit-on voir ici une influence
spécifique
dusaindoux,
ouplus simplement
laconséquence
d’uneaugmentation
del’ingéré calorique
desporcelets ?
Il estprobable
que la seconde
hypothèse
est laplus
valable.Certes,
lesrégimes
contenant de lagraisse
ontprovoqué
un certain enrichissement du lait en acides grasindispensables (ac. linoléique),
mais le taux de cet acide dans le lait des animauxtémoins, paraissait déjà
élevé et sans doute suffisant pourqu’on
nepuisse invoquer
une stimulation de croissanceanalogue
à celle observée par DEUEL( 195 6)
sur des ratons dont les mèresavaient été
supplémentées
en linoléate.Par contre, une étude antérieure
(SAi!MON-LEGA&NEUR
etAuMazTR!, 19 6 2 )
nous avait montré que
l’ingestion d’énergie
était l’un des facteursimportants
de lavitesse de croissance
pendant
l’allaitement etqu’il
y avait une relation entre la quan- tité delipides apportés
par le lait et lepoids
duporcelet
à différents stades. Le fait que dans notreexpérience
l’influence desrégimes lipidiques apparaisse
surtoutaprès
la 3e semaine de
lactation,
moment où les besoins totaux duporcelet augmentent considérablement,
renforce cetteinterprétation.
On
peut
se demander toutefois si lasupplémentation
durégime
maternel engraisse peut
être considérée comme un moyen efficace d’améliorer la croissance desporcelets ?
L’amélioration constatée est, audemeurant,
assez faible et unrapide
calcul
économique
montrequ’elle
est à la limite de la rentabilité. D’autresexpériences
avec des
graisses
et des taux différents sont sans doute nécessaires pourpouvoir
con-clure
objectivement
sur cepoint.
CONCLUSION
Le
premier
effet de l’introduction de 17 p. ioo de saindoux dans lerégime
ali-mentaire de truies en lactation a été une
augmentation
de la sécrétion deslipides
dulait. A une
exception près,
cetteaugmentation
n’a pas été le résultat de laproduction
d’une
plus grande quantité
delait, mais,
aucontraire,
d’une élévation de la teneur du lait engraisse.
Cetenrichissement,
relativementimportant ( 15
p.100 ),
du laitapparaît
même dans le cas d’unrégime iso-énergétique
et isoazoté. La teneur des autresconstituants du
lait,
saufpeut-être
celle des matièresminérales,
n’est pas modifiée.Corrélativement,
la modification de la teneur en matière grasses’accompagne
d’un
changement
dans larépartition
des acides gras et notamment d’un enrichisse- ment en acides insaturés(oléique, linoléique
etarachidonique),
que l’onpeut
inter-prêter
comme l’indication d’un passageplus
ou moins direct de ces acides de l’aliment dans le lait.On note aussi une diminution
plus
ou moinsprononcée (suivant
le niveau éner-gétique),
de laperte
depoids
maternelle au cours de lalactation, qui
atteint sonplein
effetlorsque
les truiesreçoivent également
unsupplément protéique.
L’inter-vention des
graisses
alimentaires dans lalipogenèse
du lait et la mobilisation du tissuadipeux
au cours de la lactation est ainsi clairement démontrée.On observe subsidiairement une
augmentation
dupoids
au sevrage desporcelets,
mais
qui
neparaît
pas suffisante à elle seule dans nos conditions pourjustifier
l’inté-rêt
économique
de cettepratique.
Reçu pouy
publication
era décembre i96z.SUMMARY
TIIE EFFECT OF SUPPLEMENTARY FAT
(LARD)
IN THE DIET UPONMILK PRODUCTION IN SOWS
Fourty
sows were alloted in four groups, eachreceiving
one of thefollowing
diets : I Basal ;II Basal + 17 p. ioo lard ; III Basal + 17p. Ioo lard + p. Ioo fish meal ; IV the same as III but
fed at 80 p. ioo level.
Digestibilities
for bothnitrogen
and energy were determined by chromium oxidetechnique
andit appears that diets I and IV were isocaloric and that diets I, III and IV had the same
digestible nitrogen
content.The amount of milk
produced
was the same in all groups except II, whereas the milk fat percen- tage was increasedby
15p. ioo in the three groupsreceiving
lard. Furthermore, thefatty
acid com-position
of milk was also modified : oleic and linoleic acids increased and saturated acids decreased in groups II, III, IV. So it seems that the fat intake may be useddirectly
by the sow for milklipo- genesis,
but with some differences ascompared
to otherspecies.
Thispoint
is discussed.On the other hand, losses in
weight during
lactation decreased in sowsreceiving
fat and theweaning weight
ofpiglets slightly
increased.RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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