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Journal des débats. Commission permanente du budget et de l'administration

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Journal des débats

Commission permanente du budget et de l'administration

Le mercredi 15 mai 1985 - No 20

Consultation particulière sur le projet de loi 37 —

Loi sur le régime de négociation des conventions

collectives dans les secteurs public et parapublic (1)

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Déclarations d'ouverture

M. Michel Clair CBA-737 M. Michel Page CBA-738 Auditions CBA-740 Association des hôpitaux du Québec CBA-740 Association des centres d'accueil du Québec

Association des centres de services sociaux du Québec

Association des centres hospitaliers et d'accueil privés du Québec et

Fédération des centres locaux de services communautaires du Québec (CLSC) CBA-754 Coalition pour la défense du droit de négocier

des travailleuses et des travailleurs du service public CBA-767 Remarques du président du Conseil du trésor

M. Michel Clair CBA-783 Commentaires de l'Opposition

M. Michel Pagé CBA-789 Discussion générale CBA-793

Autres intervenants M. Claude Lachance, président

M. Guy Chevrette M. Pierre-J. Paradis M. Maximilien Polak

Mme Denise Le Blanc-Bantey M. Raynald Fréchette Mme Joan Dougherty M. François Gendron M. Claude Ryan M. Yves Bérubé

* M. Florian Brissette, Association des hôpitaux du Québec

* M. Jacques Nadeau, idem

* M. Claude Boutin, idem

* M. Marcellin Dallaire, Association des centres d'accueil du Québec

* M. Pierre Cloutier, idem

* M. Yves Neveu, idem

* M. Marcel Sénéchal, Fédération des CLSC du Québec

* M. Maurice Charlebois, idem

* M. André Groulx, Association des centres hospitaliers et d'accueil privés du Québec

* M. Louis-Philippe Thibault, Association des CSS du Québec

* Mme Lise Denis, idem

* Mme Monique Goyette, cartel des organismes professionnels de la santé

* M. Michael Palumbo, Provincial Association of Catholic Teachers

* M. Luc Perron, Syndicat des professeurs de l'État du Québec

* Mme Nicole Préfontaine, Fédération québécoise des infirmières et infirmiers

* M. Louis-André Cadieux, Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec

* M. Jean-Louis Harguindeguy, Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec

* M. Harvey Weiner, Association provincial des enseignants protestants du Québec

* M. Yvon Charbonneau, Centrale de l'enseignement du Québec

* M. Gérald Larose, Confédération des syndicats nationaux

* M. Louis Laberge, Fédération des travailleurs du Québec

* Mme Hélène Pelletier, Fédération des syndicats professionnels d'infirmières et infirmiers du Québec

* M. Claude Gingras, Centrale des syndicats démocratiques

* Mme Hélène Weaver, Fédération des infirmières et infirmiers unis Inc.

* M. Claude Gerbeau, Fédération des professionnels et professionnelles des services éducatifs du Québec au niveau des commissions scolaires

* M. Henri Massé, Fédération des travailleurs du Québec

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(Dix heures quatorze minutes)

Le Président (M. Lachance): La commission du budget et de l'administration se réunit ce matin avec le mandat de procéder à une consultation particulière portant sur le projet de loi 37, Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M.

Baril (Arthabaska) sera remplacé par M.

Lafrenière (Ungava), M. Blank (Saint-Louis) sera remplacé par M. Pagé (Portneuf), M.

Caron (Verdun) sera remplacé par M. Doyon (Louis-Hébert), M. Johnson (Vaudreuil- Soulanges) sera remplacé par M. Ryan (Argenteuil).

Le Président (M. Lachance): Merci, M.

le secrétaire. Selon une entente qui a été conclue entre les deux formations politiques pour les travaux de cette matinée, il y aura d'abord l'Association des hôpitaux du Québec comme premier groupe et, ensuite, un deuxième groupe formé de l'Association des centres d'accueil du Québec, de l'Association des centres de services sociaux du Québec, de l'Association des centres hospitaliers et des centres d'accueil privés du Québec et, finalement, de la Fédération des centres locaux de services communautaires du Québec.

J'inviterais maintenant M. le ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du trésor pour des propos préliminaires.

Déclarations d'ouverture M. Michel Clair

M. Clair: Merci, M. le Président. Ce sera très bref comme propos d'introduction à cette commission parlementaire puisque cette commission se tient pour entendre deux grands groupes, des associations patronales et des associations syndicales des secteurs public et parapublic, sur la réforme du régime de négociation et non pas pour discuter en commission parlementaire, article par article, du projet de loi, ce que nous aurons l'occasion de faire prochainement.

Je voudrais simplement, dans un

premier temps, souhaiter la bienvenue aux représentants de l'Association des hôpitaux du Québec, de même qu'aux autres associations patronales qui sont présents ici ce matin, mais aussi souhaiter la bienvenue aux parlementaires et à tous ceux et celles qui suivent le processus de révision de la réforme du régime de négociation dans les secteurs public et parapublic.

Je voudrais dans un premier temps rappeler que nous avons tenu une commission parlementaire il y a quelques mois sur l'avant-projet. Depuis ce temps, les représentants du gouvernement ont eu l'occasion de rencontrer les représentants tant des associations patronales que des associations syndicales à de multiples reprises. En f a i t , il y a eu quatre rencontres avec les représentants des associations syndicales qui se sont regroupées dans une coalition, comme chacun le sait. Ces rencontres-là avaient eu lieu à la demande des associations syndicales et le gouvernement avait décidé de tenir ces rencontres même si, à l'exception de la CSN, les autres centrales avaient refusé de participer aux travaux de la commission parlementaire. Le gouvernement a considéré approprié, compte tenu de l'importance des enjeux, de rencontrer quand même ces associations syndicales. Bien sûr que nous avons eu, d'autre part, de nombreuses rencontres avec les représentants des associations patronales.

Nous en sommes maintenant à la fin d'un processus de consultation, de révision du régime de négociation dans les secteurs public et parapublic qui aura duré près de deux ans, où tout le monde a eu l'occasion de se faire entendre. Le gouvernement en a, quant a lui, tiré des conclusions qui se sont matérialisées dans le contenu d'un projet de loi qui est présentement devant l'Assemblée nationale. En d'autres mots, après un processus de consultation qui a duré deux ans, le gouvernement a maintenant fait son l i t et a concrétisé dans un projet de loi ses intentions, ses orientations quant à une réforme du régime de négociation.

Cependant, compte tenu du fait qu'il y a eu des modifications substantielles par rapport à l'avant-projet de loi, d'une part, et que, d'autre part, les parlementaires n'avaient pas eu, quant a eux, l'occasion d'entendre une dernière fois le point de vue des associations patronales et syndicales, j ' a i moi-même proposé qu'une commission

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parlementaire restreinte, du genre de celle que nous commençons aujourd'hui, se tienne afin, justement, d'offrir la chance une dernière fois aux parlementaires des deux formations politiques et également aux députés indépendants de recueillir le point de vue des associations patronales et syndicales, puisque, encore une fois, d'autres rencontres ont eu lieu entre les représentants du gouvernement et les représentants des associations concernées en dehors des travaux de la commission parlementaire qui s'étaient tenus il y a quelques mois.

Inutile de vous dire, M. le Président, que je suis très heureux que les représentants tant des associations patronales que des associations syndicales aient décidé de venir communiquer leur point de vue aux parlementaires, aux membres de l'Assemblée nationale.

Ce sont là les commentaires préliminaires que je voulais faire. Je termine, encore une fois, en souhaitant la bienvenue à tous ceux et celles qui s'intéressent à cette réforme du régime de négociation dans les secteurs public et parapublic.

Le Président (M. Lachance): Merci, M.

le ministre. M. le député de Portneuf.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, M. le Président. M. le ministre, MM. les membres de la commission, MM. les représentants de l'Association des hôpitaux du Québec, à qui on souhaite la plus cordiale bienvenue aujourd'hui, voici qu'en ce beau matin du 15 mai s'amorce une nouvelle fois, à l'Assemblée nationale du Québec, un débat et un échange qui, on l'espère, seront utiles parce qu'ils sont importants et qu'ils touchent l'ensemble du régime des négociations dans les secteurs public et parapublic.

