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Influence du climat sur les flux et bilans de carbone en forêt tropicale humide guyanaise
Antoine Cabon
To cite this version:
Antoine Cabon. Influence du climat sur les flux et bilans de carbone en forêt tropicale humide guyanaise. 2014, 15 p. �hal-01268785�
Rapport de stage
Influence du climat sur les flux et bilans de carbone en forêt tropicale humide guyanaise
Encadrant : Damien Bonal, directeur de recherche à l’UMR Ecologie et Ecophysiologie Forestière, responsable du dispositif Guyaflux
Antoine Cabon
Master FAGE, spécialité FGE, année universitaire 2013 – 2014 Projet du 28 avril au 20 juin 2014
RESUMÉ
Les flux de carbone et les paramètres environnementaux relevées de manière
continue de 2004 à 2012 sur le site Guyaflux dans la forêt tropicale humide de
Paracou en Guyane Française ont été l’objet d’une étude dans le but de mieux
comprendre l’influence du climat sur les bilans de carbone entre la forêt et
l’atmosphère. J’ai eu deux approches statistiques complémentaires dans le
cadre de cette étude en utilisant des méthodes adaptées aux séries
temporelles d’une part et des méthodes corrélatives d’autre part. J’ai ainsi pu
mettre en évidence que le rayonnement global est le principal facteur explicatif
des bilans de carbone saisonniers et de leurs variations inter-annuelles. Ce
travail a par ailleurs permis d’observer que contrairement à ce qui était
attendu, la saison humide était responsable de la plus large partie du puits de
carbone annuel. Ce comportement particulier devra être expliqué par des
études complémentaires.
Remerciements
Je tiens à remercier mon encadrant, Damien Bonal, qui m’a donné de son temps pour m’aider, m’orienter et me corriger tout au long de mon stage et qui a également mis à ma disposition le jeu de donnée issu du dispositif Guyaflux à la base de mon travail. Je remercie Hervé Rybarczyk qui m’a aiguillé dans le choix des packages pour R à utiliser dans le cadre de ma problématique et Pierre Montpied. Je remercie également le centre INRA de Champenoux et le personnel du laboratoire EEF pour l’accueil qui m’a été réservé et le cadre de travail qui a été le mien pendant deux mois.
Table des matières
Introduction ... 1
Matériels et méthodes ... 2
Acquisition de données : Site d’étude ... 2
Description du matériel d’acquisition ... 2
Calcul du flux net de carbone entre l’écosystème et l’atmosphère ... 3
Analyse des données ... 4
Résultats ... 5
Variabilité inter-annuelle ... 5
Facteurs explicatifs de la variabilité inter-annuelle ... 7
Variabilité intra-annuelle ... 9
Facteurs explicatifs des variations entre saison sèche et saison humide ... 10
Discussion et conclusions ... 11
Variations inter-annuelles de NEE, GPP et Reco ... 11
Variations intra-annuelles de NEE, GPP et Reco ... 12
Conclusions ... 14
Abréviations
NEE = échanges nets entre l’écosystème et l’atmosphère (net ecosystem exchange) GPP = production primaire brute (gross primary production)
Reco = respiration totale de l’écosystème Rg = rayonnement global
Rn = rayonnement net
ISWC = indice de contenu en eau du sol (index of soil water content) VPD = déficit de pression de vapeur (vapour pressure deficit)
MaxVPD = maximum journalier du déficit de pression de vapeur Rain = quantité de précipitation
Wind.dir = direction du vent
Wind.speed = vitesse du vent
Tair = température de l’air
Tsoil = température du sol
Introduction
Dans le contexte du changement climatique global (IPCC, 2013), il est important de pouvoir comprendre le fonctionnement et le cycle des gaz à effet de serre entre les différents compartiments des écosystèmes et l’atmosphère, et leur évolution dans le futur. Parmi les écosystèmes terrestres qui peuvent jouer un rôle de puits de carbone, les forêts tropicales ont une dynamique complexe et de nombreux risques pèsent sur elles dans le futur, du fait du changement climatique et des changements d’utilisation des terres. De par leur surface (1 700 millions d’hectares, ou 10% de la superficie des continents – ONF, 2014), les forêts tropicales sont un acteur majeur dans la séquestration du carbone dans la végétation et dans le sol : Malhi et al. (2010) ont estimé que les forêts tropicales intactes (non perturbées par l’exploitation) ont été un puits de 1,1 Pg C.an-1 sur les périodes 1990 à 1999 et 2000 à 2005 et qu’elles participent ainsi à 47% du puits net de carbone terrestre.
