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La part des usagers dans la formation aux métiers de services: les apports de la perspective interactionnelle

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La part des usagers dans la formation aux métiers de services: les apports de la perspective interactionnelle

FILLIETTAZ, Laurent

FILLIETTAZ, Laurent. La part des usagers dans la formation aux métiers de services: les apports de la perspective interactionnelle. In: I. Vinatier, L. Filliettaz & M. Laforest. L'analyse des interactions dans le travail. Outil de formation professionnelle et de recherche . Dijon : Editions Raison et Passions, 2018. p. 150-182

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:108754

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1 / 1

(2)

Lo port des usogers dons lo formolion qux méliers de services: les opports de lo perspeclive

inlerociionnelle

Lourenl

Filliettoz

l. Métiers de services el modélisolion des interoclions tuloroles

La

littérature récente

portant sur les

rapports entre langage, travail et formation n'a que peu thématisé la question de la part des

(

usagers >> dans la formation aux métiers de services. Certes, dans

les

champs

de la sociologie et de la linguistique du

travail, d' abondants travaux empiriques soulignent l' importance croissante des métiers de services dans le contexte de la nouvelle économie et d'une société dite de l'information et de la connaissance (Borzeix

&

Fraenkel, 2001

;

Boutet, 2008), mais sans pour autant s'intéresser aux enjeux de formation.

La

didactique professionnelle

pour

sa

part n'a

pas

non

plus manqué de s'intéresser aux professions dites de << services >> et plus généralement

à

<

I'analyse d'activités qui

s'accomplissent avec d'autres humains > (Pastré, Mayen

&

Vergnaud,2006). Ce faisant,

elle interroge avec une acuité

croissante

les conditions

de transposition

de

son appareillage théorique

et

conceptuel au-delà des métiers industriels et agricoles qui ont servi, à

I'origine,

à son élaboration. Pastré (201

l),

dans son ouvrage de synthèse, relève à ce propos que la prise en compte des activités de services a conduit

à un intérêt accru de la didactique professionnelle pour le langage et les médiations symboliques. Pour sa part, 1l reconnaît

trois

traits spécifiques aux activités de services

: a)

elles relèvent

d'une

co-

activité et

requièrent

de

repenser

la

< situation )>

comme

une catégorie englobante

qui

intègre au minimum deux interlocuteurs,

b) elles présentent un caractère dynamique et

évoluent

indépendamment de I'action de I'interlocuteur sur lequel on focalise l'analyse,

c)

elles présentent

un

caractère < discrétionnaire >>, au sens

elles produisent une obligation de résultats sans certitude des moyens permettant de les obtenir.

Pourtant,

si la

didactique professionnelle

a

clairement intégré

les métiers dits de

services

au périmètre de son

domaine de recherche et d'intervention, force est de constater

qu'il

est un objet d'investigation dans lequel la < figure de I'usager

)

a encore été peu explorée, en I'occurrence celui des interactions dites de tutelle. On assiste en effet depuis quelques années à un regain d'intérêt de la didactique professionnelle comme d'autres courants de recherche pour I'activité des tuteurs et les interactions de tuteller. Ces travaux ont permis de cerner quelques-unes des spécificités des activités de

tutelle et en

premier

lieu leur

caractère organisé

et distinct

des pratiques d'enseignement (Savoyant, 1995). Pourtant,

on

pourra

relever que le périmètre empirique de ces travaux reste encore ffès majoritairement dominé par les professions techniques, artisanales

et

agricoles,

et surtout que les

< modélisations

>

proposées de

l'activité

tutorale reposent sur une

vision

fortement duelle

de

la

relation

entre << novices

) et

<( experts >>. Les pratiques d'étayage décrites par Mayen (2002) et par Chrétien (2014) dans le domaine agricole ou par Kunégel (2011) dans

le

domaine de

la

mécanique automobile permettent de repérer des formats à la fois récurrents et dynamiques de la relation tutorale en situation de travail. Mais cette relation reste conceptualisée comme un rapport binaire entre deux agents. On néglige

ici

de considérer que cette relation porte parfois

sur

des usagers,

qui

constituent eux-mêmes

des

agents

et

des partenaires de l' interaction.

Dans ce contexte ce chapitre s'intéresse à l'étude de situations de formation dans

et par le travail,

dans lesquelles

le travail

ne consiste pas seulement en une transformation matérielle du monde

extérieur mais en l'établissement d'une relation avec

des

(( usagers >>.

La

présence des usagers dans

le

périmètre du travail constitue une contingence particulière qui ne manque pas d'exercer

I voir notamment Balslev, Filliettaz, ciavaldini-cartaul & vinatier (2015), le numéro 206 de Education Permanente,

le

numéro

l4l

de Emploi &

Formation, ou encore les numéros 83 et 84 de Recherche & Formation-

150 151

(3)

des influences notables

sur l'activité. Elle

requiert

un

< travail relationnel >> et interactionnel avec l'usager, en parallèle aux enjeux

de

formation

qui

caractérisent classiquement

la

relation tutorale elle-même (Rémery

& Markaki,2016). A

ce

titre,

elle procède de ce

qu'on

pourrait désigner comme une relation

(

au carré r>, une relation portant sur une relation (Filliettaz, 2015). Mais la présence des usagers dans

le

périmètre du travail peut constituer aussi une opportunité pour la formation, dès lors qu'elle agit sur les situations et plus spécifiquement sur les conditions dans lesquelles les tuteurs médiatisent

la

rencontre des novices avec les réalités

du

travail.

C'est ce

que

notre

démarche souhaite explorer,

en

décrivant de manière minutieuse les effets que peuvent produire sur la formation

les

situations de

travail qui

portent sur des acteurs humains, des

(

usagers >>, dans

des relations dites de

services.

Pour le

dire autrement,

il

s'agira donc

ici

de remettre les << usagers >> à leur juste place, c'est-à-dire celle de partenaires des interactions tutorales et non plus seulement de destinataires d'un service.