Comme le ministre l'a indiqué, nous avons été conviés à quelques reprises depuis deux ans à des échanges sur ce sujet qui fait oeuvre de premier plan, si je peux utiliser le terme, dans l'appareil de l'État et du gouvernement du Québec. Essentiellement, une commission a siégé, comme on le sait, en 1984. L'avant-projet de loi a été déposé de façon assez expéditive et assez surprenante, si on peut utiliser le terme, parce que la majorité des intervenants ne prévoyait pas le dépôt d'un tel projet de loi à quelques jours de la fin de la session de décembre dernier. C'est un avant-projet qui a été étudié en commission parlementaire et où quelques-uns de ceux qui nous font l'honneur de leur présence pendant ces deux jours sont venus témoigner devant nous.

Le gouvernement du Québec, par la voix de son ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du

trésor, a eu l'occasion d'avoir des échanges avec ceux qui étaient en désaccord avec ce projet de loi, tant et si bien qu'il y a quelques semaines le ministre déposait un projet devenu définitif, le projet de loi 37, à l'Assemblée nationale.

Tous les membres de l'Assemblée nationale et tous les intervenants semblent unanimes à soutenir que cet exercice de modification de votre régime de négociation dans les secteurs public et parapublic doit se faire. Tous les parlementaires sont unanimes à souscrire à cette volonté que les négociations entre l'État et ses employés se fassent à partir de nouvelles mentalités et avec l'ultime objectif de mettre fin aux luttes stériles et aux affrontements qui ont été coûteux non seulement pour les travailleurs, mais aussi pour le gouvernement et surtout pour la population du Québec.

Autant on a, d'une part, une volonté gouvernementale de modifier ce régime de négociation de façon significative, autant, il faut en convenir, on a un intérêt clairement manifesté chez les travailleurs et les travailleuses de s'associer à une démarche qui modifierait de telles règles. Jusqu'à maintenant, ces deux volontés ne se sont pas rejointes; cependant, le message gouverne- mental est clair, précis et l'État a certaines obligations.

Très brièvement, M. le Président, parce que je veux qu'on profite du plus de temps possible pour écouter ceux qui interviendront, je me dois de rappeler certains des éléments qu'on avait abordés, M. le ministre et moi, lors de la commission parlementaire qui a étudié l'avant-projet de l o i .

Nous sommes d'accord et nous souscrivons au principe qu'un gouvernement comme le gouvernement du Québec se doit de rechercher un équilibre budgétaire, d'où l'importance de cette approche nouvelle au chapitre de l'établissement de la rémunération et cette volonté qu'a manifestée le gouvernement d'intervenir à ce niveau. On sait que la situation budgétaire et financière du Québec est très discuta- ble. Le gouvernement, après neuf ans d'administration, vient de constater l'obli- gation qu'on a comme société d'aligner, de tenter de faire en sorte que soient comparables les revenus payés dans le secteur public par rapport à ce qui se fait dans le secteur privé. Il faut en convenir, c'est le secteur privé qui alimente les coffres du gouvernement.

L'avant-projet de loi, en ce qui concerne la façon dont sera établie la rémunération, contient des éléments qu'on juge, quant à nous, très intéressants, M. le ministre. L'Institut de recherche sur la rémunération, le bureau qui sera chargé d'établir ou de formuler des recommandations, ce bureau dit paritaire, nous avions souhaité qu'il soit le plus

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crédible possible et qu'il ait le plus d'autorité possible. C'est avec beaucoup d'intérêt qu'on voit cette nouvelle structure qui se distinguera et de beaucoup du Conseil du trésor antérieurement.

Cependant, c'est avec surprise - je dois en convenir - que j ' a i pris connaissance par la lecture du projet de loi, dès son dépôt, des modifications que vous avez apportées en regard du droit à la grève pour la question de la rémunération. Je me suis permis de lire longuement et à quelques reprises votre déclaration du 29 janvier 1985. Le Journal des débats c'est un bon livre de chevet. Vous disiez en commission parlementaire, à la page CBA-125: "Quatrièmement - et c'est le ministre Clair qui parle - un régime équilibré devrait prévoir que le gouvernement n'est pas appelé, une fois tous les trois ans, à négocier son niveau de déficit ou de taxes et ses priorités gouvernementales avec les seuls représentants des employés des secteurs public et parapublic". Vous savez, c'était clairement exprimé que le droit à la grève ne devait plus prévaloir en regard de la rémunération, mais vous l'avez réintroduit. J'ose croire que l'échange qu'on aura avec nos intervenants pourra nous permettre de faire préciser plusieurs des aspects du projet de loi par le ministre.

On doit porter à l'attention en même temps - même si cela peut paraître conflictuel, c'est quand même conciliable - d'une part, l'équilibre des comptes du gouvernement et aussi l'obligation' qu'a le gouvernement comme État employeur de se comporter comme un bon citoyen à l'égard de ses employés.

Je rappellerai au ministre l'écueil qui guette le gouvernement quel qu'il soit: toute tentative de rapprochement du public avec le privé risque de causer un préjudice coûteux et de faire mal à ces milliers de travailleurs et travailleuses qui oeuvrent dans les secteurs public et parapublic et pour qui les conditions de travail et les niveaux de rémunération doivent être évalués. À cet égard, je me limiterai à référer le ministre aux propos de Mme la vice-présidente de la CSN, propos très intéressants. C'est un écueil qui devra être surveillé par le gouvernement quel qu'il soit.

Nous avons été surpris, dans notre groupe parlementaire, de voir le ministre affirmer clairement dans son communiqué de presse - je termine bientôt - la primauté du droit aux services de santé. Je me suis dit:

II reprend les termes exacts du programme de notre formation politique, j'espère qu'il ira jusqu'au bout et qu'il acceptera les mesures qu'on propose. Or, force nous est de constater qu'il a pris le libellé, qu'il a pris l'intention, mais qu'il n'est pas allé jusqu'au bout; il nous propose une mécanique sur laquelle il sera très certainement utile de discuter avec nos visiteurs ce matin, une

mécanique en vertu de laquelle un pourcentage de travailleurs devront maintenir les services en cas de conflit.

Un point important dans cette loi, la décentralisation. Il faut retenir que plusieurs souhaitent une décentralisation. Il faut retenir, cependant, que les matières ainsi décentralisées ne feront pas l'objet d'un recours à la grève. Il faut retenir aussi que certaines des instances qui se voient attribuer un pouvoir au niveau local ou régional, n'ont pas de pouvoir de taxation.

Ce sont là deux éléments importants dans ce débat.

Enfin, le ministre propose, par son projet de loi, des modifications substantielles aux pouvoirs du Conseil des services essentiels. C'est avec beaucoup d'intérêt qu'on accueille ces dispositions. Nous sommes franchement convaincus que sur ce point particulier on pourra probablement s'entendre. Encore une fois, force nous est de constater que vous avez très certainement regardé dans le devoir d'à côté, parce que c'est le même gouvernement que celui qui a déposé ce projet de loi qui qualifiait, il y a quelques mois, les propositions de notre chef, M. Bourassa, en regard de celles du gouvernement, d'un marteau automatique. Or, c'est ce que l'on retrouve dans le projet de loi déposé par le ministre. Alors, c'est très intéressant.

M. le Président, en terminant, les deux journées qui s'amorcent sont des journées importantes. On ose croire et espérer que ce projet, même s'il a été mal conçu... Car il faut se souvenir à partir de quoi il a été conçu. Il a été conçu à partir des lois 70 et 68 en 1982, à partir de la loi 105 en 1982.

Il a été conçu à partir d'un échange qui a porté pendant beaucoup de temps sur les effets des coupures budgétaires, entre autres, dans le réseau de la santé et sur l'effet des décrets, entre autres, dans le réseau de l'éducation.

Le gouvernement a une dernière chance d'aller chercher un consensus avec les représentants des travailleurs. Quant à nous, on espère et je souhaite, au nom de notre groupe, qu'on fera oeuvre utile. Faire oeuvre utile, cela ne veut pas dire pour le gouvernement déposer son projet de loi, écouter les gens qui viendront, puis refermer les livres et maintenir son projet de loi tel qu'il a été déposé.

(10 h 30)

J'interprète l'interaction qu'on vivra dans les deux prochaines journées comme voulant probablement dire des modifications au projet de loi tel qu'il a été déposé. On espère qu'on fera oeuvre utile. Car si le gouvernement est venu ici seulement par acquit de conscience pour entendre les parties et maintenir fermement ses positions dans le projet de loi 37, encore une fois ce sera peut-être, cela aura été

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malheureusement une commission parle- mentaire qui n'aura pas fait oeuvre utile.

