M ATHÉMATIQUES ET SCIENCES HUMAINES
B. L ECLERC B. M ONJARDET
Problèmes ouverts. Représentation graphique d’un graphe
Mathématiques et sciences humaines, tome 26 (1969), p. 51-57
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PROBLÈMES OUVERTS
REPRÉSENTATION GRAPHIQUE
D’UN GRAPHEpar
B. LECLERC et B. MONJARDET
INTRODUCTION.
Dans
Sémiologie graphique [16],
J. Bertin étudie les buts et les moyens de lareprésentation graphique
définie commetranscription
dans lesystème graphique
designes
d’unepensée,
d’une« information » connue par l’intermédiaire d’un
système
designes quelconques.
Cettetranscription
devra être aussi fidèle que
possible,
cequi
se traduit enlangage mathématique
par la notion d’homo-morphisme.
Il y aquelques années, Mathématiques
et Sciences Humaines avaitpublié
un article de M. Barbut sur ce thème deshomomorphismes
dans leplan, baptisés
par l’auteuridéogrammes [17].
On pourra
s’y
reporter pour avoir une vue d’ensemble sur les rapports entremathématiques
etrepré-
sentation
graphique.
Nous nous limiterons dans cette note, à exposer un aspectparticulier
concernantla
représentation graphique
d’ungraphe.
Cettequestion,
trèsimportante
pour les rédacteursgraphiques,
pose deux
problèmes mathématiques
intéressants ; lepremier
estoriginal,
à notreconnaissance ;
nousnous contenterons de
quelques
remarquespréliminaires
à sonétude ;
le second est par contreclassique :
il
comprend
comme casparticulier
leproblème
de la reconnaissance desgraphes planaires ;
nous donne-rons les indications
bibliographiques correspondantes.
Pour le
premier,
nous souhaitons que des mathématiciens «graphistes
»s’y intéressent,
et bien entendu nouspublierons
tout résultat obtenu dans ce domaine(ou
toute information sur des résultatsdéjà connus).
LA
REPRÉSENTATION GRAPHIQUE
D’UN GRAPHE.La donnée de base à
représenter
est ungraphe
G =(E, R)
où E est unensemble,
R une relationbinaire sur E. G sera
donné,
parexemple,
par sa matrice d’incidence :(Le premier
élément ducouple
est enligne.)
On peut
évidemment, représenter graphiquement
un telgraphe
demultiples façons ;
J. Bertinen donne 17 dans
[16],
page 270. On va s’intéresser ici à deux modes dereprésentation
dénommésrespectivement (par
J.Bertin)
linéaire et en semis.REPRÉSENTATION LINÉAIRE.
Les sommets du
graphe
sontreprésentés
par despoints
duplan alignés
sur unedroite ;
les arêtespar des
lignes
courbesjoignant
lespoints
encorrespondance.
La droite définit un ordre sur les sommets(par exemple,
degauche
àdroite),
et par convention les arêtes seront dessinées au-dessus ou au-dessous de la droite suivantqu’elles
sont ou non en conformité avec l’ordre sur les sommets.Par
exemple,
legraphe précédent
sereprésente
ainsi :Fig.
1REPRÉSENTATION EN SEMIS.
Les sommets du
graphe
sontreprésentés
par despoints
duplan ;
on peut supposerqu’un,
aumoins,
despoints
est à « l’intérieur » des autres, c’est-à-dire situé dans leur fermeture convexe ;ceci,
si l’on veut exclure les
configurations
de typepolygonal.
Les sommets en relation sontjoints
par deslignes :
si deux sommets sontjoints
dans un sens on utilisera uneligne orientée ;
s’ils sontjoints
dans lesdeux sens on utilisera deux
lignes orientées,
ou une seuleligne
non orientée.Par
exemple,
legraphe précédent
sereprésente
ainsi :Fig. 2
LE
PROBLÈME
CENTRAL.Les deux
représentations précédentes
utilisent despoints
et deslignes ;
ceslignes
se coupentaux
points représentatifs
des sommets, mais elles peuvent aussi se couper en d’autrespoints,
que nousavons entourés d’un cercle dans les deux
figures précédentes.
Leproblème
de lareprésentation graphique
consiste alors à trouver une
disposition
despoints
et deslignes
minimisant le nombre despoints
nonsignifiants.
