R EVUE DE STATISTIQUE APPLIQUÉE
J. M OTHES
De la statistique comme moyen à la qualité comme fin
Revue de statistique appliquée, tome 8, n
o1 (1960), p. 77-87
<
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DE LA STATISTIQUE COMME MOYEN A LA QUALITÉ COMME FIN
J. MOTHES
Vice -
Président de r
A. F. C. 1.Q.
Au cours de l’année 1958, 1 1 Assoc i at i on
Française
pour 1 e con- trôle Industriel de laQualité (A.F.C.I.Q.)
aorganisé
uncycle
deconférences,
tion et lefonctionnement
consacré aux de servicesproblèmes généraux
industriels que posent dequalitéil) Z’or~~~isa-
H. CAVE,
Ingénieur
enchef
des Fabrications d’Armement :"Exemples
diversd’application
des méthodesstatistiques"
H. DURLACH,
Chef
de Service, Direct ion de laQualité
delaRéÉie
Na-tionale des Usines RENAULT :
"Organisation de la
qualité
dans unefabrication de grande
série"N. RYERSON,
Chef
de Service à la R.C.A.(Etats-Unis)
"Le
problème
de l’assurance de laqualité"
N. POHHIER, Directeur du Groupe des Moteurs à la
Régie Nationale des
Usines RENA UL T :
"La
qualité, responsabilité majeure
de l’atelier".H. SWAN,
Chef
duDépartement
d’Etudes à la Société COURTAULD Ltd(Angleterre) :
"Organisation
d’un service industriel de contrate de laqual i té"
F. BUISSON, Directeur de
l’Electronique Appt iquée :
"Diversité nécessaire des méthodes de contrt)le de
laqualité"
H. BOREL, Directeur du Contrate de la
Qualité
à la Société L.M.T. :"Le contrale de la
qualité
dans lafabrication
du matérielde télécommunications".
Tous ces
conférenciers
ont insisté sur le ralefondamental
quepouvaient
et devaientjouer
les méthodes statistiques dans l’étude de cesproblèmes
mais aussi sur lesproblèmes d’or~anisatio~a interne,
de liaisons inter-services et
inter-entreprises
queposait
le soucide leur
efficacité.
M. MOTHES. Vice-Président de
l’A.F.C.I.Q.;
dans saconférence
du 9
Décembre,
aprésenté,
en conclusion de cepremier cycle,
unesynthèse
dont nous donnonsci-après d’importants
extraitsqui
si- tuent, du point de vue de l’auteur :---
(1) Toutes ces conférences ont été publiées par l’A.F.C.I.Q. , 6 rue
Royale,
Paris(VIII).
1) Le r8te de la méthode statistique dans le contrate 2)
L’organisation du
contrale dansl’entreprise
3) L’action à mener pour assurer la promot ion de cette organi- sat i on e t de ce rôle °
I -
QUALITE
ET CONTROLE DEQUALITE -
Comme l’ont
noté,
entreautres,
MM. Durlach etPommier,
la notion dequalité
est une notionglobale qui
résulte de laconception
del’objet,
de ses con-ditions de réalisations et de son
comportement
àl’usage. Lorsque
M. Buissonnous a
dit,
à peuprès,
que"parler
de contrôle dequalité
à propos de contrôle d’une cote d’une certainepièce
est un abus delangage,
la conformité auxspéci-
fications de cette seule cote n’étant
qu’un
facteur dequalité", je
pensequ’il
re-joint
entièrement lespoints
de vueexprimés
sous une autre forme par MM.Durlach et Pommier.
Et
je
crois que nous n’insisteronsjamais
assez àl’AFCIQ,
sur ce pre- mierpaint
absolumentcapital.
Il en résulte en effet desconséquences
fonda-mentales : le
fait,
parexemple,
que lagestion
de laqualité
est une tâchequi
intéresse indisti nctement tous les échelons de
l’entreprise,
etqu’il s’agit donc
par essence, d’une
préoccupation
de Direction Générale.En ce
qui
concerne la notion de contrôle dequalité,
onpeut
d’autrepart dégager
desexposés
que vous avez entendus un certain nombre de remarquesprécieuses.
Il est tout d’abord bon derappeler
comme cela a d’ailleurs étéfait,
l’évolution des processus de contrôle au cours des dernières décades.
Le
développement
des fabrications en série et parconséquent l’impossi-
bilité de
parfaire
une à une lespièces usinées,
commepeut
le fairel’artisan,
aconduit certaines
firmes, à
sepréoccuper
de la conformité desproductions
demasses à leurs
spécifications.
Et cela s’est traduit tout d’abord parl’organisa -
tion de
contrôles-gendarmes.
Quand
lesgendarmes
ont été bien aupoint,
ils ont été amenés à dresserbeaucoup
deprocès-verbaux.
