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La fondation d une science humaine : L Emotique

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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La fondation d’une science humaine : L’Emotique

Introduction

En juillet 1991, à la sortie d’une exposition sur les surréalistes, nous décidons Eliane et moi de créer L’Emotique. Ce nom résulte d’une véritable association d’idées. Nos esprits conjuguent leurs efforts silencieux : cela s’appelle une intuition. Comme elle et moi baignons depuis toujours dans le goût des mots, nous baptisons immédiatement ce que nous venons, elle d’éprouver, moi de découvrir. C’est à cette époque que j’ai commencé à lui parler du plan qui doit présider à toute entreprise sérieuse de la pensée. Je ne sais pas trop quoi faire de cette idée car je n’ai pas une once d’esprit romanesque. Bien que professeur de Lettres, je ne me vois pas écrire un roman, à l‘image de ceux dont j’apprends à mes élèves à décrypter la structure symbolique.

L’idée du plan plane.

Elle se pose sur le plan de la parole quand en 1997, j’entreprends un vaste chantier de la pensée. Son ouverture répond à l’imprévisible qui s’est emparé de ma vie au moment de la mort de ma mère et de la décision que j’ai alors prise de lui survivre.

J’ai toujours aimé penser.

J’ai mis ce goût au service d’une exploration de ce que j’ai nommé dans un de mes livres Le Royaume des Ombres, en écho à la quête que le psychanalyste Bruno Bettelheim traduit, en termes de sciences humaines.

Son ouvrage sur les troubles autistiques La forteresse vide s’ouvre sur ce Royaume des Ombres, celui-là même que visite Orphée dans la mythologie grecque afin de ramener à la lumière du jour sa fiancée Eurydice.

Cette exploration témoigne d’un goût inné pour l’aventure, l’air du large qui fonde la liberté du geste poétique.

Par lui, j’ai fini par m’identifier, cessant de me confondre à l’ombre muette que j’ai rencontré en ces non lieux existentiels, zone de non droit où règne la plus brutale des polices de la pensée.

Toute science procède d’un regard sur ce que le cinéaste Bunuel nomme

« cet obscur objet du désir »

La petite flamme des désirs visite les gouffres qui à chaque pas menacent de nous engloutir. La démarche scientifique aide l’homme qui apprend à marcher, lui trace en quelques sortes le chemin. Ses enseignements l’avertissent des trous noirs qui le perforent de quelques menaces sous jacentes. Ses investigations, en définissant les contours de ces gouffres,

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délimitent ceux du continent humain qui émerge des profondeurs du grand océan des désirs de la vie.

La science tire son humanité de la qualité du regard dont le miroir appréhende les abyssales profondeurs qu’il explore.

Dans ce domaine, règne la plus grande confusion.

Le débat éthique, qui a toujours accompagné la mise en œuvre d’une démarche scientifique, témoigne des périls de l’entreprise.

En son temps l’humaniste Rabelais, nous avertit que « science sans conscience n’est que ruine de l’âme ». Montaigne, son successeur, en vient même à plaider pour « une tête bien faite plutôt que bien pleine. » Toujours les savants ont été à la fois l’objet de la reconnaissance publique et le grand souci de notre humanité.

L’homme se sent mis à mal devant les exigences et les impératifs catégoriques que les sciences formulent en terme de lois plus ou moins fondamentales.

Le regard peine à se départir de l’ombre dont il explore les profondeurs quand l’être met en action et en pensée cette libre volonté de l’homme de se donner les périmètres de sécurité les plus étendus possibles, les mieux peuplés de toutes les beautés de l’existence, les mieux aptes à produire les joies simples de la vie.

Cette confusion entre le reflet que le miroir du regard projette dans le puits sans fond de la connaissance et l’ombre qu’il y appréhende, rend toute démarche scientifique incertaine et périlleuse.

J’ai fait de ce péril et de cette incertitude l’objet d’un savoir humain.

L’objet de ce petit exposé est de définir le caractère scientifique de la démarche qui est mienne depuis toujours.

L’intuition, qui a traversé le ciel de nos pensées en 1991, m’a ouvert la voie poétique comme moyen d’investigation d’une réalité bien réelle. La profondeur, d’où elle émerge, la dérobe au regard. L’objet de cette science se situe très exactement à ce point d’émergence, c’est là où s’articulent l’impondérable qui agit et agite la vie et la volonté libre qui fait de nous des êtres humains.

L’image poétique creuse ce point d’impact d’où jaillissent les sources du langage. Son pouvoir réfléchissant extrait, des zones d’ombre qu’elle explore, les échantillons de la matière vivante dont le langage travaille la substance, ce que l’on pourrait appeler un substantif psychique.

Il s’agira dans un premier temps d’évoquer les « prêts » requis, c'est-à- dire tout le matériel dont j’ai disposé pour élaborer cette découverte de la pensée qui découvre à elle-même ses ressorts les plus intimes.

Puis, j’en viendrai à une brève définition de cette science humaine.

Enfin, j’évoquerai ses possibles champs d’application qui sont les champs d’action de notre association

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I)Les « prêts » requis

Il s’agit d’évoquer ici la nature des connaissances auxquelles j’ai pu avoir accès. Cette liste n’a pas l’ambition d’être exhaustive. Elle ne rendra pas non plus compte du contenu précis dont leur « substantifique moelle » a nourri ma pensée

C’est une sorte de tour d’horizon, un des tours de magie de mon cœur qui, sans faire le tour de la question, promène l’esprit, tout autour.

L’Emotique est une science humaine qui s’appuie sur les acquis de

1) La psychanalyse

Ce n’est pas bien sorcier, il nous faut lire Freud.