Aux deuxreprésentations précédentes correspondent
donc deuxproblèmes mathématiques.
PROBLÈME 1.
Il
s’agit
de trouver un ordre sur les sommets dugraphe
minimisant dans lareprésentation
linéairecorrespondant
à cetordre,
le nombre d’intersections des arêtes.Ainsi,
pour legraphe
Gpris
commeexemple,
on trouve la solution suivante :Fig.
2 bisPROBLÈME 2.
Il
s’agit
de trouver unedisposition
des sommets dugraphe
dans leplan
minimisant le nombre d’intersections - non à leurs extrémités - des arêtes. Enparticulier
s’il existe unedisposition
pourlaquelle
iln’y
ait aucuneintersection,
legraphe
est par définitionplanaire ;
c’est le cas dugraphe
del’exemple :
Fig.
3REMARQUES
SUR LE PROBLÈME 1.Soit G =
(E, R)
ungraphe
à n sommets ; on pose :0~ === { ordres
totaux T surE }
I G (T)
= nombre d’intersections des arêtes dans lareprésentation
linéaire de Gcorrespondant
à l’ordre T.L’intersection de deux arêtes
(supérieures
dans ledessin) correspond
aux données suivantes :Fig. 4
On dira
que {
x, z, y,u }
forme une sous-chaîne alternée de T.Posons
c G~T)
--. nombre de sous-chaînes alternées et soitT
l’ordre inverse de l’ordreT ;
on a :Pour un
graphe
donnéG,
on doit :- trouver
IG
= min~c G(T) + c G(T)~
T eOn ;
-- construire effectivement la ou les solutions
correspondant
à ce minimum.C’est évidemment un
algorithme
de construction d’une solutionoptimale
pour ungraphe quel-
conque
qui
intéresserait leplus
les rédacteursgraphistes (on
peut d’ailleurs se limiter auxgraphes connexes).
A ce propos, il est clairqu’on
diminuera le nombre de chaînesalternées,
en choisissant unordre T vérifiant la condition : le nombre d’arêtes entre deux éléments consécutifs de T communes avec G
est
maximum ;
ce critère revient pour la matrice d’incidence de G à maximiser le nombre des élémentssur les deux
lignes
transversales au-dessus et au-dessous de ladiagonale.
C’est ce critèrequi
a été utilisépar
J. Bertin,
pour trouver la solution del’exemple.
Mais ce critère est insuffisant car il peut conduire à des solutionsmultiples
et nonoptimales ;
c’est enparticulier
le cas si G est ungraphe
de tournoi(antisymétrique
ettotal) ;
eneffet,
le nombre d’éléments sur les deux transversalesprécédentes
estalors fixé.
Un cas
particulier
intéressant est celui où legraphe
àreprésenter
est legraphe
d’une relation d’ordre T sur néléments ;
il faut alors choisir un autre ordre pourreprésenter
linéairement T.En
effet, I T(T)
=n nombre
très au-dessus du minimumI T.
Parexemple,
pour l’ordre n-4(alphabétique)
surcinq éléments,
on obtient= 1 ;
on areprésenté
ci-dessous une des solutionspossibles :
1 ’-1
Fig.
5Fig.
6Cette solution a été obtenue au moyen d’un
algorithme qui,
s’il donne une solutionoptimale,
conduirait aux valeurs :
et de
façon générale à :
On
peut
aussi remarquerqu’en général,
le nombre d’intersections n’est pas invariant par unepermutation
circulaire de l’ordre de lareprésentation
linéaire. D’autrepart :
où
c(G)
est le nombre minimum d’intersections pour leproblème
2.Enfin,
il fautsignaler
que leproblème
de lareprésentation
linéaire d’ungraphe
est un casparti-
culier d’un
problème plus général
dereprésentation
suivant unefigure
duplan ;
parexemple,
onpourrait
s’intéresser au
problème
de lareprésentation
circulaire d’ungraphe.
BIBLIOGRAPHIE DU SECOND PROBLÈME.
L’aspect
leplus simple
du deuxièmeproblème
est celui-ci : ungraphe
Gquelconque
étantdonné,
dire s’il est
planaire,
c’est-à-dire s’il peut être tracé sur leplan
ou, cequi
revient aumême,
sur lasphère,
sans que deux
quelconques
de ses arêtes secoupent,
et en donner éventuellement un tel tracé.:1"~~~:::I
Diverses conditions nécessaires et suffisantes ont été données :
"
Condition de Kuratowski
[1] (donnée
dansBerge [6]).
