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nique, permettent de faire entrer l’évalua- tion de la composition corporelle dans la pratique clinique des maladies de la nutri- tion, du métabolisme et de l’endocrinolo- gie.

Nous envisagerons brièvement les bases de l’étude de la composition corporelle et la mise en place des nombreuses méthodes qui ont pu être développées, ainsi que leur place. Nous décrirons ensuite les méthodes utilisables en pratique clinique.

Modèles d’étude

de la composition corporelle

L’étude de la composition corporelle fait appel à des modèles, ou systèmes, de représentation du corps humain (figure 1, p. 197).

Le modèle anatomique, le plus ancien, sépare le corps en différents tissus : tissu musculaire, tissu adipeux, organes… C’est un modèle descriptif qui permet de com- prendre l’organisation spatiale des diffé- rents constituants et leurs niveaux d’inter- connexion physique. Les progrès de l’imagerie médicale, constitués par la tomodensitométrie et de la résonance magnétique nucléaire, ont renouvelé l’inté- rêt de ce modèle.

Le modèle biochimique sépare les compo- sants de l’organisme en fonction de leurs propriétés chimiques : l’eau, les lipides (extractibles par les solvants organiques), les protéines, les glucides, les minéraux.

En fonction de la profondeur de l’analyse chimique, une distinction de la molécule jusqu’à l’échelon atomique peut être effec- tuée. Cette approche a montré que l’azote corporel correspond presque uniquement aux protéines, le calcium et le phosphore à l’os, le carbone aux lipides (les glucides étant comparativement très peu abon- dants), ou que le potassium est presque uniquement intracellulaire et le sodium extra-cellulaire, etc. Il s’agit là encore d’un modèle descriptif qui permet de préciser les quantités des composants de e corps humain est constitué de nom-

breux éléments de différentes natures : eau, graisse, os, protéines. L’analyse des proportions de ces divers éléments constitue ce que nous appelons l’étude de la compo- sition corporelle. Les variations de ces constituants ne sont que très grossièrement appréciées par la mesure de concentrations biologiques ou du poids corporel. Ainsi, la

perte de poids chez un sujet obèse peut cor- respondre à une perte de graisse, une perte d’eau, ou encore une perte de masse muscu- laire. Jusqu’à une époque récente, ces don- nées, dont l’analyse restait réservée à quelques centres très spécialisés, n’étaient pas prises en compte dans l’évaluation cou- rante. Actuellement, deux méthodes, l’im- pédancemétrie et l’absorptiométrie biphoto-

Les méthodes d’étude

de la composition corporelle

P. Barbe*

* Service d’endocrinologie-nutrition, CHU Rangueil, Toulouse.

L’étude de la composition corpo- relle repose sur des modèles de représentations biochimiques, ana- tomiques ou physiologiques. Le modèle physiologique est le plus fonctionnel.

Les méthodes d’étude sont de 3 ordres : quantification (DEXA), estimation (hydrodensitométrie, eau corporelle), prédiction (plis cutanés, impédance bioélectrique). L’agres- sivité et la précision de ces méthodes sont inversement corrélées.

L’absorptiométrie biphotonique (DEXA) constitue actuellement la méthode de référence.

Le DEXA permet de mesurer la masse maigre et la masse grasse. Il permet aussi de mesurer avec pré-

cision de faibles variations de ces deux compartiments.

L’hydrodensitométrie permet de mesurer la densité corporelle et d’es- timer le pourcentage d’adiposité.

La méthode des plis cutanés per- met une estimation de l’adiposité.

Elle est très dépendante de l’opéra- teur.

L’impédance bioélectrique per- met une prédiction de l’eau corpo- relle et indirectement de la masse maigre et de l’adiposité. Sa simpli- cité de mise en œuvre compense en partie son manque de précision.

La tomodensitométrie permet d’évaluer le tissu adipeux profond périviscéral.

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l’organisme et leurs proportions respec- tives. Ce modèle permet ainsi d’introduire la notion de masse d’un constituant donné, donc de réserve, par définition épuisable et nécessaire à évaluer. Les données biochi- miques directes dont nous disposons sur la composition corporelle de l’organisme humain sont cependant très limitées. Elles reposent sur deux études effectuées à tren- te ans d’intervalle sur quelques dizaines de cadavres (1, 2), qui constituent toujours la référence. C’est de ces travaux qu’ont été tirées la densité moyenne de la masse gras- se et de la masse maigre ainsi que l’hydra- tation moyenne du corps humain, qui ont servi de référence à différentes méthodes d’étude de la composition corporelle.

