FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNÉE 1897-1898
I%° *8
CONTRIBUTION A L'ETUDE
DU
CHOLESTËATOME
de l'Oreille moyenne
(PATHOGÉNIE ET TRAITEMENT)
[g THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MÉ "
présentée et
soutenue publiquement le 4 Février 18 9 8
Jean-Camille BOUYER
Né à Saint-Androny (Gironde),
le 11 janvier 1872
/ MM. DEMONS professeur Président.
Examinateursde,.Thdse: „AÏE
( MOURE chargéde
cours)
Le Candidat répondra aux
questions qui lui seront faites sur les
diverses parties de
l'Enseignement médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE DU
MIDI
—PAUL CASSIGNOL
91 — RUK PORTE-DIJEAUX —
91
1898
Faculté de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux
M. DE NABIAS, doyen — M. PITRES, doyen honoraire.
B»llOIIOSSIO(ltS MM. MICE...
AZAM..
DUPUY, Professeurs honoraires.
MM.
P1. . • . \ PICOT.
Clinique interne
^ PITRES
p.. . , \ DEMONS.
Clinique externe
j
laNEi.ONGUE. Pathologie interne... N.Pathologie et théra¬
peutique générales. VERGELY.
Thérapeutique ARNOZAN.
Médecine opératoire. MASSE.
Clinique d'accouche¬
ments MOUSSOUS.
Anatomie pathologi¬
que COYNE.
Anatomie BOUCHARD.
Anatomie générale et
histologie VIAULT.
AG11 10CiSiS 10 A' section de médecine(Pdtliolog
MM. MESNARD.
CASSAET.
AUGHu.
Physiologie Hygiène Médecine légale Physique Chimie
Histoire naturelle .. .
Pharmacie
Matière médicale....
Médecine expérimen¬
tale
Clinique ophtalmolo¬
gique
Clinique des maladies chirurgicalesdes en¬
fants
Clinique gynécologique 10 A 10 IICI Cl10 :
ie interneetMédecine MM. SABRAZÈS.
Le DANTEC,
MM.
JOLYET.
LAYET.
MORACHE.
BERGON1É.
BLAREZ.
GUILLAUD.
FIGUIER.
de NABI AS.
FERRÉ.
BADAL.
PIECHAUD.
BOURSIER.
légale.)
section de chirurgie et accouchements (MM. YILLAR.
Pathologie
externe]
BINAUD.BRAQUEHAYI0
Accouchements.. iMM. RIVIERE.
'/ CHAMBRELENT
Anatomie..
section des sciencesanatomiques etphy.sioi.ogiques
(MM. PRINCETEAU | Physiologie MM. PACHON
•••) CANNIEU. Histoire naturelle BEI LUE.
section des sciences physiques
Physique MM. S1GALAS. | Pharmacie M. BARTHE.
Chimie etToxicologie DEN1GÈS.
j
S OS IIS COilI*liÉilI0ATA I II10S :
Clinique internedes enfants MM. MOUSSOUS.
Clinique des maladiescutanées etsyphilitiques.
Clinique des maladies des voies urinaires Maladies dularynx, desoreilles etdunez Maladies mentales
Pathologie externe Accouchements Chimie
DUBREUILH.
POUSSON.
MOURE.
RÉGIS.
DENIJCÉ.
RIVIÈRE.
DENIGES Le Secrétairede la Faculté: LEMA1RE.
Pardélibération du 5 août1879, la Faculté aarrêté que les opinions émises dans les Th«sesqu'elle n'entendqui luisontleur donnerprésentéesnidoivent êtreapprobationconsidéréesniimprobation.commepropres àleursauteurs,et
A LA
MÉMOIRE
DE MON PEREA MA MÈRE
A MON ONCLE P. TESSONNA UD
A MA SŒUR
A mon Président de Thèse
MONSIEUR LE DOCTEUR DEMONS
PROFESSEUR DE CLINIQUE CHIRURGICALE A LA FACULTÉ DE BORDEAUX
OFFICIER DE LA LÉGION D'HONNEUR
OFFICIER DE i/lNSTRUCTION PUBLIQUE MEMBRE CORRESPONDANT DE i/ACADÉMIE DE MÉDECINE
MEMBRE CORRESPONDANT DE LA SOCIÉTÉ DE CHIRURGIE DE PARIS
Arrivé au terme de nos études médicales, nous sommes heureux de saisir l'occasion qui s'offre
à
nousde remercier
tousnos maîtres de la Faculté et des Hôpitaux. Nous
n'ou¬
blieronsjamais leur
affabilité et leurs savantes leçons.
