G´ eom´ etrie – Master 1 PMG Temps disponible : 3 heures
Toutes les r´ eponses doivent ˆ etre justifi´ ees. Il est possible d’admettre la r´ eponse ` a une question afin de r´ epondre aux questions suivantes, en indiquant le point admis. Il est conseill´ e de choisir un maximum de 4 exercices ` a traiter.
Tous les corps sont commutatifs et de caract´ eristique diff´ erente de 2.
Exercice 1 (Questions de cours). Soit D, D ′ droites distinctes d’un plan projectif P 2 sur un corps K , O = D ∩ D ′ . Soit A, B, C ∈ D et A ′ , B ′ , C ′ ∈ D ′ distincts et posons :
a = ( BC ′ ) ∩ ( CB ′ ) , b = ( AC ′ ) ∩ ( CA ′ ) , c = ( AB ′ ) ∩ ( BA ′ ) , A = P 2 ∖ ( bc ) . 1. ´ Enoncer le th´ eor` eme de Pappus portant sur a, b, c.
2. Montrer que les points a, b, c sont distincts.
3. Justifier que A est un plan affine. Montrer le th´ eor` eme de Pappus si O ∈ A . 4. Montrer le th´ eor` eme de Pappus si O ∈ ( bc ) .
5. Soit A = ( 0 ∶ 1 ∶ 0 ) , B = ( 0 ∶ 1 ∶ 1 ) , C = ( 0 ∶ 1 ∶ 2 ) , A ′ = ( 1 ∶ 0 ∶ 2 ) , B ′ = ( 1 ∶ 0 ∶ 1 ) , C ′ = (1 ∶ 0 ∶ 0). Donner l’´ equation de la droite par a, b, c.
Corrig´ e 1. Esquisse de r´ eponses.
1. Pappus stipule que a, b, c sont align´ es.
2. Supposons par l’absurde que deux parmi les trois points soient confondus, par exemple a = b. Alors a ∈ ( CA ′ ) ∩ ( CB ′ ) = { C } , car A ′ ≠ B ′ , donc a = C. Par le mˆ eme argument, b ∈ ( AC ′ ) ∩ ( BC ′ ) = { C ′ } , b = C ′ . Ainsi C = a = b = C ′ , ce qui est absurde. De mˆ eme si on suppose a = c ou b = c on parvient ` a une contradiction.
3. On sait que, si F est une droite projective de P 2 , alors P 2 ∖ F est un plan affine.
Les droites ( AC ′ ) ∩ A et ( CA ′ ) ∩ A sont parall` eles, car leur point d’intersection b n’appartient pas ` a A. De mˆ eme (AB ′ ) ∩ A et (BA ′ ) ∩ A sont parall` eles.
Soit λ ∈ K tel que # —
OC = λ # —
OA. Par Thal` es, on a # —
OA ′ = λ # —
OC ′ . Donc l’homoth´ etie ϕ de centre O et rapport λ satisfait ϕ ( A ) = C et ϕ ( C ′ ) = A ′ . De mˆ eme on a une homoth´ etie ψ de centre O qui satisfait ψ ( B ) = A et ψ ( A ′ ) = B ′ . On a ϕ ( ψ ( B )) = C.
Comme ϕ et ψ sont homoth´ eties de mˆ eme centre, elles commutent, donc ϕ ( ψ ( C ′ )) =
B ′ . Ainsi, par la r´ eciproque de Thal` es, (BC ′ ) ∩ A et (CB ′ ) ∩ A sont parall` eles, donc
a appartient ` a la droite ` a l’infini, ` a savoir ( bc ) . Ainsi, a, b, c sont align´ es.
4. De nouveau ( AC ′ ) ∩ A et ( CA ′ ) ∩ A sont parall` eles, de mˆ eme que ( AB ′ ) ∩ A et ( BA ′ )∩A ; cette fois D et D ′ sont aussi parall` eles. Par le lemme du parall´ elogramme,
# —
AC = # —
C ′ A ′ . La translation ϕ de vecteur # —
AC satisfait donc ϕ(A) = C et ϕ(C ′ ) = A ′ . De mˆ eme la translation ψ de vecteur BC # — satisfait ψ(B) = A et ψ(A ′ ) = B ′ . On a ϕ ( ψ ( B )) = C et, comme ϕ et ψ commutent (en tant que translations) on a ϕ(ψ(C ′ )) = B ′ . Ainsi, (BC ′ ) ∩ A et (CB ′ ) ∩ A sont parall` eles, donc a ∈ (bc) et a, b, c sont align´ es.