M. le Président, nous sommes ici jusqu'à tard ce soir. Je suis persuadé que le débat sera serein et qu'on sera capable d'échanger pour bonifier ce projet de loi, si besoin est, et si par surcroît il y a consensus. Merci.

Auditions

Le Président (M. Lachance): Merci, M.

le député. J'invite maintenant le porte-parole de l'Association des hôpitaux du Québec, M.

Florîan Brissette, à nous présenter les personnes qui l'accompagnent, en lui indiquant que nous aurions, dans le partage du temps, jusqu'à 11 h 45 pour échanger.

Association des hôpitaux du Québec M. Brissette (Florian): M. le Président, je voudrais que vous excusiez l'absence de notre président, M. Brousseau, qui est retenu à Montréal. Comme probablement l'ensemble des membres de la commission le savent, c'est le congrès annuel de l'Association des hôpitaux et l'ouverture officielle était ce matin. Alors, M. Brousseau regrette de ne pas être présent ce matin.

Je suis accompagné de M. Jacques Nadeau, vice-président exécutif et directeur général de l'association et de M. Claude Boutin, à ma gauche, directeur des ressources humaines à l'association. Alors, nous vous remercions encore une fois de nous fournir l'occasion de vous exposer la position des dirigeants des centres hospitaliers publics sur le projet de loi relatif à la réforme du régime de négociation.

Comme tout le monde le sait, la main- d'oeuvre hospitalière se compose d'environ 135 000 personnes représentant quelque 100 000 équivalents temps plein et le gouvernement consacre plus de 3 500 000 000 $ au programme de santé dispensé par les hôpitaux. Tout le monde le sait, le contenu des conventions collectives conditionne largement la possibilité qu'ont les administrateurs d'hôpitaux de gérer et d'organiser le fonctionnement des services de santé. Vous comprendrez alors notre grand intérêt pour le projet de loi qui est en discussion actuellement.

Au terme de plusieurs mois de consultation et de nombreux compromis, nous devons nous montrer satisfaits que la réforme du régime de négociation soit arrivée à sa phase finale. D'autant plus que le projet de loi contient encore plusieurs modifications qui vont dans le sens des orientations préconisées par l'association depuis plusieurs années.

Nous sommes particulièrement heureux de constater que le gouvernement tient

compte de la primauté du droit des citoyens à la santé sur celui du droit de grève. Nous croyons que cette optique répond aux attentes de la population et c'est un droit qui est reconnu, selon nous, partout dans le monde entier.

Les changements apportés auxquels nous accordons une importance primordiale sont reflétés par plusieurs innovations et notamment les suivantes: création de l'Institut de recherche sur la rémunération;

modalités nouvelles pour favoriser les accords sur les aspects monétaires; amorce de décentralisation des matières négociables sur les aspects normatifs; nouvelles mesures pour favoriser le règlement des différends tant au niveau sectoriel qu'au niveau local; caractère plus permanent des négociations aux différents paliers; l'exercice du droit de grève rendu presque symbolique; déjudiciari- sation, des conflits et nouveaux pouvoirs confiés au Conseil des services essentiels.

Nous avons le sentiment d'avoir été consultés et d'avoir suivi de près l'évolution des travaux qui ont conduit au dépôt de ce projet de loi. Nous avons également le sentiment que les centrales syndicales ont bénéficié de la même opportunité. Nous estimons que le coup de barre est donné et qu'en effet ce nouveau cadre devrait favoriser l'évolution des mentalités dans le sens recherché par la collectivité québécoise tout entière et en particulier par ceux que nous représentons.

Comme nous avons déjà eu l'occasion de le mentionner dans le cadre des travaux de la commission sur l'avant-projet de loi, nous aurions souhaité une réforme plus en profondeur de l'actuel régime de négociation.

Tout en étant d'accord avec les objectifs poursuivis, nous estimions qu'à certains égards les moyens à mettre en place pour garantir les résultats devaient être différents de ceux envisagés dans l'avant-projet.

Sans reprendre ici l'ensemble des éléments que nous avions alors débattus, nous souhaitons attirer à nouveau l'attention des membres de la commission sur quelques aspects qui méritent d'être signalés. Je demanderais à M. Jacques Nadeau, vice- président exécutif, directeur général de l'Association des hôpitaux, de même qu'à M.

Claude Boutin, directeur des ressources humaines de l'association, de vous les expliciter. Jacques.

M. Nadeau (Jacques): M. le Président, permettez-moi d'attirer, comme le disait notre président, votre attention sur un certain nombre d'éléments. Le premier, c'est l'article 41 qui mentionne que "les stipulations négociées et agréées par le comité patronal de négociation sont signées par le ministre ainsi que par le président et le vice-président du comité. Elles lient les établissements en cause. "

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Nous pensons que dans une période de décentralisation il y aurait lieu que les conventions collectives soient signées au niveau local. On fait un pas vers la décentralisation et on centralise les signatures. Si on veut aller dans le même sens, il m'apparattrait logique que ces conventions collectives soient signées au niveau local, c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'empêchement à ce qu'il y ait une signature au niveau national, mais qu'au niveau local ce soit contresigné, approuvé. Nous pensons que ce serait vraiment un mouvement dans le sens de la décentralisation.

Le deuxième élément que nous voulons souligner, c'est l'article 42, où il est stipulé que "le Conseil du trésor assure le suivi des négociations et qu'il peut déléguer un observateur aux séances de négociations. "

Encore là, il me semble que dans une ère de décentralisation il ne serait pas nécessaire que le Conseil du trésor délègue quelqu'un aux tables de négociations. Il me semble que c'est un peu une méfiance du Conseil du trésor vis-à-vis du ministre - peut-être en ce qui nous concerne - des Affaires sociales et également vis-à-vis du club patronal. Il me semble que cela n'est pas nécessaire dans une ère de décentralisation.

Le troisième élément, c'est l'article 43 où il est mentionné que le Conseil du trésor invite les ministres sectoriels à participer à ses délibérations. Nous pensons que ce n'est pas nécessaire que les règles qui régissent le gouvernement et ceux qui sont invités parmi les ministres au Conseil du trésor apparaissent nécessairement dans cette loi.

Ce qui nous paraîtrait important, c'est qu'il soit stipulé que le président du club sectoriel ou sous-sectoriel puisse être au Conseil du trésor au moment où il se dégage des mandats. C'est évident que le ministre va être là, c'est sûr. Il me semble que ce n'est pas nécessaire de reprendre cela dans cette l o i , mais il semble que cela pourrait être utile de voir que le président du club peut participer à l'élaboration des mandats au Conseil du trésor.

L'autre élément que nous voulons soulever, ce sont les comités qui sont sous l'autorité des ministres sectoriels. Il me semble que dans une période de décentralisation à l'intérieur du club on établit ensemble des règles de prépondérance et il me semble que le club comme tel où participent le ministère et les associations d'établissements devrait s'assumer. Il me semble que ce n'est pas nécessaire que le club soit sous l'autorité du ministre sectoriel.

On a des prépondérances à l'intérieur de ce club et on peut se donner des règles du jeu ensemble sans qu'il soit mentionné dans la loi que le club est sous l'autorité du ministre sectoriel. Tout cela dans le contexte de l'ère de décentralisation. Vous vous rappelez, on vous disait tantôt: II y a un pas de fait dans

la décentralisation. On aurait espéré que cette réforme aille plus en profondeur, mais, évidemment, quand on dit plus en profondeur, on veut dire aller un peu plus loin dans la voie de la décentralisation.

L'autre point que je veux vous souligner, M. le Président, c'est au sujet de l'article 40. Au niveau de l'article 40, on voit que les comités sectoriels requièrent du Conseil du trésor des mandats de négociation et, dans le cadre de ces mandats, organisent, dirigent et coordonnent les négociations. On comprend que cela veut dire que le Conseil du trésor va autoriser tous les mandats.

Nous, on pense que la deuxième partie de votre article 42 est suffisante, c'est-à-dire que le Conseil du trésor donne des mandats sur les matières qu'il juge d'intérêt gouvernemental. Il me semble qu'aux articles 40 et 42 il y a une espèce de conflit. On a l'impression qu'à l'article 40 tous les mandats doivent être dégagés par le Conseil du trésor et à l'article 42, dans la deuxième partie, on dit: "Dans les matières qu'il juge d'intérêt gouvernemental. " Dans les matières qu'il juge d'intérêt gouvernemental, cela nous apparaît suffisant.