En d’autrestermes,
ils ontdétecté, parfois,
de fortesproportions
de rebuts.Les rebuts s’avérant onéreux - même
quand
ils étaientpassibles
de ré-usinage - on
apensé qu’il
seraitbon, aussi,
d’intervenir en cours de fabrication afin depouvoir agir à temps. Seulement,
faute depouvoir
contrôler un à un tousles
produits
usinés(en
raison de leurcadence)
et pour éviter lesdépenses
pro- hibitivesqu’aurait impliqué,
àl’époque, l’emploi
despremiers
processus de contrôle à100% (quand
ilsexistaient),
on s’est alors orienté vers les solutions dutype
carte de contrôle.Aujourd’hui d’ailleurs,
audéveloppement
de l’automation va sans doutecorrespondre
undéveloppement
concommittant des processus de contrôles au-tomatiques
et cela d’autantplus
que, en raison duprogrès technique,
le coût deces dernières méthodes va, sans
doute,
décroîtreproportionnellement.
Il résulte de cet aperçu
historique,
si sommairesoit-il,
que l’identification du contrôle dequalité
au contrôlestatistique
est un leurre. Lastatistique
n’estqu’un
des moyens à ladisposition
desgestionnaires
de laqualité.
Et notre As-sociation le sait
bien, puisque
dans sontitre,
elle a tenu à ne pas fairefigurer
explicitement
le mot"statistique".
C’estégalement
cette considérationqui
m’aguidé
dans le choix du titre de cetexposé.
En contre
partie, évidemment, l’importance
de lastatistique
en matièrede
contrôle,
tient au faitqu’à l’origine
de touteopération
decontrôle,
il y a es- sai ; or,je
croisqu’on peut répéter
avec M. Borel que lastatistique
est par dé- finition dans presque tous les cas, latechnique qui
nouspermet,
au moindrecoût,
de tirer le maximum d’informations des essais effectués.1/ Qu’il s’agisse de
contrôle à laréception
ou, en fin defabrication, qu’il s’agisse
de contrôle à100%
ou parprélèvement, qu’il s’agisse
de contrôle encours de
fabrication,
dèsqu’interviennent
desappareils*
de mesure,peuvent
seposer des
problèmes
délicats deprécision
desappareils
ou decomparaison
en-tre
appareils;
or, cesproblèmes
relèventincontestablement,
aupremier chef ,
de la
statistique.
M.Cavé,
vous vous en souvenez, dès lepremier exposé,
nousa donné un bel
exemple
de malentendu entre client et fournisseur tenant en gran- departie
à la non-identité desappareils
de contrôle mis en oeuvre, et il nous amontré comment une étude
statistique
avaitpermis d’analyser
lephénomène
etde mettre d’accord les deux
parties.
Jesuis,
pour mapart, persuadé
que dans le cas despécifications
trèsfines,
bien des discussions entreparties
contrac-tantes
pourraient
être évitées si les intéressésregardaient
deplus près
les ap-pareils
utilisés.D’autre
part, je
ne crois pas que les processus de contrôleautomatique, supprimeront
leproblème.
Je dirai même que c’est vraisemblablement la sta-tistique qui permettra
leplus
souvent d’en contrôler lecomportement.
2/ Qu’il s’agisse
de contrôle à laréception
ou, en fin defabrication,
de contrôle à100%
ou parprélèvement,
ou de contrôle en cours defabrication,
ladétermination des critères de
qualité
à retenir et desspécifications
àimposer implique
souventréflexion,
et là encore,généralement,
réflexion en termes destatistique.
En cequi
concerne le choix du critère dequalité,
vous vousrappelez également
que M. Cavé nous a montrécomment,
dans uneentreprise
métallur-gique,
un essaichimique long
et onéreux avait puêtre,
parapplication
des tech-niques
deregression, remplacé
par un essaibeaucoup plus simple.
D’autre
part, en ce qui
concerne la détermination desspécifications
elles-mêmes, je
pensequ’on pourrait reprendre
bien des remarques de M. Buissonqui
a traité de cettequestion
defaçon
fortpertinente,
etje
suis pour mapart persuadé
que toute confrontationstatistique objective
des conditionsd’emploi
d’un
produit
donné et de la variabilité deséquipements
mis en oeuvre pour en assurer la fabrication montrerait que, trèssouvent,
lesspécifications
actuelle-ment
adoptées
sont discutables.Je crois me souvenir que c’est là une des
premières
difficultés àlaquelle
se sont heurtés les Services de FORD à
Détroit, quand
ils ont commencé à ap-pliquer
le contrôle dequalité. Après
delongues
et infructueuses discussionsavec leurs
sous-traitants,
ils constatèrentqu’ils imposaient
desspécifications auxquelles
leséquipements
lesplus
modernes étaientincapables
derépondre.