5. On calcule ` a titre d’´ equation de la droite par ( BC ′ ) . Cette droite passe par les points B = (0 ∶ 1 ∶ 1) et C ′ = (1 ∶ 0 ∶ 0) donc elle s’´ ecrit :
( BC ′ ) = V
⎛
⎜
⎝ det
⎛
⎜
⎝
x 0 x 1 x 2
0 1 1
1 0 0
⎞
⎟
⎠
⎞
⎟
⎠
= V ( x 1 − x 2 ) . On a calcule ainsi D = V (x 0 ) et D ′ = V (x 1 ) puis on ´ ecrit :
( BC ′ ) = V ( x 1 − x 2 ) , ( CB ′ ) = V (− x 0 − 2x 1 + x 2 ) , ( AC ′ ) = V ( x 2 ) , ( CA ′ ) = V (− 2x 0 − 2x 1 + x 2 ) , (AB ′ ) = V (x 0 − x 2 ), (BA ′ ) = V (−2x 0 − x 1 + x 2 ).
Donc :
a = (1 ∶ −1 ∶ −1), b = (1 ∶ −1 ∶ 0), c = (1 ∶ −1 ∶ 1).
Ainsi la droite qui contient a, b, c est V ( x 1 + x 2 ) .
Exercice 2. Soit q ∶ R 4 → R une forme quadratique non d´ eg´ en´ er´ ee et Q = V ( q ) ⊂ P 3 R la quadrique lisse associ´ ee.
1. Soit Q non vide. Justifier que Q est projectivement ´ equivalente ` a Q 1 ou Q 2 avec : Q 1 = V ( x 0 x 3 − x 1 x 2 ) , Q 2 = V ( x 2 0 − x 2 1 − x 2 2 − x 2 3 ) .
2. Montrer que l’on a une application bien d´ efinie ϕ ∶ P 1 R × P 1 R → Q 1 donn´ ee par : ϕ ∶ (( s 0 ∶ s 1 ) , ( t 0 ∶ t 1 )) ↦ ( s 0 t 0 ∶ s 0 t 1 ∶ s 1 t 0 ∶ s 1 t 1 ) .
3. Montrer que ϕ est bijective.
4. Justifier que ϕ est un hom´ eomorphisme.
5. Justifier que Q 2 est hom´ eomorphe ` a une sph` ere de R 3 .
Corrig´ e 2. On utilise que deux formes quadratiques d´ efinissent deux quadriques projec-
tivement ´ equivalentes ssi elles ont mˆ eme signature, ` a un signe pr` es.
1. Il a 5 signatures possibles pour une forme quadratique non d´ eg´ en´ er´ ee q sur R 4 . Au signe pr` es, ces signatures sont ( 0, 4 ) , ( 1, 3 ) et ( 2, 2 ) . Mais une forme quadratique de signature ( 0, 4 ) d´ efinit une quadrique vide, donc il ne reste que deux signatures possibles, au signe pr` es. Or les deux formes d´ efinissant Q 1 et Q 2 ont bien signature ( 2, 2 ) et ( 1, 3 ) . En effet, pour Q 2 l’affirmation est ´ evidente, tandis que pour Q 1 il suffit d’´ ecrire 4(x 0 x 3 + x 1 x 2 ) = (x 0 + x 3 ) 2 − (x 0 − x 3 ) 2 + (x 1 + x 2 ) 2 − (x 1 − x 2 ) 2 . Ceci ach` eve la preuve.
2. D’abord, l’expression de ϕ est bien pos´ ee car pour tout λ, µ ∈ R ∗ on a : ( λs 0 ⋅ µt 0 ∶ λs 0 ⋅ µt 1 ∶ λs 1 ⋅ µt 0 ∶ λs 1 µ ⋅ t 1 ) = ( s 0 t 0 ∶ s 0 t 1 ∶ s 1 t 0 ∶ s 1 t 1 ) .
Aussi, il est clair qu’un point ( x 0 ∶ . . . ∶ x 3 ) = ( s 0 t 0 ∶ s 0 t 1 ∶ s 1 t 0 ∶ s 1 t 1 ) dans l’image de ϕ appartient ` a Q 1 puisque ce point satisfait x 0 x 3 − x 1 x 2 = s 0 s 1 t 0 t 1 − s 0 s 1 t 0 t 1 = 0.