L'autre élément que je veux souligner, M. te Président, concerne l'article 87. Alors, c'est ce que le député de Portneuf soulignait tantôt, les proportions en ce qui concerne les services essentiels à maintenir. Je veux vous rappeler que la position de l'Association des hôpitaux du Québec, c'était que la grève ne puisse s'exercer que de façon symbolique.

Nous n'étions pas en faveur de faire un débat sur le retrait du droit de grève; cela, je pense que nous l'avons dit clairement. Ce que nous avons dit, cependant, c'est que la grève ne devrait s'exercer que symboliquement et qu'il ne devrait pas y avoir de rupture dans les services de santé.

Je reconnais que, lorsqu'on met des plafonds à 90 % et à 80 %, on a fait un très gros pas par rapport à ce qui existait antérieurement. Cependant, je ne peux pas dire que cela n'amènera pas de rupture dans les services de santé. À notre point de vue, il devrait y avoir 100 % des effectifs: c'est ce que nous vous avions dit.

Si jamais vous décidez que ce n'est pas 100 % des effectifs et que vous allez dans le sens de ce que vous présentez là... Je n'ai pas besoin de vous justifier cela, je pense que, lors de l'avant-projet de loi, on vous a dit pourquoi la grève ne devrait pas s'exercer dans les services de santé; je ne fais pas ce débat-là, je ne reviens pas là- dessus, on a déjà argumenté longuement là- dessus. Si jamais vous voulez maintenir le fait que ce ne doit pas être 100 % des effectifs, il me semble que c'est difficile de faire une classe à 90 % et une autre classe à 80 %. Si je regarde votre classe à 90 %, pour les services d'un centre d'accueil ou de soins de longue durée, est-ce que tous les

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établissements qui ont une unité de longue durée, par exemple, 30 patients sur 250 patients, sont dans un rayon de 90 %? Je ne sais pas si c'est ce que cela veut dire.

H y a des cas là-dedans qui manquent.

Est-ce qu'on va en faire l'énumération? Par exemple, le centre des grands brûlés, ce n'est pas couvert là-dedans, l'obstétrique, les centres de traumatologie. Plutôt que d'en arriver à faire encore une longue liste, si vous ne voulez pas retenir la prétention qu'à l'exercice il ne devrait pas y avoir de rupture dans les services de santé, au moins ne faites pas deux classes; faites donc 90 % pour tout le monde. À ce moment-là, on ne se posera pas de questions. Encore une fois, je vous dis qu'on privilégie qu'il n'y ait pas de réduction d'effectifs.

La dernière intervention, M. le Président, c'est sur l'article 88. "Malgré une grève appréhendée, un établissement doit dispenser ses services habituels sans modification des normes applicables à l'accès aux services et à leur prestation". Je peux vous dire que, s'il y a une grève le lendemain dans les centres hospitaliers et que les centres hospitaliers doivent avoir 80 % des effectifs, c'est à peu près impossible de donner la veille 100 % des soins qui se donnaient normalement.

(10 h 45)

Je pense que vous devriez considérer, si vous voulez maintenir ce pourcentage de 80 % et de 90 %, au moins un délai de 48 heures, un délai d'ajustement. Vous ne pouvez pas vous ajuster du soir au lendemain, ce n'est pas possible.

Je veux vous sensibiliser aussi au phénomène suivant concernant cet article: le respect de la loi sera extrêmement important. Si on donne plein service, incluant le délai de 48 heures, vous pouvez vous imaginer que le centre hospitalier est à peu près plein. Si jamais la loi n'était pas respectée, nous sommes pires que nous n'avons jamais été dans les centres hospitaliers parce qu'antérieurement on coupait peut-être 50 %, 60 % des patients.

Là, on va fonctionner avec un volume de patients de peut-être 80 % ou 85 %. Si la loi n'était pas respectée, la sécurité de ces patients serait largement menacée. Je pense que c'est important qu'on y pense. Il faudra absolument, dans le contexte où les établissements sont appelés à fonctionner, que la loi soit respectée.

On ne peut pas terminer sans vous mentionner également quelques notes sur le code d'éthique syndical qui vous a été présenté. Je vais demander à M. Boutin de vous livrer ces quelques notes.

M. Boutin (Claude): M. le Président, on le fait immédiatement étant donné qu'on n'aura pas la possibilité de réagir ou d'intervenir à la suite de la présentation que

feront peut-être les groupements syndicaux en après-midi. On a eu l'occasion de prendre connaissance du code d'éthique qui est en consultation, présentement, au niveau des instances de la CSN, entre autres, et on a été à même de constater que ce code d'éthique, tel qu'il se présente, n'offre, évidemment, aucune garantie de la nature ou de l'envergure de celles qui sont contenues en particulier dans le projet de loi à l'étude présentement.

On constate de façon évidente que, dans ce code d'éthique est reflété un pouvoir discrétionnaire important au niveau des organismes syndicaux quant au maintien des services essentiels ou même à la détermination du nombre de lits qui resteront ouverts en période de conflit ou à l'occasion de grèves. Ces décisions ultimes du côté syndical, à défaut d'entente, tiennent, évidemment, compte du nombre de cadres qui devront se maintenir en service ou, en tout cas, qui devront travailler à la place des syndiqués. On parle également des non- syndiqués et on fait allusion aux bénévoles.

On y constate également qu'ultimement le syndicat pourrait décider des affectations de travail de tous ces gens et même définir ou déterminer quels seraient les horaires types des gens qui seraient affectés aux services essentiels. Évidemment, les organisations patronales n'auraient, à ce point de vue, pas de contrôle sur les catégories de personnel qui viendraient travailler dans les différents services.

On indique de façon assez évidente dans ce code d'éthique que serait affectée aux services essentiels une proportion raisonnable de personnel habitué à travailler dans ces différents services. À l'inverse, on peut supposer que le syndicat local pourrait envoyer, pour assurer des services essentiels, des gens qui ne seraient pas habitués à travailler, par exemple, dans les différentes unités de soins spécialisées ou ultra- spécialisées, entre autres.

On souligne que - pour affirmer le fait que ça confirme le pouvoir discrétionnaire de l'instance syndicale à la limite - le syndicat serait disposé à recevoir les représentations des médecins ou des bénéficiaires et que, finalement, la décision lui appartiendrait quant au niveau des services à maintenir.

C'est d'autant plus vrai que, contrairement à ce qui est prévu dans le projet de loi actuel, quand on fait référence au plancher d'effectifs qui devront se maintenir au travail en situation de conflit, dans le code d'éthique on fait plutôt référence au plafond de salariés qui devront se maintenir en service à l'occasion d'un conflit et que, en aucun cas, ce plafond ne devrait être dépassé, mais plutôt pourrait être diminué en tenant compte d'un certain nombre d'éléments ou de critères qui pourraient être indiqués dans ce code d'éthique.

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Un autre aspect qui mérite d'être signalé: on indique que même la sous- traitance et les fournisseurs qui, normalement, ont accès à l'établissement pourraient faire l'objet de négociations aux termes des ententes sur les services essentiels ou aux termes d'une liste syndicale et que, finalement, l'accès à l'établissement serait largement contrôlé et qu'il appartiendrait à l'employeur de développer des façons d'identifier les gens qui auraient accès à l'établissement.

Donc, cela laisse entrevoir que, compte tenu de l'étanchéité des lignes de piquetage, l'accès à l'établissement pourrait être largement compromis. Alors, tout cela pour dire, M. le Président, que le code d'éthique nous paraît compromettre largement l'objectif visé qui est celui d'assurer finalement et dans la mesure prévue au projet de loi l'accessibilité à l'établissement et la primauté des droits des bénéficiaires au maintien des services jugés essentiels.

Le Président (M. Lachance): Merci. M.

le président du Conseil du trésor.

M. Clair: M. le Président, même si mon collègue, le ministre des Affaires sociales, n'est pas membre de la commission, je souhaiterais que ce soit lui qui puisse intervenir à ma place. Je me contenterais, quant à moi, de simplement remercier... Oui?