Pour ce faire, deux corpus empiriques présentant des similarités dans leurs conditions de recueil seront examinés. Ceux-ci portent respectivement

sur deux formes

contrastées

de relations

de services

: la

relation de soin

qui

s'établit entre des techniciens en radiologie médicale

et leurs

patients

; la relation

éducative qui

s'établit entre des

éducateurs

et des enfants

fréquentant des

institutions

de la petite

enfance.

A partir d'une

documentation vidéoethnographique d' interactions tutorales prenant place entre des stagiaires, des tuteurs

et

des usagers,

les

analyses proposées ont pour

objectif

de questionner les effets formatifs des interventions

des

usagers

dans les

interactions tutorales.

Nous

étudions en particulier leurs effets sur les savoirs

mis

en circulation dans les

situations

rencontrées

d'une part, et sur les conditions

de

participation des stagiaires aux activités de travail d'autre part. La première

partie du chapitre explicite le

cadre théorique

de

la démarche adoptée

ainsi

que les conditions méthodologiques dans lesquelles

la

recherche

a

été menée.

La

deuxième partie propose

deux

études

de

cas, issues respectivement

de

chacun des deux corpus empiriques considérés.

Elle

montre

à l'aide d'extraits

de

transcriptions comment les interventions des

usagers,

respectivement des patients

et

des enfants, peuvent exercer une

influence sur

le

potentiel d'apprentissage des situations de travail que rencontrent lès stagiaires. Ènfin, la dernière partie explicite les conséquences

d'un

changement de regard sur

le rôle

des usagers dans lês interactions tutorales et esquisse des propositions visant à concevoir des formes d'aménagement des situations de

travail

à même de soutenir ce potentiel d'apprentissage'

2. l'inlerqclion comme perspeciive lhéorique el méthodologique

La

démarche

de

recherche adoptée

ici s'inscrit

dans une

perspective interactionnelle en analyse du travail (Filliettaz,

2014;

pltti"tt-, de

Saint-Georges

& Duc, 2008). si la

didactique

professionnelle peut être définie comme < l'analyse du travail pour

iu

formation

> (pasffé, 20ll), la

perspective interactionnelle contribue

à

préciser

les

conditions dans lesquelles l'analyse du

travail peut être réalisée, notamment dans ses

dimensions

langagièie, communicationnelle et plus

généralement interactionnelle. C'est une composante

à la fois

constitutive et

significative de bon nombre d'activités de travail

comme

d' expériences de formation.

Àdopter un point de vue

interactionnel

s*r les

activités de

travail it de formation, c'est considérer que les

processus

d'interaction

constituent

pour les

chercheurs comme

pour

les praticiens à

la fois

des objets et des méthodes d'analyse. Ce sont à'abord des objets en tant

qu'ils

constituent un domaine de réalité

qui

médiatise l'accomplissement

des activités de travall et

de

formation.

Et ce

sont des méthodes

au

sens

où ils

peuvent être

considérés comme des moyens par lesquels les acteurs comme les chercheurs produisent une compréhension locale de ces activités dans

les .onditiotrt

dans lesquelles elles sont accomplies.

De

ce

point

de vue, les interactions tutorales

ne

sont pas appréhendées

.o-tn"

une réalité abstraite

et

décontextualisée, mais comme un

<< accomplissement pratique >>, rendu manifeste

par

les conditions

dans lesquelles

il

est réalisé par les participants

Sur lè plan théorique, adopter un point de vue interactionnel sur les pratiquàs professionnelles accompagnées revient à assumer trois por^totutr.

Le premier postulat théorique

reconnaît

la

relation

152 153

(4)

indexicale

qui s'établit

entre

les

comportements observables des membres

d'un groupe et les conditions à la fois

pratiques, matérielles, historiques et sociales dans lesquelles ils sont accomplis

et

interprétés.

En continuité avec une

perspective d'inspiration ethnométhodologique

(Garfinkel, 2007), ces

comportements n'acquièrent

leur

caractère ordonné

et signifiant que dans

les conditions dans lesquelles

ils

sont accomplis. Le deuxième postulat théorique reconnaît

le

caractère conjointement

construit et

co- élaboré des réalités impliquées dans

les

interactions. Dans une perspective inspirée de I'analyse conversationnelle (Sacks, 1992), la

signification et l'ordre des actions situées

s'établissent conjointement, étape par étape et dans un processus permanent de négociation entre les partenaires de l'interaction. cette signification n'est pas donnée a

priori ;

elle n'est pas non plus

le fait

d,actions isolées et appréhendées individuellement. Elle résulte d'une logique d'enchainement séquentiel et d'interdépendance entre les tours de

parole (Schegloff,

2007

; Traverso, 2016). Enfin, le

troisième postulat théorique reconnaît

le

caractère à la

fois

langagier et plus généralement multimodal des processus par lesquels se co-construit

et se négocie la signification en actes des

comportements interactionnels.

En

continuité avec les approches multimodales en analyse

du

discours

et

de

l'interaction

(Kress, Jewitt, Ogborn,

&

Tsatsarelis,

2001

; Goodwin,

2000

; Mondada, 2017),

ces significations

sont

fondées

d'une part sur une large

palette de ressources issues

de

systèmes sémiotiques

variés (la parole,

la prosodie, les gestes, les postures corporelles, les objets matériels, les pratiques scripturales etc.) et d'autre part sur des combinaisons et des formes d'articulation entre ces ressources.