Entre autrespériodes
de stage accomplies dans les hôpi¬
taux, celles
passées dans les services de MM. Arnozan,
Dubourg et
Piéchaud compteront
pour nousparmi les meil¬
leures et lesplus
agréables
; que cessavants maîtres reçoi¬
vent ici l'assurance de notre
profonde gratitude.
M. leprofesseur
agrégé Braquehaye, qui
nous ainspiré
l'idée dece travail, et M. le Dr Moure, pour
l'affabilité
quenous rencontrâmes toujours chez
lui
etl'obligeance
avec laquelle ils'est mis à notre disposition, ont particulièrement
droit à notre reconnaissance.
Nous garderons
toujours le meilleur souvenir de M. le
professeur
agrégé
LeDantec
pourla sympathie qu'il a bien
voulu nous témoigner pendant
le
coursde
nosétudes.
M. le professeur Démonsnous
fait le très grand honneur
d'accepter la
présidence de cette thèse. Qu'il veuille bien
agréer l'hommage très respectueux
de
nossincères remer¬
ciaients.
CHAPITRE PREMIER
PATHOGÉNIE
Les cholestéatomes de
l'oreille
moyenneconstituent une
affection relativement fréquente,
qui est bien
connueaujour¬
d'hui. D'une façon
générale,
onpourrait les définir des amas
de
produits de sécrétion dans la caisse et ses annexes, les¬
quelsse
forment lorsqu'il existe des obstacles s'opposent à
la libre évacuationdu pus.
Leur histoire remonte à
Cruveilhier qui, le premier, les
signala ; ce fut
plus tard Millier qui les désigna sous le nom
qu'ils portent
aujourd'hui.
Mais notre intention n'est point
d'entreprendre ici l'histo¬
riquedelà
question
quel'on trouve fait d'une manière assez
complète dans
divers
ouvragesqui traitent de ce sujet. Nous
laisserons également
de côté la symptomatologie, le diag¬
nostic, la marche et
le pronostic
surlesquels tous les auteurs
sont à peu
près d'accord.
La
pathogénie, elle,
aucontraire,
adonné lieu à un grand
nombre de discussions. Le
traitement, de
soncôté, a subi
une évolution que nous croyons
devoir rapporter. De médi¬
cal, il est devenu
chirurgical; et chirurgical, il s'est modifié
avec les diverses méthodes
opératoires préconisées depuis
quelques années.
— 10 —
La
pathogénie
et le traitement nous paraissent intime¬ment iiés ; aussi essaierons-nous de passer en revue les diverses
interprétations
de lapathogénie
et, d'examiner les différents moyensthérapeutiques employés
pour fixer unchoix,
retenir la théorie qui paraît la plusvraisemblable, adopter
le traitement le plus approprié et parmi les nom¬breux procédés,
indiquer
avec satechnique
celui qui paraît le pluslogique,
celui dontnousavonspu nous-même appré¬cier lesheureux résultats.
En somme, c'est une étude critique ou plutôt unemise au
point de la
pathogénie
et du traitement du cholestéatomeque nous voulons
entreprendre.
Coyne,
dans son « Anatomiepathologique
», définit le cho¬lestéatome des formations de nature encore
indéterminée,
représentées par des agglomérations de masses épitliéliales.