3. Montrons que ϕ est surjective. On commence par consid´ erer ( x 0 ∶ . . . ∶ x 3 ) ∈ Q 1 tel que x i = 0 pour un certain i ∈ J 0, 3 K . Soit i = 0. On a donc x 1 x 2 = 0 de sorte que x 1 = 0 ou x 2 = 0. Si x 1 = 0, alors on voit que ( 0 ∶ 0 ∶ x 2 ∶ x 3 ) = ϕ (( 0 ∶ 1 ) , ( x 2 ∶ x 3 )) . Si x 2 = 0, on a (0 ∶ x 1 ∶ 0 ∶ x 3 ) = ϕ((x 1 ∶ x 3 ), (0 ∶ 1)). On traite de mani` ere similaire les autres cas i = 1, . . . , i = 3 et on conclut que ϕ est surjective sur Q ∩ H i pour i ∈ J 0, 3 K o` u H i = V (x i ). On voit aussi l’unicit´ e des ant´ ec´ edents trouv´ es des points ( x 0 ∶ . . . ∶ x 3 ) ∈ Q 1 tels que x i = 0 pour au moins une valeur de i ∈ J 0, 3 K .
On suppose d´ esormais que x i ≠ 0 pour tout i ∈
J 0, 3 K . On cherche ( s 0 ∶ s 1 ) et ( t 0 ∶ t 1 ) points de P 1 R tels que :
⎧ ⎪
⎪ ⎪
⎪ ⎪
⎨
⎪ ⎪
⎪ ⎪
⎪ ⎩
s 0 t 0 = x 0 , s 0 t 1 = x 1 , s 1 t 0 = x 2 , s 1 t 1 = x 3 .
On doit avoir s i ≠ 0 ≠ t i pour i = 0, 1 et t 0 = x 0 / s 0 , t 1 = x 1 / s 0 et s 1 = x 2 / t 0 = ( x 2 / x 0 ) s 0 . De cette mani` ere on d´ etermine s 1 , t 0 , t 1 ` a partir de ( x 0 , . . . , x 3 ) et s 0 . La derni` ere ´ egalit´ e s 1 t 1 = x 3 est valide car :
s 1 t 1 = x 1 x 2
s 0 t 0 = x 1 x 2
x 0 = x 3 .
Ainsi, ((s 0 ∶ s 1 ), (t 0 ∶ t 1 )) est un ant´ ec´ edent de (x 0 ∶ . . . ∶ x 3 ).
L’unicit´ e de ces ant´ ec´ edents est aussi claire. En effet, nous avons remarqu´ e que s 1 , t 0 , t 1 sont d´ etermin´ es ` a partir de s 0 ≠ 0 et des valeurs x 0 , . . . , x 3 . Par ailleurs, si on choisit λ ∈ R ∗ et on consid` ere x ′ i = λx i pour i ∈ J 0, 3 K alors, s 0 ∈ R ∗ et t 0 ∈ R ∗
´ etant choisis, on a s 1 = ( x ′ 2 / x ′ 0 ) s 0 = ( x 2 / x 0 ) s 0 et t 1 = x ′ 1 / s 0 = ( x ′ 1 / x ′ 0 ) t 0 = ( x 1 / x 0 ) t 0 . Donc ( s 0 ∶ s 1 ) et ( t 0 ∶ t 1 ) sont d´ etermin´ es uniquement ` a partir de ( x 0 ∶ . . . ∶ x 3 ) . 4. On montre que ϕ est continue. On consid` ere Φ ∶ R 4 → R 4 d´ efinie par
Φ ( s 0 , s 1 , t 0 , t 1 ) = ( s 0 t 0 , s 0 t 1 , s 1 t 0 , s 1 t 1 ) , continue en tant que fonction polynomiale en chaque coordonn´ ee. La projection canonique π ∶ R 4 ∖ {0} → P 3 R fournit une application continue comme composition d’applications continues :
π ○ Φ ∶ R 2 ∖ { 0 } × R 2 ∖ { 0 } → P 3 R .
Soit τ le produit des deux projections canoniques R 2 ∖ { 0 } → P 1 R qui associent ( s 0 ∶ s 1 ) ` a ( s 0 , s 1 ) et ( t 0 ∶ t 1 ) ` a ( t 0 , t 1 ) . On a ϕ ○ τ = π ○ Φ continue donc, comme P 1 R × P 1 R est muni de la topologie quotient associ´ ee ` a τ , l’application ϕ est continue.
Maintenant ϕ est continue et bijective sur son image Q 1 . De plus,, P 1 R × P 1 R est compact en tant que produit de compacts. Conclusion : ϕ est un hom´ eomorphisme en tant que bijection de P 1 R × P 1 R sur Q 1 , l’espace source ´ etant compact et l’espace but ´ etant s´ epar´ e (en tant que partie de P 3 R , qui est s´ epar´ e).