Freud est accessible à tout un chacun Ce n’est pas un épigone.

Ses textes ne sont pas commentaires. Ce sont les tenants d’une parole à accomplir. La lecture de Freud ne relève pas d’une prouesse intellectuelle. Elle engage le lecteur dans une action de réflexion. Je l’ai mise en pratique au cours d’une longue analyse.

J’ai joint ainsi le geste à la parole, ce qui est, pour moi, la seule façon d’être en accord avec moi-même.

Je dis souvent que je ne suis pas une intellectuelle.

Cela veut dire que je n’appréhende pas le monde à l’aune des idées.

Mais j’aime les idées et ceux qui les défendent avec conviction.

J’aime les intellectuels qui mettent leur vie et leurs actes en conformité avec leurs pensées.

Les miennes résultent d’un rapport au monde ce qu’il y a de plus concret.

Le Verbe se fait chair dans le geste de vivre.

La pensée formalise ce rapport au monde d’une manière directe, la métaphore s’en fait le médiateur sur le plan de la parole.

L’analyse, dont il a été question, a été le lieu d’une expérimentation.

C’est un cas pratique, bien avant d’être un cas d’école.

Son déroulement a pris la dimension symbolique du geste qui m’inscrit sur la terre.

Ce geste élémentaire, sans fioriture pour ainsi dire, a créé tellement de contre sens sur moi que mon point de vue s’en est trouvé désintégré .Le travail d’analyse a contribué à sa recomposition sur le plan symbolique dont mon Témoignage d’Humanité s’est fait le médiateur.

Pour le reste il n’y aura jamais rien à dire d’autre sur ma vie

Freud aurait bien aimé, je pense, qu’on fasse davantage cas du point de vue existentiel que son travail de réflexion situe sur le plan de la parole où l’incessant remous qui agite les profondeurs de l’être projette les avant-postes du langage

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Freud savait très bien que la science, dont il est l’initiateur, tire son humanité ,non de la mise en examen des cas pathologiques qui lui ont été soumis , mais de celle du point de vue d’où il scrutait les avancées de la pensée.

De Freud, j’ai retenu particulièrement « Le mot d’esprit et sa relation avec l’inconscient ». Le mot d’esprit s’est révélé être un outil particulièrement performant dans l’exploration à laquelle je me suis livrée. Son humour indécidable aère la densité de la réflrxion. Le mot prend son envol. Ses fantaisies témoignent d’une joie créatrice qui éclaire la matière ombreuse d’un cauchemar existentiel dont j’ai fait l’objet d’un savoir humain. J’ai en expertisé les composantes en protégeant mon regard d’une lentille de contact avec la réalité psychique qui en tait l’objet. Freud nomme ce mode de perception le Witz.

D’autres penseurs de la psyché m’ont conduite au sommet de leurs pensées. Il est vrai qu’il faut parfois accepter de les suivre sur des sentiers bien sinueux. Mais, l’un dans l’autre, le parfum poétique qu’exhalent un certain nombre d’entre elles vaut bien qu’on se donne cette peine. Leurs circonvolutions épousent celles que le complexe humain imprime sur le tissu de la vie. L’extrême complication de ces pensées donne donc un aperçu du mystère auxquelles elles nous font accéder, in situ.

J’ai eu aussi accès à l’évocation de cas pratiques.

J’en ai retenu la grande humanité de ces praticiens du langage qui tendent la main aux naufragés de la vie. Ils m’ont aidé à forger la clé d’un savoir dont l’humanité ne fasse aucun doute.

2)La linguistique

En 1990, je me suis lancée dans une aventure intellectuelle qui m’a initiée à cette science du langage. Je n’avais d’elle qu’une idée très approximative, n’ayant suivi que de très loin les études universitaires concernant le sujet.

Il s’agissait de poursuivre ce cursus universitaire, cette fois ci d’une manière rigoureuse et stricte, en vue de passer avec succès le concours de l’agrégation de Lettres Modernes afin d’installer mon potentiel réflexif à un poste d’observation adéquat à la pleine exploitation de ses ressources cognitives, celui de professeur de Lettres en classe de Lycée.

C’est donc par hasard que j’ai appris l’existence de cette science du langage, en apprenant par cœur l’évolution phonétique et sémantique d’une quantité très respectable de mots plus ou moins usuels.

J’ai assimilé cette matière vivante.

J’en ai digéré les principes actifs sans avoir plus de temps que cela à consacrer aux théories dont cette pratique de la langue expérimente les possibles.

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J’ai approché la morphologie de quelques verbes en chair et en os. La syntaxe des phrases m’a fourni l’épure symbolique qui esquisse la structure profonde du langage des hommes.

J’ai ainsi appris à décliner l’étymologie silencieuse de la vie.

La mémoire des mots apprivoise les fantômes de tous ordres qui hantent les mémoires muettes des hommes.

Leur agencement dans la ronde des phrases articule les membres de la phrase existentielle en une ligne mélodique qui joint les cœurs. C’’est ainsi que nous devenons le sujet de nos vies. Nous cessons d’être l’objet fantasmagorique de désirs de toutes natures pour devenir le sujet de l’amour librement consenti.

La racine des mots nous ancre au sol de l’existence.

J’ai été captivée par les mécanismes complexes que met en œuvre l’articulation du moindre phonème. Leur formalisation sur un plan symbolique concourt à l’élaboration d’une physique du langage dont les lois conceptualisent la structure profonde.

L’Emotique se situe en ce point de convergence entre les sciences du langage et celles qui explorent les profondeurs de la psyché. Son caractère expérimental emprunte ses principes actifs aux lois cadres de la pensée.