Les uns,
d'après
lui, considéreraient ces massesépitliéliales
comme des produits inflammatoires
desquama
tifs, d'autres comme des tumeurs perlées et de véritables épithéliomes sébacés.Ces masses sontconstituées par des lamelles formées de cellules épitliéliales
polyédriques disposées
le plus souvent en couchesconcentriques,
parfoisirrégulièrement;
entre ces couches de celluleson observe des lamelles decholestérine,
et Lucae y a décrit des cellules géantes avec de nombreux noyaux. Leur
siège
de prédilection paraît être la cavité mas¬toïdienne,
bien qu'on les observe dans toutes les régions de l'oreille moyenne et externe.Nous ajouterons que parmi les
microorganismes
décou¬verts dans ces
productions,
Bezold y signale le bacille deKoch, ce qui explique
l'origine
tuberculeuse de certaines suppurations de l'oreille dont lecholestéatome
n'est qu'une complication.L'aspect
nacré qui a valu aucholestéatome
le nom de tumeur perlée du premier auteur qui l'aitsignalée,
Cruvei- lhier, cet aspect nacré serait dû,d'après
JohannesMillier,
àun
phénomène d'interférence
de la lumière à travers les— 11 —
lamelles cornéesplus
fines qui constituent les couches péri¬
phériques
de
cesproductions.
Quelle est
la nature de ces cholestéatomes? Comment se
produisent-ils? La question a été bien controversée et est
encore discutable, car il est
difficile de trouver une explica¬
tion qui
convienne à tous les cas. Elle nous paraît cependant
suffisammentavancée
à l'heure actuelle pour qu'on puisse
se faire une
opinion à
cesujet.
Cruveilhier,Virchow,
Rokitansky considéraient le choles-
téatome del'oreille commeune
véritable tumeur épithéliale
hétéroplastique,
développée aux dépens des couches périos-
tiques.
Le type
de
cesnéoformations se trouverait dans les
méningeset
la substance cérébrale où elles formeraient des
nodules et desnoyaux
solitaires
oumultiples.
PourMikulicz etKùster ces
tumeurs seraient dues à des
pincements épithéliaux qui se seraient produits pendant la
fermeturede la
première fente branchiale.
Ziégler
admettrait aussi l'origine épidermique de ces
tumeurs. Il a en effetune
observation personnelle d'un cas
où il aurait découvert, au
milieu des amas cellulaires, de
petits cheveux
libres
oucontenus dans leur gaine.
Mais,
d'après Heineck, les kystes congénitaux de la dure-
mère dansle rocherqui se
rencontrent au-dessus de l'inci-
sure
occipito-mastoïdienne et du conduit auditif externe ont
été confondus avec le
cholestéatome dont ils se distinguent
en ce
qu'ils contiennent des poils. Ils se développent lente¬
ment et quand
ils sont petits peuvent rester longtemps
latents. Toynbee
et Hinton
enont publié des exemples.
Kuhn admetaussi l'existence
de
cestumeurs primitives,
maisd'une façon
exceptionnelle.
Cette
hypothèse, qui consiste à admettre l'origine néopla-
siquedu
cholestéatome, repose exclusivement sur des con¬
sidérations cliniques
et
surdes constatations macroscopi¬
ques;
mais elle
aété vivement combattue depuis qu'on a fait
desexamens microscopiques.
— 12 —
Pour
Schwartze,
lecholestéatome désigne
des états patho¬logiques différents,
du moinsfréquemment;
très rarement, ils'agit
d'un véritablenéoplasme
provenant de l'os ou des parties molles del'oreille,
analogue au cholestéatome d'au¬tresosdu crâne
(temporal, frontal)
et à celui desméninges.
Il est alors constitué par une capsule mince et un contenu
stéarineux,
à éclat nacré, ayant pour élément morpholo¬gique principal
des cellules plates de formepolygonale
avecdes cristaux de cholestérine et des cellules
géantes.
Iln'y
a au début aucune irritationinflammatoire
des parties voisi¬nes, et c'est plus tard que survient un processus purulent à tendance destructive.
Politzer déclare que ces
produits,
apparaissant sous forme detumeurs,
ne peuvent que très rarement être regaidéscomme des cholestéatomes au sens que les
anatomo-patho-
logistesattachent à ce mot.Pour Sabrazès et
Lichtwitz, l'hypothèse
del'origine
hétéro-plastique
n'est pas démontrée etne pourrait d'ailleurs être acceptable que pour un petit nombre de cas.Blau,
récemment,
insistait pour qu'on divisât les cas de cholestéatomes en deuxcatégories.
Il admet un cholestéa¬tome
d'origine néoplasique,
qui peut rester latent pendant des annéesjusqu'à
son ouverture au dehors ou dans la cavité crânienne, ou qui se complique secondairement d'un processusinflammatoire.