Les méthodes physiologiques introduisent la notion de compartiments. Un comparti- ment regroupe des composants fonction- nellement liés entre eux indépendemment de leur localisation anatomique ou de leur composition chimique (figure 2). En nutri- tion, le modèle physiologique de référence est le modèle métabolique à 4 comparti- ments :

– la masse cellulaire active correspond à l’ensemble des cellules des différents organes et muscles ; le fonctionnement de cette masse détermine les besoins énergé- tiques de l’organisme ;

– l’eau extra-cellulaire correspond à l’en- semble des liquides interstitiels et au plas- ma ; elle constitue la masse liquidienne facilement échangeable pour le fonction- nement normal de l’organisme ;

– la masse grasse correspond aux triglycé- rides stockés dans les adipocytes quelle que soit leur localisation anatomique ; cette masse constitue l’essentiel des réserves énergétiques de l’organisme ; – la masse minérale osseuse correspond aux cristaux de phosphate tricalcique du squelette ; cette masse constitue l’essentiel de la masse minérale de l’organisme.

D’autres modèles à deux ou trois comparti- ments ont été décrits (figure 2). Ces modèles n’ont de sens qu’en référence à une technique d’exploration (voir ci-après).

Leur utilisation, comme représentation

Figure 1. Différents modèles conceptuels de la composition corporelle.

Figure 2.Modèles physiologiques de représentation de la composition corporelle.

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simplifiée de la composition corporelle, repose sur l’acceptation d’hypothèses de travail (hydratation ou densité constantes de la masse maigre, teneur moyenne en potassium de la masse cellulaire…). Ces hypothèses constituent les limites de validité des modèles et des méthodes d’ex- ploration qui y font référence.

Finalement, en fonction du système de représentation, on appellera la graisse tissu adipeux dans un modèle anatomique, lipides (essentiellement triglycérides) dans un modèle chimique, masse grasse dans un modèle physiologique.

Mise en place

des méthodes d’étude de la composition corporelle

L’étude anatomique et biochimique d’un organisme vivant peut être effectuée de façon très précise par analyse de carcasse.

C’est la pratique la plus utilisée en méde- cine vétérinaire et en recherche agrono- mique. Elle permet de préciser les poids, les densités et les volumes des constituants chimiques. Des études de ce type n’ont été effectuées chez l’homme que dans un nombre très restreint de cas, pour des rai- sons d’éthique. C’est pourtant sur ces tra- vaux que reposent en grande partie nos connaissances théoriques.

Une vue d’ensemble de ces méthodes, adap- tée de la référence 3, est donnée dans la figure 3. Elles y sont présentées en fonction de leur degré d’agressivité et de précision.

Elles peuvent être classées en trois groupes : – les méthodes permettant la quantification in vivo des constituants spécifiques de l’or- ganisme ; cette qualification repose sur la modification d’un signal (en général un rayonnement), interprétée grâce à un étalon- nage préalable avec un composé connu. Ces méthodes n’impliquent pas d’hypothèse particulière ; leur limite est celle de la capa- cité à recueillir la modification du signal utilisé (seuil de détection, variabilité…) ;

Figure 3.Principales méthodes d’étude de la composition corporelle.

Les méthodes sont classées par ordre croissant d’agressivité et par ordre décroissant de précision. Les méthodes sont présentées dans la partie gauche, les paramètres mesurés dans la partie droite [d’après Heymsfield et al. (3)].