Quand
ils eurent fait cettedécouverte,
ils vérifièrent que lesspécifications
enquestion n.’étaient
absolument pasimpératives.
3/ Quels
que soient les modes de contrôle à laréception
ou en fin de fa-brication,
il faut dans lamajorité
des cas, et pour des raisons évidentes d’é-conomie, opérer
parprélèvements. Or,
définir lesplans d’échantillonnage
lesplus
efficacespuis exploiter
les données recueillies sont alors desopérations qui
relèvent évidemmenttypiquement
de lastatistique.
4/ Enfin,
dans les domaines connexes de celui ducontrôle,
comme l’ana-lyse
des causesd’hétérogénéité
desfabrications,
oul’analyse
del’aptitude
desoutillages
aux travauxqui
leur sont confiés. C’est encore lastatistique
et elleseule
qui
fournit leplus
efficacement les informations souhaitées.En
bref,
pour résumer lapremière
séried’enseignements
relatifs auxnotions de
qualité
et de contrôle dequalité
que l’onpeut
retirer de notrepremier cycle
deconférences, je
dirai essentiellement :1)
La notion dequalité
est une notionglobale;
2)
Lesopérations
nécessaires pour atteindre et maintenir les ni-veaux de vie recherchée débordent le domaine des
techniques statistiques;
3)
Mais cestechniques statistiques occupent néanmoins,
dans l’en-semble,
destechniques utilisables,
uneplace privilégiée
tantpar leur puissance
que par leur diversité
d’applications.
II - L’ORGANISATION RATIONNELLE DE SERVICES INDUSTRIELS DE
QUALITE -
Voyons maintenant,
si vous le voulezbien, quels enseignements
nous pou-vons retirer de notre
premier cycle
de conférences dupoint
de vue del’organi-
sation rationnelle de services industriels de
qualité.
Du fait que la notion de
qualité
estglobale,
elle doit êtreprise
en consi-dération dans tout le processus industriel de la firme : c’est donc une
tâche,
une
préoccupation,
de Direction Générale.Tout ce que
je
vais dire restera évidemment trèsgénéral :
on nesaurait,
en
effet,
penserl’organisation
rationnelle de services dequalité indépendam-
ment de la structure de la firme
qui
lesemploiera
etindépendamment
de la na-ture des
produits qui
serontfabriqués.
Il n’est donc paspossible
d’entrer dans lesdétails,
et de résoudredéfinitivement,
inabstracto,
pour uneentreprise type,
leproblème
del’organisation
rationnelle de laqualité.
S’il est bon ce-pendant
d’affirmer que toutproblème
estparticulier,
cela ne veut pas direqu’on
soit absolument
incapable
d’énoncer un certain nombre derègles
deréférences,
depoints d’appui généraux,
d’idées directrices.La notion de
qualité
doit être une notion de Direction Générale et ce seul fait conduit sans discussionpossible
àplacer
une"unité"
centrale deQualité
à côté - disons en"Staff"
pourappliquer
laterminologie anglo-saxonne -
de la Direction Générale.Je
parlerai
par la suite de la"Direction
de laQualité",
enréalité, je
pense à une unité centrale se
préoccupant
duproblème
de laqualité,
cette unitécentrale
pouvant être,
selon lafirme,
une direction ou un service d’étude ou une seule personne. Mais ce queje
retire de toutes lesexpériences qui
ont étéévoquées ici,
c’est l’idéequ’il
faut une unité centrale dequalité
à côté de la Di-rection Générale.
Comme l’ont fort bien
remarqué
MM. Durlach etPommier, je
pense que cette unitécentrale,
cette Direction de laQualité
doit avant tout se considérercomme le
porte-parole permanent
du consommateur à l’intérieur del’entrepri-
se. A ce
titre,
elle doit parconséquent
être en relation étroite et constante avecles services
d’Après-Ventes.
C’est en effet à travers cesservices,
que la Di- rection de laQualité peut apprendre
àconnaître
laclientèle, apprécier
sespré- occupations
en matière dequalité,
s’identifier à elle.Dans
l’hypothèse,
enparticulier,
d’insatisfaction de laclientèle,
c’estcette unité - en raison de la liaison que
je
viensd’évoquer - qui
pourradisposer d’informations,
aussiobjectives
quepossible
sur les motifs de cette insatisfac- tion et les transmettre aux unitésproductrices.
C’est
ainsi que
nous voyonsapparaître une première
liaison nécessaire de la Direction de laQualité
avec les Servicesd’Après-Ventes.
Disposant
de tellesinformations,
la Direction de laQualité
doit évidem- ment être en mesure de les faireprévaloir
au sein del’entreprise,
cequi impli-
que l’entretien de liaisons étroites avec :
- le bureau d’études
- la fabrication
- la
réception (des
matièrespremières,
desproduits
demi-finiséventuellement des
produits
finis en provenance del’extérieur).