En 1896,
Steinbrugge,
deGiessen,
rapportait le cas d'un malade detrente-sept
ans,atteint d'un écoulementdel'oreille droite avecgranulations au fond del'oreille,
l'ablation de ces dernières ne donna pas derésultats;
aussi, après avoir décollé le pavillon et la paroi membraneuse du conduitauditif, l'auteur enleva couche parcouche l'os mastoïde et la paroi postérieure du conduit ; au fond de l'antre apparais¬
sait une masse
cholestéatomateuse
blancheetluisante qu'on pouvait enlever en entier. L'antreélargi
et la cavitétyrnpa-
nique furent réunis en une seule cavité. La guérison futrapide. Steinbrugge
regardaitce cascommeun cas déchoies-téatome primitif du temporal, se basant sur ce fait que l'écoulement était survenu depuis peu.
En 1896 également, Schwartze publiait un cas de cboles- téatome de l'écaillé clu temporal qu'il rapproche, au point de
vue de la pathogénie, de certains cliolestéatomes de la caisse et de ceux des méninges. Il s'agissait d'unetumeur blanchâ¬
treayant la forme d'une lentille
biconvexe,
d'une épaisseur de 1 millimètreà lmm 5 et de 44 millimètres de diamètre. Elle était incluse dansl'écaillé du tempo] al et arrivaitjusqu'à la portion pétreuse. Elle présentait unestructure lamelleuse et les lamelles avaient un brillant nacré. A l'examen micros¬copique, il s'agissait d'un cholestéatome par transformation cornée de cellules épithéliales plates. La tumeur était entou¬
rée d'une couche de tissu conjonctif, à légère infiltration cellulaire, dont la face interne était revêtue d'un
épithélium
platstratifié. La tumeur ne contenait ni poils, ni glandes sébacées.L'examen du rocher fit voir le tympan épaissi et gardant dans la moitié inférieureune cicatrice, trace d'une ancienne perforation. Le marteau et l'enclume étaient intacts. La caisse, l'antre et les cellules pneumatiques, très développées dans la paroi supérieure du conduit présentaient un aspect absolument normal, sans la moindre - trace d'affection anciennequelconque.
Pour explique-r
l'apparition
de ce cholestéatome isolé, Schwartze admetqu'il s'agissait d'une prolifération de cel¬lules
épithéliales
plates survenue pendant la période em¬bryonnaire
dedéveloppement.
De cet exposé un peu long de
l'hypothèse
d'uncholestéa¬
tome, on peut conclure, pensons-nous, que cette
affection
existe bien rarement comme tumeur primitive, et qu'au
contraire les cholestéatomes secondaires sont la règle.
Ceux-ci sont la complication fâcheuse de certaines
vieilles
otites suppurées, et, dans ce cas, l'inflammation de la caisse
est le fait initial. L'observation de M. Braquehaye est typique à cepoint devue; le début de l'affection a, en effet,
été
un e uneotite aiguë bilatérale survenueaprès
uneamygdalite.
— 14 -
Observation I
(Braquehaye).
(Société de chirurgie de Paris. Rapport de M. Broca.)
LenomméP...,
vingt-sept
ans, estentré le 13 août 1896 clans le ser¬vicede M. leprofesseur Démons, pour une fistule mastoïdienne gauche.
Le début del'affection remonte à une otite moyennebilatérale survenue à l'âge de dix-sept ans. probablement à la suite d'une amygdalite.
