Bertin, Jules
Etude sur les forestiers
so
190
F5B45
ÉTUDE
LES FORESTIERS
T L'ETABLISSEMENT
DU COMTÉ HÉRÉDITAIRE DE ELANDRE
SUIVIE DE QUELQUES DOCUMENTS SUR LES FETES DES FORESTIERS DE BRUGES
PAR Jules BERTIN
&OL'S-I.\SPECTEDIl DES FORÊTS, MEMBRE CORRESPONDANT DE LA SOCIÉTÉ ACADÉMIQUE DE L'ARRONDISSEMENT DE BOULOGNE-SUR-MER
& George VALLÉE
MEMBRE DES SOCIÉTÉS DES ANTIQUAIRES DE PICARDIE ET DE LA MORINIE,
DE LA SOCIÉTÉ ACADÉMIQUE DE BOULOGNE-SUR-MEH, ETC.
•^.5
ARRAS,
chezSUKUR-CIIARRUIÎY,
Librairc-Eclileur, 31, Petile Placo187()
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ÉTUDE SUR LES FORESTIERS
LETARLISSEMENT DU COMTÉ IIEHEDITAIRE DE FEAXDTÎE
SUIVIE DE QUELQUES DOCUMENTS
SIR LK- FKTES DKS
FOF">K>T!EP,SDE BRIGES.
no
A MONSIEUR TAILLIAR
PRÉSIDENT DE CHAMDnf: UONORAlllL' i LA COfR DE DOl'Al CHEVALIEB DF I.i LÉGION DBOXNEUe,
mOXSIEaR LE PRÉSIDENT,
Dans
cette étudefur
les Fore/fiers .ieFlandre, nous
710USJœnmcs
appliquésfpécialement
à faire reffortir les événsjnents qui,par une marche pro-
grejjire,ont amené i agrandi
(fementde
laFlandre
et
fa
transforvnation encomté
héréditaire. Cette que/lion pr^ésenteun
intérêtd'autant plus
réelque
la Flandî^eapparaît comme un
des fiefs héréditaires les plus anciens.Dans
cette ejj'ai hijtorique.nous
avons.Monsieur
le Pî'ésident,
recouru
à vosremarquables travaux fur
nusanciennes
in/litutions, etnous
ne/aurions trop vous remercier de
vouloir bien accepter la dédicace de cette étudefur
lesForeJUers.
Veuille^ agréer.
Monsieur
lePrésident
, l ajj'urance desfentiments
les plus respectueux, de vos très-dévoués
ferviteurs,.liilf's [)K(;ti.\. (leoiuo Vallél.
buuai, If i'J Déceiiibro 1870
AVERTISSEMENT.
Dans UD article de Ja lievue- des
Eaux
et FonHs de 18(32, p. -209) relatifaux forêts dela Belgique,M.
Christian Dassenditen terminant: "n'oublionspasquelespremiers souverains(l)
•• par ordre de date, de l'anciencomté de Flandre ont porté le
» titre de Forestier.
Dans
ce titremême
et les actesadminis-» tratifs qui s'y rattachent, il y aurait à faire plus d'une
') évocation utiledontleprésentetl'avenirpourraientprofiter. » L'attention publique s'est portée souvent sur lesorigines de notre province : à Douai, dans une expositionde tableaux quia eulieu, il
y
a quelques annéesàl'Hôtel-de-Ville, etoîifiguraient lesglorieux ancêtresde ThierryetPhilippe d'Alsace ; àCourtrai, dans la chapelle des comtes de Flandre décorée de.peintures murales de ^I. J. Vanderplsetsen qui représententles premiers gouverneurs delaFlandre; àLille, dans quelques fêtescommu-
nales dont les personnages s'appelaient Phinart, Lyderic, en souvenir des premiers Forestiers; à Bruges où, en 1417, les citoyenss'étaientréunis pourorganiser des fêtes et fairerevivre la dignité de Forestier du tournoi
commémorative
des vieux châtelains d'Harlebeckc.(t)
Ou
plutôt lespremiers gouverneurs.—
v.i—
Ces considérations nous ont permis ili- oioire qu'il y avait quelque utilité à réunir etrésumer les documents relatifs aux Forestiers, documents disséminés dans des ouvrages qui ne se rencontrent souvent que très-difficilement, et que le plus grand
nombre
de personnes n'ont ni le loisir ni la facilité de compulser.Nous
n'avons point laprétention d'avoir résolu dans tous ses points cettequestion des Forestiers, plus ardue et plus obscure que celle des Mérovingiens dont ils dépendaient : notre but a été de présenter en quelques pages assez de documents pour permettre au lecteur de se faire une idée juste et à peu près complètedu
gouvernement de la Flandre à cette époque, de ce que l'on entendait alors par Forets, et des règlements qui y étaient relatifs, de la hiérarchie administrative, desmœurs
cynégétiques
du
temps,—
et de faire ressortir surtout lesévénements qui, par une marche progressive, ont
amené
à la suite des Forestiers, la fondation du comté héréditaire de Flandre.Nous demandons
pour notre essai labienveillancedu
lecteur qui, sinous osionsnous servir de cette phrase de M.Maury
« n'oubliera pas que dans les
œuvres
d'érudition, on nesaurait jamaisse flatterde n'avoir pointcommis
de fautesd'inexactitudeou d'omission (1) ».
(I) Les forèlsdo la C'.aulo ot t\>' l'anficnne France pai I-. V. Alfreil
Maury, Paris, 18G7,préface, p. 7.
CHAPITRE
P' '\DESCRIPTION
DE
LA FLANDRE.D'après
une
très-ancienne chroniquedu monastère d'Oudenbourch (Aldembourg)
dont parle d'Oudegherst, laFlandre fut ainsi
nommée
à cause des eauxque
lamer
yversait sur divers points. Ces
eaux
formaient ceque
l'on appelle en flamand het vlache et en langage picard flaquesou
/laquais, petites mares. C'est ainsique
l'on a trouvé dans diverses parties de l'ancienne Belgique, entre autres à(1) Sources : Annales de Flandre, de P. d'Houdegherstcommentées par Lesbroussart, édit. de Gand, p. 3. édit. d'Anvers, 1G2I, p. 43.
—
Forcis des Gaules et de Vancienne France, par L. F. Alfred Maury, Paris, 18G7, chap. 2,p. 55.