En cohérence et en continuité avec ces principes théoriques, la démarche de recherche en analyse interactionnelle se fonde sur une documentation

de

pratiques tutorales authentiques recueillies en contexte nafurel, au moyen de traces audio-vidéographiques. Dans le cas présent, les enregistrements vidéo ont été effectués dans deux contextes professionnels distincts

: le champ de la

radiologie médicale en

milieu

hospitalier; et celui de l'éducation de la petite enfance en contexte institutionnel. Indépendamment des spécificités

qui

contrastent

fortement dans les conditions dans

lesquelles

s'exercent ces deux métiers, il existe des

convergences

significatives entre

les

champs

de la radiologie

médicale

et

de

l'éducation de l'enfance. Les formations des

techniciens en radiologie médicale (TRM) et des éducatrices de l'enfance (EDE), même

si

elles ne relèvent pas du même niveau de reconnaissance dans le système éducatif suisse, sont proposées sur le régime d'une alternance

qui

combine

des

périodes

de

stage

et des

périodes d'enseignement. L'expérience de

travail

en situation de stage fait

l'objet d'un

accompagnement

par un praticien

formateur

ou

un référent professionnel. Mais surtout le travail des TRM, tout comme

celui

des

EDE,

porte

sur

des êtres humains (respectivement des patients

et

des enfants)

et implique

I'instauration

d'une

relation interpersonnelle avec des << usagers >>, dans une forme de prestation

de

service.

C'est à ce titre que l'usage conjoint de ces

deux situations retient notre attention.

Les données empiriques exploitées dans le cadre de la présente recherche

ont

été

.è"rr.illi"t

errtre 2012

et

20152

à

I'occasion de stages effectués par des étudiants engagés dans des dispositifs de

formation professionnelle initiale, respectivement dans

les

domaines de la radiologie médicale et de l'éducation de l'enfance.

Les

enregistrements

ont été réalisés à l'aide d'un

dispositif

vidéographique

mobile, dans des situations ordinaires et

non provoquées de

travail,

avec

le

consentement des participants- Le travail d'analyse se fonde sur ces enregistrements ainsi que sur une

retranscription multimodale des interactions qui s'y

trouvent documentées (Filliettaz, 201 8).

3. Rôle el ploce des usogers dons les interoclions tutoroles

La démarche d'analyse empirique conduite ci-dessous porte sur

deux extraits

emblématiques issus

de

chacun

des deux

corpus considérés. Les extraits se caractérisent par le

fait qu'ils

consistent

tous deux en des situations de pratique

professionnelle accompagnée, en présence des usagers.

Les

stagiaires

y

réalisent des activités de travail, adressées respectivement à des patients ou

2 La recherche a été conduite avec le soutien du Fonds national suisse (FNS), sous les numéros de requête 100019-149159 et 100019-169743.

154 155

(5)

des

enfants,

en

coprésence

et avec le

guidage

de leur

tutrice.

L'analyse a po'r objectif de décrire finement les formes

de

participation des

usagers

à ces

interactions,

l'influence de

ces formes de participation sur les situations dans lesquelles s,engagent les stagiaires et les tutrices et finalement les effets de ces formes de

participation sur les enjeux de formation qui

président

à

ces

situations.

Pour mener ces

analyses,

une attention particulière

sera consacrée à trois phénomènes interactionnels, que nous considérons comme des indicateurs significatifs des processus d'apprentissage

en

situation

de travail (voir Filliettaz,

Rémery

&

Treb

ert,

2014;

Durand, Trébert

&Filliettaz,2015).

Le premier axe d'analyse porte

sur les

formats

de

participation

à I'interaction, eu'à la

suite de Goffman nous qualifions de < positionnement

>

(footing).

un

des

mérites des travaux de Goffman

(1981,

1987) est

d'avoir

montré

que les

interactions verbales

ne

procèdent

pas

seulement d,une relation dyadique entre des << locuteurs >> et des << récepteurs >r, mais qu'elles consistent

en

des << rencontres sociales

>

dàns lesquelles

plusieurs participants peuvent se trouver

engagés,

selon

des positions de participation diversifiées. Dans les situàtions de la vie quotidienne, les << récepteurs > d'un acte de communication peuvent par exemple être identifiés cornme des destinataires

ratifiéi

ou au

contraire comme de simples témoins, perçus ou non par

les

participants à I'interaction. Les

destinataires

ratifiés

peuvent également être désignés comme tels par

le

locuteur ou

pai,

selon que l'adressage est accompli de manière directe ou indirècte. pour Goffrnan, ces processus

de

positionnement

relèvent du

< cadre participatif >> de

l'interaction

et présentent

la

caractéristique de se

négocier et de se renégocier, tour de parole après tour de pàrole, par les participants eux-mêmes (Goodwin

&

Goodwin, 2004). Dans le cadre des interactions tutorales, ces mécanismes ne sont pas sans enjeux dès lors

qu'ils

indiquent vers quels acteurs les participants (ré)orientent leur attention et dans quelle position de participation ils placent leurs partenaires à un moment donné de leur iencontre.

un

deuxième axe d'analyse des données porte sur les processus de < cadrage de l'activité > et des prémisses organisationnelles que les participants

à

l'interaction reconnaissent comme exerçant un rôle configurant dans la situation rencontrée. Dans une perspective

goffmanienne,

les

<< cadres

de

l'expérience >>

(Goffman,

1991) permeffent

aux individus de

répondre

à une

question

qu'ils

se

posent, explicitement

ou

implicitement,

à

chaque instant

de

leur présence sur

la

scène que constitue

la

sphère publique

:

qu'est-ce

qui

se passe

ici ?

Ces cadres de I'expérience ne préexistent pas à

leur

rencontre

et ne

constituent pas des réifications tangibles et données une fois pour toutes.

Ils

sont rendus visibles à travers les comportements

des participants et la signification que

leur confèrent les participants dans

le

processus intersubjectif de leur rencontre. <

A partir du

moment

ou

nous comprenons ce

qui

se passe

>, dit Goffman

(1991,

p. 242), ( lous y

conformons nos àctions

et

nous pouvons constater

en

général

que le

cours des

choses confirme cette conformité. Ce sont ces

prémisses

organisationnelles

- que nous confirmons en melme

temps mentalement

et par noffe activite -

que

j'appelle le

cadre de

I'activité >>. C'est à ce titre que les cadres sont dits < vulnérables >.

Ils

peuvent être déconstruits

et

reconstruits au

profit

d'une autre

interprétation de la situation. Et ils peuvent

également être

modalisés ou fabriqués dans des logiques d'hybridation,

de transposition,

voire

de manipulation. Les phénomènes de cadrage de

l'activité

intéressent l'étude des situations d'apprentissage par le

travail

dès

lors qu'ils

peuvent

servir

d'indicateurs

de la

manière dont les participants s'orientent vers des enjeux tantôt constructifs

etlou productifs à des

moments

particuliers de leur

rencontre (Filliettaz

&

Durand, 2016).