5. Pour justifier que Q 2 est hom´ eomorphe ` a une sph` ere de R 3 , il suffit de consid´ erer
l’ouvert affine U 0 = P 3 R ∖ V ( x 0 ) de P 3 R constitu´ e des points de la forme ( 1 ∶ x 1 ∶
x 2 ∶ x 3 ) . Alors Q 2 ∩ U 0 = Q 2 car ( x 0 ∶ . . . ∶ x 3 ) ∈ Q 2 ∩ V ( x 0 ) implique x 0 = 0 et
x 2 1 + x 2 2 + x 2 3 = 0, donc x 0 = x 1 = x 2 = x 3 = 0, ce qui donne l’ensemble vide dans P 3 R .
Par ailleurs, U 0 est hom´ eomorphe ` a R 3 via l’application qui envoie ( x 1 , x 2 , x 3 ) sur
(1 ∶ x 1 ∶ x 2 ∶ x 3 ) et l’image r´ eciproque de Q 2 ∩ U 0 est consitu´ ee des points (x 1 , x 2 , x 3 )
de R 3 tels que x 2 1 + x 2 2 + x 2 3 = 1, ce qui est une sph` ere de R 3 .
Exercice 3. Soit K un corps et A 1 , . . . , A 5 points distincts de P 1 K . 1. Montrer l’identit´ e suivante :
[ A 1 , A 2 , A 3 , A 4 ][ A 1 , A 2 , A 4 , A 5 ][ A 1 , A 2 , A 5 , A 3 ] = 1.
2. D´ ecrire l’unique homographie σ de P 1 K telle que σ (∞) = 0, σ ( 0 ) = ∞ , σ ( 1 ) = 1 puis en d´ eduire [A 2 , A 1 , A 3 , A 4 ] = [A 1 , A 2 , A 3 , A 4 ] −1 .
3. Soit G l’ensemble des homographies de P 1 K pr´ eservant S = {∞ , 0, 1 } ⊂ P 1 K . Montrer que G est un sous groupe de PGL 2 ( K ) puis en calculer l’ordre.
4. Exprimer chaque ´ el´ ement de G sous la forme z ↦ az+b cz+d avec a, b, c, d ∈ K .
5. En d´ eduire l’expression de [ A σ(1) , A σ(2) , A σ(3) , A 4 ] en fonction de [ A 1 , A 2 , A 3 , A 4 ] , pour tout σ ∈ S 3 .
Corrig´ e 3. On utilisera la formule, pour A, B, C, D ∈ P 1 K = K ∪ {∞} distincts : [ A, B, C, D ] = D − B
D − A C − A C − B .
1. On calcule [A 1 , A 2 , A 3 , A 4 ][A 1 , A 2 , A 4 , A 5 ][A 1 , A 2 , A 5 , A 3 ] et on obtient : A 4 − A 2
A 4 − A 1
A 3 − A 1
A 3 − A 2
A 5 − A 2
A 5 − A 1
A 4 − A 1
A 4 − A 2
A 3 − A 2
A 3 − A 1
A 5 − A 1
A 5 − A 2
= 1.
2. Soit a, b, c, d ∈ K tels que σ ( z ) = ( az + b )/( cz + d ) , donc σ ( 0 ) = ∞ implique d = 0.
Aussi, σ (∞) = 0 implique a = 0. Donc σ ( z ) = b /( cz ) . Comme σ ( 1 ) = 1 on a b / c = 1 et σ ( z ) = 1 / z.
On sait que, si ϕ est l’unique homographie qui envoie A 1 sur ∞ , A 2 sur 0 et A 3 sur 1, alors ϕ(A 4 ) = [A 1 , A 2 , A 3 , A 4 ], posons z ∈ K ∗ pour ce birapport.
Ainsi, σ ○ ϕ envoie A 1 sur 0, A 2 sur ∞ , A 3 sur 1, donc σ ○ ϕ envoie A 4 sur [A 2 , A 1 , A 3 , A 4 ]. Par ailleurs, si λ = ϕ(A 4 ) = [A 1 , A 2 , A 3 , A 4 ] alors σ ○ ϕ(A 4 ) = 1/λ, donc [ A 2 , A 1 , A 3 , A 4 ] = 1 /[ A 1 , A 2 , A 3 , A 4 ] .
3. Il est clair que l’identit´ e pr´ eserve S et que la composition d’homographies fixant S fixe S. Aussi, si ϕ fixe S alors ϕ −1 ( S ) = ϕ −1 ( ϕ ( S )) = S, donc G est un sous groupe de PGL 2 ( K ) . Un ´ el´ ement ϕ ∈ G induit une permutation ρ ϕ de S, et l’application ϕ ↦ ρ ϕ est un morphisme de groupes. On sait que la seule homographie fixant un rep` ere projectif est l’identit´ e, donc ρ ϕ = id S implique ϕ = id P1
K