—
Généalogie desIForesiiersde Flandre, par C. Martin Zelandoys, Anvers, chezJ.-B. Vrints, 1598, p. 2.—
Les comtes de Flandre, parEdward leGlay, Paris, 1843, prélim : p. l.—
Ilisloire descomlcs de Flandre, depuis l'établissementdeses souverains jusqu'à présent, pas denom
d'auteur, Paris, 1733, Ouvr. de la bibliothèque de Douai, p.4, deVAbrcr/é de l'Histoirede Flandre.—
FlorusIII,3.—
Histoire de la Flandre etde sesinstilulionsciviles etpolUiques jusqu'à l'année 1305, par L. A. Warnkœnig, Bruxelles, 1835, p. 119, 123.
—
Histoirede Flandre, parKervyn do Lettenhove, Bruges, 1853. p. 52.
—
Cliarlemagne, par Gapeligue, Bruxelles, 1842, p."25, 159, IGO.
—
De la religion du Nord de laFrance avant le christianisme, par Louis do Baecker, Paris, 1834, p. 7 etsuiv:—
Une pagedétachée de l'histoire de Flandre, 1301 à 1328, ou l'époque héroïque de Biugcs,jnu'.1. Pcrneol, Bruges, 1850 :—
8_
Clainnarais, àBlandéque, à Wisernes, des débris denavires et des ancres (1). Les
eaux
de lamer
envahissaient de plusieurs cùlés les marais et, faisant irruption à travers lesdunes, gagnaientles iorèls elles-mêmes.
Un
écrivaindu
xvi" siècle, CorniUe Martin Zclandoys,nous
ditque
la Flandre s'appelaitFlandria
œstuaria parce qu'elle étaitpleine deflots etd'étangs. Cefutseulement avecle
temps que
lamer
se retira lorsque l'on eut créé en quantité suffisante des obstacles telsque
remparts, fossés, etc.Pierre Bertius,
en commençant
sa Descriptiondu
comté deFlandres,dit: « L'ondoute d'oùvientlenom
de Flandres:(1) LeGlay(prélim.p.1.)prétendque lamers'avançaitnon-seulement jusqu'à Clairmarais, Blandéque, Wisernes, viais jusqu'à Flines-lez.
Marchiennes, aux environs de Douai. Nous devons à l'obligeance de M. Jules Lion, auteur de savants mémoires surle Portus Itius et le Sinus Itius, la communication suivante qui indiquera ce qu'il y a d'erronédans cette assertion:« lamer, au tempsde Jules César, venait
• battre le pied du mont Sithin, et au
V
siècle, legolfe appelé avec» raisonllius s'étendaitencore de Sangatte àClairmarais.
—
Quant àla• plainedeDunkerque dont le niveau n'estaujourd'hui qu'à 1 m. en
» moyenneau-dessous des hautesmers deviveseaux, elle était certai-
• nement couverte par les eaux au temps de Jules César. De cette
» époque au
V
siècle, on apu y faire des tentatives d'cndiguement,• maiscene fut que longtempsaprès cestempsreculés quecette vaste
» iiiaine putêtre conquise sur lamer.
— Au v
siècle, dans ledéparte-• mentdu Nord, leterrain submersible peutselimiterjiar le canal de
• la Colmeetlecanal deBerguesà Furnes. Fiines-lcz-Marchiennesest
• bien loin de là. »
En
suivant la cartedressée parM. Jules Lion, on voit que le golfe Itius commençait au cap Blanc nez,en avant de Sangatte, se continuaitlelongdu littoraljusfpi'àl'embouchure del'Yser ttu-de<sus do Furnes, et au-dedans dos terres était limité ])arGuincs, Ardres, Saint-Omer, Blandectiucs, l'Aa, ^Vatton, lecanal de la Colmo.Bergues, le canal de Borgnes à Furnes, Ilondschoot et Fumes.
—
9—
D
aucuns
le déduisent d'une ville de ceraesme nom,
assise Doù
est à présentArdenbourg
; les autres de Flandebert,» fils de Belsinde, qui fut
sœur
de Clodion, roy de France.V CeFlandel)ertvivait l'an deChrist Aio. Lesautresestiment
»)
que
cenom
lutdonné
à ce pays de Flandrine,femme
de» Lyderic
premier comte
; quelques-uns aussi, des vents et» flots dont ce pays est fort affligé
pour
estreproche
voisin» de la
mer
; voire de telle sorte sujet qu'encore l'aniSAO
» en la location et vendition des
champs,
on exceptait cela» assavoirquesi
dans
le terme de dixanslamer par
sonfins» les submergeait, le contract seraitde nullevaleur y> (i).
Le
pays était voilé par d'éternels brouillards, attristé pai' des vents glacés, impétueux, qui, selon quelques-uns, four- nissentl'explicationdu mot
Vlaendercndonné
à la Flandre.Florus ne fait pas de diiïérence entre le ciel de la Gaule et celui de la
Germanie
; il les qualifie tousdeux
deafroxcœlnm.
D'après l'opinion émise par M.
Kervyn
de Lettenhove, opinion qui rencontrebeaucoup
de partisans, lemot Flandre ne
s'applique dans l'origine qu'aux rivages de lamer
situés entre les frontièresdes Gaules et laFrise,où
des coloniesSaxonnes
(2) étaientvenues successivements'établir.(1)Communication deM.JulesLiondéjàcilé.
(2) Los Saxonsdoiventl^r
nom
àleurs longs couteaux. Ilsvenaient des bords de l'Elbe.—
Ils s'imposaientla loi des'exiler tous les cinq ans. Ceux qui devaientquitterla patriepour ne plus la revoir étaient désignés par le sort.—
Les Saxons adoptaientlenom
de Kcrskonung pour désigner ceux quilesconduisaientaux batailles.On
ne doitpoint prendre iciladignité de roi dans ses acceptions monarchiques: rrj- signifiealorsconducteurd'hommes,chefde troupesvictorieuse?quelque-fois
mémo
capitaine de pirates.—
10—
Le nom
de Flander-Land, celui de Flamings,que
portent ses habitants, appartiennent à lamôme
langue et auxmêmes
traditions; ils désignent la terre des bannis, le soloù
la conquête adonné aux
piratesun
portpour
leurs navires,une
tentepour
leurscompagnons.
