8 | La Lettre de l'Infectiologue • Tome XXXI - n° 1 - janvier-février 2016
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VIH
Prophylaxie préexposition à la demande
chez les hommes à haut risque d’acquisition du VIH
Contexte
L’essai IPERGAY (Intervention préventive de l’exposition aux risques avec et pour les gays) a évalué l’efficacité et la tolérance d’une prophy
laxie préexposition (PrEP) dépendante de l’acti
vité sexuelle, chez des hommes homosexuels (HSH) à haut risque d’acquisition du VIH, en France et au Canada, randomisés pour recevoir soit du ténofovir/emtricitabine (TDF/FTC), soit un placebo. Étaient consi dérées comme à haut risque les personnes ayant eu dans les 6 derniers mois des rapports anaux non protégés avec au moins 2 partenaires. Les patients atteints d’hépatite B ou C, ayant une clairance de la créatinine < 60 ml/ mn, des ALAT > 2,5 N, une glycosurie ou une protéinurie étaient exclus.
Méthode
Le schéma de prise était le suivant : 2 comprimés de TDF/FTC ou de placebo 24 heures avant les rapports sexuels, 1 comprimé 24 heures après et 1 comprimé 48 heures après la première prise. Les patients bénéficiaient d’un suivi clinique toutes les 4 à 8 semaines et renseignaient des question
naires via Internet. Ils accédaient aussi à un service complet de prévention et à un dépistage systématique des infections sexuellement transmissibles tous les 6 mois. Le critère principal de jugement était le diagnostic d’in
fection par le VIH. Au cours de cet essai, les critères secondaires étaient la tolérance et le niveau d’observance (correct − prise d’au moins 1 comprimé 24 heures avant et 1 comprimé 24 heures après −, nul ou suboptimal) dont l’appréciation était associée à un comptage du nombre de comprimés (diapositives 1 et 2).
Résultats
Entre le 22 février 2012 et le 23 octobre 2014, 400 volontaires ont été inclus : 199 dans le bras TDF/FTC et 201 dans le bras placebo. Le suivi médian était de 9,3 mois. Durant ce suivi, 56 patients (14 %), soit 31 dans le groupe TDF/FTC et 25 dans le groupe placebo, ont reçu une prophylaxie postexposition.
Tout au long du suivi, les pratiques sexuelles n’ont pas évolué, ce qui explique le nombre élevé de diagnostics d’infections sexuellement transmissibles : 41 % dans le bras TDF/FTC, 33 % dans le groupe placebo, sans différence significative (81 infections à Chlamydiae, 88 infections à gonocoque, 39 syphilis et 5 hépatites C).
Concernant le taux de séroconversion du VIH1, en intention de traiter, 16 nouvelles infections ont été diagnostiquées : 2 dans le groupe TDF/FTC (incidence de 0,91 pour 100 personnesannée) et 14 dans le groupe placebo (incidence de 6,6 pour 100 personnesannée), ce qui correspond à une réduction relative de l’incidence d’acquisition du VIH1 de 86 % dans le groupe TDF/FTC (p = 0,002) [diapositives 3 et 4]. Chez ces 16 patients, aucune mutation de résistance n’a été mise en évidence. Chez les 2 patients infectés dans le groupe TDF/FTC, les dosages plasmatiques étaient indétec
tables. En termes d’effets indésirables de grade 3 ou 4, il n’existait aucune différence entre les 2 groupes. On observe une augmentation des effets indésirables gastrointestinaux dans le groupe TDF/FTC (14 versus 5 % ; p = 0,002). Trentecinq sujets (18 %) du groupe TDF/FTC et 20 (10 %) du groupe placebo (p = 0,003) ont eu une augmentation de la créatinine.
Aucun de ces effets indésirables, de grade 1, n’a été responsable d’un arrêt du traitement.
Référence bibliographique
Molina JM, Capitant C, Spire B et al.; ANRS IPERGAY Study Group. On- demand Preexposure Prophylaxis in Men at High Risk for HIV-1 infection.
N Engl J Med 2015;373(23):2237-46.
La PrEP est une alternative attractive au traitement en continu chez les sujets à haut risque. Néanmoins, les données obtenues ne peuvent être extrapolées aux HSH ayant moins d’activités sexuelles à risque.
Les recommandations du groupe d’experts d’octobre 2015 préconisent que la PrEP :
• soit considérée comme une modalité de prévention s’inscri
vant dans une démarche de santé sexuelle globale ;
• s’inscrive dans le cadre de la prévention dite “combinée” ;
• soit prescrite aux HSH non infectés par le VIH rapportant avoir eu des relations anales non protégées avec au moins 2 partenaires sur une période de 6 mois, ayant présenté
plusieurs épisodes d’infection sexuellement transmissible (IST) dans l’année, ayant eu plusieurs fois recours à une prophylaxie antirétrovirale postexposition dans l’année ou ayant l’habi
tude de consommer des substances psychoactives lors des rapports sexuels, ou aux personnes transgenres ayant des relations sexuelles non protégées ;
• soit accompagnée d’un suivi visant à favoriser l’adhésion à cette modalité de prévention et l’adoption à terme de pra
tiques sexuelles à moindre risque visàvis de toutes les IST ;
• s’accompagne d’une réévaluation et d’une mise à jour du statut vaccinal des personnes pour les virus des hépatites A et B et du méningocoque.
Commentaire
Valérie Pourcher- Martinez
(Service des maladies infectieuses et tropicales, hôpital de La Pitié- Salpêtrière, Paris)
Pour aller plus loin
Morlat P et al. Prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH - Recommandations du groupe d’experts. Actualisation 2015.
L’auteur déclare avoir des liens d’intérêts avec BMS, Gilead, Janssen, MSD, ViiV Healthcare.
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