Enfin, un troisième axe d'analyse porte sur des

enjeux épistémiques

et

sur

la

place des << savoirs >> dans les interactions

tutorales

étudiées.

Ces savoirs peuvent

présenter

des

degrés

d'explicitation et

de

visibilité

variés selon les situations. Dans la perspective

de la théorie de l'action conjointe en

didactique

comparée (Sensevy, Mercier

&

Schubauer-Leoni, 2000), ces savoirs peuvent

être

transposés dans

des milieux

contrastés, selon des rythmes variés et à travers des formats de participation multiples.

Dans

les

niveaux d'analyse microscopique adoptés

par

certains courants

en

didactique

disciplinaite, ce

sont

bien les

processus interactionnels

qui

permettent

aux

participants

de

thématiser les différentes << facettes >>

de savoirs

rendues pertinentes

dans

la situation

(Malkoun &

Tiberghien,

2008).

Dans

le

contexte des

156 r57

(6)

interactions tutorales, ces questions ne sont pas sans enjeux dès lors qu'elles permettent de décrire selon quelles modalités âes éléments

de

savoir en

lien

avec

le travail .ont a la fois mis

en oeuvre et

partagés entre les participants et comment ils peuvent devenir aussi, localement,

des objets d'une pratique de

transmission

et

de transposition (Filliettaz, 2009).

3.1.

l. cos des porients dons

res

inrerocrions en rodiorogie médicole

Le

premier cas étudié rerève

du

contexte

de la

santé.

il a

été gbservé

et

enregistré dans

re

service

de radiologi" ;ir"

centre hospitalier,

au

cours

d'un

stage

de

2è-" année,

ari,

"r" ,alle

de

scanner. une étudiante technicienne en radiologie médicale y effectue

un

stage

de huit

semaines,

pracé sous la

responsabilité

d''ne

praticienne formatrice, mais travaillant au quotidién avec

diftrents

techniciens

et

techniciennes qualifiées, exerçant

à son

égard une fonction de tutorat de

proximié

Le premier des deux extraits?stitués ci-dessous

porte

sur_

l'accueil du

patient

et la

preparation

de

son installation sur la << table > du scannèr. La stagiaire

tsïel

"rptiqrr"

u., patient le

déroulem*l d:

l'examen, en préseirce

o"

ru tot

i"i itutl

Le patient arrive en chaise roulante.

Il

est placé

,o".

o*ygèo" et doit

ybir'ne

radiographie dy tholax, qui implique l'injection

jtrn

tiquide

de contaste au moment de réaliser i,exarien par scanner.

.La transcription ci-dessous recourt à des conventions

qui

sont explicitées en annexe.

La

distribution en deux colono"s

p"-À"t

oe rendre compte

du fait

que plusieurs activités

et

interaciions sont menées en parallèle. Les segments en gms sont mis en évidence à des fins d'analyse.

Extrait I

:

I'accueil

du

patient

TUT: ((enfile des gants en latex et se place derrière Ia chaise du

PAr)) 'approche du PAT)) alors

pour le scanner tout simplement/ ce qui va se passer c'est que on va vous mettre sur cette table vous allez vous

TUT: ((saisit le tuyau d'oxygène et le mobilise))

I#ll

TUT: ((se place à droite de la chaise du PAT et débloque le frein))

TUT

((se place à la droite

du PAT et attend))

TUT: ((déplace la chaise en direction de la table))

PAT: i'enlève le: I'oxygène alors\

TUT: non non on va le garder\

STA: (se redresse et regarde TUT)) ah tu veux le laisser là/

I#2\

TUT: oui:: normalement

il

est assez long\

TUT: ((se penche vers les pieds du patient))

ouais soulevezdéiàl PAT: ((le patient retire ses

pieds du support)) TUT: voila/

STA: on va vous injecter un produit qui va vous faire chaud/ dans tout le corps\

I#il

PAT: mhmm\

STA: c'est normal\

PAT: ((acquiesce de la tête)) STA: vous avez pas d'allergie/

PAT: non\

STA: OK\

PAT: XX

j'ai

la dialyse mais c'est pas une allergie/

STA: non\ ((rire dans la voix)) et puis vous faites pas de

diabète non plus/

PAT: non\

STA: parfait\ ((se retourne et dépose la couverture sur une chaise))

STA: (se déplace vers l'arrière de la chaise du patient et commence à manipuler la bouteille d'oxysène))

STA: ((continue de manipuler la bouteille d'oxygène))

STA: ((actionne lefrein de la chaise))

2.

J 4 5 6.

7

8.

9

10.

l1 t2.

I3

14

15 16.

I7

18.

19

20 2I

158 159

(7)

3.1.1. Une procédare de travail multifucalisée

Dans la partie inaugurale de

l'extrait

et

jusqu'à

la

ligne

14, un cadre de participation organisé en deux foyers d'action parallèles

est instauré, dans lequel des activités

complémentaires sont accomplies

en \ue de

préparer

le patient à

l'examen. Dans un premier foyer, retranscrit dans

la

colonne de gauche, STA conduit une interaction verbale avec

PAT,

dans laquelle

elle

explique au

patient le

déroulement

prévu de I'examen (1. 1, l' 2).

Elle

sélectionne

ici PAT

comme destinataire

ralifté et

désigné

de

ses

propos, comme l'indiquent à la fois les choix pronominaux (vous), les contenus thématisés, la direction de son regard et son orientation

corporelle (voir [#1]). De son côté, PAT ratifie ce

cadre de participation

et s'aligne

dans

la position de

destinataire désigné dans laquelle

il

est placé.