La
Flandre, dans l'origine,forme un
district individuelnommé Pagus
Flandrensis (1). Cepagus
n'est autreque
le littoral saxonconnu
déjà vers la findu
A" siècle,du temps
de Théodose, et dans la Notiliaimper
H, sous lenom
deliltits
Saxonicum,
etoccupé
par les colons germaniques.Il s'étend des frontières du la Morinie jusque vis-à-vis d'Anvers, etsesubdivise en plusieurs petits cantons, savoir:
celui de
TYser
quicomprend
Nieuport, celui de Bruges, et le pays de AYaes (placé d'après quelques auteurs dans lePagus Gandemis)
avec les quatre métiersou
villœ [>rinci- pales de Bouchautcs, Assencde, Axel etIlulst.Telle était la Flandre jusqu'en 8Go,
époque
à laquelle elle eutpour
limites, auNord
età l'Estl'Escaut : au Sud,(1) Lemol Pagussignifiepays,canton(voird'Oudegherst,dise:prôlim.
etMaury, chap. 10,p. 135).
—
Los grandsdistricts (pagi majores) se sont formésd'après les peuples quileshabitaient, et se sont conservés jusf[u'au milieu du xii" siècle. Jusqu'à celle époque la situation desliiciililés et des possessions particulières est déterminée d'après les cantons.
Au
xii' siècle, la division jiar cantons litjilace à cellepar Ciiàtelienies{Caslcllani.r) ; néanmoinsi>lusio%rs contréesretinrent leurs anciens nomsde pays(pagi)telsque le pays de ^V;l'S, le pays d'Alost (Warnkœnig, )i. 121 et de Loys,i'. Hï.V, \o pays du Franc de Bruges connuaussi sousle
nom
de Municijiium Hrugense. Lesnu)lsFranc de Hnir/essignifientt(M-refranche, Rrupensis Agor immunis, (Dictionnaire géographiqueet historique jiarMiciiel-Anloinc Haudrand, Paris, 1705) :—
Le mot Municipium signilii' li'^n fortifié possédant sa .juridiction (AdhéinarTnghels.ji. 17.'
—
11—
l'Oise et la
Somme
jusqu'à Saint-Valery inclusivement, à l'Ouest etau
Nord-Ouest, l'Océan.La
Flandre comprit alors en863
:Le
Prgus
Bononicncis, dontlesprincipaleslocalitésétaientBoulogne
{Gcssoriacum), Witsant, Guincs et peut-être encorex\rkes et Petresse, depuisCalais.Le Pagus
Flandrensis,au
Nord-Est; Bruges en était la principale ville.Le Pagus
Menapiscusou Mempiscus
l'orme de sixmoindres
Pagi, savoir: l*^ leMempiscus
proprequi s'étendait depuis Cassel jusqu'aux environs deGand.
2° le Thorholtanusoù
l'on remarquait
Thourout
et Roulers. S*' le Curtriusus surles
deux
rives de la Lys autour de Courtrai,où
s'élevaient Courtrai, Ilarlebecke et peut-êtreAudenaerde.
-4° leTorna-
censis, à l'exception desplaces de
Condé
et d'Antoing quise trouvant sur la rive droite de l'Escaut appartenaientau
roi Lolhaire. 5°le Leticus, sur lesdeux
rives de la Lys,où
se trouvaient Reninghe, Armentières et Broylus, qu'on appela depuis Maurontiivillaou
Merville,du nom
de Saint-Maurant qui bâtiten cetendroit, dontil était seigneur, lemonastère
de Brueil. 6° lePagus
Gandensis, payspeu
étendu, qui possédait l'abbaye de Saint-Pierre aumont
Blandin, lePortus
Gandavus
etprobablement
aussi les villages deHeckengem
(Akkergem),Goxdelghem (Woxdelgem),
Slola, Slonderiga (Sleydinghe), Desseldonck (Desteldonk),Tonen-
sela (Dooreseele),
Spengcdonk
(peut-êtreTer-Donk
sur le canal fieNcuzen) etMetmedonk
(Mendonk), qu'un diplôme de967
indiquecomme
appartenant au Portus Gandavus.Le Pagus
Aderlisusou
Atrebalensis, l'Artois de l'histoiremoderne,
qui avait déjàles villesd'Arras,Bapaumo,
Lens et r>(''tliun('. 11 ;iv;iit dans s;i dt'peiidnnce les pngi sniv;inls :— n —
i» rOstrebannus, situé entre l'Escaut et la Scarpe,
où
se trouvent les monastères de Marchiennes etIlasnon,Goui
etLambres.
2" le Tarvennensis où AVaslclain désigne les villesde
Térouanne,
Sitiu(l'abbaye de Saint-Bertin près de Saint-Omer),
Blangircnti, Aire, Saint-Pol, Lillers et autres demoindre
importance.Le
Melunensisou
Medenalensis,nommé
plus tard Melan- Ibois,où
se trouvaient Seclin^ Runcliin, Roubaix, et Los,abbaye
près de Lille.Le
Pabulensis, pays de Pcvelleou
Puclle, dont Orebies et l'abbaye d'Elnoneou
dôSaint-Amand
étaient les principaux points.Après
le partage des Etals de Lolliaire, entre Louis et Cliarles-le-Chauve, celui-ciparaîtavoir ajoutéaux comtés
de Baudoin-Bras-de-Fer lecomté
de Cambrai, puisquenous
voyonsque
Rodolpbe, fils de Baudoin, en étaitcomte
avant 899.(Rodolphus comes
Cnmeraccnsis, frater comilis flandrcnsis,in bello occiditur). (Rbot,fino, ad ann. 899).CHAPITRE
IIUTILITÉ
DES
FORÊTS.Les
Gouverneurs
de la Flandre, avant l'établissementdu comté
héréditaire de Flandre, étaient des comtes bénéfi- ciaires portant le titre de Forestiers.Ce
n'était pointlàun
simple titre honorifique. Les Forestiers étaient réellement desAdministrateursplacéssouslecontrôle defonctionnaires d'un ordre plus élevé, le Missi Dominici.C'estcequinous
est indiqué d'une
manière
formellepar l'article22 du
capi- tulairede l'an810 où
ilest dit : u Ut Missi nostriubicumque
» fuerint, de forestibus nostris dilligentissime inquirant
w
quomodo
salvœsint etdefensaîetntcomilibusdenwitienl.y>Ces explications sont nécessaires
pour comprendre
pour- quoinous donnons
assez de détails dans les chapitres suivants concernantles forêts, lahiérarchie administrativeet lesrèglements del'époque, relatifsaux
forêts.(1) Baudrillart :DictionnairegénéraldesEauxelForêls, Paris, 1823, tome I., p. 43 et 44 duDiscourspréliminaire.