– les méthodes permettant l’estimation in vivo des compartiments de l’organisme ; chaque méthode repose à la fois sur une mesure corporelle (la densité ou le volume d’eau totale), sur la référence à un modèle de composition corporelle et sur l’accep- tation d’une hypothèse. Par exemple, à

partir de la mesure du volume d’eau tota- le, en faisant référence à un modèle à deux compartiments (le corps peut être divisé en deux parties : la masse maigre, qui contient de l’eau, et la masse grasse qui n’en contient pas), et en posant comme hypothèse une hydratation moyenne de la

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masse maigre de 76%, on convertit les litres d’eau totale mesurés en kilogrammes de masse maigre, et on déduit la masse grasse du poids corporel. Les masses ne sont donc pas mesurées mais estimées. Les variations de l’hydratation au cours de la vie (enfant, vieillard) et en pathologie (œdèmes, déshydratation) soulignent faci- lement les limites de ces approches ; – les méthodes permettant la prédiction de la valeur d’un compartiment à partir de mesures anthropométriques (plis cutanés, circonférences, poids, taille) ou électriques

; ce sont des méthodes indirectes. Elles sont les plus utilisées en clinique car les plus simples à mettre en œuvre. Une équa- tion prédictive, intégrant au moins le poids du sujet et le paramètre mesuré, permet de calculer la valeur d’un compartiment mesuré. Cette équation prédictive est éta- blie à partir d’une des méthodes du groupe précédent, dans une étude de référence.

L’équation peut être “enrichie” de para- mètres tels que l’âge, le sexe. La prédiction n’est en général applicable qu’à un groupe comparable en tout point au groupe qui a servi à établir l’équation. Ces méthodes possèdent leurs propres limites (variabilité, reproductibilité des mesures) et intègrent aussi les limites de la méthode de référen- ce qui a servi pour établir l’équation. Le caractère très indirect de ces méthodes doit rendre prudente l’interprétation des résul- tats à l’échelon individuel.

Au total, chaque méthode repose sur une ou plusieurs hypothèses de travail qui en constituent les limites, autant que les aspects technologiques ou le coût. Nous n’envisagerons que les méthodes les plus utilisées. Plusieurs revues générales sur le sujet dont données dans la bibliographie (4, 5, 6, 7).

Différentes techniques utilisées

Hydrodensitométrie

L’hydrodensitométrie fut considérée com- me la méthode de référence à partir des

années 1960. C’est sur ses données que repose une grande part de notre connais- sance de la composition corporelle et de ses variations. Le principe général de la méthode consiste à déterminer la densité corporelle (DC) à partir des mesures du poids corporel dans l’air, dans l’eau, de la densité de l’eau, du volume résiduel pul- monaire et du volume des gaz intestinaux.

Le modèle de composition corporelle utili- sé est un modèle à deux compartiments, séparant le corps en masse grasse et masse non grasse (assimilée à la masse maigre).

L’hypothèse acceptée assigne une densité fixe à ces deux compartiments de l’ordre de 0,90 g/ml pour la masse grasse et de 1,10 g/ml pour la masse non grasse. On peut ainsi calculer, à partir de la densité totale, les proportions respectives des deux masses. Le pourcentage de masse grasse (% MG) est donné par les formules : – de Brozek (8) : % MG = [(4,570/DC) – 4,142] x 100 ;

– de Siri (9) : % MG = [(4,950/DC) – 4,500] x 100.

À partir de cette mesure et du poids, on cal- cule la masse grasse et on en déduit la masse non grasse, assimilée à la masse maigre. Sur le plan technique, cette métho- de nécessite une cuve permettant une pesée immergée du sujet en expiration forcée et une mesure du volume corporel. Le volume résiduel pulmonaire est mesuré par dilution de l’hélium. Les gaz intestinaux sont consi- dérés comme constants. On conçoit que ces impératifs la rendent peu utilisable en pathologie et chez les sujets âgés.

Les limites de cette exploration sont la coopération du sujet, qui conditionne pour une grande partie la reproductibilité et la variabilité de la mesure (pour y remédier, on effectue six à dix mesures dont on utilise la moyenne), et l’hypothèse de base sur les densités respectives de la masse grasse et de la masse non grasse.

Ces valeurs de densité reposent sur les constatations anciennes effectuées lors des premières études de dissection (1). La den- sité de la masse grasse (c’est-à-dire celle des triglycérides contenus dans le tissu adipeux)

est peu sujette à des modifications indivi- duelles. En revanche, la densité de la masse non grasse est fonction de sa teneur en eau, en muscle et en minéraux osseux qui varient d’un sujet à l’autre (homme/femme, spor- tif/sédentaire, jeune/vieillard). Ainsi, les dis- sections récentes portant sur des séries autopsiques plus larges ont montré que la masse osseuse et la masse musculaire repré- sentent respectivement 16 à 26 % et 42 à 59 % de la masse non grasse (2).

