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Syndromes auto-inflammatoires en dermatologie

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L. Feldmeyer

introduction

Les syndromes auto-inflammatoires, aussi appelés syndromes de fièvre périodique héréditaires, sont caractérisés par une inflammation stérile sans cause infectieuse, des poussées fé- briles récidivantes associées à des manifestations cutanées, des muqueuses, des séreuses et des articulations (tableau 1).1-4 On ne trouve ni autoanticorps, ni cel- lules T autoréactives. Certains syndromes ne comportent pas de fièvre, mais pré- sentent les manifestations associées. La réponse inflammatoire est généralement très marquée, avec une élévation des marqueurs inflammatoires sériques et de l’amyloïde A. Certaines maladies sont héritées de façon monogénique (fièvre mé- diterranéenne familiale, syndrome de fièvre avec hyper-IgD (hyper-immunoglo- buline D), syndromes périodiques associés à la cryopyrine, syndrome PAPA (Pyo­

genic arthritis, pyoderma gangrenosum, acne), et arthrite pédiatrique granulomateuse) tandis que d’autres ont une origine polygénique. Les mutations identifiées dans les maladies monogéniques conduisent à une production exagérée d’inter leu- kine (IL)-1b, une cytokine pro-inflammatoire. C’est pourquoi, l’antagoniste du ré- cepteur de l’IL-1 (anakinra, Kineret) ou des anticorps monoclonaux recombinants contre l’IL-1b (canakinumab, Ilaris) 5 permettent de traiter certaines de ces maladies (tableau 2). D’autres répondent mieux aux antagonistes du TNF-a (facteur de né- crose tumorale). A côté des maladies monogéniques rares mentionnées ci-dessus, un rôle de l’inflammasome dans d’autres maladies plus courantes a aussi été dé- montré, comme par exemple dans le vitiligo ou les dermatoses neutrophiliques.

physiopathologie

L’inflammation, nécessaire à la réponse contre les pathogènes ou à la cicatrisa- tion, peut aussi se révéler néfaste pour l’organisme si elle est incontrôlée, telle que dans le diabète de type 2, l’athérosclérose, l’asthme, la maladie d’Alzheimer et le cancer.6 L’IL-1 joue un rôle central dans l’inflammation.7 L’immunité innée protège les mammifères contre les signaux de danger (danger signals). Ces signaux, Autoinflammatory syndromes

in dermatology

Hereditary periodic fever syndromes, also called autoinflammatory syndromes, are cha- racterized by relapsing fever and additional manifestations such as skin rashes, mucosal manifestations, or arthralgias. Some of these disorders present without fever but with the associated systemic manifestations. The res- ponsible mutated genes have been identi- fied for most of these disorders, which lead to the induction of the uncontrolled and ex- cessive production of interleukin-1b (IL-1b).

The inhibition of IL-1b through IL-1 receptor antagonist or monoclonal antibody against IL-1b is used with success in most of these disea ses. In case of TNF-receptor associated periodic syndrome (TRAPS) and paediatric granulomatous arthritis (PGA), TNF-antago- nists may also be used ; in familial Mediterra- nean fever (FMF) colchicine remains the first choice.

Rev Med Suisse 2012 ; 8 : 756-61

Les syndromes de fièvre périodique héréditaires, aussi appe- lés syndromes auto-inflammatoires, sont caractérisés par des poussées fébriles récidivantes et des atteintes cutanées des muqueuses ou des articulations. Certaines de ces maladies surviennent sans fièvre mais présentent les manifestations sys- témiques associées. Les gènes mutés ont été identifiés dans la plupart de ces syndromes, avec des mutations conduisant à une production incontrôlée et excessive d’interleukine-1b (IL- 1b). L’inhibition de l’IL-1b, au moyen d’antagoniste du récep- teur IL-1 ou d’anticorps monoclonal contre l’IL-1b, permet un traitement efficace de la plupart de ces syndromes. Les anta- gonistes du TNF (facteur de nécrose tumorale) sont aussi uti- lisés dans le syndrome périodique, associé au récepteur du TNF et l’arthrite pédiatrique granulomateuse, tandis que la colchicine reste le traitement de choix de la fièvre méditerra- néenne familiale.