—
Charlemagne, par Capefigue. Bruxelles, 1842, p. 46.—
L'aliénalion des forêts de l'État devant l'opinion imblique, Paris, 1865, p. 3, 22, 70, 48, 143et 233.—
HevuedesEauxet Forêts de 1809, p. 116;de 1867, p. 194, 195; de 180S, p. 161, 162, 163, 166; de 1862, p. 156.
-
Biographie générale, publiée parMM.
Firmin Didot, sous la direction de M. Hœfer,—
article :Schiller.
—
Coursélémentaire de culture desbois, parLorentz, complété fl iiubliéparParade, édil. de 18ô5. Introduct : vetvi.—
14—
Les historiens qui ont écrit sur les Forestiers se sont
généralement peu
occupés de cesOfficiersroyaux
au point de vue administratif,au
pointde vue des forets soumises à leur juridiction, et cependant cette question présenteun
intérêt réel, puisque de tout
temps
on apu
reconnaîtrel'utilité desforets.
Ainsi, sous les Forestiers, les forêts (les Forestœ) étaient utiles spécialementà cause de la chasse. L'administration des fermes royales (Forestœ rcgiœ, Villœ reciiœ) offrait
une
haute importance dans le système adopté parCharlemagnc
;c'étaitla
branche
principaledu
revenu public.De
nosjours,on
reconnaîtplusque
jamais l'immenseutilité des forêtspour
régulariser lerégime
des eaux et s'opposer ainsi aux inondations,pour
[arrêter lamarche
des sables dans les dunes,pour empêcher
le tarissementdes sources,pour
maintenirles terres dansles pentes. Lesmassifs boisés purifient l'atmosphère en absorbant lesmiasmes
délétères qui s'exhalent deseaux
stagnantes et marécageuses.Un
hectare de forêt fixe par an dans les tissus ligneux
2000
kilogrammes
de carbone,empruntés
tout entiers à l'atmos- phère par la décompositiondu
gaz acide carbonique.—
Etau
point de vue de laconsommation
!Nous
ne citeronsque
quelques chiffres ; car,comme
le dit Pline (livre XII): (( Mille sunt ususarborum,
» etnous
serions entraînés trop loin.—
11 faut à lamarine
militaire 40,000
mètres cubes par an, et à lamarine marchande
00,000, soit en tout 100,000 mètres cubeséquarrisà vive arête,cequicorrespond à200,000
mètres cubes de bois plein.—
Les traverses dechemins
de fer, destinées à supporter les rails, durent dix ans ; il en fallait déjà en 1804,3,000,000
par an, ce qui à raison de 10 ]»;u'mètre
cube, doniirnu volume
{\o :U>0,000—
15—
métrés cubes par an, correspondaiU à la production totale de
120,000
hectares de forêts régulièrementaménagées en
futaie pleine ! Et le réseau de nos
chemins
de fer est loin d'être complet! Eton
n'a pascompté
dans le calcul qui précèdelesboisnécessairespour
laconstruction deswagons,
tenders etc. !—
Aussi leschemins
de fer ne savent pascomment
suppléer à l'insufiisance des produits propres à la fabrication destraverses.On
a essayé lefer eton areconnu que
le prix était plus élevéque
celui des madriersen
bois.— Dans
certaines partiesdu
bassin carbonifèredu nord
dela France, des puits ont plus de
000
mètres de profondeur, et il fautpour
le cuvelage de ces puits,pour
guidages et autres travaux accessoiresjusqu'à500
mètres cubes de bois de chêne de l" choixau
prix de200
à250
fr. l'un !De
plus,une
fossecomprend
des galeries principales, des galeries secondaires.La compagnie
d'Anzinconsomme
annuellementpour
ces galeries1,070,000
perches, de diverses essenceset et de diverses dimensions ! Et lescharbonnages prennent
de plusenplus d'extension dans notre contrée !On
rapporteque
Schiller, legrand
poète, qui obtint delaconvention le
26
août1792
avecseize autres étrangers le titre de citoyen français, interrogeaun
jourun
Inspecteur des Forêts sur saprofession etses travaux,etque
cedernier en parla avec tant de verve et d'enthousiasmeque
Schiller s'écria après l'avoir écouté avec attention : a. Quelbeau
)) métier
que
celui de Forestier ! Je voudrais être Fores-» ticr ! D Et en effet
on comprend
cet enthousiasme en se reportantà cette variété de travauxque comporte
le service, telsque
triangulations etaménagements
de forêts, barrages etgazonnements
contre les inondations, création de pépi- nières, semis et plantations iini.iiiiinciil (l;ins les dunes.— 16 —
établissement de routes
pour
le transport des bois, de ponts, d'aqueducspour
l'écoulement des eaux,de fossés d'assainis- sement, direction des exploitations, estimation des bois à vendre, détermination des arbres à réserver, elc, etc.;
travaux qui sont tous
marqués
d'un liaut degré d'utilité, et quiempruntent
leurs éléments constitutifsà l'bistoirc natu-relle,
aux
matliématiques, à la physique, à la chimie, au droit et à l'économie politique.L'illustre ministre Colbert s'occupait des forêts puisque c'est à lui
que nous
devons l'ordonnance deseaux
et forets de ICG9.On
lui prête cesmots
: « laFrance
périra fLiutede bois ! » Puisse cette
menace
ne jamais se réaliser !Puissions-nous conserver avec soin et améliorer de plus en plus les forets qui
nous
restent!Espérons
surtoutque
l'onne
songeraplus à l'aliénation des forets de l'Etat.Rappelons-nous
qu'en1805
lorsque leGouvernement
a présentéau
Corps législatifun
projet de loipour
l'aliéna- tion de forêts de l'Étatjusqu'à concurrence de100
millions de francs, d'énergiquesprotestations ont éclaté de toutes parts, etque
cent-trente-mille hectares de forêts ont été sauvés !CHAPITRE
III.DESCRIPTION FORESTIÈRE
DE
LABELGIQUE
(2).La
Belgique actuellement sipeu
boisée le fut jadis sur presquetoutesa superficie.Le mot
loo quisert àformerune
foule denoms
de localités de la Belgique telsque
Waterloo, Westerloo, Louvain (2), etc.. s'appliquait à des hauteurs boisées, ettémoigne
de la disparition des forêts dans les Flandres et le Brabant.On
areconnu
des branches et des troncsde bouleaux, dehêtres etde chênes danslestourbières de la Flandre.Les essences qui composaient les forêts au
temps
des Gaulois étaientgénéralement
lesmêmes
qu'on y rencontre aujourd'hui, abstraction faite de celles qu'y ont introduites les progrès de la sylviculture. Ainsion
y voyait déjà nos principales espèces de chênes, l'érable (acer), le bouleau,(1)MAUUY.Chap.2.p. 58.Chap.4.p. 82. 83.Chap.G.p.113.Chap.2.p. 55.