Le tableau d’interconnexion de la Direction de la
Qualité,
au sein de lafirme, peut
donc être schématisé comme suit.D.G.
(DirectionGénérale) D.Q. (Direction Qualité)
A.V.
(Serv. Après-Ventes)
B.E.
(Bureau d’Etudes)
F.
(Fabrication)
R.
(Réception)
Tout en restant dans le domaine des idées
générales,
onpeut
sepréoc-
cuper
quand
même de voir d’un peuplus près
ce que recouvrent cesliaisons,
ces traits que
j’ai
dessinés sur le schéma ci-dessus.1/
Liaison entre le Bureau d’Etudes et la Direction de laQualité.
Examinons d’abord la liaison entre le Bureau d’Etudes et la Direction de la
Qualité.
a)
Dupoint
de vue de laconception
desproduits,
cette liaison doit viser d’unepart,
laconception
de laqualité et,
d’autrepart,
la définition desopérations
de contrôle. La direction de laqualité
doit tenir le Bureau d’Etudesau courant des
défaillances
de matérielenregistré
chez les usagers, defaçon
àpermettre
à ce bureau de contrôler et decorriger
lesimperfections.
Defaçon plus générale, on peut
même admettrequ’elle
le tienne au courant des desiderata de la clientèle en matière dequalité
defaçon
à luipermettre
d’en tenircompte
dans sesprojets.
Bienentendu,
ellepeut superviser
éventuellement les essais desprototypes qui
sont faits par le Bureau d’Etudes.b)
En cequi
concerne nonplus
laconception,
mais la définition desopérations
decontrôle,
la Direction de laQualité doit,
en liaison avec le Bureaud’Etudes, participer
à l’étude des critères dequalité
à retenir et à celle desspécifications
àimposer.
2/
Liaison entre la Fabrication et la Direction de laQualité.
En liaison avec la
Fabrication, je
pense que la Direction de laQualité
doitassumer trois tâches
principales :
a)
Définir les méthodes de contrôle à mettre en oeuvre;b) Superviser
lesopérations
de contrôle en vue de vérifier leur con-formité aux directives
données;
c) Analyser
les résultats obtenus en vue,éventuellement,
de suivretous indices de
qualité
ou tous indices de coûts de laqualité qu’on
voudra bien élaborer.3/ Liaison
entre laRéception
et la Direction de laQualité.
En ce qui
concerne la liaison avec laRéception, je
pense que ces trois dé- finitions de tâches restent valables.Ceci nous
précise
un peu la nature desopérations
que recouvre chacunede ces
liaisons;
mais il reste encore à savoir comment les concrétiser. A cetégard, je crois qu’il
convient dereprendre une idée développée par
M.Pommier,
à savoir que la
qualité
SEFABRIQUE.
En d’autrestermes, je
croisqu’il
fautinsister sur l’idée que le contrôle effectif doit être considéré comme une
opé-
ration faisant
partie intégrante
ducycle
de fab rication : c’est-à-direqu’il
doit être considéré comme uneopération
dont laresponsabilité
incombe auxexploi-
tants. C’est
pourquoi jusqu’ici je
vous ai volontairement dit :"la
direction de laqualité,
en liaison avec lafabrication,
parexemple,
définit les méthodes decontrôle, supervise les opérations
decontrôle pour
vérifier leur conformité auxdirectives données, analyse
enfin les résultatsobtenus,
maisje
ne vous ai pasdit
"fait
lescontrôles".
Cette
façon d’envisager
leproblème
met en évidence le fait que laqualité
doit être une des
préoccupations
constantes de l’ensemble dupersonnel produc-
tif et non la
préoccupation "des autres".
Parailleurs,
ellerépond
à cette sim-ple
évidencequ’il
vaut mieux intervenir en cours defabrication, qu’en
fin de fabrication.C’est
également
en vertu de ceprincipe qu’il faut,
en matière de contrôle à laréception,
souscrire entièrement à l’idéedéveloppée
par M. Borel et con- cernant l’Assurance de laQualité.
Je cite cequ’a
dit M. Borel sur cesujet
ex- trêmementimportant :
"Les
clientsqui passent
des marchésd’équipements
sont amenés à res-"serrer
deplus
enplus
leursexigences
et souvent à alourdir leurs méthodes de"réception.
Toutnaturellement,
ilss’appesantissent
sur les essais deréception
"des
matériels terminés et effectuent ou font effectuer des essaisparfois
très"onéreux...
"Ces
méthodes offrent de nombreux inconvénients. Elles nécessitent une"duplication
deséquipements
de mesure et de testsqui représente
des frais"considérables.