Syndromes auto-inflammatoires en dermatologie

le point sur…

Dr Laurence Feldmeyer Service de dermatologie et vénéréologie CHUV, 1011 Lausanne laurence.feldmeyer@chuv.ch

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par exemple des protéines d’organismes pathogè nes, sont reconnus par des récepteurs membranaires ou intracellu- laires et sont aussi nommés Pathogen associated molecular pat­

terns (PAMP). Les récepteurs de l’immunité innée recon- naissent également des signaux de danger endogè nes, tels que des protéines intracellulaires comme l’acide urique ou l’ATP (adénosine triphosphate), ou des acides nucléiques, signaux définis de manière plus générale com me Danger associated molecular patterns (DAMP). Parmi ces récepteurs, on trouve les Toll-like récepteurs (TLR), pour la plupart ex- primés à la surface des cellules, et les NOD-like récepteurs (NLR), principalement dévolus à la reconnaissance intra- cellulaire. Différents NLR ont été récemment identifiés comme cause de maladies auto-inflammatoires. Plusieurs de ces syndromes sont caractérisés par une production exces sive d’IL-1b. Le lien entre NLR et IL-1b, l’inflamma- some, a été décrit par le groupe de Jürg Tschopp à Lau- sanne.6 L’inflammasome est une plateforme moléculaire, responsable de l’activation de l’IL-1b. Il est composé d’un NLR servant de senseur, d’une ou plusieurs molécu les adap- tatrices, comme par exemple ASC (apoptosis­associated speck­

like protein containing a CARD (caspase recruitment domain)), et d’une ou plusieurs caspases. L’inflammasome le mieux dé- crit jusqu’à présent est l’inflammasome NLRP3 (figure 1), qui active la caspase-1, qui elle-même va activer l’IL-1b et

conduire à une inflammation. De nombreux activa teurs de l’inflammasome NLRP3 ont été décrits, tels l’acide urique, l’ATP, l’amiante, les sels d’aluminium employés com me ad- juvants ou les ultraviolets pour les kératinocytes.8,9

syndromesfébriles périodiques

classiques

Fièvre méditerranéenne familiale

La fièvre méditerranéenne familiale (FMF) est le syn- drome fébrile d’origine génétique le plus fréquent et tou che en majorité les populations du pourtour méditerranéen (Juifs du nord de l’Afrique, Arméniens, Turcs, Arabes), avec une prévalence de 1/200 à 1/1000. Les manifestations de cette maladie autosomale récessive surviennent pendant l’enfance ou l’adolescence et comprennent des accès de fièvre d’environ trois jours, des arthralgies, myalgies, péri- cardite, pleurite, douleurs abdominales aspécifiques et lésions cutanées. Les lésions cutanées ne sont pas obliga- toires et décrites dans 12 à 43% des cas. A côté des exan- thèmes purpuriques non spécifiques, la plaque érysipéloïde est relativement typique, plaque érythémateuse bien dé-

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4 avril 2012 Syndromes fébriles périodiques classiques

• Fièvre méditerranéenne familiale (FMF)

• Syndrome périodique associé au récepteur du TNF (TRAPS)

• Syndrome de fièvre avec hyper-IgD

Syndromes périodiques associés à la cryopyrine

• Urticaire familiale au froid

• Syndrome de Muckle-Wells

• NOMID/CINCA

Autres maladies auto-inflammatoires (liste non exhaustive)

• Pyogenic arthritis, pyoderma gangrenosum, acne (syndrome PAPA)

• Syndrome de Schnitzler

• Periodic fever, aphthous stomatitis, pharyngitis, cervical adenitis (syndrome PFAPA)

• Syndrome de Still

• Déficience de l’antagoniste du récepteur de l’IL-1b (syndrome DIRA)

• Arthrite pédiatrique granulomateuse et syndrome de Blau NOMID/CINCA : Neonatal onset multisystem inflammatory disease/

Chronic infantile neurological and articular syndrome ; IgD : immunoglo- buline D ; TNF : facteur de nécrose tumorale.

