J
OURNAL DE
T
HÉORIE DES
N
OMBRES DE
B
ORDEAUX
M
ICHEL
W
ALDSCHMIDT
Valeurs zêta multiples. Une introduction
Journal de Théorie des Nombres de Bordeaux, tome
12, n
o2 (2000),
p. 581-595
<http://www.numdam.org/item?id=JTNB_2000__12_2_581_0>
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Valeurs
zêta
multiples.
Une introduction
par MICHEL WALDSCHMIDT À Jacques Martinet, pour ses 60 ans
RÉSUMÉ. Soit s =
(s1, ... , sk)
unk-uplet
d’entierspositifs
aveck~ 1. Pour s1 ~ 2, la série
converge et sa somme est notée
03B6(s).
Dans le cas k = 1 ils’agit
simplement
des valeurs de la fonction zêta de Riemann aux entierspositifs. Quelles
relationsalgébriques
existent entre ces nombres? Leproduit 03B6(s’)03B6(s")
de deux valeurs de fonctions zêtamultiples
est une combinaison linéaire
de 03B6(s),
comme on le voitfacile-ment en
multipliant
les séries : c’est leproduit
demélange
lié aux séries. D’autre part une autre expression pour le nombre03B6(s)
est donnée par uneintégrale
itérée(intégrale
deChen);
cela fournit une autre relationquadratique
exprimant de nouveau leproduit
03B6(s’)03B6(s")
comme une combinaison linéaire c’estle
produit
demélange
lié auxintégrales.
On conjecture que ces deuxproduits
demélange
suffisent à décrire toutes les relationsalgébriques
entre les nombres03B6(s) .
Se pose alors leproblème
d’étudier
l’algèbre engendrée
par desgénérateurs
(les
multizêtasymboliques)
indexés par les et définie par lesrela-tions données par ces deux
produits
demélange;
on obtient ainsil’algèbre
MZV, dontÉcalle
est en train de déterminer la structure.Pour définir des séries
génératrices
permettant de coder simul-tanément tous les multizêtasymboliques
il convient d’inclure less correspondant à des séries
divergentes
(avec
s1 =1).
Nousmen-tionnons enfin brièvement
quelques
résultats del’équipe
de Petitot sur lespolylogarithmes,
et encoreplus
brièvementplusieurs
sujets connexes.ABSTRACT. For positive integers s1,..., sk with s1 ~ 2, the series
nk~sk
this is
nothing
else than the value of the Riemann zeta functionat the point s1. What are the
algebraic
relations between thesenumbers? these numbers? The
product of two multiple
zeta valuesis again a
multiple
zeta value: this iseasily
checkedby
multiplying
the two series, and using a "shuffie"product.
Anexample
is03B6(2)03B6(3) = 03B6(2,3)
+03B6(3,2)
+03B6(5),
There are other
quadratic
relations between these numbers, which arise from anotherexpression
of03B6(s) = 03B6(s1 , ... , sk)
as a(Chen)
iterated
integral:
03B6(s) =
~0394p
03C9~1 03C9~p(tp),
with the
following
notation: p = s1 + the sequence(~1, ... ,
of elements in{0, 1}
is definedby writing
the wordx1= x~p
on the
alphabet X
={x0, x1},
the differential forms03C9~ are defined
by
03C90 (t)
et03C91(t)
=and
0394p
is thefollowing
simplex
in RP:=
{t
~ 1 > t1> >0}.
Again
thisyields
an expression of theproduct
of twomultiple
zetavalues as a linear combination of
multiple
zetavalues,
asimple
example being
03B6(2)03B6(3)= 03B6(2,3)
+303B6(3,2)
+603B6(4, 1).
The main conjecture is that these two types of relations are
suffi-cient to describe all
algebraic
relations between these numbers.This
subject
hasdeep
connections with many othermathemat-ical topics: combinatoric
(the
theory
ofquasisymmetric functions,
Radford’s Theorem andLyndon
words),
Lie andHopf algebras,
Écalle’s
theory
of resurgent series, Goncharov’s work on mixed Tate motives onSpecZ, polylogarithms, monodromy
ofdifferen-tial equations, the fundamental group of the
projective
line minus three points andBelyi’s Theorem,
the absolute Galois group ofQ,
the group ofGrothendieck-Teichmüller,
knotstheory
and Vassilievinvariants,
K-theory, Feynman
diagrams
and quantum fieldthe-ory,
quasi-triangular quasi-Hopf
algebras
and Drinfeld’s associator03A6KZ
(related
to the connexion ofKnizhnik-Zamolodchikov).