M. Pagé: Conciliants comme nous le sommes, c'est devenu une véritable tradition, on va l'accepter, cela va de soi.

M. Clair: Merci, M. le Président.

M. Chevrette: J'avais su que tout le monde pouvait parler, mais qu'on n'avait pas nécessairement le droit de vote.

M. Pagé: On ne vote pas i c i . De toute façon, vous avez tellement peur des votes.

M. Chevrette: Oh non!

M. Clair: M. le Président, très rapidement je veux remercier l'AHQ, par ses représentants, ce matin, M. Brissette, M.

Nadeau, M. Boutin, d'être venue nous soumettre ses commentaires. Je dirai aux représentants que leur appui général au projet de loi est réconfortant et que ce sont les propos qu'ils ont tenus, quant à moi, que j ' a i le plus appréciés, parce que souvent on ne le reconnaît pas. Effectivement, les associations patronales et syndicales ont eu toutes les occasions d'être associées à la mise en place de la réforme du régime de négociation. Je pense que c'est fort important parce que dès le départ le gouvernement avait indiqué sa volonté très ferme d'associer le plus grand nombre de

partenaires. Or, aujourd'hui, l'AHQ nous dit que sur certains points elle n'est pas nécessairement complètement satisfaite; j ' a i pris des notes en ce qui concerne la dizaine de points qui ont été commentés par M.

Nadeau et M. Boutin. Ce n'est pas parce que tous les points soumis par un groupe ne sont pas retenus que le processus de consultation n'a pas été large, utile et efficace. Alors, je vous remercie et si j ' a i l'occasion de revenir, j'aurai des questions, mais je préfère laisser mon collègue, le ministre des Affaires sociales, poser les siennes puisque c'est le secteur qui le concerne directement.

M. Chevrette: M. le Président, moi aussi, je voudrais remercier l'AHQ. C'est quasiment le regroupement de tout le monde, à toutes fins utiles, parce qu'on va voir que les remarques se ressemblent ainsi que les groupes qui vont se succéder.

Tout d'abord, je suis heureux que vous déclariez effectivement que le processus a été bien enclenché, contrairement à ce que j ' a i entendu tantôt. Deuxièmement, j'aimerais vous remercier pour la participation que vous y avez apportée, parce qu'on s'est réuni à trois ou quatre reprises et effectivement on a franchi un millage important pour ce qui est de la compréhension mutuelle que nous avions.

Il y a quelques points que je voudrais aborder avec vous. Il y en a un, tout d'abord, qui me semble contradictoire avec les propos que vous avez tenus lors de la première consultation en commission parlementaire. C'est peut-être au niveau des nuances, mais en tout cas, je veux tout de suite l'aborder. C'est la question du droit de grève. Vous avez clairement indiqué, lors de la première consultation ici en commission parlementaire, qu'enlever le droit de grève, c'était, à toutes fins utiles, utopique s'il n'y avait pas de formule de rechange et que cela vous apparaissait un faux débat. Je résume peut-être grossièrement vos propos, mais cela ressemblait un peu à cela. Vous avez affirmé que vous ne voyiez pas là la solution. C'était beaucoup plus dans des formules alternatives, et les planchers ou les plafonds, selon le point de vue où on se place, vous paraissaient peut-être préférables.

J'aimerais d'abord que vous clarifiiez ce point.

M. Nadeau: D'abord, M. le ministre, je pense que ce qu'on vous a dit clairement, c'est qu'on ne croyait pas opportun de faire un débat sur le droit de grève à ce moment- ci. On a dit que cela poignait les gens aux tripes et qu'il n'y avait pas lieu de retirer le droit de grève. Cependant, on voulait que l'exercice ne devienne que symbolique. Un plafond de 80 % ou 90 %, c'est sûr que c'est un pas vers un symbole de grève, mais ce n'est pas tout à fait symbolique. On dit:

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Quant à nous, l'idéal pour rendre la grève symbolique, c'est qu'il y ait 100 % des effectifs. On n'a pas retiré le droit de grève, mais on en a contraint l'exercice.

Voilà ce qu'on disait. On n'a pas voulu faire de débat sur le droit de grève, mais on a dit: Contraignez-en l'exercice. C'est cela. On pense que, quand on met un plafond, on permet l'exercice du droit de grève et on brime des citoyens qui veulent avoir des services de santé.

Donc, ce qui vous apparaît contradictoire, c'est le fait qu'on a dit: Ne faisons pas de débat sur le droit de grève, mais on n'a pas dit: Maintenez l'exercice du droit de grève. On était contre le fait que la grève puisse s'exercer. On a clairement passé ce message. On dit: Quand vous mettez des barèmes 80 % ou 90 %, à notre sens, la grève peut s'exercer.

M. Chevrette: M. Nadeau, quand on parle de droit de grève symbolique, il faut qu'il y ait un symbole quelque part. Il faut au moins une couple de pancartes si vous n'en avez pas 4000. En France...

M. Nadeau: Ils en sortent des pancartes.

M. C h e v r e t t e : . . . ou dans les pays europérens, que font-ils? Ils disent: C'est dix pancartes pendant une heure devant l'hôpital.

M. Nadeau: C'est cela.

M. Chevrette: Vous en avez dix qui ne sont pas au travail, qui tiennent la pancarte, c'est au moins un symbole.

M. Nadeau: C'est différent de 80 % des effectifs pendant un ou deux moss. C'est différent.

M. Chevrette: Je comprends. De 100 % à aller au symbole, je pense qu'il y a quand même une petite marge entre ce que vous dites et le désir de maintenir un droit symbolique. Comment serait-ce interprété si on disait: On conserve un droit de grève symbolique, mais c'est 0 %? C'est aussi bien de faire ce que le Parti libéral dit: Pas de grève du tout, mais pas de mécanisme, non plus, pour régler. En passant, qu'est-ce que vous penseriez de...

M. Pagé: M. le Président... On s'en parlera tantôt.

M. Chevrette: Bien sûr, à votre tour.

Merci.

M. Pagé: Si vous voulez avoir un débat partisan, on est prêt.

M. Chevrette: Qu'est-ce que vous

penseriez de l'arbitrage au niveau du normatif lourd?

M. Nadeau: On vous a déjà dit que, concernant l'arbitrage au niveau du normatif lourd, il y a déjà de l'arbitrage de prévu, il y a les médiateurs, il y a un conseil de médiation, il y a un rapport qui doit être fait. On pense toujours là-dedans que, ultimement, c'est l'Assemblée nationale qui doit décider.

M. Chevrette: Pas d'arbitrage.

M. Nadeau: Pas d'arbitrage. On vous a toujours dit que c'est au gouvernement, aux élus de prendre leur décision. Le normatif lourd a de l'impact sur les budgets des établissements, il en a beaucoup. Je pense qu'il faut que ce soit les élus qui décident cela. C'est trop dangereux de mettre des montants importants comme cela dans les mains des tiers.

M. Chevrette: Merci. Pour ce qui est maintenant des plafonds, vous dites que cela aurait été trop fastidieux de faire la nomenclature des différents secteurs ou des différents départements qui auraient nécessité 100 %. On avait prévu les soins intensifs, les salles d'urgence; vous avez parlé des grands brûlés, mais en rehaussant le pourcentage à 90 %. Dans un même souffle, vous nous dites: Donnez-nous 48 heures de réajustement. Vous ne craignez pas que les syndicats ne nous disent: Vous laissez un laps de temps aux hôpitaux, en particulier aux hôpitaux de soins de courte durée, pour qu'ils aient le temps d'épurer la liste opératoire et qu'ils se retrouvent à l'intérieur avec 70 %, 75 % de lits occupés, alors que vous demandez 90 % du personnel.

Est-ce que vous pourriez commenter cette allégation qui surviendra sans doute du côté syndical et qui peut avoir un sens? Quand vous appréhendiez une grève, M. Nadeau, il est exact que les hôpitaux prenaient des précautions et réduisaient le nombre d'opérations, réduisaient le nombre de lits occupés, si bien que vous pourriez vous retrouver avec un plafond de 80 %, 90 %, mais avec à peine 70 % des bénéficiaires alités. Est-ce que ce n'est pas contradictoire avec la volonté de maintenir un plafond, mais qui correspond à peu près à la totalité des soins?

Ce n'est pas le cas dans un centre d'accueil où on a un taux d'occupation de 100 %. Ce n'est pas le cas, non plus, dans les soins prolongés où c'est pratiquement 100 %. Dans les soins de courte durée, vous savez pertinemment, si on donne un laps de temps... Au contraire, on préférait, dans le projet de loi, maintenir l'obligation, pour le centre hospitalier, de continuer ses opérations sur une base régulière en fixant

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un plafond, mais qui tenait compte de la situation régulière. Là-dessus, cela réapparaîtrait verser exactement dans le sens où on ne voulait pas verser, à savoir qu'on oblige la partie syndicale à maintenir plus de services que ceux qu'en réalité les autorités hospitalières sont contraintes de maintenir.