3) La pensée dialectique et le cartésianisme Ma formation philosophique est des plus modestes.

Quelques notions élémentaires balisent le cheminement de mes pensées et les cadrent par rapport aux principes actifs de la loi commune dont le cartésianisme énonce les préceptes

N’est pas cartésien qui veut.

Je n’ai d’ailleurs jamais eu ce genre de volonté.

Mon cartésianisme résulte de la particularité de mon rapport au monde, direct.

Une telle position existentielle n’est tenable que par un incessant travail de cadrage visant à contenir les courants induits par un tel ancrage dans un réseau de distribution qui en assure une exploitation quasi rationnelle.

Le cartésianisme en offre le modèle symbolique sur le plan de la pensée.

Je n’ai pas de vénération particulière pour Descartes.

Cependant, comme tout le monde, je sais que son « Je pense donc je suis », constitue un excellent repère dans la laborieuse construction d’un point de vue existentiel que constitue toute entreprise sérieuse de l’esprit.

J’ai l’an passé décliné les vertus du Cogito ergo sum dans un exposé dont le chapitre Une Découverte de la pensée (in L’acte d’une Mise au monde) fait le compte rendu.

Le cartésianisme exalté de mon adolescence qui exerçait dans les hautes sphères de la mathématique sa puissance déductive, s’est bien assagi.

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Mon existence l’a mis à l’épreuve des faits.

Il a fait ses preuves.

Son efficacité s’est manifestée quand le mouvement dialectique de ma pensée a fait exploser les cadres institutionnels dans lesquels le fil de la parole tisse la trame des idées et des concepts.

Jusque là, je ne m’étais pas franchement aperçue de la perplexité sous jacente qu’exerçait sur autrui mon état continuellement réflexif. Cela tient, je pense, essentiellement au fait que je réfléchissais en silence. Je ne me rendais nullement compte de cet état car il ne se manifestait pas par des productions particulièrement brillantes, quelque chose qui puisse éblouir le regard des autres, totalement aveugles à la nature de la réflexion que je menais.

A l’époque, l’idée de chercher à convaincre m’était totalement étrangère.

Mes pensées portaient pour seul costume l’opacité dont la profondeur de ma réflexion voilait la transparence de mon regard sur le monde.

J’ai ainsi amassé un matériau conséquent.

Un intense travail réflexif en a fait celui d’un langage dont mon Témoignage d’Humanité abrite le laboratoire .

La pensée dialectique m’a toujours été familière Mon esprit va où le porte le vent de l’existence.

La formalisation de cette pensée est la grande découverte de mon adolescence. J’y ai eu accès par divers biais et particulièrement par le biais d’un militantisme actif et formateur.

La lecture de Marx, Engels, leur référence à Hegel, la découverte plus tard de la magie probatoire du mythe a nourri le mouvement dialectique de ma propre pensée qui l’a conduite aux confins du possible humain.

4)Le matérialisme historique

A la même époque, ma conception se matérialisa en un geste militant. Sa droiture s’inspirait des principes actifs déclinés par le matérialisme historique dont Marx et Engels ont posé les bases théoriques.

L’aspiration secrète au grand rêve d’humanité, dont le poète est le porte - parole, prit corps et mon âme toute entière.

La parole est action.

La pensée, mouvement qui inscrit l’être dans son rapport au monde.

L’histoire venait de faire irruption sur l’écran de ma conscience où l’éprouvant documentaire sur les camps de concentration d’Alain Resnais projetait l’image d’un anéantissement.

J’en pressentais tous les vertiges dans le geste quotidien de ma vie.

Nuits et brouillards sur cette humanité dont ma conscience découvrait les violences et les soudaines surdités !

« Ce n’est pas la conscience qui détermine l’existence, mais, en dernière analyse, l’existence qui détermine la conscience ».

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La conclusion de L’idéologie allemande remettait, selon Marx, la dialectique hégélienne sur ses pieds.

Ce brutal renversement de situation opérait sa révolution sur le terrain de l’histoire, là où vivent les hommes et où prennent corps idées et conceptions.

Cette période militante a contribué à mettre ma pensée à l’épreuve des faits. J’ai continué dans la même voie quand mon poste d’enseignante s’est fait celui d’une d’observation de toute la condition humaine. J’ai toujours vécu cette observation comme mise en œuvre du grand rêve d’un partage humain.

Le matérialisme historique alimente les courants de la pensée d’une matière première qu’élabore le cours de l’Histoire

Pour Marx cette matière est l’existence elle-même.

J‘ai fait de ma propre existence matière à réflexion.

Cette réflexion reformule en termes dialectiques le rapport entre conscience et existence, rapport que le caractère polémique du texte marxiste désarticule, au profit de la vigueur de l’expression.

Je dois pourtant à se grandes orientations d’avoir pu inscrire mon geste sur la terre des hommes.

5) Le bagage minimal en matière scientifique nécessaire à l’obtention du baccalauréat C à la fin des années 70.

J’ai expérimenté ma pensée à l’aune du savoir dont l’institution scolaire nous fournit les bases élémentaires.

J’ai acquis ces bases comme le reste, par pure réflexion.

Durant les cours, les matières dites scientifiques projetaient sur le miroir de mon regard leur essence substantielle.

Les équations mathématiques y imprimaient les signes d’un langage à conquérir. C’était exaltant et d’une remarquable abstraction.

Cette initiation à la fonction symbolique du langage donnait corps au cartésianisme spontané de ma conscience évolutive. Elle m’a aidé depuis à évaluer les termes de la loi qui nous fait être au monde en un rapport conflictuel et dynamique.