1. Le
produit
demélange
lié aux sériesest celle
utilisée,
parexemple,
par M.Hoffman,
tandis que D.Zagier
etA.B. Goncharov utilisent l’ordre
opposé
1 nl ... nk.Pour s et s’ entiers >
2,
leproduit
s’écrit
(formule
deréflexion)
Plus
généralement,
soient s = et s’- ( s i ,
... , s ~, )
deux suitesfinies de nombres entiers > 1 avec 2 2. Le
produit
de~(s)
par ~ ( s’ )
est la somme pour les a =(cri,... ah)
obtenus parmélange
àpartir
de s et s’ de la manière suivante : oninsère,
dans la suite S =(si, ... , ,Sk)
de même que dans la suite s’ =(s’,
s’ ~ ~ ),
des 0(y
compris
éventuellement avant lepremier
etaprès
le dernierterme)
de tellesorte
qu’on
obtienne deux suites de mêmelongueur
sans avoir deux 0 demême
indice,
et on définit a =(cri,... ah)
comme la somme(termes
àtermes)
des deux suites ainsi obtenues. Parexemple pour k
= I~’ = 1 ontrouve trois
possibilités
pour a :La relation de
mélange
liée aux séries s’écrit alorsoù a décrit les suites
(~1, ... , ah) (h > 1)
ainsi obtenues àpartir
de s et s’ .L’indice h décrit l’intervalle +
1~’J.
Voici une autre
description (équivalente)
de ceproduit
demélange.
Onconsidère les mots construits sur
l’alphabet
à deux lettres X =fxo,
À
chaque
entier strictementpositif s
on associe lemot ys
=xg-lxl,
et àchaque
suite finie s =(Si,
Sk) (avec
1~ >1)
formée d’entiersstricte-ment
positifs
on associe le mot xs = Ainsixs est une suite de
xo et de xi, le nombre k de facteurs xi est la
profondeur
( depth,
encoreappelée longueur)
du mot xs(ou
du multi-indices),
tandis que le nombrep =
Si -~- - - ~ + Sk de lettres en est le
poids
(weight).
Ondésigne
par X*l’ensemble de tous les mots en xo, x1, et par
Q(X)
l’anneau despolynômes
en deux variables non commutativesxo, XI à
coefficients rationnels(ce
sontles combinaisons linéaires de mots à coefficients
rationnels).
Les motsX*xl.
Les motsconvergents
sont, outre le motvide,
ceux dexox*xl, qui
commencent par xo et terminent par xl, c’est-à-dire ceux
qui
s’écrivent xsavec s =
(SI,... ,
Sk) et
2;
pour un tel mot w on pose
«w) = ~(s~.
Pour k = 0 la suite s =
0
est codéepar le mot vide que nous noterons e. Il
est commode de convenir que
«0)
=~(e)
= 1.On
prolonge
par linéarité la définition de~(w)
auxpolynômes
conver-gents,
qui
sont les éléments w deQ(X)
s’écrivant comme combinaisonslinéaires
(à
coefficientsrationnels)
de mots de l’ensembleOn définit
(par
récurrence sur lalongueur)
une loi associative etcom-mutative * sur l’ensemble
X*xl
de la manière suivante : on a d’abordpour tout w dans
-X*.ri,
etensuite,
pour s et t entiers strictementpositifs,
w et w’ dansX*xl,
On vérifie
alors,
avec les notationsprécédentes,
ce
qui
signifie
que les relations demélange
introduites ci-dessuss’écrivent,
pour w et w’ dans
xox*xl,
Ce
produit
demélange
est lié à la théorie des fonctions"quasi-symétriques" .
Soit t ={tl, t2, ... ~
unalphabet
commutatif infini. On considèrel’algèbre
Q[[t]]
des séries formelles en ces variables. Une sérieF(t)
~ Q[[~]]
estquasi-symétrique
si pour tout =(sl, ... ,
le coefhcient dansF(t)
detout
tsk
avecil
> ... >ik
nedépend
pas du multi-indice’Il 2 j
(il, ... ,
ik) .