(2) Louvain,lemott'en,enllamand vehen, en liollandais veen; signi-
lie • tourbière ». Lesnomsde vcnloo, looven, indiiiuont donc dos lieux tourbeuxet boisés (Maijry,chap. 2, p. 58).
—
IS—
l'orme, le saule, le platane(I).
Le
hêtre foisonnaiten Gaule, làoù
lesol atteignaitune
certaine altitude.L'état forestier de la Gaule sous les Mérovingiens et au
commencement
des Carlovingicns, ne devait pas être bien différentde ce qu'il étaitsous lesRomains. Le
seul traitqui différencie lesdeux
époques, c'est que, de plus en plus coupéespar des chemins, les forêtsanciennes encore subsis- tantes tendaient à se partager en plusieurs forêts distinctes.Près
du
littoral de l'Océan, les arbres n'offraient pas lamême
élévation, les fourrés lamême
épaisseur qu'àl'inté- rieur des terres;on
rencontrait seulementune
suite de buissons, de hallicrs, poussant surun
solmarécageux.
Les
Ménapiens
et les Morins (2) se logeaient dans ces forêts bassespour
harcelerl'armée romaine.II'^'>
FORÊTS DU
LITTORAL,FORÊTS
ET BOIS DIVERSSOUMIS
A LA JURIDICTIONDES GRANDS-FORESTIERS.
M.
Maury nous
dit à lapage 55
de son ouvrage sur les forêts des Gaules et de l'ancienne France : c( les forêts qui(1) Le Platane lui Iransiioiié par los iMorius desbords duTibre sur ceux de laLysetde la(Planche(P.d'IIoudegherst, discours préliminaire, p. 13).
(2) Virgile {Enéide, I. 8) placeles Morins aux extrémités du monde parce qu'ilsoccupaient l'extrémité ducontinent occidental de l'Europe (P. d'IIoudeghcrst, Discours prélmiinaire, par Lcsbroussart, p.3.)
(3)Mal'uy.Chaii.î.p.5G.fj?.58.59. Cliap.C.i».112.Cliap. 11.p. 186. 187.
—
19—
» couraientd'Osteiide à
Boulogne
paraissent avoir subsistéy> jusqu'au
temps
deCharlemagne.
»Nous pouvons donc
ajouter : (c par conséquent sous les« premiersForestiers. » Ce fait est très-important à relater
pour
combattre l'opinion émise parM.
de Loys dans sonmémoire
de 183-4 àla société desAntiquaires de laMorinie, p. 88,où
il prétendque
lenom
de Forestier ne vient pas de Forêts puisqu'iln'y avait pas de Forêts dans lapremière Flandre.C'estlà
évidemment une
erreur, ensereportantauxlimitesque nous
avonsdonnées
à la Flandre primitive, d'après l'opinion deKervyn
de Lettenhove et deVarnkœnig
;c'est-à-dire
que
la Flandreou
lePagus
flandrensis, d'après ces limites, comprenaitune
portion des forêtsdu
littoraldontla présence est signalée précisément par M. Maury.
Le même
auteurnous
diten outre,qu'aumoyen-âge
laforêt de Beverhout s'étendait surune
partiedu
canton deBruges
(qui faisait partiedu Pagus
flandrensis).L'emplacement
deTurnhout
(situéà28
kilom. N.-E. d'Anvers) et deThourout
(sisà
16
kilom. S.-O. de Bruges) étaitoccupé au
vii"^ siècle pardeux
forêts(Thoraldi sylva,Thoraltisylva)d'où cesvillesonttiréleur
nom.
Sous
Charlemagne
et ses successeurs, la juridiction des tjrands-Foresticrs ne s'exerce plus seulement sur lePagus
flandrensis,
mais
sur divers districts, dontla plupartcontri- bueront en863
à former la Flandre agrandie.— Dans
ces districtsnous
trouvons les forêtsou
les bois suivants qui recouvrentune
grandepartiedela superficie, et serattachent sansdouteles unsaux autrespar des lignes d'arbres souvent entre-croisées et formant de véritablesplexus:—
-20—
i" Lo Lisgaiiaw, t'orèt des bonis de la Lys, donl le point central paraît avoir été Ilarlebecke, sis à
une
lieue au nord deGourtray.— Le
Skeldeholt. forêt de l'Escaut, qui se pro- longeait sur les bords de ce fleuve, et touchaitWasda ou Waes
(forêt aux vastes prairies) dans lecomté
deGand.
Le Wasda
était situé entre le Skeldeholt etle Lisganaw.Le Lisganaw
et le Skeldeholt sontmentionnés
dans le capitulairerendu
en877
par Gharles-le-Ghauve.>
2°
La
forêt d'Orville, située d'après quelques auteurs près d'Aireen Artois,où
ils placentla villaroyale dontparlentles annales deSaint-Bertin.3'^
Dans
le diocèse deTcrouannc
donl dépendaient AireetSaint-Omer. —
La forêt dite Tristiacencis sylvaou
vastus saltus.Le
bois de Beyla (Bailleul) situé entreBudderwoorde
etThourout.
A" Sylva sancti Leodegarii, forêt
où
saint Léodegaire souffrit le martyre, et qui, s'étendant sur le territoire des Atrébates, se rattachait aux précédentes. Il en reste encore aujourd'huiun
débris dans le bois deLuchcux
dont lenom
est
une
corruption de celui de Léodegaire.5"
Au nord
de Bailleul.—
Le bois d'Ypres et le bois de Poperingue.G"
La
forêtde Lcns.7'^
Dans
le district de Loo.— La
forêt de Ilcinaersl- Trist, débris au0" siècledu
Vastus saltus.8"
Du
côtéde Giiiae et d'Avesnes.— La
forèl d'Arouaise i^aridarjamentia sylva) etla foret de Tliiérache {Theoracla Sylva) qui furent défricliées debonne heure
sur plusieurs points.9°
Dépendances
de la forêt Charbonnière.— La
forêt de Vicogneou
deSaint-Amand
étaitune dépendance
de la forêt Charbonnière, et devaitcomprendre
la forêt deCondé que
l'Escaut partage en deux.