Les modèles symboliques, dont l’esprit mathématique est le champion convaincu, appréhendent la réalité de ce mouvement dialectique dans le cadre d’une Loi qui permet sa formalisation sur le plan du langage . Ce qui échappe à l’entendement humain prend ainsi forme.

Du degré d’abstraction où les mathématiques situent le point de vue, les gouffres qui nous menacent deviennent des puits de connaissance.

Quant aux sciences physiques, elles projetaient sur le miroir de mon regard la matière plastique du monde d’une manière tellement directe que ma réflexion personnelle s’y engluait, absorbant, sans filtre protecteur cette substantifique moelle.

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Les rudiments de ces lois élémentaires m’ont permis de décliner, sur le registre d’un langage humain,celles qui cadrent la découverte de la pensée dont mon Témoignage d’Humanité a élaboré un modèle expérimental.

C’est dire si je prends au sérieux mon métier d’enseignante.

Je sais, que la conscience qui s’éveille à elle-même enregistre toutes les données qui lui permettront d’inscrire l’équation existentielle dans l’ordre du symbolique.

C’est ce partage que j’ai mis en œuvre durant tout mon parcours de professeur de Lettres qui enseigne aux élèves qui me sont confiés les vertus réflexives du langage des hommes.

Par eux. Pour moi Et réciproquement.

6)L’immense savoir humain que véhicule la littérature de tous les pays et de tous genres.

Mon métier d’enseignante a enrichi mes lectures personnelles des points de vue multiples qui se forgent dans l’examen collectif des textes littéraires. L’espace pédagogique se peuple de propos sous jacents, témoignant d’une entente de la littérature qui va bien au-delà des mots.

Mon métier m’a révélé le savoir humain dont la littérature est le véhicule.

Son pouvoir médiateur révèle à chacun d’entre nous les vérités profondes auxquelles il accède dans le partage humain qu’est la lecture d’un livre.

J’ai toujours enseigné les « classiques » avec la même conviction. Cela ne m’ennuie pas.

Cette inscription de soi sur le grand livre de l’humanité me paraît ancrer le point de vue de chacun dans ce qu’il y a de plus solide, de plus sain et de plus efficace dans la pensée humaine.

Hamlet autant que L’homme au sable d’Hofmann sont des amis selon mon cœur. La spiritualité dont leurs auteurs les anime éclaire la mienne d’une lueur ontologique.

Mon Témoignage d’Humanité leur rend hommage, ainsi qu’aux poètes qui m’ont toujours accompagnée.

D’eux il est bien difficile de dire quelque chose car l’indicible est la respiration secrète de leurs phrases.

J’ai appris d’eux que l’innommable terreur de la vie inscrit au cœur de la parole ses accents les plus beaux. Ils m’ont donné la foi en cette parole qu’aucune religion ne m’a jamais enseignée.

A El Desdichado, un des plus purs d’entre eux, revient l’étonnant privilège d’avoir témoigné de sa descente aux enfers, sans qu’il soit question d’autre chose que de l’amour humain. Gérard de Nerval relate cette étrange expérience par laquelle il ouvre « les portes d’ivoire et de corne qui nous sépare du monde sensible. » Son récit Aurélia est un

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bouleversant témoignage humain. La mise à nu de soi prend les accents poétiques d’un chant d’amour dont les mâchoires de la mort ont désarticulé le texte. A l’époque , au dix neuvième siècle, on appelait cela folie et Gérard de Nerval réfugiait sa douleur dans l’asile tenu par le docteur Blanche, psychiatre émérite d’une certain nombre des célébrités littéraires de l’époque.

J’ai parcouru le texte de ces destinées sans jamais me départir de la parole de mon cœur que la littérature m’a appris à conjuguer dans l’ordre du temps humain.

7) De quelques rudiments en matière de sciences économiques auxquels m’initie ma fréquentation des étudiants en BTS du lycée Ozenne et des professeurs qui les forment en vue de leur insertion dans le monde de l’entreprise.

Ma non intégration au monde de l’entreprise a été, pour moi, pendant longtemps une question de survie.

J’envisage maintenant les choses avec plus de sérénité.

Ma volonté d’entreprendre est forte et vivace.

La fondation de cette association laisse à toute initiative privée le loisir de s’y développer dans le cadre des principes communs qui nous y ont réunis.

Son bon fonctionnement orchestre son action selon les procédures en cours dans le monde actuel vers lequel je me tourne pour partager les conclusions de la découverte de la pensée dont j’ai posé les fondements il y a huit ans de cela.

La tempête qui a accompagné cette mise au monde s’étant calmée, ces conclusions deviennent audibles.

A tout un chacun.

Il s’agit d’inscrire cette action dans les processus éditoriaux et autres qui, ici et maintenant, effectue le partage humain de ce qui nous unit.

Un modèle expérimental de la pensée

1)Une démarche expérimentale

La composante analytique de mon Témoignage d’humanité met en œuvre ce modèle expérimental de la pensée.

Mon travail de création, d’analyse et de réflexion se conduit dans le cadre structurel que m’a fourni le plan d’ensemble qui a présidé à la naissance de mon Témoignage .Ce plan d’ensemble a d’emblée réparti la matière première d’un langage en cours de mise en forme, en treize « livres .».Ces treize unités de base stockent la matière en fusion qu’est la substance

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psychique qu’élabore le travail de la pensée. Ce sont les treize ateliers d’un laboratoire où le tâtonnement aveugle de la démarche scientifique émet les hypothèses que la réflexion convertit en lois fondamentales. Ces hypothèses prennent, dans l’ensemble de mon témoignage, la forme de grandes images dont le travail de l’écriture explore les possibles.