Il

s'oriente vers STA, produit des signaux d'écoute (1. 3) et répond aux questions qui

lui

sont posées (<< non >>,

1.7 ; <<

j'ai

la dialyse mais c'est pas une allergie >, 1.9). Sur le plan

épistémique, des contenus de savoir sont

mis

en circulation dans

l'interaction entre la

stagiaire

et le patient, qui portent sur

la

procédure de l'examen médical et qui en détaillent différents sous- domaines

: le

positionnement

du

patient durant l'examen (1. 1) ;

I'injection du liquide de

contraste (1. 2)

; les

contre-indications

(1. 6). La mise en

visibilité

de ces contenus de savoir à destination du patient relève de la procédure de travail et constitue un ensemble à la fois ordonné et routinisé de topics qui sont abordés au moment d'accueillir les patients dans ce contexte.

De son côté, la tutrice

n'endosse clairement

pas la

même

position interactionnelle que STA.

A

ce stade, elle n'interagit pas verbalement avec PAT, mais semble constituer un témoin perçu de son interaction avec STA. Elle ne reste cependant pas inactive pour autant, et s'engage dans une suite ordonnée d'actions non verbales,

dont

notamment

la

mobilisation

du

tuyau

reliant le

patient

à

la bombonne d'oxygène située

à l'arrière de la

chaise

([#1]).

Ces actions se déroulent en parallèle à l'interaction verbale menée par la stagiaire

et le

patient.

Elles

constituent donc

un foyer

d'action

individuel

accompli parallèlement

à I'interaction STA-PAT et

se synchronisant avec cette dernière.

Les

savoirs mobilisés

par

la tutrice dans

le

domaine de

la

préparation

du

patient

ne

sont pas [#1]

srA

interagir avec le patient pendant que TUT mobilise le

tuyau d'oxygène

[#2] STA interrompt son action sur la bouteille d,oxygène pour s'adresser à TUT

Dans l'extrait retranscrit

ci_dessus, les

confèrent au patient des positions

variables

successivement la situation de différentes manières mettre en évidence.

professionnelles

et

investissent

qu'il

importe de

160

161

(8)

rendus visibles

sur le plan verbal mais

sont incorporés dans les

manipulations réalisées structurer

le cadre de l'activité. De ce point de vue,

l'auto-

attribution par la tutrice de son

droit

à

la

parole après

la

question formulée par le patient agit comme une forme d'induction notable d'un rapport asymétrique au savoir (Heritage, 2012).

A

la suite de cette séquence de clarification concernant I'usage

de l'oxygène durant l'examen, les tâches de

préparation se

poursuivent

par I'installation du

patient

sur la

table

du

scanner.

Cette installation ouvre de nouvelles formes de coopération entre les participants.

Extrait

2 :

I'installation

du

patient

sur la table

3.1.2. L'étonnement du patient

comme

transformation de la sitaation

induction d'une

L'intervention spontanée

du

patient

en ligne 15 introduit

des transformations significatives dans la situation et dans les conditions de participation des acteurs.

En

effet,

à

ce moment,

le

patient s,auto- sélectionne comme prochain locuteur

et produit *" d.rrr*de

de vérification à I'intention des professionnelles (< j,enlève le: l'oxygène alors ? D,

l. l5). ce

faisant,

il

place

la

stagiaire et

la

tutrice dans la position de destinataires désignées et

indù un

ctaogem"ni auo,

r"

cadre de participation.

ce

n'est pas

ici

la stagiaire qui iepono, mais ra tutrice (< non non on

va le

garder

), l.

16).

A ,oi t"*,

"tiÉ

,,urrto_

sélectionne comme prochaine locutrice et catégorise le patient coûlme destinataire désigné.

c'est

aussi à ce moment précis que

la

stagiaire interrompt l'activité non verbale dans laquelle elle

éâit

engagée en manipulant la bouteille d'9xygène. Après àvoir entendu

h

ràionse de la tutrice au patien! elle s'auto-sélectiànne comme prochaine locutice

et s'adresse de manière directe à la

tutice

(< ah

t'vêux

le laisser là ? ,,,

l.l7)- La tutrice ratifie ce

nouveau

cadre de participàlon

en

s'adressant à son tour à la stagiaire et en répondant a sa

a"-Àa"

(< oui normalement il est assez long >,

l. lg).

_ Sur le plan

épistémique,

l,intervention du patient

induit également des modifications substantielles du rappori

0",

acteurs à

la

situation.

Alors que

précédemment,

le tuyau

d,oxygène ne constituait dans I'environn€ment qu'un objet matérier

manilulé

par

la

tutrice puis

par la

stagiaire

(t.l+), il

àevient u,.,

_o_à d"

lu q*estion du patient

un

thème de I'interaction verbale

et

donc un objet de

l'activité

explicitement porté

à

I'attention de l,ensemble

des participants.

!:r participants

entretiennent

des

rapports asymétriques à cet objet de savoir: alors que la tukice sait

qu,il

est possible de réaliser I'examen en maintenant un apport d'oxygène, la stagiaire et le patient semblent

l'ignorer. cette

àsymétrie ir;est pas donnée

a priori mais induite pâr les formats'de

participation accomplis par les participants et en particulier par la Àanière dont

ils

endossent respectivement

res positions à" locuteur et

de destinataire

au moment où des enjeux

épistémiques viennent

TUT: voila/

PAT: ((le PAT se lève))

TUT: ((passe le tuyau par-dessus la tête du patient)) jevais mettre le petit tuyar.r/ hopl

I#ll

PAT: ((PAT s'assied sur la table du scanner))

TUT: voila/

PAT: ((PAT s'allonse sur le dos)) TUT: ((accompagne le mouvement du PAT)) allongez vous/

PAT: ((PAT place ses jambes sur la table du scanner))

TUT:maenifique\

TUT: ((s'éloigne de la table et déplace la chaise du PAT))

((manipule le tuyau d'oxvsènd)

TIJT z (@mntre le tuyau d'orygène à STA)) tu sais tu le mets juste conrme cal ((dépkce la chaise en direction du scanner))

TUT:

tu vérifies qu'il y a la longueur puis c'est bon hein\ (Oâche Ie tuvau d'oxveène)) I#21

STA donc c'est TOUT simple hein/ ((appuie sur la

ST A: ((actionne le frein

de la chaisd)

STA: ((déplace le tuyau d'oxygène pendant le dép lac ement du p ati ent) ) STA: (se déplace sur Ia gauche du scanner))

[#ll

STA: ((déplace le

dispositif d'injection de Ia tabld)

STA: ((actionne la commande du scanner et fait monter Ia table)) 22

23

24.