On ne peut actuellement pas prévoir de manière mécanistique comment vont se comporter les forêts tropicales dans le futur suite à l’augmentation du CO
2dans l’atmosphère et du changement climatique. L’effet de l’augmentation de CO
2dans l’atmosphère pourrait avoir un effet direct en augmentant la séquestration de carbone du fait d’un effet de fertilisation sur la photosynthèse, mais cette fertilisation pourrait atteindre une saturation, du fait en particulier des limites des écosystèmes en termes de stockage de carbone (Malhi et al. 2010). Par ailleurs le changement climatique aura des effets sur les caractéristiques environnementales, comme la quantité de précipitation ou de rayonnement reçu, ou la disponibilité en eau du sol. Comprendre quel est l’effet des variables environnementales sur les flux et bilans de carbone est un prérequis essentiel à l’anticipation des variations des stocks de carbone dans un contexte de changement climatique. En particulier, quelle est la variabilité inter-annuelle des échanges de CO
2entre la forêt et l’atmosphère, et quel est l’effet du climat sur les variations inter- annuelles sur ces échanges ?
Par ailleurs, il est courant de penser que du fait de leur position latitudinale (proche de l’équateur), les forêts tropicales sont soumises à des conditions climatiques stables. Or, en Guyane Française, par exemple, il existe de fortes variations saisonnières de la pluviométrie, du rayonnement, et de la disponibilité en eau dans le sol (Bonal et al.
2008). Il a été démontré que cette variabilité influence le fonctionnement de
l’écosystème. Les flux de carbone entre la forêt tropicale guyanaise et l’atmosphère sont
2 aussi soumis à une forte saisonnalité (Bonal et al. 2008) : globalement, le stockage de carbone est positif sur l’année et est maximal pendant la saison sèche, alors qu’il peut être négatif (source de carbone vers l’atmosphère) en saison des pluies. L’origine de ces différences de bilan viendrait essentiellement de la respiration de l’écosystème qui diminue fortement en saison sèche alors que la photosynthèse diminue moins fortement (Bonal et al. 2008), probablement du fait d’un enracinement moyen des arbres relativement profond et donc un accès à une source d’eau peu limitante même en fin de saison sèche (Stahl et al. 2013). Il convient de comprendre alors quelles sont les variations intra-annuelles des flux et bilans de carbone dans les forêts tropicales humides et quels sont les facteurs environnementaux responsables de ces variations ? Mon stage de M1 avait pour objectif d’aborder ces différentes questions à travers un jeu de données de 9 années sur les échanges de CO
2entre la forêt tropicale humide guyanaise et l’atmosphère et de variables microclimatiques.
Matériel et méthodes
Acquisition des données : Site d’étude
Les données ont été acquises à l’aide du dispositif Guyaflux en Guyane Française (5°16’54’’N, 52°54'44’’W), géré par l’INRA de Kourou (UMR Ecofog) et Nancy (UMR EEF). Ce dispositif est situé dans la forêt de Paracou, où le climat est tropical humide et principalement influencé par les oscillations de la zone de convergence inter tropicale. Il en découle de fortes pluies aux mois de décembre à février et d’avril à juillet, tandis que le mois de mars connaît généralement une petite saison sèche et les mois d’août à novembre sont caractérisés par une grande saison sèche. Ces quatre saisons ont été définies pour chaque année en fonction des précipitations et de la vitesse et la direction du vent observés. Il tombe en moyenne 3168±287 mm de pluie par an sur le site d’étude et la température moyenne de l’air est de 25,6±0.2°C [données Guyaflux 2004-2012].