Enoutre,
laréception
étantprononcée
parlots, pendant
les"essais
en doublequi
sontquelquefois
fortlongs,
le matériel est immobilisé ce"qui empêche
laproduction
de couldr en un flotcontinu,
provoque desà-coups
et"conduit
à un mauvaisemploi
dupersonnel
et des moyens.Enfin,
etpeut-être
"surtout,
laqualité requise
n’est pastoujours
définie avec suffisamment depré-
"cision
par les clausestechniques.
"Pour
trouver une solution à ce dilemme entre la nécessité deprocéder
à"un
contrôle trèspoussé
de la totalité desopérations
de fabrication et la néces-"sité
de maintenir les effectifs de contrôleurs dans des limitesraisonnables ,
"les départements
militairesbritanniques
etaméricains, ont, pendant
la guer-"re,
mis aupoint
des méthodes de contrôle basées sur desprincipes
tout à fait"différents.
"Ces
méthodes fontporter le
contrôle nonplus
sur la vérification des ma-"tériels,
mais sur la vérification des méthodes utilisées par le fabricant pour"ses inspections. L’avantage
leplus important
dusystème
est que laqualité
exi-"gée est beaucoup
mieux définie parce que les clausestechniques
contenues dans"le
ma rché sontcomplétées
contractuellement pa r lesspécifications d’inspection,
"ou autres,
établies par le fabricant en accord avec le service de contrôle du"client".
Bureau
d’Etudes, Fabrication, Réception
doivent chacundisposer
d’uneunité de contrôle. Il
appartient
aux deuxpremières
unités defabriquer
laqualité ,
à la dernière de
gérer
des contrats d’assurancequalité.
Et l’ensemble de cesunités doit être relié à une unité Centrale
chargée
de penser laqualité,
de véri-fier la conformité à ses directives des
opérations poursuivies
au sein de la firme . Bienentendu,
ce schéma neconstitue,
dans monesprit, qu’un
cadre deréférences. Si un chef
d’entreprise
demandait commentprocéder,
il va sans direqu’on
nepourrait
pasrépondre
en luiprésentant
tout bonnement cetableau,
ce seraittrop simple
ettrop
beau. Il y a certainement un ordre depriorité,
dansl’organisation
de ces différentsservices, compte
tenu de la structure de l’en-treprise,
deses problèmes particuliers d’organisation,
etc.Il y
a certainesliaisons
qui
doivent être établies avant lesautres,
etc. Ce sont là desquestions qui
ne sauraient être traitéesabstraitement,
lesréponses
à y donnerpouvant
évidemment varier d’uneentreprise
à l’autre.III - L’ATTITUDE DES RESPONSABLES DES ENTREPRISES A L’EGARD DE LA
QUALITE -
Les remarques
qui précèdent,
tant en cequi
concerne laQualité
et le Con- trôle deQualité
quel’organisation
de services industriels de Contrôle deQualité
ne font que
synthétiser
lespoints
de vueexprimés
par les éminentsspécialistes qui
vous ontparlé
au cours de l’année écoulée. Comme vous l’avezconstaté,
elles ne sauraient constituerqu’un cadre, j’aimerais
dire"rationnel",
de réfé-rence, si
je
necraignais
que cela ne vousparaisse
excessif.Toutefois,
bienqu’il
ait étédégagé d’expériences approfondies,
ce cadre deréférence ,
du faitqu’il
a étélogiquement reconstruit,
ne fait aucuneplace
à l’élément humain.Or,
l’on ne saurait traiter
complètement
duproblème qui
nous occupe, sansprendre
en considération ses
aspects
humains.A la tête de toutes les
entreprises,
il y a des hommesqui
ne sont pas for- cément"motivés"
en faveur des idéesqui
nous sont chères.Alors,
si nous es-timons que nos idées sont
bonnes,
nous devons pour les faireprévaloir
nous de-mander comment
emporter
à leursujet
la conviction desresponsables.
Il est
incontestable que
nousdisposons aujourd’hui
d’unelogique
de la qua-lité ;
cependant,
il ne faut pas s’étonner de constater que lalogique
n’estjamais
suffisante en elle-même et ce, même dans les
entreprises
industrielles.Chaque responsable
industriel se veut"l’homo cartesianus"
mais ne l’est pas, parce queà mons avis, "l’homo cartesianus" n’ existe
pa splus
que"l’homo economicus"Nous
devons
prendre
notreparti
du fait que nos idéesjustes
et claires en matière dequalité
etd’organisation de
laqualité
nes’imposent
pas du toutd’elles-mêmes
etqu’il
existe des obstaclesexogènes
à surmonter.La
première idée qui
vient alors àl’esprit
est derépéter
de toutes les fa- çonspossibles
auxresponsables
desentreprises
à peuprès
ceci :"Rendez-vous compte
que tout a concourudepuis
des décades à vous"mo- tiver"
en . faveur durendement,
mais que c’ estla
une notion bieninsuffisante.