Leproduit
de deux sériesquasi-symétriques
est encorequasi-symétrique.
À
chaque
mot w = on associe la sériequasi-symétrique
Pour tous w et w’ dans
X * xl
on aSi w est un mot
convergent
alors~(w)
est la valeur deFw(t)
quand
on2. Le
produit
demélange
lié auxintégrales
Un autre
codage
des mots deX*xl
va nous être utile.À
toute suites =
(sl, ... , Sk)
d’entiers strictementpositifs
depoids
p =SI +... on
associe la suite
(El,
... , d’éléments de{O, 11
définie parOn introduit les deux formes différentielles
On
désigne
parAp
lesimplexe
suivant de RP :Proposition
1.Si,
deplus,
2,
alorsOn vérifie facilement cette relation en
développant
1 / ( 1 - t)
en sérieentière à
l’origine.
On
peut
écrirel’intégrale
intervenant dans l’énoncé de laproposition
comme une
intégrale
itérée(ou
intégrale
deChen)
définie de la manièresuivante.
Soient ~pl, ... , cpn des formes différentielles sur R. On définit par
récur-rence
-
-avec, pour n
= 1,
Ainsi
" ’-’ 11
On
peut
aussi définir lesintégrales de
Chen en introduisant d’abord leproduit
(associatif
et noncommutatif) a #
{3
de deux formes différentiellesa et
{3 :
où
La
proposition
précédente
s’écrit ainsi :quand s
=(SI, ... ,
Sk)
estconver-gent
(si
>2),
on aoù,
pour s entier > 1,
on aposé
De cette
proposition
on va déduire la relation demélange
liée auxintégrales.
On définit
(par
récurrence sur lepoids
p)
unproduit
Lu encoreappelé
intercalement oubattage)
sur X* de la manière suivante :et
ensuite, pour i et j
dans (0, 1) ,
u et v dansX * ,
(on
notera ici l’absence du termediagonal
qui apparaissait
dans la loi * duproduit
demélange
lié auxséries).
On vérifie alors que les relationssont satisfaites pour tout w et w’ dans
xox*xl.
Pour cela ondécompose
le
produit
cartésienAp
xAp,
de deuxsimplexes
en réuniondisjointe
(aux
bords
près)
de(p
-fp’)!/p!p’!
simplexes.
Ces relations
(2)
permettent
d’exprimer
leproduit
oÙ s
a pourpoids
p et s’ pourpoids
p’,
comme une combinaison linéaire à coefficientsentiers
positifs
de valeurs~(s").
La somme des coefficients est(p+p’)!/p!p’L
Par
exemple
del’égalité
on déduit
Quand
on combine cette relation avec celle dumélange
liée aux sériesqui
donne
on obtient
On étend par linéarité Lu à
l’algèbre
despolynômes
non commutatifsQ(X) ,
cequi
donne unealgèbre
commutative et associativeSl Q(X).
La structurede cette
algèbre
est décrite par le Théorème deRadford :
c’estl’algèbre
despolynômes
sur l’ensemble L des "mots deLyndon" :
Un mot de
Lyndon
est un mot non vide dans X*qui
est inférieur à touspart
xo et ils commencent tous par xo et terminent par x 1 : ce sontdonc des mots
convergents.
3. Les
algèbres
MZVNous nous sommes restreints
jusqu’à
présent
aux motsconvergents w
Exox*xl.
Si on désire éviter d’étendre la définition de((w)
à ilconvient alors de remarquer que pour w dans on
peut
écrireXIWW - xi * w comme combinaison linéaire de mots
convergents.
Encom-binant
(formellement)
les deux relations demélange,
on déduit alorsUn
exemple
de telle relation(connue
d’Euler, qui
en connaissait d’ailleursbeaucoup
d’autres!)
estque l’on déduit de
(3)
enprenant w
=xoxl :
On introduit des
symboles
(multizêta symboliques) Ze(s)
pourchaque s
=(sl, ... ,
s~), pour k >
0 et si entierspositifs.
On définit aussiZe(w)
pourtout w dans
X*xl
parZe(x,)
=Ze(s).
Unsymbole
Ze(s)
est ditconvergent
si 2 ou k = 0 : ce sont les
Ze(w)
pour w dans sans oublierZe(e)
=Ze(0).