Description du matériel d’acquisition
Le système d’acquisition est organisé autour d’une tour à flux de 55 m de haut,
construite en 2003. Les capteurs eddy flux et météorologiques ont été installés 20 m au-
dessus de la canopée. Les variables environnementales et les flux de carbone utilisés
dans ce travail ont été enregistrés de manière continue du 1er janvier 2004 au 31
décembre 2012 et compilées en tant que moyennes ou sommes sur une demi-heure à
l’aide d’un datalogger (CR23X, Campbell Scientific Inc., USA). La liste détaillée des équipements utilisés pour obtenir les données microclimatiques est indiquée dans Bonal et al. (2008).
Calcul du flux net de carbone entre l’écosystème et l’atmosphère
Le flux net de carbone semi horaire entre l’écosystème et l’atmosphère (Net Ecosystem Exchange, NEE) a été calculé en utilisant la méthode des corrélations turbulentes («eddy covariance » en anglais) présentée en détails dans Aubinet et al. (2000). De façon simple, à un instant donné, si l’on exclut la possibilité d’advection (flux latéral de CO
2dans l’écosystème), NEE correspond à la somme des flux de carbone entre l’écosystème et l’atmosphère (le premier terme est la covariance de la variation de la vitesse verticale du vent w’ et de la concentration en carbone c’) et de la quantité de CO
2atmosphérique stockée entre le sol et les capteurs au sommet de la tour (58m). Ce deuxième terme est calculé via l’intégration de mesures des concentrations de CO
2à différentes hauteurs (0,5 ; 6 ; 13 ; 23 ; 32 et 58 m). Par convention, quand NEE est positif, l’écosystème est une source de CO
2pour l’atmosphère ; il est un puits de CO
2quand NEE est négatif. NEE correspond à la différence entre la respiration totale de l’écosystème (Reco) et la production primaire brute (gross primary production, GPP). Reco est calculé en prenant les données de NEE de nuit, alors que GPP est nul.
La méthode des corrélations turbulentes ne s’applique que sous certaines conditions de
stabilité atmosphérique et requiert par ailleurs un nombre important de filtres et
épurements avant de disposer de données propres (Aubinet et al. 2001). Les séries de
données de NEE produites sont alors entachées de nombreux trous, qu’il convient de
remplir à l’aide de modèles afin de réaliser des bilans de CO
2journaliers, mensuels ou
annuels. Ce travail sur la qualité des données et sur le remplissage des trous (à l’aide du
site web : http://www.bgc-jena.mpg.de/bgi/index.php/Services/REddyProcWeb) a été
réalisé en amont de celui-ci par mon encadrant, et je ne le décrirai donc pas ici. Les
données semi horaires propres et remplies des paramètres climatiques ou du
fonctionnement de l’écosystème ont été sommées ou moyennées à l’échelle de la journée
pour constituer les données de base de mon travail. J’ai ainsi analysé la variabilité inter-
et intra-annuelle de NEE, GPP et Reco à l’aide de 9 années * 365 (ou 366) jours.
4 Analyse des données
J’ai réalisé l’ensemble des analyses de données sous R (R.app GUI 1.64, S. Urbanek & H.-J.
Bibiko, © R Foundation for Statistical Computing, 2014). Il est important de souligner ici que les données journalières dont je disposais (moyennes ou sommes journalières des variables climatiques ou de flux) ne peuvent pas être considérées comme indépendantes les unes des autres. En effet, il s’agit de données correspondant à des séries temporelles (série de valeurs journalières), pour lesquelles les approches régressives classiques pour détecter des corrélations entre variables ne peuvent pas être appliquées. Pour les analyser, il convient donc d’appliquer des approches statistiques qui prennent explicitement en compte le fait que les données se suivent dans le temps. En accord avec mon encadrant, la démarche que j’ai adoptée alors pour répondre aux questions posées est la suivante :
1- Afin de dégrossir et mettre en évidence rapidement des corrélations entre variables, et procéder à la sélection de celles qui paraissaient les plus pertinentes, j’ai utilisé dans un premier temps les méthodes statistiques classiques, tout en étant conscient du fait que leur utilisation ici « violait » certaines des règles d’application.