Tableau 1. Maladies auto-inflammatoires

Agent Nom commercial Composition Structure-cible Demi-vie Administration

Anakinra Kineret Antagoniste recombinant du récepteur Récepteur à IL-1 4-6 heures 1 x/jour à interleukine 1 (IL-1)

Rilonacept Arcalyst Protéine de fusion : récepteur à IL-1 IL-1b, IL-1a, IL-1RA 8-9 heures 1 x/semaine + protéine accessoire de l’IL-1 (IL-1 receptor antagonist)

Canakinumab Ilaris Anticorps monoclonal contre IL-1b IL-1b 28 jours 1 x tous les 1-2 mois

Tableau 2. Inhibiteurs de l’interleukine-1 (IL-1) (D’après réf.1).

Figure 1. Inflammasome NLRP3

L’inflammasome est une plateforme protéique responsable de l’activation de l’IL-1b. Il est composé d’un NLR servant de senseur (NLRP3 dans l’in- flammasome NLRP3), d’une ou plusieurs molécules adaptatrices comme par exemple ASC, et d’une ou plusieurs caspases. Une fois assemblé, l’in- flammasome active la caspase-1, qui elle-même va activer l’IL-1b et con- duire à sa sécrétion et à une inflammation. De nombreux activateurs de l’inflammasome NLRP3 ont été décrits, qui sont reconnus comme signaux de stress ou de danger par la cellule.

ASC : apoptosis-associated speck-like protein containing a CARD (cas- pase recruitment domain) ; IL-1b : interleukine-1b ; NLR : NOD-like ré- cepteur ; PYD, NACHT, NAD, LRR : domaines du NLRP3.

Inflammasome assembly

Secretion

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limitée siégeant sur la face antérieure du pied ou de la jambe, qui disparaît spontanément en quelques jours. La maladie peut se compliquer par une amyloïdose secon- daire pouvant con duire à une insuffisance rénale. Un pur- pura de Henoch-Schönlen, des angiœdèmes, un érythème palmoplantaire diffus et un syndrome de Raynaud peuvent aussi être observés. Le gène affecté (MEFV) code pour une protéine nom mée pyrine, qui est impliquée dans la régulation de l’inflammasome. Les mutations décrites con- duisent à une activation non contrôlée de l’inflammasome et une produc tion augmentée d’IL-1b. La colchicine permet de contrôler la maladie et de prévenir l’amyloïdose secon- daire. Dans les cas résistants, une réponse à l’anakinra, à l’interféron a ou aux anti-TNF-a a été décrite.1,10

Syndrome périodique associé au récepteur du TNF

Le syndrome périodique associé au récepteur du TNF (TRAPS) est une maladie autosomale dominante causée par un défaut de clivage du récepteur membranaire au fac- teur de nécrose tumorale (TNFR1), conduisant à une acti- vation excessive de la voie de signalisation du TNF-a. Le mécanisme liant les mutations de TNFR1 à l’IL-1 est incon- nu, mais la participation de l’IL-1 est plausible, un traite- ment par antagoniste de l’IL-1 améliorant les symptômes de la maladie dans certains cas réfractaires à la thérapie causale par les inhibiteurs du TNF-a. Le TRAPS débute dans l’enfance avec des longs pics fébriles d’une durée d’une à quatre semaines accompagnés d’œdème périorbi- tal, d’un érythème œdémateux du tronc et des membres, d’arthralgies, de coliques abdominales, de conjonctivite et de lymphadénopathies. Les manifestations cutanées, observées chez 80% des patients, comprennent le plus souvent des érythèmes et des plaques urticariennes des membres proxi maux migrant distalement en quelques heu- res. Les lésions cutanées corrèlent temporellement avec les myalgies.11