(11 heures)

M. Brissette: M. le ministre, la première constatation qu'on doit faire, c'est que l'objectif ultime que nous recherchons dans cela, c'est la sécurité des patients qui sont confiés aux établissements. C'est la première responsabilité, comme directeurs d'établissement, qu'on doit assumer. Il faut avoir vécu une grève dans un hôpital pour savoir, même si c'est réglementé comme on veut le faire, que l'avant-veille ou la veille d'une grève il existe quand même un climat de tension dans l'hôpital. Ce climat de tension se répercute, qu'on le veuille ou non, à l'ensemble des malades qui sont hospitalisés et la productivité ou le rendement est très différent.

Il faut regarder aussi la situation actuelle des centres hospitaliers. On parle de centres hospitaliers de courte durée, mais il y en a de moins en moins, parce que les lits sont occupés de plus en plus par des malades chroniques et par des malades qui entrent par les salles d'urgence. Donc, les malades électifs dans nos hôpitaux, de façon générale, on peut dire que c'est une "race", entre guillemets, qui n'existe plus. Il nous faut un délai raisonnable pour orienter les patients de l'hôpital compte tenu d'une grève appréhendée, quand c'est sûr qu'elle va être déclarée; on a besoin d'au moins 24 à 48 heures, compte tenu des éléments que j'ai mentionnés. Vous auriez raison si on avait un hôpital exclusivement de courte durée, qui ferait beaucoup d'admissions électives; on n'aurait pas besoin d'un délai aussi important que celui qu'on vous demande. Compte tenu de la situation actuelle de nos centres hospitaliers, il m'apparaît indispensable qu'un délai d'ajustement - on peut l'appeler ainsi - soit consenti aux hôpitaux. Si vous me donniez 100 % des effectifs, cela changerait notre demande de délai.

M. Chevrette: Mais là, en tenant pour acquis que ce n'est plus un symbole.

M. Brissette: Ce serait symbolique s'ils pouvaient faire cela pendant leur quart d'heure ou en dehors des heures de travail.

M. Chevrette: Que penseriez-vous si on mettait dans la loi un amendement - on dit tous les services réguliers dans les unités de soins intensifs, dans les salles d'urgence - ajoutant les unités de soins coronariens, les unités de soins aux brûlés, les unités de soins intensifs prénataux, les unités d'hémodialyse

et les unités de chimiothérapie et de radiothérapie? Est-ce que cela couvrirait l'ensemble?

M. Brissette: Finalement, il ne reste plus grand centres qui n'auraient pas l'une ou l'autre des spécialités que vous mentionnez.

Dans le fond, on créerait deux groupes de citoyens; l'accessibilité serait différente selon que dans leur localité les établissements n'ont ou n'ont pas les services que vous mentionnez.

M. Chevrette: Prenons l'Hôtel-Dieu de Saint-Jérôme. Est-ce qu'il resterait des départements si on ajoutait cela?

M. Brissette: II n'en resterait pas gros, parce que ceux que vous avez énumérés, on les a.

M. Chevrette: Est-ce que vous avez toutes les spécialités chez vous?

M. Brissette: Oui, à peu près et d'autres s'en viennent.

M. Chevrette: Ah! C'est une bonne nouvelle.

Vous n'avez pas parlé de décentralisation comme telle dans votre exposé. On sait que, dans l'avant-projet de loi, vous négociez nationalement et de façon sous-sectorielle par la suite. Auriez-vous des objections - présentement, dans le projet de loi, la possibilité de négocier sectoriellement tout le secteur des affaires sociales est facultative - à un amendement qui dirait qu'une annexe sur les objets suivants - qu'on énumérerait - ferait l'objet d'une négociation sectorielle, alors que, pour les autres objets, la négociation serait sous-sectorielle?

M. Brissette: M. Nadeau.

M. Nadeau: Je dois vous dire qu'on a déjà eu entre les associations des discussions sur ce sujet. On pense qu'il y a un certain nombre d'éléments qui pourraient se faire au niveau sectoriel, par exemple, le nombre de congés fériés et les avantages sociaux qui sont identiques partout. On gagnerait probablement beaucoup de temps en le faisant globalement. Dans ce cadre, on n'aurait pas d'objection à un amendement qui stipulerait quelque chose dans ce sens.

M. Chevrette: Donc, si on introduisait cette dimension, quitte à consulter formellement sur l'annexe, sur la liste, vous n'auriez pas d'objection à ce qu'on introduise le palier national, le palier sectoriel et le palier sous-sectoriel? D'accord.

Un point, vous parlez du code d'éthique. Que diriez-vous d'une formule qui offrirait une alternative au plafond, mais qui

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serait balisée dans le projet de l o i , de sorte que cette alternative soit sanctionnée par le Conseil des services essentiels? Ce sont les infirmières qui m'ont apporté cette dimension-là. Vous risquez avec un plafond, si on le prend par unité d'accréditation, qu'on le prenne, nous, par département et que cela ne vous place pas dans une situation correcte. On serait prêtes, me disent toujours les infirmières, à vous proposer que cela soit globalement ce que vous exigez comme soins, mais que cela ne corresponde pas nécessairement au plafond de 80 % ou de 90 %. Il n'y aurait pas d'objection dans leur cas à ce que ce soit, cependant, sanctionné par le Conseil des services essentiels. Un genre d'alternative, qu'il y ait une porte d'ouverte à l'intérieur de la loi permettant une alternative sanctionnée par le Conseil des services essentiels. Qu'est-ce que vous penseriez d'une approche du genre?

M. Boutin: Compte tenu de ce qu'on vient de dire concernant le niveau d'accessibilité des soins par rapport aux 80 % ou aux 90 %, il nous est difficile d'imaginer une alternative de cette nature.

Lorsqu'on regarde le code d'éthique, les orientations qu'il y a là-dedans, l'objet même de la grève dans les services de santé ou les services sociaux qui est le corollaire du rapport de forces finalement, il nous paraîtrait extrêmement périlleux de laisser aux instances syndicales ou, en tout cas, à une modalité différente la possibilité qu'on puisse avoir les mêmes résultats que les planchers qui sont déjà prévus dans le projet de l o i . Il faut se dire que, compte tenu des nouvelles obligations extrêmement engageantes que le Conseil des services essentiels obtient avec le projet de loi, il nous apparaît très difficile de lui donner des obligations supplémentaires qui seraient de nature à nous donner les mêmes garanties que celles qu'on a déjà et qui sont des améliorations considérables, encore une fois, dans le projet de loi.

M. Chevrette: Je suppose, M. Boutin, que vous avez une proposition qui est remplie de bon sens et qui correspond à peu près aux 80 %, mais que c'est 78 % dans une unité et 84 % dans l'autre, peu importe;

cela correspond quand même en ce qui regarde les autorités d'un centre hospitalier à une qualité correcte de services, mais cela ne correspondrait pas strictement à l'article de la loi. Si on n'ouvrait pas une telle possibilité, c'est-à-dire qu'on exclurait même la possibilité pour le Conseil des services essentiels de sanctionner une telle possibilité parce qu'il faudrait respecter intégralement le texte de l o i . Si j'aborde ce sujet, c'est qu'on m'a fait brièvement une démonstration j'espère que les infirmiers et les

infirmières pourront témoigner aujourd'hui et expliciter davantage ce qu'ils et elles ont voulu dire - et il m'est apparu qu'il y avait là une porte ouverte assurant, par exemple, une qualité de soins indispensable après entente même possible avec les autorités du centre hospitalier, mais qu'il y aurait eu une légère dérogation à l'article formel de la loi. C'est dans ce sens-là que je soulève le cas et non pas nécessairement pour commencer à dire que le plafond ou le plancher, d'après l'endroit où on se place, doit être une norme inflexible au point que cela pourrait nous placer dans des situations peut-être même incorrectes.

M. Boutin: Quand on fait la lecture du projet de loi, cet article-là nous indique qu'on doit assurer 80 % ou 90 % selon la catégorie de l'établissement par unité syndicale et par corps de travail. La répartition qui peut être faite de ces 80 % ou 90 % dans les différents services est objet de négociation selon la compréhension qu'on en a et ultimement d'une décision syndicale sur laquelle le conseil peut intervenir, réagir et faire des recommandations ou, en tout cas, recevoir des représentations.