2- Dans un deuxième temps, j’ai appliqué les méthodes statistiques adaptées pour les séries temporelles. L’interprétation des résultats de ces analyses est plus complexe que ceux des analyses classiques, mais la discussion que je propose est basée essentiellement sur elles. L’analyse de séries temporelle utilisée est l’analyse en ondelettes (« wavelet » en anglais) dont le principe repose sur l’utilisation d’une fonction, ici l’ondelette de Morlet, comme un filtre passe-bande sur les données temporelles qui sont donc traitées comme un signal (Grinsted et al. 2004, Setz 2011). Le résultat est la transformée continue d’ondelettes (continuous wavelet transform, CWT), une convolution entre la fonction d’ondelette et le signal. L’interprétation que l’on peut faire de cette analyse est que plus la fonction d’ondelette correspond au signal, plus la puissance de l’ondelette résultant sera élevée. En appliquant l’ondelette à différentes fréquences, on peut visualiser le spectre de puissance, qui permet de détecter quelles sont les fréquences fortement représentées dans le signal et leur position dans le temps.
Il a été également intéressant de faire des analyses de cohérence d’ondelette entre deux
variables (wavelet transform coherence, WTC). Le résultat obtenu peut être interprété
comme étant la corrélation locale de deux paramètres à une certaine fréquence. Le
package « biwavelet » (Conduct univariate and bivariate wavelet analyses, version :
0.17.3, Tarik C. Gouhier et Aslak Grinsted, 2014) de R a été utilisé pour réaliser ces analyses.
Résultats
1. Variabilité inter-annuelle
Figure 1 : Rayonnement global (Rg), indice de contenu en eau du sol (index of soil water content, ISWC), déficit de pression de vapeur (vapour pressure deficit, VPD) et température de l’air (Tair) à l’échelle journalière en fonction du temps. Un point correspond à la moyenne ou somme journalière.
Les paramètres environ- nementaux (figure 1) montrent une forte variabilité dans le temps sur la période considérée (2004-2012), avec une périodicité annuelle plus ou moins marquée. On distingue nettement un pic principal tous les ans pour Rg et VPD et un creux tous les ans pour ISWC, correspondant à la période de saison sèche. Il y souvent également un deuxième pic (ou creux) au cours de l’année, mais celui-ci est moins important. La température de l’air montre également une périodicité annuelle, plus diffuse, et la variabilité de Tair est faible (les extrêmes sont compris entre 22°C et 28°C).
Rg, VPD et Tair montrent un bruit journalier important. Par exemple, certaines journées
en saison des pluies montrent une somme de Rg de 3 MJ.m-2.day-1 alors que d’autres en
saison sèche atteignent 25 MJ.m-2.day-1. On remarque que les creux de ISWC atteignent
un maximum en valeur absolue pendant l’année 2008 et que les durées des périodes de
sécheresse varient fortement d’une année à l’autre.
6
Figure 2 : Perte nette de carbone par l’écosystème (net ecosystem exchange, NEE), production primaire brute (gross primary production, GPP) et respiration de l’écosystème (Reco) en fonction du temps.
Les flux ou bilans journaliers de carbone (figure 2) ont une forte variabilité à l’échelle des 9 années de l’étude. L’échelle de variation de NEE est de –5 à 8 gC.m-2.day-1 alors que GPP varie de 1 à 18 gC.m-2.day-1 et Reco de 5 à 18 gC.m-2.day-1. Le bruit journalier est fort pour GPP et NEE et plus faible pour Reco. On observe sur ces graphiques une périodicité annuelle plus nette pour GPP et Reco que pour NEE. Ceci peut être expliqué par le fait que NEE est justement la différence entre Reco et GPP.
