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Analyse de livre. <i>La charge mentale des femmes… et celles des hommes. Mieux la détecter pour prévenir le burn out</i>, de Aurélia Schneider

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Academic year: 2022

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Journal Identification = IPE Article Identification = 1835 Date: July 6, 2018 Time: 1:46 pm

Livres

L’Information psychiatrique 2018 ; 94 (6) : 530-1

Analyse de livre

Aurélia Schneider La charge mentale des femmes. . .

et celles des hommes Mieux la détecter

pour prévenir le burn out Paris : Larousse, 2018 Coll.«Essais et documents»

C’est en 1984 que la sociologue Monique Haicault a évoqué pour la première fois le concept de charge mentale, le définissant par la coexis- tence (ni accumulation, ni addition, mais coexistence) chez une per- sonne, essentiellement une femme pour les raisons que nous verrons, de deux univers contraignants, pro- fessionnel et domestique, dont la permanence peut finir par cons- tituer une charge psychiquement douloureuse et liberticide. Cette notion a été reprise en 1998 par l’ingénieure Sylvie Hamon-Cholet qui l’a appliquée au monde du tra- vail. Pour mémoire, le syndrome d’épuisement appelé maintenant burn-out, qui n’a pas la spécificité féminine de la charge mentale, a été théorisé dès 1974 par le psy- chiatre Herbert Freudenberger. La charge évolue dans une unité de lieu (la personne en charge) où coha- bitent des objectifs contradictoires, toujours urgents, entraînant une fragmentation et un éparpillement de l’attention du sujet. On pourrait reprendre intégralement cette défi- nition pour exprimer ce que beau- coup de soignants disent ressentir en particulier dans le milieu hospi- talier mais nous sommes là dans le cadre du syndrome d’épuisement et pas dans celui spécifique de la charge mentale.

L’auteur, Aurélia Schneider, psychiatre et psychothérapeute, va aborder cette difficile question de fac¸on historique, clinique, didac- tique et thérapeutique. Ainsi nous aborderons la question de la charge mentale des femmes à travers les âges et nous apprendrons, avant d’en arriver à la responsa- bilité (atténuée) du comportement de l’homme moderne (lui-même contraint par ses archétypes), que l’Homo sapiens n’était peut-être pas le heros viril, chasseur atta- quant le mammouth frontalement, découvreur et artiste, tel que les préhistoriens du XIXe siècle l’ont décrit mais tout simplement un dépeceur de cadavre tandis que sa (ou ses ?) femme(s) étai(en)t au four et au moulin, à charge d’enfant, s’activant à la délicate et difficile cueillette, à la préparation des repas et aux soins donnés aux petits (Lewis Binford), sans compter la disponibilité sexuelle ! Ainsi, la ségrégation dès le Néolithique se serait faite par le biais des outils mis à la disposition des femmes ce qui serait selon certains auteurs le point de départ de la fameuse et fâcheuse division sexuelle du travail.

L’auteur aborde ensuite des pro- blèmes spécifiques tels que la majoration de la charge mentale dans les familles monoparentales, dans les couples divorcés et les familles recomposées ou encore chez les conjoints homosexuels.

L’abandon progressif du droit cou- tumier (assez égalitaire et qui avait permis à la femme de Cro-Magnon de reprendre du poil de la bête, si l’on peut dire), pour le droit romain franchement patriarcal a dégradé la position féminine mais le coup fatal a été porté par le Code civil qui en 1804 a mis pour longtemps la

femme dans un statut de mineur au sein de son foyer. Aurélia Schneider nous rappelle qu’en France ce n’est qu’en 1970 que l’autorité parentale conjointe a été instaurée et que le père n’est plus détenteur du titre de chef de famille ! Ne nous trom- pons pas, il ne s’agit pas ici de s’inscrire dans un discours fémi- niste défensif mais de dresser le décor dans lequel peut s’inscrire la charge mentale spécifique des femmes qui, souvent inconsciem- ment, se contraignent à en faire toujours plus en raison d’une culpa- bilité induite et d’une hyperdisponi- bilité qui peuvent les conduire à une sorte d’autoharcèlement.