"Les organisateurs, puis les
services officiels de laProductivité
vous ontincités à penser en termes d’accroissement de
rythmes
de vos chaînes de pro-duction,
en termes de diminution detemps
standards demain-d’oeuvre,
etc. etce sont là toutes choses excellentes
qui
ont contribué à la diminution de vosprix
de
revient, qui
vous ont mis en meilleureposition concurrentielle,
mais ellesne doivent pas
épuiser
vospréoccupations.
"Bien qu’elles
soientplus
difficiles àsaisir,
moins immédiatement"ob-
jectivables",
les notions d’accroissement de valeurd’usage
desproduits
fabri-qués, d’adaptation
de cesproduits
aux desiderata des consommateurs - c’est-à- dire despréoccupations
dequalité -
sont au moins aussiimportantes
que lespré- cédentes,
onpeut
même dire que dans un pays à très haut niveau deproductivité,
au sens
classique
duterme, adopter
cespréoccupations
constituepeut-être
lafaçon
laplus
efficace de continuer àdévelopper
encore cette Productivité au- delà des seuilsdéjà
atteints."Ne
croyez pas d’ailleurs que lepublic
resteinsensible
à laqualité.Dans
une économie
qui
n’estplus
une économie depénurie,
en d’autres termes dansune économie où les choix
sont possibles,
elles constituepeut- être
pour lui un des facteurs lesplus importants
de sélection."Peut-être
ce mécanisme ne se manifeste-t-il quelentement,
mais iltravaille
déjà
enprofondeur.
En veillant à laqualité
de vosproduits,
enadop-
tant une
politique systématique
en ce sens, vous êtescertains,
àlong
ou à moyenterme d’être
gagnants.
Vous êtes certainsd’augmenter
votreproductivité
et vosprofits.
"En outre, grâce
aux méthodes modernes de lastatistique,
vous serezà même de réaliser tout cela au moindre coût et sans accroître vos frais
d’exploitation".
Certes,
c’est là certainement une belle envolée ...Mais je
doutequ’elle
soit convaincante. Ce processus de raisonnement tout à faitlogique,
est basé surl’idée que le mobile essentiel de
l’entrepreneur
est d’accroître sonprofit.
Onlui
dit,
en effet :"Vous
avezdéjà
réalisé une sérieuseproductivité, vous
avezbaissé votre
prix
derevient,
etc.Maintenant,
vous pouvezprendre
encore uneplace prépondérante
sur le marché et vous pouvez d’ailleurs le faire defaçon
pas
trop coûteuse, etc. ". Or, je
sais bien quel’entrepreneur
estconvaincu, quand
on lui enparle,
que leprofit
est un mobile pourlui,
mais enréalité,
cen’est pas exact. Je dirai même que
l’expérience
montre que, dans lamajorité
des cas, la référence à
l’augmentation possible du profit
n’a rien de décisif pourun
entrepreneur. Personnellement, je
pense que les mobilesprofonds
des res-ponsables
desentreprises
sontbeaucoup plus
nombreux etbeaucoup plus
com-plexes.
C’estainsi que,
à desdegrés
divers et dans desproportions
très varia-bles, interviennent :
- le
goût
desresponsabilités
et ducommandement;
- le
plaisir
de donner livre cours à sonimagination;
- le besoin
d’activité;
- des
préoccupations psycho-sociales qui peuvent s’ exprimer
en ter-mes de
"réputation"
au sens leplus
noble duterme,
ou en termes de distinctionshonorifiques
ou depromotion politique,
etc.- le
goût
desperformances techniques également ...
Ainsi la notion de
profit est,
à monavis,
bien moins un moteurqu’un garde
fou. Ellefigure
à mon sens, etquoique
enpensent
les intéresséseux-mêmes, parmi
les contraintes àrespecter
pour ne pas avoir d’ennuis etpouvoir agir
entoute liberté sur d’autres
plans.
Un célèbre conseiller desynthèse américain,
P.
Druker, d’ailleurs,
a écrit à ce propos une fortjolie
remarque queje
citetextuellement :
"Un objectif
de rentabilité ne mesure pas leprofit
maximum quepeut
at-teindre
l’ affa ire,
ma is le minimumqu’elle
doit réaliser pour durer etprospérer" .
Si nous reconnaissons que pour convaincre nos
responsables d’entreprises
il ne suffit pas
d’agiter
la corde del’augmentation
des marchés ou del’augmen-
tation
possible
desprofits
pour lasimple
raison que chez ces industriels ce sont des mobilesbeaucoup plus complexes
etbeaucoup plus
subtilsqui jouent,
l’idéalserait évidemment de
pouvoir raccrocher par quelque
biaissavant.l’idée
de qua- lité à cesmobiles;
seulement étant donné ce que sont cesmobiles,
tout au moinsceuxque jevous ai
énumérés(la
liste n’est certainement pasexhaustive), j’avoue
que
je
vois assez difficilement comment réussirl’opération.