25.

26 27 28 29 30.

31

JZ.

JJ.

34 35

162

r63

(9)

cwqncer la commande et

fler

VOUS

examen/

VOUS

GON puls tout

et faut quand pendant

dit

accordJ d

'images/

secondes/

VOUS

d on demander lques sene passage/

allerl que après vous une

VA

va

fait

puls juste on premrer

et on la-/

un qu qu ce

accordJ d

luste fois secondes bloquer nous

les faire chaque a allez

juste poumons/

est/

VOUS

simplement/

c'

les tenez 36.

[#1] TUT aide PAT à s'installer sur la table pendant que STA se

déplace sur la gauche du scanner

Dans

ce

second extrait, des cadres

de

participation différents se

mettent en place successivement, et se stabilisent localement selon trois configurations distinctes et reconnaissables.

3.1.3. Une inversion des rôles interactionnels entre

la

stagiaire et la tutrice

Dans un premier temps et jusqu'en ligne 32,

l'interaction s'organise selon une configuration similaire à celle qui avait prévalu au moment de

l'accueil

du patient, avec cependant une inversion des rôles entre

la

stagiaire et

la

tutrice. C'est

ici la

tutrice et non plus

la

stagiaire

qui

conduit I'interaction verbale avec le patient et

qui le

sélectionne

comme

destinataire désigné

de

ses propos

(<voilà

>>,

1.22;

<

je vais mettre le petit tuyau

hop >>,

l.

24;

< allongez-vous

), 1.28;

<< magnifique

>,

l.

30). Les

contenus

verbalisés

ponctuent

l'accomplissement

d'une suite

ordonnée d'actions.

Ils les

commentent,

les

façonnent

et les

clôturent. Le patient s'aligne

à la

position de participation dans laquelle

il

est

placé par la tutrice

; il

répond par des comportements non verbaux

qui ratifient les

demandes formulées.

La

stagiaire

pour

sa part

participe au titre de témoin ratifiée à

cette interaction avec le

patient, et non plus au titre de locutrice. Comme la

tutrice précédemment,

elle

s'engage

dans des actions

manipulatoires complémentaires

qui

se structurent dans un foyer d'action à la fois

distinct et

synchronisé

avec la

progression

de l'installation

du patient

(voir

[#1])

: elle

actionne

le frein

de

la

chaise, déplace le

tuyau d'oxygène durant le

déplacement

du patient, installe

le

dispositif d'injection et

actionne

la

commande

de la table

du scanner une fois que le patient est en position horizontale.

3. 1. 4.

L'

émergenc e d' ane p ar enthès e intelle ctiv e

En ligne

33,

la tutrice

opère des modifications significatives dans la configuration de participation, au moment où elle interpelle la stagiaire tout en manipulant le tuyau d'oxygène : < tu sais tu le mets juste comme ça, tu vérif,res

qu'il y

ala longueur puis c'est bon hein >. Ce faisant,

elle

sélectionne

la

stagiaire comme destinataire désignée,

et

place

le

patient dans

la

position

d'un

témoin perçu,

mais auquel on ne

s'adresse

pas

directement.

Sur le

plan

épistémique, cette séquence s'apparente à ce que Mayen

&

Gagneur [#2] TUT montre à STA comment positionner le tuyau d,oxygène

durant l'examen

.rU

*t6

164

t6s

(10)

(2017,

p' l0),

à ra suite de Deldalre (1967), désignent conune une

< parenthèse intellective

>. Elle

permet

de

thématiser

à

nouveau

I'objet

de savoir que constitue lË tuyau d'oxygène, mais dans un milieu qui présente des propriétés clairement didactiques.

cet

objet de savoir est pointé

à l'attention de la

stagiaire.

c,est là un bref

moment

de

<< transmission >>

ou de

transposition inséré, sous ra

fu*:- {'*

o parTe, dans l,accomplissemint d,une procédure de travail. La pertinence de cet objet dà savoir s,ajuste

toiui"À.rrt

uu*

conditions dans lesquelles

il

esi mis en oeuvre et << montré >> ; mais

la validité de ce

savoir dépasse

le

contexte

local et

présente un caractère général. cette parenthèse intellective

n'"rt

pur'ruos effets

sur le

cadre

de |activité tel qu'il est mis

"r, piu""-

"t

rendu

interprétable par ].1

comportiements

des purti"ipuol.

Eile

< modalise

> l'activité de travail

dans

un

cadre

d'un

autre type, celui_

de

I'apprentissage, rendant

à ce

moment particulièrement visibles les enjeux de formation qui président à la rencontre et les identités situées endossées par les

paiicipants r* b;ô;;e

de la formation.

^

35, _ Yuir il la

stagiaire ne s'agit

met

là.que d,une digression éphémère. Dès la ligne

à

nouveau

À place ;"" ;;;à;;;ion

de participation centrée

sur une

interacti,on verbale avec"

ie

patient, dans laquelle elle endosse ra position de locutrice

"i

r"

p",i"rt

celle de destinataire désigné.

c'est

une séquence de consigne'luioeu.rr", dans laquelle

la

tutrice laisse

la

main

à la

stagiaire

.i Ënàor."

tu

position de témoin ratifié. A ce moment, les

savoirs

mis

en circulation se centrent

à

nouveau

sur la

procédure dlexamen et contribuent à accomplir

le

cadre de ra procédure d,instailation du patient.