Syndrome de fièvre avec hyper-IgD

Ce syndrome autosomal récessif doit son nom au taux élevé d’IgD mesuré chez une partie des patients. La muta- tion du gène de la mévalonate kinase (MVK) conduit à un déficit partiel de cette enzyme et à une accumulation de l’acide mévalonique. Le déficit enzymatique entraîne une diminution des produits intermédiaires et une activité aug- mentée de la caspase-1, résultant en une surproduction d’IL-1b. La maladie commence souvent dans les premières semaines de vie et est caractérisée par des accès de fièvre récurrents de trois à sept jours accompagnés d’arthralgies, lymphadénopathies, douleurs abdominales et rash cutané.

Les manifestations cutanées sont observées chez deux tiers des patients, généralement sous la forme d’un exanthème maculo-papuleux ou morbilliforme, mais aussi une urticaire ou un érythème noueux. La moitié des patients développe des aphtes buccaux, avec ou sans aphtes génitaux, condui- sant au diagnostic erroné de Behçet. Les accès surviennent toutes les quatre à huit semaines. Une splénomégalie peut aussi être observée. Le diagnostic est posé après deux mesures d’un taux élevé d’IgD. Un taux normal n’exclut ce- pendant pas la maladie, en particulier chez les petits en-

fants, qui ont souvent un taux normal. Les IgA (immunoglo- bulines A) sont augmentées dans 80% des cas. La durée des accès fébriles peut être réduite par les statines.12

Syndromes périodiques associés à la cryopyrine

La mutation du gène NLRP3 (aussi nommé CIASI, cold­

induced autoinflammatory syndrome, ou cryopyrine) conduit à trois syndromes distincts qui ont en commun un rash urti- carien, des arthropathies et une atteinte neurologique et/ou sensorielle. Les mutations de NLRP3 induisent une stimu- lation excessive et incontrôlée de l’inflammasome résultant en une production augmentée d’IL-1b. Ces trois syndromes répondent très bien à l’inhibition de l’IL-1b.13

L’urticaire familiale au froid se manifeste dans les premiers mois de vie par des épisodes fébriles d’une durée de 12 à 24 heures, accompagnés par un exanthème urticarien dou- loureux non prurigineux, des arthralgies, des myalgies, une conjonctivite et une leucocytose, souvent déclenchés par une exposition au froid.

• Les patients, atteints du syndrome de Muckle­Wells, présen- tent une clinique similaire à l’urticaire au froid, mais indé- pendante d’une exposition au froid. Une surdité neuro- sensorielle et une amyloïdose secondaire peuvent être observées également.14

• Le NOMID/CINCA (Neonatal onset multisystem inflammatory disease/ chronic infantile neurological and articular syndrome) se manifeste dès la période néonatale sous la forme de pous- sées fébriles, avec un exanthème urticarien comparable à celui du Muckle-Wells, arthralgies, lymphadénopathies, hé- pa tosplénomégalie, méningite, accompagnés d’une perte progressive de la vision et de l’audition et d’un retard men- tal et de croissance.15

autresmaladies auto

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inflammatoires

Pyogenic arthritis, pyoderma gangrenosum, acne (syndrome PAPA)

Syndrome autosomal dominant causé par la mutation du gène PSTPIP1 (Proline­serine­threonine phosphatase­interac­

ting protein 1), qui code pour une protéine interagissant avec la pyrine (voir précédemment : Fièvre méditerranéenne fa- miliale). Comme dans la FMF, la mutation résulte en une production augmentée d’IL-1b. L’acronyme PAPA résume les manifestations majeures du syndrome caractérisé par une acné cystique sévère survenant à la puberté et persis- tant souvent à l’âge adulte, une oligoarthrite destructrice (coudes, genoux et chevilles) et un pyoderma gangrenosum en général sur les membres distaux, parfois aussi multifocal généralisé. Les patients montrent une bonne réponse à l’inhibition de l’IL-1b.16

Syndrome de Schnitzler

L’étiologie du syndrome de Schnitzler est inconnue. Une mutation autosomale dominante de NLRP3 a été décrite chez un patient, mais n’a pas été retrouvée chez d’autres.