Alors que faire ?
Personnellement, j’envisagerai
leproblème
sous un toutautre
angle.
Je pense, eneffet,
que dans notre pays, des efforts ont été faitsmalgré
tout en faveur dudéveloppement
de laqualité.
Comment l’ont-ils été ?Pourquoi ? Essayons
d’abord derépondre
à cesquestions;
nous verrons ensuitequels enseignements
nous pouvons en tirer.°
Je crois
qu’on peut distinguer schématiquement ,
troiscatégories d’entreprises :
1/
Il y a tout d’abordquelques entreprises qui, indépendamment
de toutespréoccupations statistiques
ont été conduites peu à peu àprendre
conscience desproblèmes
dequalité.
Etcela, principalement :
a)
Soit en raison de laprécision
des fabricationsqu’elles
devaientabsolument réaliser pour des raisons
techniques.
b) Soit,
pour les firmesqui
avaient une clientèleindustrielle,
en rai-son de la sévérité des
entreprises
dont elles étaient les fournisseurs.c) Soit,
pour cellesqui fabriquaient
desproduits
degrande
consom-mation et
qui disposaient
de servicesd’après-ventes
bienorganisés,
parcequ’el-
les étaient
obligées
deprendre
conscience des desiderata de leur clientèle enmatière de
qualité.
Ces
entreprises
ont alors commencé à faire du contrôle et elles ont déve-loppé
lescontrôle’s-gendarmes
quej’évoquais
tout à l’heure.Lorsque, ensuite,
les statisticiens sont venus leur dire :"Vous
pouvez rationaliser vosopérations
de contrôle et
augmenter
votre efficacité tout en réduisant vosfrais",
nombreu-ses ont été celles
qui, ayant pris
conscience duproblème,
se sont alors laisséconvaincre, plus
ou moins facilement bien sûr. Elles ont ensuite voulu que soient formés aux méthodesstatistiques
de contrôle lesingénieurs
et cadres dont elles avaient besoin - tant et si bien que lapression
de ces demandes a été ressentie à l’échelon des ServicesPublics,
que les Services de la Productivité en ontpris
conscience et ont ainsi
soutenu,
parexemple,
les efforts du Professeur Darmois en lui donnant des moyensfinanciers pour
créer le Centre de Formation que vous connaissez tous. Mais cequi
décrit très bien le processus, c’est que sile C entre de Formation s’est avéré une incontestable réussite(en 6
ans, il a forméplus
demille
ingénieurs et son
taux d’activité vacroissant),
le nombred’entreprises
enrelation avec lui n’a
jamais dépassé
200.2/
Dans un second groupepeuvent
être situées lesentreprises (en
nombrecertainement
plus grand)beaucoup
moins conscientes del’importance
de la qua-lité,
mais assez évoluées pour sepréoccuper
de leur environnement. Ces entre-prises-là,
constatant l’évolution ci -dessusévoquée
ont décidé defaire,
ellesaussi
quelque
effort. Lesresponsables
ontgénéralement envoyé
au Centre cer-tains de leurs collaborateurs; mais s’ils ont
agi
de lasorte,
c’est bienplus
dansun souci d’information
générale
que dans un souci de réalisation effective.3/ Enfin,
dans un troisième groupepeuvent
être réunies lesentreprises inviolées, si j’ose
dire , 1l’importance
de laqualité n’y
étant nullement ressen-tie et la
statistique
y étantignorée;
il est évident que lesarguments
des statis- ticiens y sont demeurés sans écho.En
bref,
si nous considérons l’évolutionqui
s’est dessinéejusqu’ici,
nousconstatons :
a) Que
lesarguments
avancés en faveur du contrôlestatistique
par les statisticiens ont surtout convaincu lesentreprises qui
étaientdéjà "sensibi- lisées"
à la notiongénérale
dequalité;
b) Que
lesentreprises
enquestion
n’avaient pas été antérieurement"sensibilisées"
à laqualité
par des raisonnementsplus
ou moinsthéoriques,
mais bien par des faits très
précis :
- sévérité des
entreprises
clientes;-
prise
de conscience des desiderata de la clientèle à travers les servicesd’après-ventes;
-
impératifs techniques.
Si nous
voulons agir plus efficacement, je
tirerai de cequi précède
la con-clusionque
notre action doit tendre àplacer
lesentreprises -
par des actes dé-libérés,
si c’estpossible -
dans l’une des situationsqui
ontprovoqué
la conver-sion à la notion
générale
dequalité,
desentreprises
lesplus
évoluées.Alors,
me direz-vous à cemoment-là,
revenons aux différentspoints
quevous avez
évoqués.