Malgré ces limites, cette méthode a été longtemps considérée comme la méthode de référence. Depuis une vingtaine d'an- nées, le développement des installations et leur utilisation en clinique sur des sujets de compositions corporelles beaucoup plus variées que celles des volontaires sains inclus dans les premières études, a permis de souligner les difficultés d'interprétation des résultats fournis. Parallèlement, à cause des difficultés de mise en œuvre et de la rareté des installations en dehors de cer- tains laboratoires de physiologie, plusieurs équipes ont cherché à développer des méthodes prédictives du pourcentage de masse grasse mesuré par hydrodensitomé- trie ; ces méthodes indirectes reposent sur l'utilisation de mesures plus simples à effectuer : les plis cutanés et l'impédance bioélectrique.

Cependant, c'est grâce à cette méthode qu'ont pu être comprises les relations entre masse grasse et composition corporelle, entre masse maigre et dépense énergétique de repos chez les sujets obèses (10, 11, 12).

L'hydrodensitométrie permet de mesurer les variations de la masse grasse au cours des régimes hypocaloriques, car l'erreur faite sur la densité de la masse non grasse (liée au contenu minéral osseux et à la masse musculaire) reste constante chez le même individu (13).

La mesure des plis cutanés Cette méthode dérive de la précédente.

Durnin et Womersley (14) ont établi des équations prédictives, en fonction de l'âge et du sexe, reliant la somme de 4 plis cuta-

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nés (bicipital, tricipital, sous-scapulaire et supra-iliaque) au pourcentage de MG mesuré par hydrodensitométrie. L'hypo- thèse de la méthode est que l’épaisseur de la graisse sous-cutanée reflète la masse grasse totale de l’organisme. La détermina- tion des plis doit être effectuée avec une pince spécialement calibrée (adiposimètre) pour mesurer l’épaisseur du pli sans écraser le tissu adipeux sous-cutané. Les pinces en matière plastique permettant un écrasement manuel de la peau sont très imprécises et doivent être proscrites. La mesure doit être réalisée par un opérateur entraîné (coeffi- cient de variabilité personnel < 5 %).

Outre les problèmes liés à la mesure pro- prement dite des plis cutanés (difficile ou impossible chez les sujets présentant une obésité sévère, la plupart des pinces ayant un écartement maximal de 50 mm), cette méthode présente plusieurs limites : - conceptuelles liées à l’hydrodensitomé- trie (voir ci-dessus) dont elle va propager les erreurs, voire les amplifier en les multi- pliant par ses erreurs propres ;

- de localisation des plis sélectionnés et de leur liaison à la masse grasse totale : les quatre plis des équations de Durnin ne prennent pas en compte le tissu adipeux de la partie inférieure du corps et ont tendance à sous-estimer l’obésité gynoïde ; en outre, la méthode estime mal le tissu adipeux pro- fond et a tendance à sous-estimer l’obésité viscérale.

La méthode des plis cutanés a pour avan- tages sa simplicité de mise en œuvre et son coût très faible. Cela a conduit au dévelop- pement de nombreuses équations prédic- tives spécifiques de sous-populations parti- culières (enfants, adolescents, sujets noirs, sportifs, avec équations différentes en fonction du sport pratiqué, etc.) (15).

Mesures de l’eau totale et de l’eau extracellulaire

Les mesures de l’eau corporelle reposent sur la méthode des traceurs. L’espace de dilution d’un traceur est assimilé au volu- me du compartiment mesuré grâce à la

courbe de décroissance du traceur, obtenue à partir de plusieurs prélèvements san- guins. Ainsi, la mesure de l’espace de dis- tribution d’une dose traceuse d’eau, mar- quée par un isotope stable de l’hydrogène, le deutérium, permet de calculer le volume d’eau corporelle totale ; il est possible de recueillir des échantillons d’urine ou de salive à la place des prélèvements sanguins (16). Cette méthode nécessite un investis- sement coûteux (spectrométrie de masse).