La maladie comporte une urticaire chronique non prurigi- neuse et une gammapathie monoclonale à IgM (immuno- globulines M) associées éventuellement à des accès fé- briles, une hépatosplénomégalie, une lymphadénopathie,

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ainsi que des douleurs articulaires et osseuses. Le syndro- me peut se compliquer d’une macroglobulinémie de Wal- denström ou d’une amyloïdose secondaire.17

Periodic fever, aphthous stomatitis, pharyngitis, cervical adenitis (syndrome PFAPA)

Le syndrome PFAPA est la forme la plus fréquente de maladie auto-inflammatoire chez l’enfant. Son étiologie est inconnue. Le syndrome est caractérisé par des poussées régulières de fièvre élevée (L 39 °C), associées à au moins un des trois signes cardinaux comportant une stomatite aph- teuse, une pharyngite et une lymphadénite cervicale. Cépha- lées, symptômes gastro-intestinaux et arthralgies peu vent également être présents. Les manifestations cutanées sont rares et peuvent se présenter sous la forme d’érythèmes du tronc, de macules palmoplantaires ou de purpura. Une aphtose bipolaire peut mener au diagnostic erroné de Beh- çet. La maladie se manifeste avant l’âge de cinq ans, avec des attaques de trois à six jours récidivant toutes les 3-8 semaines. Une résolution est généralement observée à l’adolescence. L’inhibition de l’IL-1b conduit à une amélio- ration des symptômes.18,19

Syndrome de Still

La cause de la maladie de Still de l’enfant et de l’adulte est inconnue. Dans les deux formes, une élévation de l’IL-18 a été mesurée, signe indirect d’une activité augmentée de l’IL-1b (les deux molécules sont activées par la caspase-1).

Le syndrome de Still de l’adulte survient aux environs de 35 ans et est caractérisé par des épisodes fébriles fluctuant au cours de la journée, des arthralgies, un rash de couleur saumon et une élévation de la ferritine sérique. Le diag- nostic différentiel cutané comprend les exanthèmes viraux, une syphilis secondaire et les maladies lymphoproliféra- tives. Une pharyngite, une lymphadénopathie, une hépato- splénomégalie, une leucocytose, une élévation des enzy mes hépatiques peuvent compléter le tableau clinique.20

Déficience de l’antagoniste du récepteur de l’IL-1 b (syndrome DIRA)

Le syndrome DIRA, décrit en 2009, est transmis de ma- nière autosomale récessive et causé par des mutations de l’antagoniste du récepteur de l’IL-1, résultant en une acti- vation incontrôlée de la production d’IL-1a et IL-1b. Le syndrome est caractérisé par une pustulose cutanée géné- ralisée, une ostéomyélite multifocale, une périostite ainsi que des malformations osseuses se manifestant immédia- tement après la naissance.21,22

Arthrite pédiatrique granulomateuse et syndrome de Blau

Les cas familiaux sont désignés sous le nom de syn- drome de Blau, les cas sporadiques sont aussi appelés sar- coïdose néonatale. Cette maladie autosomale dominante est causée par une mutation du NLR NOD2, ce qui conduit à une activation constitutive de NF-kB (Nuclear factor­kappa B). Des mutations du même gène sont aussi retrouvées dans la maladie de Crohn. La triade clinique caractéristi- que se manifeste avant l’âge de trois ans et comporte une dermatite granulomateuse, une polyarthrite symétrique et