Mon cartésianisme soucieux et bon enfant n’a cessé de perfectionner ce réseau de distribution des matériaux fournis par un parcours existentiel des plus sidérants.

Ce travail de structuration permet une prise en compte absolue de toutes les données élémentaires constituantes de la découverte de la pensée.

Je n’ai rien laissé de côté de ce que le travail réflexif a projeté sur la page blanche du silence inouï qui a été si longtemps le seul lieu possible de ma vie

Les treize images fondatrices, qui nomment les treize unités de base de mon Témoignage, ont affleuré à ma conscience dès le début de l’entreprise. De ce fait, elles en ont formulé les desseins généraux que le travail de l’écriture a ensuite développés et approfondis

Ces treize images sont des axiomes de base : ils tracent le schéma d’ensemble de fils conducteurs de la pensée que traversent incessants les courants des désirs de la vie.

Ce réseau de distribution alimente les champs de la connaissance dont il fertilise les zones les plus arides. Sa mise en fonction m’a conduite aux confins du possible humain.

Les lois fondamentales, que l’Emotique élabore sur le plan symbolique du langage, résultent du constant travail de structuration issu de la dynamique de la pensée qui inscrit le point de vue de l’être dans son rapport au monde.

C’est ainsi que l’existence des treize axiomes de base, loin d’enfermer l’esprit dans le carcan de la logique formelle, a permis le plein exercice du mouvement dialectique d’une pensée en voie de constitution.

La fabrication d’un certain nombre d’objets symboliques traduit ce mouvement dialectique dont la prise en compte absolue occasionne tant de vertiges au point de vue humain.

La démarche expérimentale s’est ainsi appuyée sur la rampe des phrases. La dialectique des désirs trouve dans le kaléidoscope de la mémoire une brillante représentation symbolique mise en œuvre par les mains artistes de ma sœur Eliane et précédée d’un éblouissant « Eclairage » rédigé mes soins.

La lanterne magique du cœur offre la représentation symbolique du modèle expérimental de la pensée que constitue l’ensemble de mon Témoignage d’Humanité

2) Une science du langage :les sciences comme langage L’Emotique s’intéresse aux sciences comme langage.

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J’ai ingéré une quantité respectable de langage scientifique, ce qui a bien enrichi mon vocabulaire qualifié de pauvre par ma mère qui, enfant, apprenait par cœur le dictionnaire en gardant le modeste troupeau de vaches familial.

Elle m’a donné le goût des mots.

Mon appétit de vivre m’a conduite à exercer ce goût afin de satisfaire une curiosité sans borne.

L’objet de cette curiosité échappe au regard enfant de l’humanité.

C’est pourtant dans l’enfance que naissent les plus hautes vocations.

« Cet obscur objet du désir », qui est l’objet même de la science, se dérobe à la conscience qui n’a pas encore conscience d’elle-même.

Les tâtonnements de la démarche scientifique éprouvent ces dérobades comme autant d’hypothèses. Leur formulation conduit de la crypte des mots, où reposent les bribes du pré- texte de l’existence, au souverain langage, qui nous met au monde comme sujet de la phrase de notre vie.

C’est ainsi que ce que nous ne comprenons pas prend le visage de la loi.

L’indéchiffrable mystère, dont le silence des mots est porteur, prend valeur d’énigme. Cette conversion est la clé qui ouvre les portes du langage.

Tant que nous baignons dans le mystère du monde sans l’ombre d’un souci, nous n’avons pas besoin d’apprendre à parler.

C’est quand nos premiers pas trébuchent que nous nous saisissons de la rampe des phrases dont les dieux tutélaires de l’enfance des cœurs polissent l’ébène silencieuse.

Les sources du langage émanent de ce grand silence.

Les sciences en explorent la consistance ; elles établissent sa formule sur le plan symbolique où les coordonnées du point de vue humain donnent la mesure de la conversion de ce silence en énergie. Il s’agit là du principe actif de la vie.

Cette formulation symbolique constitue un corpus de lois

Le langage est acte de séparation qui fait du mystère premier dans lequel nous baignons l’objet d’un savoir intime. En nommant les choses, nous cessons de nous confondre au reflet qu’elles décalquent sur le miroir de notre regard.

La démarche scientifique s’inscrit dans cet apprentissage du langage qui nous fait aimer ce dont nous nous séparons.

La curiosité, qui anime l’esprit dans ses grandes entreprises, manifeste un mouvement contradictoire qui nous aimante vers ce dont nous nous éloignons en le prenant pour objet de notre regard.

La tension qui en résulte réalise son énergie muette par la mise en œuvre de la différence de potentiel qui inscrit l’être dans son rapport à autrui.

C’est pourquoi en nommant les choses, le scientifique réalise le désir dont l’obscur objet échappe au regard de l’amour

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Et c’est heureusement. Car nous ne pourrions goûter aux joies simples de l’existence si toujours le miroir du regard de l’amour projetait son reflet sur le miroir aveugle de celui de la mort dont les rayons foudroient toute tentative d’évasion des périmètres de sécurité que s’impose l’esprit enfin que survivent les raisons de la vie.

Mon Témoignage d’Humanité résulte d’une aventure intellectuelle qui fait du langage une découverte à partager.

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3)Le substantif psychique

L’Emotique formalise les processus psychiques qui se manifestent dans l’élaboration du langage et dans les déficiences dont il est le lieu commun.

Un des ouvrages de mon Témoignage intitulé L’Ophtalmologue de mes rêves se présente comme une encyclopédie vivante du langage.

Ce dictionnaire raisonné recueille les concepts qui rendent compte des processus à l’œuvre dans le cours de son élaboration, dans le cadre d’une structure qui, elle, témoigne, de la vitalité de ces processus, en les définissant comme résultantes d’un rapport à l’autre.