On
distingue encore sur la carte des tracesnombreuses
de son ancienne extension à l'ouest. Toute larivegauche
delaScarpe jusqu'au bois situé
au
sud deTournay
estsemée
de localités dontlesnoms
dénotentl'ancienne présence des arbres; tels sontceux deSautbois, Court-aux-Bois, leChêne-
Sartaigne, Rue-du-Bois.A
l'ouestd'Orchies, les boisdu
Roi deviennentun
dernierlambeau
de lapartie de la forêtCharbonnière qui s'étendait au sud jusqu'au voisinage de Douai,comme
le rappelle lenom
de LeForest, porté parun
village sisun peu
au nord de cette ville. C'est làque
passe la frontière de l'ancien Artois.Ce
canton de laforêt Charbonnière adû conséquemment
constituer la
marche
des Atrébates.Une
charte de l'an937
mentionne
dans les environs deSaint-Amand une
forêt appelée Blangiacus (Blangy) qui estun
autre débris de la forêt Charbonnière.:).)
III "^
FORÊT CHARBONNIÈRE. — QUELQUES MOTS SUR
LAFORÊT DES ARDENNES DONT
ELLE FAISAIT PARTIE.D'après
du
Tillet, les Forestiers avaient sous leur juri- diction laforêt Charbonnière.On
ne s'expliquepascomment
celte forèl pouvait
dépendre
des Forestiers, puisqu'elle se trouvait dansle Ilainaut, le Brabant et leCambrèsis, que, de plus, elle étaitliniilée à l'ouestparl'Escaut, etque même
en 863, après l'agrandissement delaFlandre,cecomté
de Flandre ne s'étendait à l'estque
jusqu'àl'Escaut.— Panckouke nous
dit
que
plusieurs historiens ontnommé
la Flandre forêt (iharbonniére parcequ'elle étaitcouverle de plusieursforêts.Ilest
donc
probableque du
Tillet a faitune
confusion rela- tivement auxnombreuses
forêts qui couvraientla Flandre,et dont
nous
avons fourni la nomenclature, en leurdonnant
la dénomination de forêt Charbonnièreapplicable seulement à des forêts
du
Brabant,du
Ilainaut etdu
Cambrèsis. Les Forestiers exerçaient leur juridiction sur desdépendances
dela forêtCharbonnièreque nous
avons indiquées.De
plus,Charlemagne
ayantplacéles Saxons transportés dans laFlan- dre et le Brabant sous la directiondu
forestier Lyderic IIpour
défricher des forêts,on
voitque
les Forestiers ontpu
aussimomentanément
s'occuper de la forêtCharbonnière.(1) Abrcf/écliranolo(jiijUf delUisluircde Flandre.]k[\-A.J. Piinckouke, Lille, 17G2. p. 7 et8 del'introd:
Maiky. Clia]).'2. p. 03. 5i. 00. GO. Cliai.. 11. p. HT. iSi. 187.
Eludeséhjmolo(jiques, parChotin.
Dicliunnairc de laConverstdion eldelu Leelure, Paris.1833,t.3..Ait.
Anlunncs(Forôls des) Cœsar, debell. gall. VI. 33.
—
i>;J—
Nous donnerons donc
la description de cette forêtdont on parlefréquemment,
en disant aussi quelquesmots
dela foret desArdennes
dontelle formaitune
partie.Au nord
de laSomme
et de l'Aisne se trouvaitune
forêtconnue
souslenom
de Carbonariasijlva,foretCharbonnière.Cette foret asans doute pris son
nom
des charbons qu'on yfaisait,
comme
l'indiqueCharlesWastelain danssadescription de la Gaule belgique.—
D'après Belleforest, lenom
de Charbonnière seraitune
altération de Cambronière, dérivédu nom
deCambron,
le chef des Cimbres,ou
peut-être de celui desCimbres eux-mêmes. La
forêt Charbonnière est très-souventnommée
dans lesmonuments du moyen-àge.
Sulpice Alexandre,cité par Grégoire de
Tours
{Hist. eccl.franc. 11, 9) en parle à l'occasion d'un avantage
que
lesRomains,
ayant à leur têteNannenus
et Quintinus, y avaientremporté
surlesFranksvers 388.Ellen'ajamaisétécontinue.Elle s'étendait
au nord
jusqu'à Bruxelles (1) et Louvain;au
sud-est, jusqu'à la
Sambre; au
sud, jusqu'à Landrecy, Bavay (qui existait déjàdu temps
desRomains), le Quesnoy,péné-
traitdanslapartieEstdelaPicardie;l'Escautformait sa limite àl'ouest. Lesforêtsde Soignes {SylvaSoniaca), (Sonienbosch) près de Bruxelles, de Fagne, Sirault
ou
Tirault, la forêt deMormal
dans le Cambrésis, faisaientpartie de laforêt Char- bonnière.La
plusgrandemasse
setrouvait dans le llainaut.(I) Bruxellesécritdans lesiincienneschartes lnVinasIlrosclla, Dritolc- sila, Bruesella, Drusellia, signifie un petit bois, un breuil.