Tableau 1 : Bilan annuels de flux de carbone
Flux (gC.m-2.an-1) NEE GPP Reco
2004
-31,1 4013,9 3982,8
2005
-141,1 3725,7 3584,7
2006
-225,9 3580,1 3354,3
2007
-543,4 3755,0 3211,5
2008
-436,7 3528,1 3091,4
2009
-533,2 3775,8 3242,7
2010
-183,6 4087,8 3904,2
2011
-206,8 4023,5 3816,7
2012
-322,9 4032,6 3709,7
NEE est négatif la majeur partie de l’année (figure 2 – 70 % des jours sur la période
2004 – 2012 ont une valeur moyenne de NEE négative) mais les pics positifs de NEE
sont plus important en valeur absolue que les pics négatifs. Le bilan global annuel est
négatif, mais avec une très forte variabilité inter-annuelle : pour chaque année de la
période 2004 – 2012, la portion de l’écosystème de la forêt de Paracou qui est contenue
dans l’empreinte de la tour à flux a fixé entre -31,1 et -543,4 gC.m-2.an-1 (tableau 1). Les trois années les plus fixatrices de carbone et qui se différencient nettement des autres sont 2007, 2008 et 2009. C’est en 2004 que le bilan annuel de NEE est le plus faible. La tendance annuelle de NEE est à la baisse (augmentation du puits de carbone) de 2004 à 2008 alors qu’elle augmente à nouveau entre 2008 et 2012.
2. Facteurs explicatifs de la variabilité inter-annuelle
Les différents paramètres environnementaux intégrés dans cette étude sont clairement corrélés entre eux (figure 3) et permettent de définir deux axes bien différenciés sur l’ACP des paramètres environnementaux. L’axe de plus grande variabilité (horizontal) peut s’interpréter comme un gradient ensoleillement/disponibilité en eau. Rg est très bien corrélé au rayonnement net, au maximum journalier de VPD et également, mais dans une moindre mesure, à la température de l’air et la moyenne journalière du VPD.
Rg est par ailleurs anti-corrélé au contenu en eau du sol et aux précipitations. Le second axe (vertical) correspond à la dynamique des masses d’air. La pression atmosphérique qui est corrélée au second axe participe très peu à la variabilité du système.
Figure 3 : Cercle des corrélations de l’analyse en composantes principales des variables environnementales sur la période 2004-2012.
NEE, GPP et Reco sont en variables supplémentaires.
Les flux et bilans de carbone ont été tracés sur le cercle des corrélations sans être inclus dans l’analyse : on observe que GPP est bien expliqué par l’axe rayonnement/
précipitations et est anti-corrélé à NEE (et donc positivement corrélé à la production nette de l’écosystème, NEP, qui est l’opposé de NEE). Cependant l’ensemble des variables n’explique qu’une petite partie de la variabilité de NEE : la corrélation de NEE avec les trois premiers axes de l’ACP est significative et le r
2est de 0.20. Reco est aussi corrélé avec le premier axe mais semble dépendre néanmoins d’un plus grand nombre de variables.
Rg
Tair VPD MaxVPD
Rn
Rain Patm
Wind.Dir
Wind.speed
ISWC NEE Reco
GPP
8 Comme explicité dans la partie « matériels et méthodes », dans la mesure où l’ACP ne calcule que des régressions linéaires simples entre variables intégrées, le résultat obtenu n’est pas entièrement satisfaisant. En effet, les données dont on dispose représentent des séries temporelles qui ne sont pas indépendantes. L’ACP n’est donc pas optimale pour ce type d’approche.
Figure 4 : Analyse de cohérence des transformées en ondelettes continues entre NEE, GPP et Reco et Rg, ISWC et VPD. Le temps (time) est exprimé en jours. Les couleurs donnent la puissance de la relation : du bleu au rouge, la puissance varie de 0 à 1. Une zone orangée – rouge signifie que la puissance de la relation est élevée, ceci pouvant être interprété comme une corrélation locale entre les deux variables pour une périodicité donnée. Les zones fortement significatives sont alors entourées en noir. Une zone bleue ne montre aucune relation entre les variables. La zone en dehors du cône de signification (pointillés blanc) n’a pas de signification statistique.