On considère d’abord
MZVc,,nv
zêta values"convergentes)
comme étant
l’algèbre
commutativesur Q
définie par lesgénérateurs
con-vergents
Ze(s)
et les relationsquadratiques
standard, qui
sont celles que l’on déduit de(1), (2)
et(3)
enremplaçant
~(w)
parZe(w) :
pour w et w’ dans
xoX * x 1,
pour w et w’ dans
pour tout w E
On
dispose
donc d’unmorphisme
naturel despécialisation
de cettealgèbre
dans
C, qui
envoieZe(s)
sur«,~).
Laconjecture principale
est :Conjecture Diophantienne.
Lemorphisme
del’algèbre
MZVconv
dans Cqui
envoieZe(s)
surÇ(s)
estinjectif.
En d’autres termes toutes les relations de
dépendance algébrique
entreles nombres
(C~), ~
=(sl, ... , sk),
2,
1(2 j k)
proviennent
(conjecturalement)
des relationsquadratiques
fournies par les deuxproduits
de
mélange.
On va maintenant inclure
parmi
lesgénérateurs
lessymboles
Ze(s)
avecDefinition. L’algèbre
MZV*(resp.
MZV~’ )
estl’algèbre
(sur
Q,
pourfixer les
idées)
commutative définie par lesgénérateurs
Ze(s),
où 8 décrit l’ensemble de toutes les suites finies(sl, ... ,
(avec k >
0)
d’entierspositifs,
et la loi *(resp.
Lu)
définie parpour tout w E
X*xl.
Chacune de ces deux
algèbres
contient lasous-algèbre correspondante,
notéeMZV*
etMZV’
respectivement,
obtenue en neprenant
commegénérateurs
que lesZe(s)
avecsi 2::
2.L’algèbre
MZV,,,,nv
est à la foisquotient
deMZV* nv
par les relations(2’)
et(3’),
et deMZV
par les relations(1’)
et(3’).
On aimerait bien étendre le
morphisme
despécialisation,
qui
est définisur
MZVco,,
à chacune des deuxalgèbres
MZV* et MZV’. Ce n’est paspossible
simultanément pour lasimple
raison suivante : commeon a
mais
~(2) _
ir2/6
n’est pas nul! Onpeut
cependant
le faireséparément
pour chacune des deux lois. On vérifie en effet que chacune des deuxalgèbres
MZV* et MZV’ est constituée des
polynômes
enZe(l)
à coefficients dansla
sous-algèbre
convergente
correspondante :
Par
conséquent
pourchaque 0
EC,
et pour chacune des deux lois * et u~, il existe une manièreunique
dedéfinir,
pour toute famille finie s =(sl, ... ,
d’entiers >1,
la valeurrégularisée
(resp
("9,’ (s»
de telle sorte que(a)
Pour k = 1 et s = 1 on ait(b)
Pour tout w et w’ dansX*xl,
on ait(c)
Pour tout sconvergent
on aitOn
peut
choisir parexemple
pour 0
la constante d’Euler(que
nous désigne-rons par~),
maisÉcalle
préfère prendre 0
= 0.Comme on l’a vu, on a alors
Plus
généralement,
en notant la suite(1,...
,1)
codéepar xl
(bien
entendu la suite delongueur
nulle1(0)
=0
est codée par le mot videe),
on atandis que
Cette dernière
formule, qu’il
est intéressant de comparer avec ledéveloppe-ment pour la fonction Gamma d’Euler :
se
déduit
des relations de Newton concernant les fonctionssymétriques :
en
posant, pour s >
0,
on a dans
Q[[L]]
Revenons à la
conjecture
diophantienne.
Pourqu’elle
permette
effective-ment de décrire
conjecturalement
toutes les relations entre les valeurs de fonctions zêtamultiples,
il faut encore savoir décrireMZVconv-
Les travauxrécents
d’Écalle
vont dans ce sens(voir §
4).
Goncharov
conjecture
quel’algèbre
MZVconv
est duale del’algèbre
en-veloppante
d’unealgèbre
de Lieengendrée
par desgénérateurs
p2, ~p3, ~P5,... , cp2n+1, ... , avec les seules relations
(cp2, V2n+ll
= 0 pour tout n > 1.L’énoncé
suivant,
conjecturé
parZagier,
Drinfeld,
Kontsevich etGon-charov,
décrit la dimensiondp
du sous-Z-module deMZVconv engendré
parles
2~-2
élémentsZe(s)
avec s =(sl, ... ,
depoids
p et si > 2 :
Conjecture.