Cet ouvrage opère ainsi un mode de représentation de la pensée.

Le substantif psychique qualifie le mode opératoire de la pensée.

L’impalpable énergie, qui anime les membres de son corps constitué , constitue son coeur nucléaire, le Verbe qui s’incarne en un magma fusionnel d’images conceptuelles.

Cette énergie psychique, qui nous propulse dans la vie, prend forme dans le développement de la phrase existentielle dont l’être apprend à devenir le sujet consentant à sa propre définition

Le livre 6 de mon Témoignage, intitulé le Cœur du Livre, emmagasine le magma fusionnel d’images qui se projettent sur un tableau que j’ai nommé, en référence au peintre italien Giorgio De Chirico, Le Tableau de l’Enigme. Ce livre offre un mode de composition de la pensée. Le regard appréhende, sur le plan du tableau, l’image du monde qu’il a enregistrée sur un film dont le travail de l’esprit assure le montage dans le cours de l’élaboration de la pensée.

L’ouvrage établit la formule de la substance psychique que le travail du rêve projette aux avants poste du langage sous la forme de signes énigmatiques dont rendent compte les images qui composent ce tableau scriptural.

Le langage pictural du peintre belge René Magritte traduit cette énigmatique composition, dont l’obscur objet du désir définit les modalités, en termes de structures symboliques.

L’image se fait signe.

Le sujet de la phrase existentielle inscrit le substantif psychique dans l’ordre du symbolique qui lui donne la forme d’une parole à accomplir.

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4)La structure profonde du langage, pour une géométrie de l’inconscient Le travail de la pensée exhume la structure profonde du langage des catacombes où la refoulent les courants des désirs régressifs.

C’est un des effets secondaires de cette analyse que d’avoir mis au jour la nature de ce qui exerce son totalitarisme sur le terrain des relations humaines, séparant ceux qui s’aiment et conduisant aux pires catastrophes de l’humanité. La troisième partie de cet exposé reviendra sur les possibles applications d’une telle mise au jour.

La science donne toute la dimension de son humanité quand elle offre un modèle expérimental qui permet à tout un chacun de prendre la mesure de lui-même et de son inscription dans l’engrenage qui conduit aux pires des exclusions.

Les courants des désirs régressifs mettent en œuvre les rouages de haute précision qui se conjuguent dans le tissu des relations humaines et les mécanismes de l’extermination de masse et plus quotidiennement de toutes sortes d’exclusion.

La démarche scientifique appréhende toute la complexité du tableau dont le nœud du complexe humain imprime les motifs.

De ce point de vue, chacun peut témoigner de son humanité dont la mise en examen ne soit pas procès verbal, mais libre examen de conscience.

La démarche analytique concourt à une telle mise au jour des processus à l’œuvre dans l’épreuve existentielle que j’ai traversée sous la forme d’un procès qui a été fait à ma vie.

Etrange procès où rien ne se dit, où les preuves qui accablent l’existence la contredisent formellement.

Procès purement fantasmagorique qui m’a conduite jusqu’à ces catacombes de l’oubli où le tribunal du cœur juge des plaintes que la souffrance d’être divulgue sur le sol de l’existence.

Le travail de réflexion sur les preuves qui m’accablaient, dans le cadre d’une analyse rigoureusement menée, a creusé si profond les sous sols de l’existence qu’il a mis au jour la structure profonde du langage, instrument de mesure de la pertinence de mon Témoignage.

C’est d’elle dont il est question dans l’élaboration de cette science humaine dont je viens de définir brièvement les principes fondateurs

Les champs d’application de l’Emotique

Une science valide les acquis de la pensée dont ses principes fondamentaux sont porteurs en les mettant en pratique sur les territoires de notre humanité.

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Je ne peux bien évidement pas connaître le devenir du modèle expérimental que j’ai élaboré dans les laboratoires du langage qu’abrite mon Témoignage d’Humanité.

Les conditions de son élaboration me conduisent à ouvrir queluqes perspectives dans les domaines suivants.

1)Le domaine thérapeutique

L’ouvrage intitulé Le langage des Maux témoigne de l’extrême souffrance où m’a conduite l’indicible qui a traversé ma vie au tout début de mon adolescence, quand les crues imprévisibles d’une terrible dépression ont ravagé le sol de l’existence de ma mère.

Cet indicible relève d’un impensable. Il ne pouvait tout simplement pas me venir à l’esprit que je souffrais de quoi que ce soit.

Heureuse de vivre, curieuse et pleine d’appétit, jamais je n’aurais songé à me plaindre.

Un mal invisible rongeait ma vie. Mais je ne le savais pas.

Je ne me suis jamais pensée en souffrance.

Ce sont mes désirs qui l’étaient.

Quand le cours de ma vie a débordé sur le sol de mes jours après la mort de ma mère, je n’avais toujours rien à dire de cette souffrance qui parlait à ma place.

Il m’a été plus que pénible de devoir en répondre, pressée de m’en expliquer par toutes les polices de la pensée qui se sont alors mobilisées sous les formes les plus diverses et les plus désarçonnantes.

Je suis devenue un objet purement fantasmagorique.

Le silence dans lequel je vivais s’est fait écran blanc sur lequel autrui projetait le texte de ses mécomptes dont il me faisait ainsi l’interprète involontaire.

Cela s’appelle grosso modo une rumeur.

On n’est pas l’objet d’une rumeur pour rien.

Cela ne veut en aucune manière dire qu’en la matière il n’y a pas de fumée sans feu..

Quelque chose en moi se taisait qui, au fil des ans, a laissé le champ libre à un terrible déni d’humanité.