L’analyse de cohérence de la transformée en ondelettes continues (figure 4) nous permet de localiser dans le temps une corrélation entre deux variables et de définir avec quelle périodicité celle-ci est observée (« period », en ordonnée, exprimée en jours). Les couleurs montrent le pouvoir de la relation. L’interprétation des sorties graphiques de cette analyse n’est pas aisée mais nous permet de dégager des tendances. Nous confirmons ainsi que pour toutes les variables intégrées, les fluctuations annuelles (périodes proches de 300-400 jours) sont corrélées. Ce lien est plus ténu entre NEE et les différentes variables environnementales. Les variations de NEE et GPP de 2004 à 2012 sont fortement corrélées avec celles de Rg tous les ans, la première moitié de l’année, avec une périodicité journalière ainsi qu’à une périodicité mensuelle voire bimensuelle pour GPP (période de 1 à 30 voire 60 jours. Résultat lu à partir de l’axe
« time »). Cette corrélation est plus faible avec Reco. ISWC n’est que ponctuellement corrélé aux flux de carbone (avec une périodicité de quelques jours) mais l’est par contre sur plusieurs mois par ans avec une périodicité mensuelle à semestrielle pour NEE et GPP. VPD est clairement corrélé avec Reco aux échelles journalières et hebdomadaires, alors qu’il est localement corrélé à NEE et GPP pour les échelles mensuelles et semestrielles.
3. Variabilité intra-annuelle
Le tableau 2 synthétise les moyennes pour les deux saisons climatiques les plus marquées en Guyane. La grande saison des pluies a lieu en général d’avril à juillet, alors que d’août à novembre, se produit une grande saison sèche.
Tableau 2 : Valeurs des différents paramètres environnementaux et des flux et bilans de carbone pendant la longue saison sèche et la longue saison humide. Un test de Student a été effectué pour comparer les valeurs en saison sèche et saison humide. *** p<0.001 ; ** p<0.01 * ; * p< 0.05 ; ns = non significatif.
Longue saison
sèche Longue saison
humide Significativité statistique Rg (MJ.m-2.day-1)
21.6 ± 3.2 16.2 ± 5.2 ***
ISWC (m3.m-3)
0.52 ± 0.07 0.67 ± 0.03 ***
VPD (kPa)
0.7 ± 0.1 0.5 ± 0.2 ***
Temp (°C)
26.3 ± 0.5 25.2 ± 0.8 ***
Rain (mm.day-1)
1.4 ± 6.2 13.6 ± 21.1 ***
NEE (gC.m-2.day-1)
-0.58 ± 1.35 -0.75 ± 1.96 ns
GPP (gC.m-2.day-1)11.31 ± 1.53 10.32 ± 2.36 **
Reco (gC.m-2.day-1)
10.73 ± 1.65 9.58 ± 1.85 *
10 On note une tendance significative à de plus fortes valeurs de GPP et Reco en saison sèche qu’en saison des pluies (Tableau 2). Il en résulte une tendance vers un bilan plus négatif (stock de carbone) en saison humide par rapport à la saison sèche, même ces différences ne sont pas significatives.
4. Facteurs explicatifs des variations entre saison sèche et saison humide
Afin de mieux cerner l’impact des différents facteurs environnementaux sur NEE, GPP et Reco, j’ai effectué des ACP sur chacune des saisons (grande saison sèche et grande saison humide – figure 5). En saison humide (figure 5), le cercle des corrélations est similaire à celui issu de l’ACP faite sur toute l’année (figure 3) : l’axe explicatif des variations de NEE et GPP est un axe rayonnement/ précipitations alors que Reco est moins corrélé aux différentes variables. NEE est corrélé à GPP pour la saison humide et à Reco pour la saison sèche. En saison sèche, ISWC participe plus à la variance du système qu’en saison humide et NEE et Reco lui sont fortement corrélés (figure 5). Les deux axes expliquent peu la variance de GPP. De façon générale, les facteurs environnementaux semblent moins explicatifs des flux de carbone pendant la saison sèche.
Rg
Tair VPD MaxVPD
Rn
Rain Patm
Wind.Dir
Wind.speed
ISWC NEE Reco
GPP
Rg Tair
VPD MaxVPD
Rn
Rain
Patm
Wind.Dir Wind.speed
ISWC NEE Reco GPP
Figure 5 : Cercle des corrélations de l’analyse en composante principale des variables environnementales sur la période saison humide (gauche) et saison sèche (droite). Les variables NEE, GPP et Reco sont en composantes supplémentaires.