L'écoulementpersista, avecdes intermittences, jusqu'à l'âge de vingt
ans. A cette époque, àla fin de novembre 1888, survint ui\e poussée douloureuseàgauche, bientôt suivied'un volumineux abcès rétro-auri¬
culaire. L'incisionsimple futpratiquéeet se cicatrisa rapidement, mais l'abcès récidiva, si bien qu'en huit mois le malade dut subirvingtcoups de bistouri. Lassé de cetraitement, il entra pour la première fois dans le servicede AL Démons, dont M. Braquehayeétait alors l'interne. A cettedate, un trajet fistuleux qui perforait l'apophyse fut vidé à la
curette et la guérison était obtenue à la fin de septembre. Mais alors reparut l'otorrhée, qui avait cessé tant que
l'apophyse
était restéeouverte et, enjanvier1890, s'ouvrit spontanémentunnouvel abcèsmas¬
toïdien et, depuis, la suppurationa constamment eulieu à la foisparla fistuleet par le conduit. Cela continua de lasorte jusqu'au 1er août 1896 ; à cette date, douleurs violentes, abcès rétro-auriculaire qui fut
incisé le 10 août. Lepus ne s'écoula en abondance•et le malade ne fut soulagé quele lendemain après issue d'une grosse masse cholestéatoma- teuse, qui évidemment obstruait l'orificeosseux. Toutefois la tempéra¬
turerestait au-dessusde 38°,lorsquele 13 août le malade entra pourla
seconde fois à l'hôpital Saint-André. Pour compléter l'étude de l'examen local, il me reste à ajouter que l'audition à gauche était nulle.
Le 22 août. M. Braquehaye pratiqua la trépanation de
l'apophyse
et de la caisse. Il ouvrit l'antreaulieu d'élection,sans tenir compte de la fistuleosseuse qui siégeait à 1 centimètre au-dessus del'épine de Henle.Les cellules etl'aditus étaient très spacieux. Il ne restait pas de traces d'osselets.
Lessuites opératoires furent très simples, etlavaste cavité ouverte derrière l'oreille était épidermisée à la fin de novembre. L'audition est restée abolie; il n'y apas de paralysiefaciale.
Un fait digne de remarque est qu'au fondde l'oreille, probablement
au niveau de la base de l'étrier, existe un petit point rouge, saillant, dont l'attouchement, depuisle premier pansement, atoujours provoqué des vertiges avectendance à la syncope. Ces phénomènes sont même notés lorsquele malade laissela cavitéexposée à l'air;aussiymet-ilen permanence unpetit tampon deouate.
Mais alors quelle explication
pathogénique
pourrait-on donner de la formation de ces amasépidermiques
sous l'in¬fluence d'une otorrhée. Il nous paraît difficile de répondre immédiatement et d'une
façon catégorique
à cette question.Aussi allons-nous examiner successivementdiverses inter¬
prétations
émises,
les objections dont elles sont passibleset la partdevraisemblance qu'elles comportent.Von
Troltsch,
le premier, alla à l'encontre del'opinion
des anciensanatomo-pathologistes
qui pensaient à la naturenéoplasique
de cette affection et démontra que, dans beau¬coup de cas, il s'agitde rétention de produits inflammatoires qui se sontaccumulés sousla forme d'une tumeur desséchée.
Pour lui, autour d'un noyau de pus ayant subi une
dégéné¬
rescence
adipeuse
etune concentration caséeuse, il se formeune accumulation de cellules
épidermiques
à stratification concentrique, avec des amas plus oumoins abondantsde cristauxde cholestérine ; il y a absencecomplète
dans la tu¬meur d'une capsule de tissu conjonctif ou d'un stroma fibreux. Troltsch a trouvé des cellules plates dans le revête¬
ment de l'antre mastoïdien, dans les cas d'accumulation de pusdans cette cavitéet, d'aprèslui, il sepourrait que l'inva¬
sion
pathologique
et la pression exercée sur les parois par ledéveloppement
des masses déterminent une transformation del'épithélium
superficiel. Il s'agirait donc d'une véritablemêtaplasie,
d'une transformationdel'épithéliumcylindrique
qui, à l'étatnormal,tapisse lamuqueuse del'oreille
moyenneen un
épi tliéli
unipavimenteuxstratifiésemblable àl'épiderme
cutané. Elleserait la conséquence d'une irritation
chronique
liée à la rétention du pus et à la pression que ce dernier exercerait sur les tissus sous-jacents lorsqu'il est concrété.
Quant à Wendt, cette transformation de
l'épithélium
seferaitsous l'action de causes irritantes provenant de l'extérieur et pénétrantà travers la perforation tympanique.
Si toutes les cavités del'oreillemoyenne
sontépidermisées,
cette explication est acceptableet l'on peut, avecSchuchardt,
assimiler cette transformation à celle qui se produit sur la muqueuse nasale, dans l'ozène par exemple. Mais les preu¬
ves
histologiques
de cette assertion manquent ; bien au con¬traire l'examen
microscopique
montre que dans beaucoupde cas il n'existe pas de pus au centre des cholestéatomes.