J’étais occupée à y réfléchir.

Car c’est, en toute liberté, que le cartésianisme de mes pensées et l’intime conviction d’un haut mystère à conquérir m’a conduite, à l’âge de l’adolescence, à emprunter la voie réflexive.

Ce choix m’a permis de garder mon intégrité et de témoigner de l’humanité dont la souffrance d’être exprime le mystère.

J’ai pour cela visité d’incroyables régions, des zones de non droit où j’ai croisé les silhouettes désarticulées des naufragés de l’existence.

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Au Royaume des Ombres, j’ai entendu le cri strident de l’inaudible souffrance d’un double muet .Les penseurs de la psyché ont nommé autisme cette mystérieuse présence au monde, totalement hantée, qui réfugie la forme élémentaire d’une existence dans une forteresse vide dont Bruno Bettelheim a visité les silences abyssaux. Ces êtres sans parole touchent à ce qu’il y a de plus intime dans les désirs de l’être, de plus indicible dans ses aspirations secrètes. Et c’est désolation de les laisser seuls avec le terrible secret d’amour et de mort qui hante leur vie et propage son écho sur tous nos territoires. Car c’est le lieu commun de l’humanité que de boire aux sources du langage celle de ce secret qui nous identifie.

Le visage de l’amour qui m’a toujours veillée m’a permis de le convertir en parole poétique et en termes d’énigme existentielle.

Nul ne peut envisager ce qu’est un être sans parole.

Lui donner son amour, c’est lui donner la vie.

L’autisme est la forme extrême d’une souffrance dont toute l’humanité porte une part, part d’un mystère dont j’ai exploré les possibles.

Le caractère autiste de la souffrance d’être le décline en symptômes qui inverse les signes du désir.

C’est pourquoi le versant en prose du Langage des maux, s’intitule Maladie, mal à dire.

Les souffrances de l’être ne se partagent pas.

Le geste thérapeutique se doit de lever le masque de la compassion qui boursoufle le visage de l’amour.

Compatir aux souffrances d’autrui est une chose bien naturelle.

Notre humanité se blesse aux pointes aigues qui brisent le miroir du regard de celui qui n’a pas appris à conjuguer, sur un plan symbolique, le potentiel humain de l’énergie aveugle qui nous met au monde.

La compassion tente de convertir cette blessure en un geste humain.

Mais il est bien difficile de faire la part des choses.

Le geste humain qui tente d’apaiser la souffrance d’autrui peut se retourner comme une gifle. Son insistance persécute l’innocence harcelée par une prière dont la compassion véhicule l’urgence. Il n’y a plus alors aucun autre moyen que de se réfugier dans les forteresses vides du silence de la grande solitude humaine.

Le modèle expérimental appréhende la souffrance psychique d’un point de vue analytique.

L’analyse est regard.

La réflexion explore les profondeurs de la pensée, l’analyse met au jour les échantillons de la matière première par le travail de réflexion extrait des grottes préhistoriques de la vie

Le travail d’analyse expertise ces échantillons. Il établit la formule de ses composantes en termes de lois fondamentales. Ces lois proposent un

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mode d’approche des réalités psychiques dont résulte la souffrance du même nom.

Celle-ci reste au regard de la société et de ceux qui la soulagent au quotidien, une forme bien mystérieuse de la souffrance d’être.

Ce qui se dit dans les troubles mentaux, moraux et psychologiques, dans les symptômes des maladies plus ou moins répertoriées, restent ici lettres mortes.

La bonne volonté humaine se trouve démunie devant cet indicible qui prend forme en une impensable souffrance.

C’est une conquête de l’esprit humain que d’y avoir pensé .

2) Le domaine socio- politique

Mon insertion dans la réalité ambiante m’a toujours encline au geste militant.

Très pacifique de nature, j’ai mis en œuvre le rêve d’une concorde humaine d’une manière toujours très déterminée.

L’expérience existentielle, dont ma vie a été le théâtre, a testé la nature de cet engagement militant.

En la matière, je n’ai pas d’idées préconçues. Ma position est tout aussi expérimentale que dans les autres domaines. Elle s’appuie sur les « prêts » requis décrits dans la première partie de cet exposé enrichis du savoir humain que mon contact permanent avec les autres m’a permis d’acquérir.

Mon métier d’enseignante est devenu au fil des ans un poste d’observation de la condition humaine et particulièrement des relations tissées par les fils des destins qui se croisent dans ce microcosme social qu’est l’espace pédagogique.

Le travail d’analyse sur ma propre condition fait de cette observation un témoignage et non une performance d’entomologiste.

En termes d’analyse, les ouvrages concernant Mon métier d’enseignante fournissent un certain nombre de relevés conclusifs de cette observation pratique sur le plan pédagogique.

Le livre intitulé J’ai conjugué le Verbe être sur tous les modes de la solitude manifeste une démarche d’ordre réflexif. Cette réflexion expérimente sur le terrain des relations humaines dans leur ensemble le modèle de la pensée élaboré dans tout mon Témoignage d’Humanité.

Les tragédies de l’histoire et les catastrophes individuelles mettent brutalement sur le devant de la scène ce avec quoi chacun s’accommode, comme il le peut, dans le quotidien de l’existence.

Le mal n’est pas absolu, il résulte d’un rapport de l’être au monde. Les conditions de la mise en œuvre de l’extermination de masse relèvent de l’ensemble du complexe humain. Celui-ci décline toute la gamme des sentiments qui colore les relations humaines d’imprenables reflets.

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Les ravages, que toutes les perversions de l’existence produisent sur les territoires de l’humanité, sont un produit des circonstances : chacun joue sa partition dans les rituels fantasmagoriques qui s’accomplissent dans tous les processus d’exclusion et de persécution.