L’estimation de la masse maigre et de la masse grasse à partir du volume d’eau cor- porelle totale repose sur l’hypothèse que la masse grasse ne contient pas d’eau, et que la masse non grasse présente un coefficient d’hydratation fixe de 73 % (voir ci-dessus).

Cette valeur moyenne, qui peut être accep- tée chez des sujets de composition corpo- relle “normale”, sera invalidée dans tous les états d’inflation hydrosodée. C’est en particulier le cas chez les sujets présentant une obésité sévère (17). De la même façon, on peut déterminer le volume d’eau extra- cellulaire (plasmatique et interstitielle) en utilisant le brome qui se dilue spécifique- ment dans ce compartiment.

Impédance bioélectrique

L’impédance biolélectrique (Bioelectrical Impedance Analysis, BIA) est fondée sur la capacité des tissus hydratés à conduire l’énergie électrique. L’impédance est, pour un courant alternatif, l’équivalent de la résistance (l’inverse de la conductance) pour un courant continu ; elle est fonction du volume du compartiment hydroélectro- lytique contenu dans ce corps. L’impédance (Z) d’un corps est liée à la résistance spéci- fique (r), à la longueur (L) et à la surface de section (S), selon la formule :

Z = r . L / S

Si on assimile le corps à un cylindre, on peut multiplier les deux côtés de l’équation par L, soit Z = r . L2/ (L. S), ce qui revient à lier Z au volume (L.S) du compartiment mesuré. On peut donc en théorie mesurer le volume (V) d’un corps à partir de Z : V = r . L2/ Z

La mesure de l’impédance corporelle tota- le par BIA permet ainsi l’estimation du volume de l’eau corporelle (et par assimila- tion, en admettant que son hydratation est constante, celle de la masse maigre qui contient de l’eau de l’organisme).

La technique BIA la plus répandue utilise un seul courant de 800 µA avec une fré- quence de 50 kHz et 4 électrodes de surfa- ce autocollante (18). En pratique, le sujet doit être allongé depuis au moins 30 minutes pour que les liquides de l’orga- nisme soient uniformément répartis. Deux électrodes sont placées au niveau du poi- gnet, et deux au niveau de la cheville homolatérale. Le courant est appliqué pen- dant quelques secondes et la mesure de Z est lue. Du fait des caractéristiques du cou- rant, la mesure est totalement indolore.

Une technique un peu différente, utilisant un courant à double fréquence (5 kHz et 1 MHz) et des électrodes semblables à des aiguilles d’acupuncture, a été développée par A. Thomasset, puis par A. Boulier (19).

L’intérêt de deux fréquences est lié à l’obs- tacle que constituent les membranes cellu- laires au passage du courant. Ainsi, un cou- rant de basse fréquence (5 kHz) ne pénètre pas dans le secteur intracellulaire, et donc l’impédance qui lui est opposée reflète l’eau extra-cellulaire ; un courant de haute fréquence (1 MHz) traverse l’ensemble des secteurs intra- et extra-cellulaire, son impé- dance reflète l’eau totale de l’organisme.

Un courant de fréquence moyennement élevée (50 kHz), tel que celui utilisé dans la méthode à électrodes de surface, est censé pénétrer dans l’ensemble du secteur hydrique, mais ce n’est probablement pas vrai pour tous les sujets.

Plus récemment, des appareils d’impédan- cemétrie, comparables à des balances, sont apparus sur le marché. Les électrodes sont des empreintes sur lesquelles le sujet pose les pieds ; l’impédance mesurée est celle des jambes et de la partie basse du tronc.

L’intérêt de cet appareillage réside dans la possibilité de l’utiliser en consultation, sans la période de décubitus nécessaire

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avec les appareils plus anciens. Le disposi- tif affiche le poids et le pourcentage de masse grasse. Ce calcul est en réalité très indirect.

Quelle que soit la technique utilisée, les fondements de la méthode restent les mêmes : l’impédance bioélectrique nécessi- te une méthode de référence, pour pouvoir élaborer une équation prédictive permettant de passer des constantes électriques directe- ment mesurées à l’estimation de la masse non grasse, ou du volume d’eau corporelle totale. Jusqu’à présent, la mesure de l’eau totale et l’hydrodensimétrie ont été utilisées comme références. Plusieurs dizaines d’équations ont été publiées, plus ou moins spécifiques de sous-groupes (hommes, femmes, obèses et non obèses, sujets âgés).