On adi
=0, d2 = d3
=d4 =
1 etdp = dp-2
+dp-3
pourp>4.
Pour
chaque
p >
0,
définissonsZp
comme leQ-espace
vectorielengendré
par les
Ze(s)
avec s(convergent)
depoids
p etZo
=Q.
Alors la sommedes
~p
(p >
0)
estdirecte,
et la dernièreconjecture
s’énonce de manièreéquivalente :
-4. Fonctions Génératrices
Quand
ondispose
des((w)
pour tous les w E et pas seulementpour les mots
convergents,
onpeut
les insérer tous simultanément dans des sériesgénératrices.
Pour montrer que
l’algèbre
MZvconv
est librementengendrée
par unesous-famille
d’irréductibles,
Écalle
introduit des fonctionsgénératrices
qui
possèdent
ungrand
nombre desymétries.
Ainsi,
pourchaque
entier k =0,1, ... ,
il définitSi on sommait formellement en
remplaçant
Ze(s)
parÇ(s)
(même
pourSI =
1,
bienque la série définissant
(C~) diverge),
enpermutant
lessignes
de sommation on
trouverait,
à laplace
deZig(vl, ... , vk),
la sérieLa série
Zig
est donc un substitut pour cette dernière sériedivergente.
Noter que
pour k
= 1 unerégularisation
de la série estDéfinissons aussi des
Wa(s)
liés auxZe(s)
par la relationdans le cas
convergent
si > 1 et par une relationanalogue
mais un peuplus
compliquée
dans le casdivergent
sl =1,
puis
associons auxWa(s)
lasérie
génératrice
Les familles
Ze(s)
etWa(s)
sont desexemples
de "moules" au sensd’Écalle.
Un anneau
(commutatif)
étantdonné,
un moule est ladonnée,
pourchaque
suite
finie s
=(si, ... ,
Sk)
delongueur
arbitraire k >0,
d’un élément Mé decet anneau. Un tel moule est noté M’ .
A 1~
= 0correspond
L’addition(A
+B)s
:= As -f- Bs de l’anneau. Lamultiplication
de deux moules estdéfinie de la manière suivante :
où
Dans la
première
somme, s’s" est la suite obtenue par concaténation desi et s".
Une troisième
opération
sur les moules est utile : lacomposition
où
et
I~I [
désigne
lepoids
p =sl + - ... de s.
Multiplication
etcomposition
sontassociatives,
non commutatives.Sur ces
objets
Écalle
définit sixtypes
desymétrie :
partant
de deuxsuites s’ et s" il introduit trois ensembles
~"),
s"), Shi(s’, s").
Le
premier
est obtenu par lemélange
des deuxsuites,
pour le second onajoute
les termes obtenus en contractant deux termes"adjacents"
(voir
lesexemples
ci-dessous),
et pour le troisième au lieu de lesajouter
on fait unedifférence
symétrique.
Quand
la somme des Mi pour les s dans cet ensembleSha(s’, s"),
She(s’, ~")
ouShi(,î, 2)
estégale
à on dit que le moule estsymétral, symétrel
ousymétril
respectivement.
Si la sommecorrespondante
est
nulle,
alors le moule estalternal,
altemel ou alternil. Parexemple
unmoule
symétral
satisfaitet
pour un moule
symétrel
on aet
et
Le moule Wa* est
symétral,
tandis que Ze* estsymétrel
et que la sérieZig
définit un moule
symétril.
Parexemple
les formules de réflexionse traduisent par
Pour
rigidifier
la situationÉcalle
considèreaussi,
pour ... , racinesde
l’unité,
cequ’il appelle
les multizêta modulésoù,
pour a racine del’unité,
on aposé
Ces nombres
( z)
apparaissent
déjà
chez Nielsen en1904,
et aussiplus
récemment dans des travaux de A.B. Goncharov concernant les motifs de
Tate mixtes sur
SpecZ.