Après ce passionnant (et troublant) retour sur les bases socio-historiques des relations femmes/hommes, le discours va devenir plus clinique et technique.

Soulignant le rôle de l’horloge interne dans la charge mentale, l’auteure va développer sa théorie dite de « l’emprise du comptage permanent»dans le quotidien des femmes et décrire leur rapport spécifique, entre autres, à leur horloge biologique (la théorie de l’iceberg). La constitution des dif- férentes formes de charge mentale par l’intermédiaire de facteurs de risque est ensuite abordée ainsi que les signes d’alertes à détecter puis la fac¸on de lutter contre l’emprise débutante. Ainsi, pour maîtriser cette charge naissante, elle propose de piocher dans la règle des sept D : discerner, diminuer (la tyran- nie), déprogrammer, déconnecter, détente, douceur et last but not the least, dansez maintenant ! Chaque sous-chapitre se présente avec un temps d’exposition du problème traité suivi de nombreux exemples cliniques, de conseils précis et de conduites à tenir susceptibles de diminuer la charge mentale. La réfé- rence théorique on l’a bien compris, est celle de l’appareil théorico- pratique cognitivo-comportemental sans pour autant exclure d’autres approches psychodynamiques.

doi:10.1684/ipe.2018.1835

Rubrique coordonnée par Joséphine Caubel

530 Pour citer cet article : Analyse de livre.L’Information psychiatrique2018 ; 94 (6) : 530-1 doi:10.1684/ipe.2018.1835

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Journal Identification = IPE Article Identification = 1835 Date: July 6, 2018 Time: 1:46 pm

Analyse de livre

Dans son prologue, l’auteur cite malicieusement et avec un humour que nous retrouverons tout au long du livre et qui donne une dis- tanciation bien venue, un extrait du Kâma-Sûtra dont voici quelques lignes :«Une épouse fidèle qui aime sincèrement son mari doit le révé- rer comme un dieu et accéder à ses moindres désirs [. . .] Elle tiendra la maison impeccablement propre ; la décorera de fleurs variées ; elle maintiendra le sol bien lisse de fac¸on à donner un bel aspect à l’immeuble [. . .] Quand il rentre à la maison, au seul bruit de ses pas, elle doit se lever et se tenir prête à toutes ses exigences [. . .]

Le dernier chapitre porte sur la gestion optimale de la charge mentale à l’intérieur du couple et laisse entendre que la diffé- rence est une richesse pour autant que chacun s’inspire de l’autre.

Le contexte peut-être suffisamment tendu pour qu’Aurélia Schneider donne la parole à Georges Courte- line :«Il y a deux sortes de mariage, le mariage blanc et le mariage mul- ticolore. Ce dernier est appelé ainsi parce que chacun en voit de toutes les couleurs». Bon, la question est complexe ; on voit, bien qu’il existe aussi de nombreux cas de charge mentale chez des célibataires et que le niveau d’équilibre des taches dans un couple impacte fortement la survenue ou non d’un syndrome dit de charge mentale. Qui sait si la femme du Néolithique, voyant son homme renter dans la grotte le soir venu, ne pensait-pas, comme Car- men, 30 000 ans plus tard : « je t’aime et si je t’aime prends garde à toi !»?

L’objectif de ce livre est d’informer bien sûr mais aussi de permettre aux thérapeutes et

aux lecteurs de mieux repérer la diversité des symptômes signaux, de disposer d’une boîte à outils diversifiés et de donner ainsi la pos- sibilité de desserrer l’étau ressenti.

Des conseils de premier secours sont habilement présentés dans de nombreux cartouches intégrés dans le texte. Ce livre excellemment documenté, bien écrit, très agréable à lire, repose sur une expérience clinique riche et sur une réflexion originale qui mérite vraiment le détour.

Jean-Charles Pascal, 30 avril 2018

<jchpascal@aol.com>

Liens d’intérêts

l’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêt en rapport avec cet article.

L’Information psychiatriquevol. 94, n6, juin-juillet 2018 531

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