G estplanaire
si et seulement s’il ne contient pas desous-graphe homéomorphe
àK5
ou àKi
étant legraphe complet
à i sommets et legraphe bichromatique complet à j
et 1 sommets.Fig. 7 Fig.
8Condition de H.
Whitney [2].
G connexe, à m sommets et narêtes,
estplanaire
si et seulement s’ilcontient m - n -~- 1
cycles, indépendants
pour la différencesymétrique,
tels que toute arêteappartienne
à deux au
plus
de cescycles.
Une troisième condition
classique
est à la base de nombreuxalgorithmes. Exprimée
pour unproblème plus général
parTutte, puis Ghouila-Houri,
on la trouve dans[9].
De formalisationplus complexe
que les deuxprécédentes,
elleexprime
que pour toutcycle élémentaire p
d’ungraphe pla-
naire
G,
on peut construire deuxgraphes planaires G,
etG2
tels que :et que
Gl
etG2
peuvent être tracésplanairement
en laissant vide l’une des deuxrégions
duplan
définiespar ~.
(q
est une face deG,
et deG2.)
Fig. 9
La reconnaissance d’un
graphe planaire s’effectue,
enfait,
en faisant fonctionner unalgorithme
de tracé sur le
plan,
observant si legraphe
entier peut être ainsi construit. De telsalgorithmes
sontmaintenant assez nombreux. Leur formulation est
toujours
assezlourde, lorsqu’elle
estcomplète.
Nousdonnons
cinq
références[5], [9], [13], [14]
et[15]
et deux autres[4], [12]
pour unproblème
un peuplus général.
Lesalgorithmes
décrits dans[4], [5]
et[13]
sont trèsproches.
Lepremier
estincomplètement,
mais clairement formulé. C’est celui que le lecteur aura d’abord intérêt à
regarder
pour un survol.L’algorithme [9],
dont[15]
donne unevariante,
nousparaît particulièrement
intéressant.Diverses
généralisations
de cequi précède
ont étéproposées.
Leproblème qui
nous intéresse leplus
ici est de déterminerc(G),
le nombre minimal d’intersections deux à deux des arêtes de G tracésur le
plan,
ainsi que le tracécorrespondant.
Pour ungraphe planaire,
on a c(G)
= 0. Pour legraphe bichromatique complet,
Zarankiewicz[3]
a montré que :Pour le
graphe complet, Harary
et Hill[7]
ont, par une constructionexplicite,
établi :Cette borne
supérieure
est la valeur exacte dans les cas connus.Deux autres nombres attachés à un
graphe peuvent
être recherchés :h(G), épaisseur
dugraphe G,
est le nombre minimal de
graphes planaires
dont G est l’union. y(G),
genre dugraphe,
est le genre minimal d’une surface orientable surlaquelle
ilpeut
être tracé sans que deux de ses arêtes ne se coupent(si
l’on considère une surface orientable S comme une «sphère
munie d’anses », le genre de S est son nombre d’anses. Le genre du tore est1,
celui du bretzel à deux trous2, etc.).
Pour un
graphe planaire
on a donch(G)
=1 et y(G)
= 0. J. W. T.Youngs
a montréqu’une
surface sur
laquelle
G est tracé est de genre minimal si et seulement si ce tracé la ccdécoupe »
encellules,
sans « anses » ni « trous », et en nombre maximal. La
plupart
des résultatsprécis
sur h(G)
et y(G)
ontété obtenus sur des
graphes
du typeK~,
et On en trouvera ungrand
nombre dans[7].
Note.
Le
problème
de c a été rouvert en1968,
divers auteurs ayantremarqué
une faille dans la démonstration du théorème de Zarankiewicz. Les valeurs données ci-dessus ne peuvent être considéréesen
général
que comme des bornessupérieures.
Elles sontcependant
exactes pour les cas connus(i _ 6, j ~ 8).
Lepoint
de laquestion
a été fait par R. K.Guy [19] qui signale
que de nouveaux résultats ontété annoncés,
àparaître prochainement
dans leJournal of
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