Écalle
introduit alors les bimoules(moules
indexés par des suitesdou-bles),
surlesquels
il définit de nouvellesopérations
swap, rec, neg etpush,
à
partir
dequoi
il construit unealgèbre
de LieARI,
munie desous-algèbres
ARIM, ARITH,
ARITHM etARITHMÉ,
le groupe de Lie GARI(et
sonsous-groupe de Lie
GARITHMÉ),
avec descorrespondances
EXP et LOGentre ARI et GARI. L’introduction de ces
objets
parÉcalle
a pour butd’établir que les multizêta
symboliques
Ze(s)
sont librementengendrés
parune sous-famille d’irréductibles
canoniques,
et de décrire unedécomposition
explicite programmable
des multizêtasymboliques
en ces irréductibles. Parexemple
les irréductiblescanoniques
d’Écalle
depoids Ç
10 ne sont autres queainsi que deux éléments
qui
coïncident avecZe(6,2)
etZe(8, 2)
modulo les5.
Polylogarithmes
Le
polylogarithme classique
Lis(z), pour sentier 2
1 etIzi
1,
estPlus
généralement,
lesfonctions polylogarithmes
sontdéfinies,
pour s =(s1, ... ,
s~)
avec si entiers >1,
parqui
convergepour Izl
1.Si,
deplus,
2,
alors la série etl’intégrale
convergent
absolument sur tout ledisque
unité1,
et on aOn écrit encore
Liz"(z)
=Lis(z)
quand
s est codé par le mot w EX*xl :
quand w
= La condition Ep - 1garantit
laconvergence de
l’intégrale.
L’exemple
leplus simple
avec 1~ =1, SI
=1,
x =xl est
Pour tout w E on a
ce
qui
s’écrit aussiAfin de définir une série
génératrice,
il faut encore étendre la définition deméthode de
régularisation
desintégrales divergentes
consiste àintégrer
àpartir
de 1 au lieu de 0quand
l’intégrale diverge.
Ainsi on poseet
plus généralement,
pour s > 1,
L’intégrale
qui
sert d’intermédiaire est bien définie pour z réel dans l’inter-valle 0 z1,
mais celapermet
de définirLiw
(z)
pour tout w E X* etzEe B
avecpour tout
(u,
v)
dans(X*)Z.
En revanche les relations demélange
liées auxséries ne s’étendent pas aux
polylogarithmes
en une variable.La série
génératrice
est la solution de
l’équation
différentielledéterminée par la condition initiale
Grâce à l’étude de la monodromie de cette
équation différentielle,
Petitotet ses
collègues
montrent que les fonctionsLiw,
pour w décrivantX*,
sontlinéairement
indépendantes
sur C.Il en résulte que tout
polylogarithme
Li~, s’exprime
de manièreunique
commepolynôme
à coefficients rationnels en despolylogarithmes
codés par des mots deLyndon.
Enparticulier pour k
= 1 lespolylogarithmes
classiques
Lis, s
entier >1, qui
sont codés par les mots deLyndon
xg-lxl,
sont
algébriquement indépendants.
6.
Sujets
connexesNous n’avons fait
qu’effleurer
lesujet.
Lesquelques
références ci-dessousdéveloppent
d’autresaspects
de laquestion.
L’algèbre
MZVc,,, a
aussides liens très intéressants avec le groupe fondamental de la droite
pro-jective privée
de troispoints
et le théorème deBelyi,
le groupe de Ga-lois absolu deQ,
le groupe deGrothendieck-Teichmüller,
lescatégories
monoïdalestressées,
la théorie des noeuds(invariants
deVassiliev),
laK-théorie,
lesdiagrammes
deFeynman
et la théoriequantique
deschamps,
la renormalisation enphysique,
lesquasi-algèbres
deHopf
quasi-triangulaires
et l’associateur
(lié
à la connexion deKnizhnik-Zamolodchikov)
de Drinfeld.Un groupe de travail consacré à ce thème se réunit à l’Institut Henri
Poincaré
depuis
un an. Le texte ci-dessus est un condensé dequelques
exposés
qui
y ont été donnés par PierreCartier,
JeanÉcalle,
Michel Petitot.Quand
ils sontoriginaux,
les résultatsprésentés
ici leur sont tous dus.Bibliographie
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Michel WALDSCHMIDT
Université P. et M. Curie (Paris VI)
Institut de Mathématiques CNRS UMR 7586
Théorie des Nombres Case 247
175, rue du Chevaleret 75013 Paris
France