une uvéite récurrente pouvant conduire au glaucome et à la cécité. Les lésions cutanées sont le premier signe de la maladie et se manifestent sous la forme de papules brun- rouge ou d’érythèmes nodulaires histologiquement com- parables à une dermatite granulomateuse sarcoïdale.23

discussion

Le nombre de maladies auto-inflammatoires monogéni- ques connues augmente chaque année. Le diagnostic diffé- rentiel clinique est essentiel avant la recherche de la muta- tion suspectée. Un score diagnostique pédiatrique, en partie transposable aux patients adultes, a été décrit récemment,24 et est accessible sur le site web de PRINTO (Pediatric Rheu- matology International Trials Organisation ; www.printo.it/

periodicfever).

A côté des maladies monogéniques rares mentionnées ci-dessus, un rôle de l’inflammasome dans d’autres mala- dies plus courantes a aussi été démontré. Des polymorphis- mes de NLRP1 ont été décrits chez des patients atteints de vitiligo associé ou non à d’autres maladies auto-inflamma- toires.25 La fonction de l’IL-1b dans les cancers, en particu- lier le mélanome, reste à déterminer, des données contra- dictoires montrant un rôle dans le développement et la progression du mélanome tandis que d’autres études ont souligné l’importance du NLRP3 inflammasome dans l’im- munité anti cancéreuse.9 Parmi les maladies non dermato- logiques liées à l’inflammasome, on peut citer le rôle de l’in- flammasome NLRP3 dans le diabète de type 2, la goutte et l’influenza.

La plupart des manifestations cutanées des syndromes auto-inflammatoires se présentent sous forme de dermato- ses neutrophiliques (acné, pyoderma, hidradénite suppura- tive). Il est de ce fait tentant de supposer que ces derma- toses neutrophiliques sont liées à l’IL-1b en cas d’apparition isolée également. L’anakinra a été employé avec succès dans la dermatose aiguë fébrile neutrophilique (syndrome de Sweet). Un patient atteint d’hidradénite suppurative et de pyoderma gangrenosum concomitant a montré une bonne réponse à l’anakinra et des essais cliniques sont en cours pour le traitement de ces deux maladies par les antago- nistes de l’IL-1b.

La recherche de mutations de gènes auto-inflamma- toires est restée vaine pour le moment dans la maladie de Behçet, malgré les symptômes évoquant les syndromes PAPA, PFAPA et NOMID/CINCA. Cependant, l’efficacité de traitements par anti-TNF, interféron a ou justement ana- kinra, a été publiée.1

La compréhension des syndromes inflammatoires a d’une part une importance clinique, étant donné que l’inhibition de l’IL-1 offre un traitement efficace et spécifique. Ces syn- dromes ont d’autre part une valeur éducative, permettant de comprendre les voies inflammatoires dépendant de l’IL-1. On peut espérer que les stratégies thérapeutiques modulant la reconnaissance des signaux de danger condui- ront au développement de nouveaux traitements, ainsi qu’à la compréhension de ces voies de signalisation, également dans d’autres maladies inflammatoires plus courantes com- me les dermatoses neutrophiliques, l’acné ou le pyoderma gangrenosum.

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* à lire

** à lire absolument

Bibliographie

Implications pratiques

Les maladies auto-inflammatoires sont caractérisées par une inflammation chronique ou récidivante en l’absence de cause infectieuse ou auto-immune

Devant une maladie récurrente de la peau et des articula- tions, il faut penser à une maladie auto-inflammatoire car un traitement efficace est disponible

Un score diagnostique est accessible sur le site web de PRINTO (Pediatric Rheumatology International Trials Orga- nisation ; www.printo.it/periodicfever)

La fièvre méditerranéenne familiale (FMF) est le syndrome fébrile d’origine génétique le plus fréquent et touche en ma- jorité les populations du pourtour méditerranéen

L’inflammasome est également impliqué dans des maladies dermatologiques plus courantes telles que le vitiligo, le pyo- derma gangrenosum ou l’hidradénite suppurative

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