Je pense qu'il y a là une marge de manoeuvre pour les instances locales quant à l'application qui serait faite dans chacun des établissements des 80 % ou des 90 % compte tenu du nombre de lits qui resteraient ouverts et des catégories de services à maintenir. Il y a déjà là une base de négociation quant à la répartition qui pourra en être faite dans les différents services, compte tenu que les 80 % ou les 90 % doivent s'appliquer par unité syndicale et par quart de travail. Cela nous apparaît des garanties importantes qui doivent être maintenues.

M. Chevrette: Merci. Une autre question. Vous parlez de décentralisation versus signature de convention locale. Si j ' a i bien compris, c'était au niveau, plutôt, de l'impact que ça peut créer parce que je n'ai pas senti une argumentation qui était très corsée pour dire: Pourquoi signer 900 conventions collectives dans le domaine des affaires sociales si on prévoit dans la loi que le fait d'avoir signé au niveau national constitue une signature d'office qui lie l'ensemble des établissements? Au Tribunal du travail, à ce moment-là, vous avez le dépôt du contrat collectif régissant l'ensemble des établissements de santé.

Est-ce que c'est plutôt symbolique, ce que vous recherchez, ou si vraiment ça a une importance capitale pour vous? Je comprends que, si on parle de négociations ou d'arrangements locaux, il faut nécessairement que ce soit signé localement.

Mais si on parle d'une négociation nationale,

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sectorielle, sous-sectorielle, est-ce que ce n'est pas multiplier les signatures, la paperasse et l'encombrement au ministère du Travail ou si vous avez d'autres motifs plus corsés, en tout cas, pour me convaincre de la nécessité d'une signature locale pour quelque chose qui aurait été agréé à l'échelle nationale et qui lierait de facto l'ensemble des établissements?

M. Boutin: Là-dessus, un des points majeurs qu'on a voulu souligner, c'est plutôt compte tenu des objectifs poursuivis par le projet de loi, entre autres, principalement celui de la décentralisation ou de la réappropriation par les instances locales de leurs conditions de travail ou du contenu de leur convention collective. Autre argument: il arrive parfois qu'il s'écoule plusieurs semaines avant que les instances locales reçoivent les conventions collectives ou les textes administratifs que représentent les conventions collectives avant qu'elles puissent les appliquer localement.

On pense que c'est à la fois, au niveau des délais, intéressant et, au niveau de l'orientation, important que les gens, progressivement, prennent l'habitude de faire de la convention collective leur propre affaire et qu'il puisse y avoir cette modalité prévue. Mais c'est au niveau des objectifs poursuivis par la décentralisation.

M. Chevrette: Qu'est-ce qui arriverait, M. Boutin, si un syndicat local qui est en chicane avec sa centrale refusait de signer ladite convention s'il y a une clause à l'échelon national qui ne lie pas les parties?

M. Boutin: On pense, comme on l'a souligné, que cette signature locale ne doit pas compromettre, entre autres, les avantages financiers qui pourraient être consentis ou convenus à l'occasion d'une entente au niveau provincial. Les instances locales devraient nécessairement appliquer les dispositions, entre autres, financières qui doivent être consenties aux employés.

Dans le passé, ce genre de situation s'est vu dans peu d'établissements, peut-être un ou deux. De toute façon, l'employeur appliquait les nouveaux avantages qui avaient été consentis ou convenus dans le mémoire d'entente provincial.

M. Chevrette: Un dernier commentaire, parce que je sais que mon temps est écoulé, sur l'application de la loi. M. Nadeau a insisté sur l'application de la loi. Qu'on mette un plafond à 80 % ou, dans les CSS et CLSC, à 60 % ou 55 %, à 90 %, ou qu'on enlève le droit de grève, c'est évident que l'application de la loi se retrouve à tous les niveaux. D'ailleurs, on trouve son application, bien souvent, dans le réalisme d'une législation ou dans la façon dont elle

est acceptée globalement. C'est évident que, quand vous avez assisté à des grèves illégales, l'importance de l'application d'une loi trouve tout son sens parce qu'on fait fi de toutes les balises ou de toutes les mesures pour éviter précisément qu'il n'y ait de ces arrêts de travail.

Je comprends que votre interprétation là-dessus, c'est que, quelles que soient les décisions législatives, c'est évident que c'est au niveau des comportements, par la suite, vis-à-vis d'une loi qu'on tire tout le sens de vos propos. Je disais tantôt: Trouver des alternatives, ce n'est pas toujours facile. On peut penser à une foule d'alternatives, nais si, au niveau des mentalités, c'est là que le travail s'effectue, je pense que c'est peut- être la clé de changer les mentalités dans le domaine des affaires sociales et de la santé pour qu'on en arrive à dire: L'utilisation d'un droit de grève n'est que symbolique.

(11 h 15)

M. Nadeau: Antérieurement, dans le processus qu'il y avait, avec tous les inconvénients de ce processus, les centres hospitaliers prenaient une semaine ou deux d'avance, diminuaient leur programme opératoire et on se ramassait avec peut-être 30 % ou 40 % des patients. Évidemment, qu'on enlève le droit de grève ou que l'on mette des plafonds, ce que je voulais vous souligner, c'est que le respect de la loi et le changement des mentalités à ce niveau-là sont drôlement importants parce qu'on se trouve dans la même situation qu'une grève illégale, c'est-à-dire l'hôpital plein et pas de monde pour les soigner, et cela mettrait drôlement en cause la sécurité de ces patients.

C'est ce que je voulais vous souligner, mais c'est bien évident que ce n'est pas la loi comme telle; c'est le respect qu'on pourrait avoir de cette loi. Cela s'applique autant dans le cadre du retrait du droit de grève que des plafonds que vous fixez ou d'une grève illégale dans un centre hospitalier à l'heure actuelle.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je veux m'associer, moi aussi, au groupe de la majorité pour souhaiter la bienvenue et remercier de sa contribution à nos travaux votre association, et saluer cordialement M.

Brissette, M. Nadeau et M. Boutin. J'aurai une question-commentaire à vous formuler et mon collègue, le député de Brome-Missisquoi, M. Paradis, qui est responsable au sein de notre groupe parlementaire des questions relatives au ministère des Affaires sociales, pourra ajouter.

Je dois, tout d'abord, vous remercier d'avoir précisé l'opinion que vous aviez émise il y a quelques mois, lors de votre

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comparution dans le cadre de l'analyse de l'avant-projet, plus particulièrement sur la question du recours à la grève dans le secteur de la santé. On se rappellera que vos propos, exprimés par la voix de M. Nadeau, si ma mémoire est fidèle, avaient été interprétés tout au moins comme voulant dire que l'Association des hôpitaux du Québec était contre l'abolition du droit de grève dans le secteur de la santé, dans le secteur qui vous concerne. Vous pouvez être assurés que cette interprétation allait directement dans le sens que voulait l'entendre le gouvernement du Québec qui, bien qu'il évoque, dans un premier temps, du côté gauche de la bouche, l'obligation de donner une qualité et une quantité de services non diminués aux citoyens et aux citoyennes en contact avec les institutions de santé, malgré les négociations, de l'autre côté de la bouche, dit: Le droit et le recours à la grève doit être utilisé. Vous aviez évoqué à ce moment-là et vous l'avez réitéré ce matin que tout recours à la grève se devait d'être purement et simplement symbolique, mais je conviens, à votre crédit, que vous n'aviez pas voulu aborder le sujet de l'abolition de ce droit.

Vous savez, la fatalité est tellement instaurée dans le système en regard du recours à la grève dans le domaine des affaires sociales qu'encore ce matin on doit consacrer une partie importante de nos travaux à discuter de la façon dont les parties vont s'affronter plutôt qu'à discuter des moyens à prendre pour qu'il y ait moins d'affrontements et de problèmes dans les réseaux. D'ailleurs, cette approche transpire même dans le projet de loi, puisqu'on élabore ici toute une mécanique en vertu de laquelle on pourra établir les paramètres et les règles du jeu permettant aux parties patronales et syndicales de se tirailler bien comme il faut plutôt que de négocier, que ce soit les 80 %, les 90 %, le comité sur les services essentiels, que ce soit, d'autre part, un code d'éthique à gauche, un code d'éthique à droite, etc. Notre position est claire et précise; elle n'est pas, comme le dit le ministre des Affaires sociales, bête. Non.