Un
village situé près(JeSaint-Gillesgarde encorelenom
de Foresl, dénomination qui prouve qu'uneforet existait dans leprincipe au sud do Bruxelles, (note des annales forestières, 1'' année 1808, p. 208, 219, citée par Muury, cliap.2. p. 59).__ 24 —
Nous
avons indiquéprécédemment
quelles étaient les dé-pendances
de. la forêtCharbonnière.Les bois
que
l'on coupait dans cette Ibrèt et ses dépen- dancesétaient vraisemblablementembarqués
surl'Escaut, et conduits de là sur les bords de l'Océanoù
ils servaient à construire des nefs qui hantaient la haute mer.—
Dès leVIP siècle, la fondation de monastères au voisinage
ou
dans les clairières de la forêt en hâtèrentledémantellement
(1).Près de
Namur,
laforêt de Villersou
de Mariage unissait la forêt Charbonnière à laforêt des Ardennes, dont Césaret Strabonnous
ontdonné
ladescription, etqui estmentionnée
par Tacite et plusieurs écrivains de l'antiquité.Le nom
d'Ardcnnes
ou Anhicnna
sylva estun
appellatif général.Ardanacou Arduanac
signifie très-grand, très-étendu. C'étaitdonc
la grande forêt, demême. que
la forêt Hercynienne, enGermanie,
le Ilarz (engermanique, grande
forêt). Les différentes parties desArdennes
avaient desnoms
propres, Celle qui couvrait les Vosgess'appelaitYosaqum,
et celledu
Hainaut, autour de Bavay, Carbonaria.La dénomination
de très-grande, très-étendue, étaitdonnée
ajuste titre àlaforêt des Ardennes, puisque, d'après Jules César, elle s'étendait depuisleRhin
jusque chez lesNcrviens,(2) surune longueur
de i)lus(le500
milles.(1) La constitutionen foivlssoparéos dos principales divisions de la forélCharbonnière, expliiiue pourquoile
nom
de celle-ci disparut au moyen-âge. Déjàà lalin du xirsiècle, elle n'esti)lus représentée quecomme
un bois,Nemus
Carboneria (Maury, Cliap. 11, p. 183).(2) Les Nervienshabitaient entrelaSambre et l'Escaut surlesbords delaDyle et dela Ilaync(Notice, surl'origine ri laformation des vil- lages dunordde la France, par M. le PrésidentTailliar,de Douai).
CHAPITRE IV.
I i'3
ATTRIBUTIONS
DES
FORESTARII, SALTUARII (2! ,OU GRANDS-FORESTIERS DE
FLANDRE.Les gouverneurs de la Flandre, avant la proclamation de Baudoin Bras-de-Fer
comme comte
héréditaire, exerçaientsur cettecontréeune
surintendancecivile, militaire etmaritime.On
les désignaitsouslenom
deForestarii,Saltuarii,Grands-Veneurs ou
Grands-Forestiers. Ces titres étaient loin d'êtresimplement
honorifiques. Les forêts, ceque
l'on appelait alors les Forestœ, les Villce regiœ, recouvraient le pays, et les gouverneurs de laFlandreou
Grands-Forestiers étaientfl) L'Univers pillorescjuc, Histoire de France, parPh. Lebas.
—
Art:Flandrecl Artois, p 113.
—
La France Forestière,par Cli. deKirwan,\). 312 du correspondant du 25 juillet 18G9.
—
Notice Jtistoriqiie sur quelquesmonumentsdesenvirons d'Arras,parM. lePrésidentQuenson;notesp. -123des Mémoires de la Sociélé d'agriculture de Douai, 1829- 1830.
—
Cliarlemagne, par Capofiguc, p. 113.'2) LemotForrlest indiqué enlatinparlesmotsForesla,Foresk,Forex- lus,Sallus, Silva, Ncmus : lesquatrejjremiersdonnentl'explicationde?
motsForeslarii, Salluarii(Voir l'ouvragede
Du
Gange intitulé: •Glos-?ari\mini1 scripton-smedin^ ft infim.Tlatinitatis. • Paris. I8i4\
— 20 -
réellement des administrateurs dont le service était contrôlé par des députés royaux (les Missi dominici).
Charlemagne
les invitait à prendre connaissance de tous ses décrets,
notamment pour
la chasse, et indiquait par celamême
qu'ils remplissaient réellement des fonctions d'administra- teurs.
Les Grands-Forestiers provoquaient lesjugements, avaient
un
droit d'inspection sur les métairies royalesdites Forestic quiétaientcomposées
de jardins, vergers et surtout de bois avec les plaines, rivières et étangs qui lesjoignaientou
s'y enclavaient. Ils donnaientdes instructionspour
la chasse, lapèche, lesdéfrichemenis, etc....
Dans
les boisnombreux
qui couvraient le pays, ils devaient chercher àles rendre prati- cables et à pourvoir à la sûreté ties voyageurs.Ils portaient non-seulement le titre de Grand-Forestier
mais
aussi celui de comte, (i) puisqu'en parlant de l'un d'eux, d'Inguclram, dans le capitulaire de Charles-le-Chauve
de 853, on désignecomme comtés
d'Inguclram, les districtssoumis
à sajuridiction. Par conséquent tout ce qui va suivrepour
faire connaître les attributions des Comitéssera applicable auxGrands-Forestiers.»l)Lolitredocomlosorencorilix'•Ji'-jàà la lin duiv" tiiocii:dans ji'lilliis
saxnnicuinou lo Flandir.A'um loisiine l'omperourHonoriuslit dijnoni- l)rRr jtjspojiuialions divui^esd'!l'ompirc, lorsqu'il commandaderédigiM*
lelivresur lesdignitésdumomie romain,ilindiqua un comte du littoral B3iionromcslill'irissa-roniri{flisl.rirC/itirlcnhiffiir. parCapelipue.p. \:)^.)
27 —
II0)
RÉGIE
DES FORÊTS
ROYALES.—
HIERARCHIE ADMINISTRATIVE.La régie des Ibrcls royales t'ait l'objet de plusieurs capi- lulaires de
Charlemagnc
et de Louis-le-Débonnaire, et on peut déterminer de lamanière
suivante la hiérarchie administrative : 1° Seniscalclms, "i" Buticulariiis.— Le
Sénéchal était Grand-Maître de France. Il occupait la pre-mière
dignité del'Etat.— Le Grand
Bouteillier étaitGrand-
Officier de lacouronne. Les chartes des roisétaient signées par lui.
Les officiers envoyés dans les provinces
pour
porterou pour
exécuter les ordresdu
roiou
de la reine, en ce qui concernait l'administration des biens royaux, dépendaientdu
Sénéchal etdu
BouteiUier,On
en a la preuve dans la findu
capitulaire deCharlemagne
de l'an802
ainsiconçue
:«
quando
adaliquam
utilitatem eos miserimus, aut)) Seniscalchus et Buticularius de nostro verbo eis aliquid
» facere prœceperint. »
(I) Baudiui.laht. Disc, prél'un : p. i3, 4i. art. « Foret « p. Ilî3.
—
Maihy, p. 07, 08, 90, 100, -iOO, 410.
—
La France forestière, par Ch.deKirwanj). 312 et313du Correspondantdu 25juillet 1800.