Leurs formules et une étude critique peu- vent être retrouvées dans la référence (20).

La structure de l’équation est en général la même :

Masse non grasse = a + b. (T2/Z) + c.Poids, où a, b, c sont les coefficients spécifiques de l’équation. L’âge, le sexe ou d’autres para- mètres sont parfois introduits dans le modè- le, mais cela réduit d’autant l’importance de Z dans la prédiction. Pour certaines de ces équations, la réévaluation de la mesure dans un groupe test a pu montrer que l’impédan- ce mesurée n’intervenait plus dans le calcul de la masse maigre (21).

Comme les plis cutanés, le BIA propage les erreurs de la méthode de référence utilisée.

Le modèle à deux compartiments utilisé entraîne l’amplification de l’erreur, puisque la mesure d’un compartiment est dépendan- te de l’autre.

Quelles que soient les fréquences et les équations utilisées, les limites de la mé- thode sont liées au modèle géométrique permettant de calculer un volume à partir de Z et restent les mêmes. Celui-ci assimi- le le corps à un cylindre. En fait, l’impé- dance corporelle mesurée est la somme des impédances de plusieurs cylindres (les bras, les jambes, le tronc) de surfaces de section croissantes et donc d’impédances décroissantes. L’impédance du tronc ne représente que 15 % de l’impédance totale,

celles des jambes et des bras 40 % chacune (22, 23). Ainsi, la morphologie du sujet est un des éléments d’imprécision de la mesu- re, et les modifications de composition cor- porelle au niveau du tronc sont très mal enregistrées par cette méthode (24).

Le BIA a cependant pour avantages sa sim- plicité d’emploi, son faible coût et la repro- ductibilité des résultats électriques obte- nus, qui est indépendante de l’utilisateur.

Absorptiométrie biphotonique L’absorptiométrie biphotonique à rayons X (Dual Energy X-ray Absorptiometry, DEXA) initialement développée dans les années 1980 pour la mesure du contenu minéral osseux (25), s’est imposée comme la méthode de référence pour l’étude de la composition corporelle.

Elle consiste à balayer l’ensemble du corps avec un faisceau de rayons X à deux niveaux d’énergie. Le rapport des atténua- tions de ces deux rayonnements est fonction de la composition de la matière traversée.

L’irradiation imposée au patient est faible (moins qu’une scintigraphie thyroïdienne).

Le calibrage est effectué avec des “fan- tômes” artificiels contenant des triglycé- rides et du calcium. La DEXA permet de séparer trois compartiments (masse grasse, masse maigre et contenu minéral osseux).

En réalité, deux compartiments sont mesu- rés par l’atténuation du faisceau : le conte- nu en graisse et le contenu en minéraux ; le

“reste” est attribué par le logiciel à la masse dite maigre, qui est en fait une masse non grasse et non osseuse. La précision est excellente : le poids du sujet recalculé par la somme des 3 compartiments mesurés diffè- re de moins de 3 % du poids réel (26).

Par rapport aux méthodes précédentes, la DEXA présente l’avantage de ne pas for- muler d’hypothèse telle que la constance de la densité ou de l’hydratation de la masse maigre. Elle mesure la valeur du compartiment osseux, négligée jusque-là.

Le balayage du corps entier et le traitement de l’image permettent une approche régio- nale (bras, tronc, jambes) des trois compar-

timents mesurés, impossible à réaliser avec les autres méthodes (27).

La DEXA est capable d’enregistrer de façon fiable des variations de faible ampli- tude de la masse maigre, telles que celles réalisées par une soustraction de liquides extra-cellulaires d’un test de déshydrata- tion-réhydratation (28), ou au cours d’une séance d’hémodialyse (29). De même, la capacité de la méthode à enregistrer une augmentation de masse grasse, simulée par l’addition de pièces de lard sur le tronc des sujets, a fait l’objet d’une validation (30).