Aussi privé soit le théâtre sur lequel se joue cette partition, c’est l’ensemble du complexe humain qui se manifeste en une orchestration dont le chef n’est autre qu’une loi sans visage à laquelle chacun sacrifie ce qu’il a de plus cher.

Ces mécanismes délicats impriment sur la chair de la pensée le fer rouge des tatouages, provoquant démissions tragiques, mutismes crispés, suicides et autres manifestations d’un intolérable dont rien ne peut se dire.

Plus communément, cela empoisonne les relations vampirisées par les lèvres obscures de toutes les perversions de la vie.

On ne peut guérir l’humanité du mal qui n’est que la manifestation des désirs mortifères sur le sol de l’existence.

La mort délègue ses pouvoirs à cette loi totalitaire qui prononce ses arrêtés d’expulsion et ses interdits.

L’amour nous apprend à composer ses termes dans l’alphabet des cœurs.

Si l’on ne peut songer à entrer en guerre contre la mort, on peut veiller à l’équité de la parole de chacun dans le quotidien de la vie.

Il est des signes clairs que l’on peut apprendre à regarder.

Ce n’est pas acte de justice, mais simple geste humain.

La connaissance de soi et d’autrui contribue à trouver un point d’équilibre d’où toute action sociale ou politique prenne sa juste mesure.

L’autre acquis de cette mise en œuvre du modèle expérimental de la pensée dans le quotidien de l’existence s’appuie sur l’examen du rapport entre la loi et la liberté individuelle.

Ce rapport témoigne de ce qu’il y a de plus intime à chacun.

Quand il devient rapport de force, l’humanité est en danger.

Une action politique sérieuse fait de cette question la pierre angulaire de toute conception programmatique.

Le rapport entre la loi et le désir n’a cessé d’alimenter ma réflexion sur mon métier d’enseignante qui est au carrefour de cette dialectique problématique.

Il n’y a pas contradiction entre la loi et le désir, l’ordre et la liberté, l’imaginaire et la raison Il y a entre eux un rapport humain.

C’est à cette humanité que l’on doit constamment veiller.

Le domaine politique, qui est celui de la loi, se peuple de petites sentinelles attentives au respect constitutionnel de la liberté individuelle On appelle citoyens ces figures de proue de notre humanité.

3) Le domaine artistique

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Les sciences sont au service de l’art.

En matière de création artistique, la liberté ne saurait faire question.

La démarche scientifique met en œuvre l’énergie potentielle des désirs de la vie. La formulation en terme de lois conceptuelles des relevés conclusifs auxquels parvient le tâtonnement aveugle de la pensée, s’accompagne d’une joie qui est signe d’accomplissement d’un désir.

C’est un vrai plaisir. La concordance entre l’ordre du symbolique et celui des désirs produit une pleine satisfaction. La liberté d’entreprendre se trouve en conformité avec la loi humaine.

La conception d’ensemble qui guide la démarche scientifique se traduit en termes de lois fondamentales.

L‘artiste comme le savant travaille sur l’humain.

Sa liberté d’entreprendre s’appuie aussi sur une conception d’ensemble qui produit l’œuvre d’art.

Celle-ci résulte de concepts, plus ou moins formulés.

Le caractère intuitif de la création artistique ne saurait faire question.

La formulation des concepts, qui s’incarnent dans l’œuvre d’art, développe la dynamique créatrice en l’inscrivant sur le plan symbolique du langage, c'est-à-dire un plan où puisse se concrétiser l’échange créatif.

A la base de la conception d’ensemble de mon Témoignage d’Humanité, il y a la conviction absolue que la création inscrit l’être dans son rapport au monde. Le geste de l’artiste est geste humain qui dialogue avec le monde. Autrui n’est pas le simple récepteur de l’œuvre.

L’œuvre d’art résulte d’une co-production.

La lecture d’un livre, la visite d’une exposition de peinture réalise l’entente d’une parole dont l’œuvre concentre le potentiel.

Ce potentiel témoigne de l’effervescent contact de l’artiste et du monde qui lui donne naissance.

La particularité de mon Témoignage d’Humanité est d’avoir mis cette conception en oeuvre de manière radicale.

Elle a donné naissance à la collaboration régulière avec ma sœur Eliane, son mari et prend aujourd’hui sa forme accomplie avec la création de notre association.

Si j’en suis la Présidente, ce n’est bien évidemment pas par goût du pouvoir.

Je souhaite seulement aider à ce que la loi soit au service de notre humanité, de notre liberté d’entreprendre et de créer.

L’acquis, dont témoigne la fondation de l’Emotique comme science, nous aidera à mener à bien nos projets dans le respect de la liberté de chacun, dans l’entente de la parole dont notre association offre la cadre législatif.

Des projets, il y a en déjà un certain nombre dans mon laboratoire du langage qui ouvre ses portes pour accueillir les vôtres

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Conclusion.

Dire que je suis fière d’avoir mené mon entreprise jusqu’ici ne prend pas l’exacte mesure de ce que je ressens.

La fondation de l’Emotique comme science ne relève pas d’un plan prémédité ; c’est là où la vie m’a menée.

Ce dont je peux être fière, c’est de n’avoir jamais dérogé aux principes de mon cœur et à ma foi absolue dans l’amour.

C’est cette foi qui valide l’humanité de cette science dont la mise en œuvre apportera, je l’espère, quelque chose à ceux que j’aime, quelque chose de grand, quelque chose de beau, que je ne connais pas encore.

C’est ce dont je serais totalement satisfaite.

A Vous Toulouse, Mai 2005

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