—
Diclion- naircdelaConversation et de la Lecture,art. «SénéchaletBouteiUier.—
Xolire dis diplômes, deschartes el des actesrelatifs à l'histoire de France, jiar M. do Foy, Paris, 1705, p.281, 282, 2S'i.—
rlmrt'maipir.]>iw (".,ipolif.'nr. )i. 10, :,2, :,1. I^.'), 131. l:W cl |:,8.
—
^2d>-
3° Missi dominici.
—
Cesmois
indiquent des députésque
les rois envoyaient dans les provincespour
voir pareux-mêmes
ce qui se passait et leuren
rendre compte.Souvent on les choisissait dans l'ordre des évoques, ainsi qu'on le voitpar
un
état derépartition qui fut fait alors des divers cantonspour
lesquelson nomma
des députés.Leur
pouvoir n'avait point de bornes; leurs instructions, pas de limites; ilscommandaient
aux comtes avec la puissance qu'ilstenaientdeFcmpereur
;ils paraissaientcomme rimage
et le
symbole
de la centralisation carlovingienne. Ilstrouvaient dans"les provinces des
comtes
résidants, partagés pardistricts limités, qui étaient chargés d'informer de l'étatoù
ils trouvaientlesmétairies royales, et de veiller à y main- tenir lebon
ordre et à yréformer les abus. C'estce ({ui est indiqué par l'article22 du
capitulaire de l'an810 où
il est dit : (( Ut ]\lissi nostri,ubicumque
fucrint, de forestibus)) nostris diligenti'ssime inquirant
quomodo
salvsc sint et» defensœ, etutcomitibus (/cuî/niicn/. »
ïl est nécessaire de
donner
ici quelques explications concernantles métairiesque
l'on désignait sous lenom
deVillœ
ou
Forestœ.Les Carlovingiens, tout en laissant subsister dans les
Gaules
une
partie descoutumes
apportées par les barbares, cherchèrent à fortifier leur autoritéet à s'attribuer exclusi-vement
des avantages dont avait d'abord joui l'ensemble des contpiérants.— A
cetteépoque
on conservait les lorèls,non
pointpour
le bois (jui était troj)commun
et de troppeu
do valeur,mais
avant toutpour
la chasse.La
chasse était l'objet dela vive sollicitude île Cliarlrmagne. Le capitulaire De Villis de Tau800
s'enoccupe
spécialement.— On
sait«•ondiicu les KranKs élaicnl amateurs de la ehasse. « Vix
—
-20—
» ullain terrisnatioinvenitiir
quœ
in hac arteFrancispossity> œquai^i, » écritEginhard.
—
Les arbres defortesdimen-
sions servaientdansles chasses à
marquer
les quêtes et les relais.—
Les loups pullulaient dan?les forêts de laGaule.Les porcs sauvages, les sangliers erraient par troupes
nom-
breuses dans cesforêts où lesglands leur fournissaientune
abondante nourriture ; les renards, les cerfs n'étaient pasmoins
répandus.— On
se servaitpour
la chasse d'épieux garnis d'un fer pointu et de rets faits d'une quadruple toilede Hn. Les cerfs étaient abattus à coups de flèche.
On com-
battait les loups avec le
harpon ou
par des fossesou au moyen
de chiens.—
Les fermes royales étaient habituelle-ment
situéesaumiheu
de vastes forêts; le suzerain y faisaitson séjour de chasse lorsque venait le
temps
d'hiver.L'éducation des chiens, des faucons, des éperviers, était l'objet des grandes sollicitudes
du
suzerain; les chiens étaient de belle espèce d'Ecosse, deGermanie
; les danois, les suèves avec poils courts ; les dogues, (Molossiis, les glossairesdonnent
cenom
àune
^grosse espèce de dogues) àla dent aiguë.Le
droit de chasse devint leprivilège exclusifdu
roi, desLeudes
et des derniers rejetonsde lanoblesse gallo-romaine.Pour
exercer ce droit, les souverainscommencèrent
par affecter à leur usage spécial et à celui des officiers de lacouronne,
non-seulement
lesmassifs deforêtslesplusbeaux
et les plus propices, mais aussiles plaines,rivières et étangs qui lesjoignaient
ou
s'yenclavaient. Ces étendues de terrain, souventimmenses,
étaient peuplées de gibier et do bêtes fauves,etservaient aussi àl'exercicedu
droitde pêche;on les appelaitForestoou
Villfr, métairies entremêlées dejardins, de vergers et surtout de bois. C'i^sl seuhMiK^nt j)lus tardque
— 30 —
]o
mot
forêt (sylva) servit à dcsigiifr iini(|uenieii(uno
j^randomasse
boisée.—
Les ForestiCou
Vilke apparlenanl au roi étaient désignées sous lenom
de Forestac regiaîou
Villccregiac.
— Au
prince seul appartenaitledroitde laisser établirune
Forcsta. C'est ceque Ton
appelait forestare, afforcslarcou
inforestare. Lorsqu'un grand de la cour,un comte
[cornes) voulait établirune
Forcsta, c'est-à-direune
garenne, il devaitdemander
l'autorisation aumonarque
:La
Foresta,môme
établie avec leconsentement
royal, pouvait être supprimée. C'est ce qu'on appelait dcafforcitlareou
disafforestare. Le droit de suppriuicr les Forestœ établies
cnmjussione
régisn'aguère étéexercé parnos rois.Du
reste la définitionque nous
avonsdonnée du mot
Foresta faitvoirque
le droitde déforester no signifiait pas qu'il fût interdit de planter desbois.A° Comités, (ou
pour
laFlandre, lesGrands-Forestiers).—
Les
Comtes
résidants existaient déjà avantCbarlemagne
etmême du temps
desRomains. Le
puissantempereur
leurdonna une
organisation régulière, complète ; il les fitassis- ter dans l'administration et lajustice par des propriétaires élus; c'était l'idée saxonnedu gouvernement
représentatif.Les
Comtes
étaient chargés,comme
leprouve
le capilulaire de 810, d'informer de l'étatoù
ils trouvaient les métairies royalesetdeveillerà ymaintenir lebon
ordre et à reformerles abus.
Les articles des capitulaires
que nous
citerons bientôt et (pii ontrapportauxforets, ferontconnaîtrelesattributions dessubordonnés
des Comîîcs et les difrérenls points sur lesquels devait se porter l'attention de ces derniers dans leur contrôle administratif.— Un
capitulairedeCbarlemagne
i\r l'an Si.) nioiilr<Miue b's comtes n*' jugeaient jias. mai»