La DEXA paraît donc être actuellement la méthode la plus intéressante pour l’étude de la composition corporelle et de ses variations en clinique (31). La limite réside dans le coût et la rareté des installations actuelles. Il faut souligner aussi que les appareils actuels ne sont pas adaptés aux sujets présentant une obésité massive (pour lesquels il n’existe d’ailleurs aucune méthode d’évaluation à l’heure actuelle).

Tomodensitométrie computérisée La graisse périviscérale intra-abdominale intervient dans le déterminisme des com- plications métaboliques et cardiovascu- laires de l’obésité. En clinique, nous avons pris l’habitude de mesurer la circonférence à la taille pour estimer l’adiposité abdomi- nale. Cependant, la valeur du tour de taille est à nuancer par l’épaisseur du pli cutané abdominal. Cela souligne l’intérêt d’un bon examen clinique et la nécessité de développer une approche plus précise de la graisse profonde.

La tomodensitométrie permet de réaliser des coupes anatomiques abdominales et d’identifier dans un plan horizontal les tis- sus, en fonction de leur densité qui atténue les rayons X (32). Elle ne fournit pas une mesure de la masse grasse viscérale (en kg), mais un calcul des surfaces des tissus adipeux profonds et superficiels. On peut ainsi décrire un rapport d’adiposité viscérale/sous-cutanée (V/S). La méthode est rapide (quelques secondes si on se limi- te à une coupe), et le coefficient de varia-

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tion pour le tissu adipeux est de l’ordre de 1 %. Elle permet d’enregistrer les varia- tions d’adiposité viscérale, en particulier au cours d’une intervention diététique.

Conclusion

L’étude de la composition corporelle constitue un élément indispensable de l’évaluation du statut nutritionnel. L’intérêt et les limites des différentes méthodes d’étude sont présentées dans le tableau 1.

En pratique médicale de consultation ou en hospitalisation, la DEXA, dans la mesure où elle est accessible, représente la métho- de de choix étant donné la précision et la qualité des renseignements obtenus. À défaut, l’impédance bioélectrique peut être utilisée, en tenant compte des limites et des imprécisions de la méthode, c’est-à-dire en n’accordant de valeur aux modifications de composition corporelle observées que pour des pertes ou des augmentations de poids suffisamment importantes. Les données anthropométriques, les plis cutanés consti-

tuent des moyens peu coûteux d’évalua- tion ; le suivi longitudinal par des mesures répétées compense le manque de précision.

La notion de composition corporelle doit être intégrée dans le raisonnement et la pra- tique médicale. Les méthodes d’évaluation ne sont plus réservées aux cercles d’initiés.

Elles permettent de prendre les décisions et de formuler les propositions thérapeutiques les mieux adaptées (interprétations des variations pondérales, suivi d’un program- me d’amaigrissement ou de renutrition). ■

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Méthodes Intérêts Limites

Hydrodensitométrie mesure simultanée modèle,

masse grasse coopération des sujets,

et masse non grasse coût, appareillage

Eau corporelle mesure le volume modèle, coût, appareillage

Absorptiométrie mesures simultanées coût, appareillage, biphotonique (DEXA) masse grasse, masse maigre disponibilité,

contenu minéral osseux corpulence pas de coopération

Tomodensitométrie graisse viscérale/sous-cutanée coût, appareillage, disponibilité, qualitatif

Anthropométrie coût, rapidité, répétition modèle, imprécision,

(plis cutanés) observateur, obésité

Impédance bioélectrique coût, rapidité, observateur modèle, géométrie,

(BIA) équations, imprécision

Tableau I.Intérêts et limites des méthodes d’évaluation de la composition corporelle.

M i n i s y n t h è s e

(8)

18. * Lukaski HC, Bolonchuk WW, Hall CB, Siders WA. Validation of tetrapolar bioelectrical impedance method to assess human body com- position. J Appl Physiol 1986 ; 60 : 1327-32.

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A U T O - T E S T A U T O - T E S T

Vrai ou faux ?

1. La densité de la masse maigre est constante d’un individu à l’autre.

2. Le DEXA permet de mesurer de faibles variations d’hydratation.

3. L’impédancemétrie est un examen indolore utilisable en consultation.

4. La composition corporelle est un élé- ment clé de l’évaluation du statut nutri- tionnel.

réponses page 215

Nota :Les références importantes sont marquées d’un astérisque et les références

indispensables de deux astérisques.

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