Le

tuyau d'oxygène

et

ses

.oodition, d,utilisation et

de

manipulation sortent alors du périmètre de l,attention

des participants.

ce

qui retient notre attention dans cet exemple, c'est d,abord la diversité des positions de parricipation dans

Ërô;Ë

ie*patient peut être placé dans

le

cours du àéroulement de ceffe interaction.

comme nous l'avons souligné, le patient peut être tantôt catégorisé comme

un

destinataire.désigné auquel on s'adress"

"*pti.ii"r.r.nt,

tantôt comme

un

témoin perçu dont on parle,

_ui, u,rq,rli on

ne s'adresse pas (ex.

l. l7-lg

;1.33_34). Le patient enOor."

u,lrJparfois

le rôle de locuteur et peut lui-mêmé initiàr aes echanles

.ifiJ"", r",

professionnelles dans des positions de destinataires. De ce point de

lue, il

ne fait pas que s'aligner aux cadres de participation proposés

par les

soignants,

il induit lui

aussi des formats spécifiques de participation. Ces interventions à

I'initiative

du patient conduisent à des transformations notables

de la

situation,

et ce

sur différentes dimensions.

Sur le plan de la

participation,

les

interventions du patient < déplacent

> de fait les

autres participants.

C'est le

cas

notamment lorsque la tutrice quitte son rôle de témoin pour répondre

à la

question

du

patient

0. 16). Et sur le plan

épistémique, ses

interventions

ont le mérite de

rendre saillants

des

éléments de

I'activité

jusqu'ici

mis en oeuvre mais non thématisés. C'est le cas

notamment

du tuyau d'oxygène, dont la

manipulation semble indiquer qu'une désinstallation est requise pour conduire I'examen.

Or

c'est précisément

la

question

du

patient

qui,

séquentiellement,

peut

contribuer

à

déconstruire

une

inference erronée,

à partir

de

laquelle un savoir peut être mis en visibilité

: il

n'est pas nécessaire de désinstaller l'oxygénation

d'un

patient pour réaliser

un

examen par scanner du thorax et

il

existe des techniques de mobilisation et de

positionnement

du tuyau qui permettent d'éviter une

telle désinstallation. C'est

tout l'enjeu d'une exploitation épistémique de l'étonnement du

patient:

en reconnaître

la

cause et en proposer

une

élaboration

formative sous la forme d'une

<

mise

entre parenthèses > subreptice du travail. C'est du moins ce que montre ici

la

propension des participants

à

s'orienter simultanément vers les objets du travail et vers les objets de savoir qui les sous-tendent.

3.2. Le

cos des enfonts dons

les

inleroclions éducolives

en

conlexle instilulionnel

Le

second cas étudié relève

du

contexte de l'éducation de la petite enfance.

Il a

été observé et enregistré dans une institution de

ia

petite enfance, au cours

d'un

stage

dit

d'expérimentation de 1è'"

année. Une étudiante anime des activités

éducatives auprès

d'enfants, sous la

supervision

d'une

éducatrice référente. Les extraits présentés et retranscrits ci-dessous restituent une situation typique relevant de la pratique professionnelle accompagnée. Une étudiante stagiaire (STA), en première année de formation, conduit une activité de psychomotricité avec un groupe de sept enfants âgés

166 r67

(11)

de l8 mois environ, en collaboration avec sa

référente

professionnelle

(TUT). L'activité

consiste

à explorer

librement differents objets, tels que des toboggans, des tapis, des cylindres ou des tunnels en mousse.

L'activité a

été planiàeé

pu, lâ

stagiaire, puis validée parlaréférente à l'occasion d;un entretienpédagogique préparatoire.

L'extrait retranscrit

ci-dessous

interviènt àans

la seconde

moitié du

déroulement

de cette activité. La

stagiaire surveille

I'activité

de

ToM, le

plus jeune enfant présent, pendant

q":

l1 réferente

joue

avec un groupe d,enfants

(CAL, I-ûi, nef)

qu'elle place dans un cylindre en mousse.

Extrait

3 : une activité de psychomotricité en contexte

éducatif

ll ',-;

''

[#1] STA ramène TOM dans la salle pendant que TUT joue avec un groupe d'enfants placés dans un cylindre en mousse

[#2] STA se lève et sollicite TUT du regard au moment de proposer à TOM de

lui

donner un ballon

TIJT: ((balance doucement le cylindre en effectuant des bruits avec sa bouche))

regard TUr)) l#21

vers STA:

(se

déplace et va

chercher

un

ballon

dans

l'armoire))

11

TUT: ((place LUC dans

le

cylindre)) allez vous faites la discothèque là\

((chante et tape sur Ie cylindre en rythme))

TUT:

tu

danses/ ((chante bougeant Ie cylindre en rythme))

TUT: *coucou:* ((s"

penche vers L

RAF:

((MF

se déplace et s'approche

du cylindre))[#l]

TUT: est-ce qu'il

y a

une place pour Raphaël\ viens on essaie à trois/

((tend les bras en direction de TUT: tu aimerais allerdedans/

TUT: ((porte RAF et Ie place dans le

avec LUC et STA: ((observe TOM qui

quitte Ia salle))

STA: TOM/ TOM/

ru

restes là\.

tu

restes ici\...

STA: ((se lève et

va

chercher

TOM dans le couloir

STA: allezl. non je vais pas

to faire

mal\

((ramène TOM dans Ia salle et le pose sur le

STA:

((referme

le portail qui donne

accès

au

STA: +tu

aimerais un ballon TOM/+

STA:

otu veux

jouer

avec un ballon/o opeut-être heinl" ((se

lève et lance an

1

2.

-t

4 5

6

7 8

9

l0

168 169

(12)

3.2.1. Une

scissiory--

de la participation en deux foyers

interactio nnels p arallè le s

configuration de participation

qui

sous-tend l'interaction au début de cet extrait se

structuri

clairement autour de deux foyers distincts (Goodwin

& Goodwin,2004;

Markaki

&

Rémery, 2016).

un

premier foyer interactionner est pris en charge par

lastigiaire

et

est orienté vers un enfant en particulier, ioita. La

stagiaire sélectionne

TOM comme

destinâtaire

direct de

ses

propos, l"

ramène. dans I'espace

d'activité (( ToM/ ToM/ tu

resies

là\ .

tu restes. ici >>, l.