1/ Est-il possible d’augmenter
le nombre desentreprises-clients
suscep- tibles de faire preuve de sévérité àl’égard
de leurs fournisseurs ?Je le crois
volontiers;
surtout enagissant
sur les gros clients et enprio-
rité sur l’Etat. Aux
Etats-Unis,
ledéveloppement
du Contrôle deQualité
date dujour
où l’armée a fait savoir à ses fournisseursqu’elle s’y
conformerait. Dujour,
en effet où l’armée a décidéd’appliquer
certainesrègles,
les fournisseurs ont dû y veniréga lement.
Je pense que
si,
par un moyen ou unautre, l’AFCIQ
arrivait àemporter
la
conviction,
parexemple,
de la DéfenseNationale,
des P. T. T. et dequelques grandes entreprises nationales,
lapartie
seraitgagnée,
et ce serait des cen-taines,
voire des milliersd’entreprises, qui, progressivement,
se mettraientà
appliquer
les méthodes du contrôle dequalité.
2/
Est-ilpossible
de donnerplus
depoids
auximpératifs techniques
deprécision ?
C’est peu probable;
car cesimpératifs
sont fonction desproduits fabriqués
sur la nature
desquels
nous n’avons pas à intervenir.Mais
je
pensequ’il
y a tout de même toute une gamme de fabrications où laprécision,
sans être absolumentimpérative,
est néanmoins recherchée.En ce
qui
concerne cesfabrications,
les techniciens commencent à sepréoccuper
des moyens de lescontrôler;
ils font desessais,
des observations . Ils ne sepréoccupent
pas de l’efficacité des conclusionsqu’ils
entirent,
maisils cherchent à savoir. En d’autres
termes,
si vousvoulez,
ils en sont à l’heureactuelle,
etdéjà depuis plusieurs années,
à l’achat desappareils
de mesure.Je dis que si nous arrivions à nous mettre d’accord avec les
profession-
nels de la
métrologie
afin de convenir d’une action commune, nouspourrions
ac-célérer considérablement l’évolution en cours.
3/ Est-il possible d’agir
en vue depromouvoir
les Servicesd’Après-Ven-
tes dans les
entreprises qui
les ontnégligés ?
Je ne le pense pas. Car cela reviendrait à tenter une reconversion as- sez
profonde
de notre mentalité nationale en matière commerciale. On est en droit de penser que cette reconversion auralieu, qu’elle
est même en train de se faire(il
suffit de lire lesjournaux
pour voir parexemple
ledéveloppement
àl’étranger
des servicesaprès-ventes
de certaines firmesfrançaises).
Maisenfin,
cela n’a rien à voir avec le cadre de nos activités.En
revanche, j’imagine
une autrefaçon
deprocéder, susceptible
de pro- voquer unphénomène
d’émulation.Pourquoi,
parexemple,
ne pasreprendre
l’idée deQualité-France,
maissous une toute autre
forme,
consistant à lier un label dequalité,
non pas à desproduits,
mais auxentreprises
elles-mêmesqui
auront suorganiser
chez ellesla
qualité
defaçon incontestable,
autrementdit,
auxentreprises
dontl’organi-
sation et les modalités de fonctionnement des services de contrôle seront pour la clientèle une assurance de
qualité.
Aider les
entreprises
intéressées à améliorer leurs modalités actuelles degestion
de laqualité,
vérifier par la suitepériodiquement l’organisation
et lefonctionnement des unités
chargées
de cettegestion représente
évidemment une lourde tâche. Maispourquoi
ne serait-ce pas la vocation d’un corpsd’ingénieurs spécialisés ?
Nous serions le
premier
pays à nous lancer dans une telleopération,
maisc’est dans l’ordre de nos traditions.
Au fond, je ne
me dissimule pas que toutes ces idées queje viens,
sij’ose dire,
de lancer en l’air - etqui, peut-être,
vont me retomber sur la tête commeun
boomerang -
nepeuvent
être concrétisées sansl’appui
de l’Etat.Cependant
cela n’est pasutopique.
Les idées sont en l’air. Savez-vous cequ’ont développé,
auCongrès
de l’E. O.Q.
C.( 1)
àEssen,
enSeptembre dernier,
M. John
Riordan,
Directeur au Secrétariat de la Défense des U. S. A: et M .Joseph Greenwood, duDépartement
de la Marine ? L’idée d’une agence nationalecapable
d’aider lesentreprises
às’organiser
en vue de donner à leurs clients l’assurance de laQualité,
et habilitéeégalement
à leur attribuer un label dis- tinctif sous réserve des vérificationspériodiques
nécessaires.(1)