Elle se veut réaliste et elle évoque une volonté clairement exprimée de la population du Québec de ne plus souffrir des inconvénients et des préjudices comme suite de conflits dans le secteur de la santé au Québec. C'est clair, c'est précis. D'ailleurs, on doit retenir aussi qu'il y a de moins en moins de personnes dans le secteur des affaires sociales qui sont heureuses d'être conviées à des exercices de grève ou de conflit, ou à des moyens de pression comme ceux que vous avez évoqués ce matin.

Nous avons toujours soutenu - le ministre des Affaires sociales devra en prendre bonne note, et lui-même le signalait, d'ailleurs, lorsqu'il est venu en commission

parlementaire - que la très grande majorité des conflits - là, vous pourrez me corriger et en même temps corriger le ministre des Affaires sociales parce qu'on était d'accord - dans le secteur de la santé se réfèrent non pas à des questions de rémunération ou à d'autres comme celle-là, mais davantage à l'organisation du travail, à la tâche, à l'effet des coupures budgétaires, etc. Nous soutenons, quant à nous - mon collègue pourra ajouter - que le retrait du droit de grève dans le domaine de la santé devrait être accompagné d'une révision des politiques budgétaires allant même jusqu'au niveau des établissements. La lecture qu'on fait de la situation qui prévaut actuellement, c'est qu'il faudra, assurément, injecter de l'argent neuf.

Cela est le constat auquel on vient comme suite de la tournée qu'on a effectuée, présidée par notre collègue, M. Paradis.

C'est, d'ailleurs, dans ce sens-là que le chef de notre formation politique s'engageait, hier, à injecter 150 000 000 $ d'argent neuf dans le domaine de la santé.

Vous avez dit: La grève se doit d'être symbolique. Vous dites ensuite, et on y souscrit, que le monde des hôpitaux ne peut subir de rupture de services. C'est interprété par le gouvernement comme étant un changement de position ou d'attitude. Je lui laisse le soin de définir son interprétation, mais je dois vous dire qu'il a été surpris ce matin, il a été très surpris de vous entendre dire cela.

M. Chevrette: On l'a préparé ensemble, imagine-toi donc! Tu es surpris en même temps que nous.

M. Pagé: Essentiellement, vous deman- dez des précisions au ministre et vous dites: Vous devriez définir spécifiquement et précisément ce qui constitue un centre tombant sous le coup des 90 % par rapport aux 80 %. À cet égard, le ministre a posé des questions, par exemple: chimiothérapie, unité des brûlés, etc., mais il ne nous a pas dit ce qu'il en était exactement. J'aimerais bien qu'il profite des dernières minutes pour préciser ses intentions là-dessus.

La question concernant la présence de malades à long terme. Dans la très grande majorité des hôpitaux, on se rappelle la quantification: au début, c'était 10 %, c'est devenu les 20 % du docteur Lazure il y a quelques années. Est-ce qu'un centre hospitalier où des malades à long terme sont hospitalisés tombera sous le coup des 80 % ou des 90 %, ou est-ce que c'est seulement le département? Sur cela, il faut des précisions; je pense que le débat est ouvert et c'est l'endroit privilégié pour donner des précisions de la part du gouvernement.

Ma question est la suivante: Nous en sommes à une analyse avant la deuxième lecture, avant l'adoption du principe de ce

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projet. Êtes-vous d'accord, compte tenu de votre objectif de non-rupture de services aux bénéficiaires, avec les dispositions des 90 % et des 80 % ou si la volonté que vous avez exprimée ce matin, que tout recours à la grève ne soit que symbolique, veut dire que vous vouiez le maintien total, de 100 % des effectifs et, ainsi, l'abolition du droit de grève dans le secteur qui vous concerne et la non-rupture des services?

M. Nadeau: En f a i t , ce qu'on dit aujourd'hui, M. le député de Portneuf, n'est pas différent de ce qu'on a dit la dernière fois.

M. Pagé: Cela a été interprété de façon différente.

M. Nadeau: Cependant, l'interprétation, je pense, a été un peu différente. Je ne vise pas le parti au pouvoir quand je dis cela; je regarde certains médias d'information qui ont interprété, ainsi que d'autres personnes, y compris, peut-être, le gouvernement, l'opinion de l'Association des hôpitaux du Québec. On a eu l'occasion, lors d'une émission de télévision, de préciser ce qu'on voulait dire par cette position. Quant à nous, et je le répète, nous avions dit que nous ne voulions pas, à ce moment-ci, faire de débat sur le droit de grève. On avait dit: Cela, c'est poigner le mouvement syndical aux tripes.

Faisons donc que l'exercice ne soit que symbolique. Quand on parle d'un exercice de droit de grève symbolique, ce n'est pas 80 % ou 90 %; c'est faire comme il se fait dans d'autres pays. Je comprends que ce n'est pas facile à écrire dans une l o i , mais que, par exemple, 5 % des employés dans les centres hospitaliers sortent pendant deux heures un après-midi pour alerter l'opinion publique, je pense que cela est symbolique. Cela va se faire une ou deux heures, quelque chose comme cela. Je ne sais pas comment cela peut s'écrire dans un projet de loi. Qu'on ait 80 % des effectifs pendant un mois, une semaine ou deux semaines, je dis que ce n'est pas symbolique.

M. Pagé: Et vous êtes contre.

M. Nadeau: On admet qu'il y a un pas intéressant qui est f a i t , mais, quant à nous, on irait plus loin dans le cadre du symbole.

On demande qu'il y ait à peu près 100 % des effectifs partout.

M. Pagé: II y a un élément qui est intéressant sur lequel le gouvernement devra se pencher. D'accord, il y a un mécanisme conférant des pouvoirs importants au Conseil des services essentiels, mais ce mécanisme implique quand même délais, lourdeur, etc.

Vous dites: Si jamais on a une grève illégale, compte tenu que la préparation à la grève

appréhendée sera faite en fonction de 80 % ou 90 % des effectifs, cette grève illégale est susceptible de causer plus de préjudices aux bénéficiaires et de mal à l'institution dans son ensemble que toute grève antérieurement vécue puisque vous aviez un délai ou une période pour vous y préparer.

Là-dessus, nous sommes pleinement d'accord que, si le projet de loi demeure tel qu'il est par l'expression de la voix de la majorité, le gouvernement devra se pencher là-dessus.

Cependant, j'aimerais avoir vos commentaires sur la réplique du ministre, car cela m'a semblé très gros. M. le ministre des Affaires sociales disait à peu près ceci - vous me corrigerez au besoin - Si on vous donne un délai de 48 heures, une obligation de divulguer l'intention de la part du syndicat d'au moins 48 heures, il y a un risque que vous fermiez des lits, que vous diminuiez vos opérations et les 80 % ou 90 % risqueront de représenter 100 % de la prestation à donner aux bénéficiaires, compte tenu de leur nombre diminué. Je trouve cela très gros. Cela veut dire que pour le ministre des Affaires sociales, ii faut qu'une grève fasse mal aux bénéficiaires. C'est grossier et c'est très grave, ce que vous avez évoqué ce matin.

M. Nadeau: Ce que je comprends de l'intervention du ministre des Affaires sociales - je ne sais pas si on comprend bien, il pourra nous le préciser - c'est qu'il ne voudrait pas, dans le cadre où il maintient les plafonds de 80 % ou 90 % - on a l'impression qu'il ne les maintiendra pas, s'il les maintenait - qu'on ait en place plus d'effectifs qu'on n'a de patients. S'il vous donne la possibilité de réduire vos effectifs, si vous réduisez vos patients de 40 % et que vous avez 90 % des effectifs, il me semble que cela fait un déséquilibre

des forces.

M. Pagé: C'est comme cela que je l'interprète. Vous aussi?

M. Nadeau: Si on devait s'en aller dans une situation comme celle-là, et il me comprendra, c'est bien évident que la partie syndicale n'accepterait pas une affaire comme celle-là, cela lui donnerait un moyen coup. Afin de ne pas se retrouver dans une situation comme celle-là, qu'on laisse 100 % des effectifs et on n'aura pas de problème comme cela. C'est la solution qu'on lui propose.

D'un autre côté, je pense que, s'il devait maintenir ces plafonds et qu'on parle d'un délai de 24 heures ou de 48 heures pour s'ajuster, c'est pour s'ajuster en fonction des clientèles qu'on a en place. C'est pour ne pas avoir 100 % d'occupation avec 80 % des effectifs. Cela aussi, ce serait insécurisant pour les patients.

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