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Un antalgique ? et si on se faisait une toile

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Academic year: 2022

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Un antalgique ? et si on se faisait une toile

PIGUET, Valérie, ALLAZ, Anne-Françoise

PIGUET, Valérie, ALLAZ, Anne-Françoise. Un antalgique ? et si on se faisait une toile. Revue médicale suisse, 2006, vol. 2, no. 71, p. 1619-1620

PMID : 16878527

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:92716

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Edito: Un antalgique ? et si on se faisait une toile

V. Piguet A.-F. Allaz

Rev Med Suisse 2006; 31461

Résumé

Dans une grande enquête européenne comprenant la Suisse, un cinquième des sujets interrogés par téléphone ont déclaré souffrir de douleurs chroniques, pour lesquelles 85%

d'entre eux précisent avoir consulté au cours des six derniers mois, au moins une fois un médecin. Ainsi, dans sa pratique quotidienne, tout médecin se voit confronté à de tels patients dont le nombre va augmenter vu le vieillissement de la population. La très grande majorité des patients interviewés souffrant de douleurs chroniques indiquent recevoir un traitement antalgique médicamenteux, plus fréquemment sur prescription qu'en vente libre. Les médicaments sur prescription les plus souvent cités sont les anti-inflammatoires et les opioïdes faibles, alors que les opioïdes forts le sont rarement, avec une prévalence de l'ordre de 5%. Concernant les médicaments en vente libre, les médicaments mentionnés sont les anti- inflammatoires et le paracétamol, et dans une moindre mesure les opioïdes faibles dans les pays où ils peuvent être obtenus sans prescription.1

En Europe, la mise sur le marché de médicaments en vente libre est en augmentation.

Parallèlement, on assiste à une augmentation de la publicité dirigée directement vers le patient-consommateur. Il y a quelques mois, des panneaux publicitaires dans les rues de Genève s'adressaient aux migraineux. Dans les vitrines de certaines pharmacies, la guerre des prix s'affiche avec les actions du mois dans lesquelles les analgésiques sont souvent présents.

Encore plus branché, en quelques clics sur la toile, le consommateur peut obtenir de nombreux analgésiques. Confortablement assis dans son salon, il est tout à fait possible de faire son marché sur Internet et de commander non seulement des anti-inflammatoires, mais également des opioïdes ! En effet, plusieurs sites de langue anglaise proposent de nombreux analgésiques à la vente par correspondance. Ces sites offrent également la possibilité d'obtenir une prescription par un service médical online avec l'argument de choc qu'une consultation n'est pas nécessaire. Tout se fait anonymement devant son écran, mais bien sûr accompagné de sa carte de crédit. Le client est incité à s'inscrire à la newsletter lui permettant d'être informé des futures offres avantageuses et même devenir un platinum member permettant, entre autres avantages, un accès à un plus grand nombre de molécules. Dans une information destinée aux médias, Swissmedic estimait en 2004 «que ce sont chaque année 20 000 à 40 000 commandes de médicaments passées sur Internet qui entrent en Suisse, dont 4000 à 8000 contiendraient des substances telles que des stupéfiants ou des psychotropes, dont

l'importation par des particuliers est pourtant interdite».2 Le médicament qui, depuis des décennies, se situe au carrefour des mondes scientifiques, industriels et étatiques tout en étant au cœur de la relation patient-médecin tend à devenir un banal produit de consommation.

Le médecin peut se sentir désabusé devant l'émergence de ce marché qui ne suit aucunement les recommandations élaborées par les sociétés scientifiques, par exemple quant à la

prescription des opioïdes dans les douleurs chroniques non cancéreuses. En effet, il y a deux poids et deux mesures. D'une part, les médecins sont soumis à une exigence de formation continue contrôlée et à un suivi de règles de bonnes pratiques qu'ils acceptent pour maintenir

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un haut niveau de qualité des soins et pour répondre à leurs propres exigences éthiques ; et d'autre part, ils sont face à une libéralisation du marché des médicaments comme des soins qui échappe de plus en plus au contrôle des autorités de surveillance de la bonne pratique

médicale et de la sécurité du médicament.

Ces tendances laissent penser que l'économie de marché et/ou la modernité, en déplaçant le médicament dans le monde commercial, tendent à déposséder les médecins de celui-ci qui pourtant - c'est notre avis - doit aussi être considéré comme un moyen thérapeutique inséré dans une rencontre médicale. Bien que les patients apprécient de plus en plus la diversité des sources d'information et peut-être des modes d'achat, les enquêtes montrent que c'est auprès du médecin qu'ils viennent en dernier lieu chercher des informations et une réassurance concernant les médicaments lorsque leur santé est mise en jeu. Pour la majorité des patients, le médicament se différencie encore d'un banal produit de consommation, mais pour combien de temps ?

S'il est illusoire de croire qu'il est possible d'arrêter ces tendances libérales, il est urgent, par contre, de repenser la place des médecins dans ce qui devient le marché du médicament.

Certaines affaires fortement médiatisées ont montré que la sécurité du médicament n'est pas assurée par le marché, mais doit le rester par les autorités de surveillance étatiques et au niveau individuel par les médecins. Ainsi, le rôle de ces derniers doit-il rester essentiel dans la prescription des médicaments dont l'évaluation de l'efficacité, des effets indésirables, des interactions, sans parler des indications et des contre-indications, nécessite un savoir

thérapeutique approfondi pour assurer une adaptation individuelle. De plus, il est à souhaiter que les médecins restent des interlocuteurs de choix pour donner une information à la fois objective, adaptée à l'individu et qui sache également tenir compte des représentations tant individuelles que sociétales du médicament.

Les articles de ce numéro, en rappellant les bonnes pratiques de prescription lors de douleurs chroniques, y compris leur importance relationnelle, s'inscrivent dans le souhait de réinscrire la prescription thérapeutique dans l'espace de la rencontre médecin-malade.

Bibliographie

1 Breivik H, Collett B, Ventafridda V, Cohen R, Gallacher D. Survey of chronic pain in Europe : Prevalence, impact on daily life, and treatment. Eur J Pain 2006;10:287-333.

2 http://www.swissmedic.ch/files/pdf/Medienrohstoff-22-07-04-F.pdf

Contact auteur(s)

Valérie Piguet

Centre multidisciplinaire d'évaluation et de traitement de la douleur Service de pharmacologie et toxicologie cliniques

HUG, Genève

Anne-Françoise Allaz

Service de médecine interne de réhabilitation Département de réhabilitation et gériatrie HUG, Genève

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