2) et lui

propose

un ballon pou, maintenir

son attention dans I'espace du

jeu

(<

tu

aimerais

un ballon ToM/

tu veux

jouer uu"" un balloni

o,

). s-lj. La

référente

pour

sa part

s'engage dans

un

second

foyer

d'interaction, qu'elle

iu.tug"

urr".

un groupe de

trois

enfants placés dans

un

cylindre.

Elle

sjadresse d'abord au groupe d'enfants (< alrez vous faiies la discotheque là >,

l. I

; <

-est-ce

qu'il y

a une place pour RAF/ )), l. 6), puis J

-ifap

"n

particulier (< viens on essaie a

tràisl tu

veux aller dedan s/ >>, 1.7).

L'espace de l'interaction est ainsi structuré en régionr,

qri

donnent

lieu à

des logiques.d,organisarion séquentielle

s]écifrô;r;;;

engagent

des participants disrincts (voir I#ri c,Ëst

une

configuration typique des situations de

co_animation, dans lesquelles les éducatrices se distribuent des rôres

.àÀfie.*","ir",

dans l'accomplissement du

travail

impliquant

"n gro"i"

àl"nfants

(fittjgttaz,

Rémery

&

Trébert,

2014;burand,

Trébert ^&

Filiettaz,

20ts).

3-.2.2- rnterdépendances

et indices

de

porosité entre

res foyers intersctionnels

.

.

Pourtant,

il

importe de relever que si ces foyers d'interaction se déroulent de manière parallèle, ils ne sont pas pour autant étanches

l'un à l'autre,

mais entretiennent des relations o'interàependance

qui s'expriment de

manière croissante dans

le

déroulement de I'activité. Pour commencer, on pourra observer que les régions qui comp_osent l'espace

de l'interaction ne sont pas

cloisonnées et qu'elles.rendent possibles des contacts visuels

"nt "

1", purtr"rpunts.

La^-stagiaire

peut ainsi

observer

la

conduite

de l'activité de

la réferente ; et réciproquement, la référente peut maintenir un contact visuel avec

l'activité

de la stagiaire.

c'est

d'ailleurs ce

q,rir" pur."

au moment où la stagiaire formule à l'attention de

TOM l'offre

de lui donner un ballon 0. 9-10). Au moment de se lever et de formuler son offre (<< tu veuxjouer avec un ballon/ . peut-être/ >), elle oriente son regard

en direction de la

réferente.

Celle-ci s'aligne à

son regard tout en terminant de placer RAF dans le cylindre

(voir

[#2]).

Elle

s'engage

donc ici

simultanément

dans deux foyers,

dans lesquels elle endosse des rôles distincts.

Cette perméabilité observée entre les deux foyers de l'activité éducative se confirme et se renforce dans

la

suite de l'interaction, au moment notamment où

CAL,

un des trois enfants placés dans le cylindre bercé par la tutrice, porte son attention vers les ballons que la stagiaire distribue à TOM.

Extrait

4 : la

distribution

des ballons aux enfants

CAL:

é-ba-éli-li/ ((regarde et pointe de

I'index en direction

de

l'srmoire où sont

rangés les ballons))

I#ll

TUTz ((regarde en direction de I'armoire)) les ballons/ ah je sais pas +je sais pas si les ballons vont être dans notre activité hein c'est Sandra qui mène\+

TUT ((ait

basculer le cylindre contenant

les

trois

enfants)) attention: le bateau

il

fait plouf dans l'eau:/

+attention: attention:/*

T[JT:

((penche le

cylindre

horizontal ement)

)

+svi11:+ oups

sous le ballon\

TUT:

((se penche

vers I'intérieur

du cylindre)) coucou Raphaël/

L\JC: ((Lucia commence à pleurer dans STA:

((dépose

le

ballon devant

row) l#tl TOM: ((TOM

se

saisit

du

ballon et

le

lient dans ses bras))

TOM: ((fait

rouler"

le ballon sous

le

regard de STA))

STA: ((STA se lève et.

va

chercher

le

ballon qui

est

coincé

sous

le

cylindre)) STA:

(se

retourne et.

lance

le

ballon

en

direction

de TOM)) tiensl

TOM: (6e saisit

du 12

l3

t4

l5

t6

t7

170

l7l

(13)

le cylindre))

ben Loulou/

TUT: oh

as pas aimé avec Raphaël\

t'

LUC: ((pleure))

TUT: c'est

rien

c'est comme

tout

à

l'heure/

LUC:

(mama:)

comment

penche ça non non\ sors/ (se

vers l'intérieur

du TUT

LUC

((sort

du cylindre

et se

remet debout))

ballon et

le

lqnce

en

direction

de

((rattrape

le

bollon

et

lance

un

regard

en

direction

du STA:

((lance

le

ballon

en

direction

de STA:

TO

((se saisit du

bollon et

Ie

Iance

en

direction

de TOM

STA: ouais:/

((rattrape

le : ((s'approche de STA, lève le bras))

CAL

STA:

t'aimerais

un ballon/

((approuve de

la têtu

et stavance vers

CAL:

: ((tendlc ballonà CAL)) alors ce\tr

là tu peux

le donner à TOM et je vais t'en prêter un autre\

STA

18

l9

2l

22

23

25

[#1] au moment où STA tend le ballon à TOM,

CAL

et TUT regardent en direction de l'armoire où sont rangés les ballons

l#21CAL

s'approche de STA en lui demandant un ballon

En ligne 12

émerge donc une nouvelle forme de perméabilité enffe les foyers d'interaction précédemment établis.

Au

moment de

voir

la stagiaire sortir un ballon de l'armoire pour le tendre à TOM, CAL, une petite

fille

< prisonnière > du cylindre, oriente son regard et tend

la

main en direction de

l'armoire,

manifestant son intérêt

pour les ballons (< é-ba-é-li-li ), l. I2). La

référente s'aligne visuellement

à cette sollicitation (voir [#1]) et lui

attribue une

172

t73

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