D'autre part, cette
interprétation n'explique
pas la présence de la membrane qui entoure le cholestéatome. Et enfin, comment pourrait-on par cette théorieexpliquer
la forma¬tion de cholestéatomes sacciformes dans lesquels
l'épithé-
lium
cylindrique
a persisté?Lucae admet que les couches externes des granulations de la caisse qui se
développent
dans l'otite purulentechronique
donneraient lieu à une desquamation très abondante qui constituerait lecholestéatome.
D'après Politzer,dans
beaucoup
de cas,de petits cholestéa¬tomes isolés pourraient sedévelopper dans la muqueuse de la caisse par suite des
desquamations
qui se font dans l'inté¬rieur de kystes qui s'y forment et
s'y développent
sous l'in¬fluence de suppurations
chroniques.
Habermann et Bezold ont avancé une théorie qui actuel¬
lement réunit tous les suffrages des otologistes modernes.
Elle est fondée sur cette remarque que, dans les cas d'otor- rhée et de perforation du tympan,
l'épi
thélium externe tym¬panique bourgeonne vers la caisseet pousse des culs-de-sac dans toutes les directions, culs-de-sac qui recouvrent d'une couche
épidermisée
toute la muqueuse de la caisse. C'est d'ailleurs là le meilleur moyende
guérir les otites purulen-- 17 —
tes chroniques : 011 a
môme essayé
pardes autoplasties de
provoquer
l'épidermisalion. L'écoulement peut
setarir, la
guérison se faire, mais cettesuractivité proliférative de
l'épithélium continue et sesproduits de desquamation
cor¬néenepouvant
s'éliminer s'accumulent et deviennent le point
de départ de cholestéatomes.
Un
noyaude cholestéatomes
constitué devient le point de
départ d'un grand nombre de
ramifications qui
engendrent d'autres cholestéatomes, les¬
quels irontse loger
dans toutes les anfractuosités de l'oreille
moyenne.
Quel quesoit le
point où
se trouvela communication entre
l'oreille moyenne et
la surface cutanée, cette invasion du
revêtement
épidermique
seproduira; mais le point le plus
favorable pour cette
pénétration est, ainsi
quel'a indiqué
Bezold, la
perforation dans la membrane de Schrapnell,
dépourvue demembrana propria qui puisse
opposer une résistance.Panse a signalé des cas assez
nombreux de formations de
cholestéatomes dans les fistules de la paroi postérieure du
conduit aboutissant à l'antre, fistules qui sont la consé¬
quence de l'ouverture
artificielle de l'apophyse dans le
con¬duit.
Lichtwitz et Sabrazès
(1894), qui adoptent absolument cette
théorie, apportent
leur confirmation à cette dernière inter¬
prétation en relatant
l'observation suivante qui est
commeune preuve
expérimentale de
cequ'Habermann avançait
pour élucider la
pathogénie du cholestéatome. Il s'agit,
en effet, d'une fistule qui adû succéder à l'ouverture spontanée
d'un abcès mastoïdien dans le conduit auditif.
Observation II
(Lichtwitz et Sabrazès).
[Bulletin médical,
1894.)
M. X..., âgé
de
vingt et un ans,natif de Varsovie, vient nous con¬
sulter pour une affection nasale. Ilse
plaint aussi depuis plusieurs mois
B. 8
d'une dureté de l'oreille droite, accompagnée de sensation de lourdeur de tète; ila eu,pendantsa première enfance, des écoulements fréquents
decette oreille, qui ontdisparu il y a six ans. Le malade a été soigné
par plusieurs confrères spécialistes de Varsovie, mais n'a jamaissubi d'opérationsdu côté des oreilles. On relève aussi dans son histoire sept atteintes de pneumonies, deux fois compliquées de pleurésie. L'avant- dernièrepneumonie, qui date de deuxans, a été particulièrementgrave eta failli entraînerla mort.
L'examen, pratiqué le 0 novembre 1893, permetde constater du côté des fosses nasalesune atrophie assezmarquée des cornets inférieurs; du côté desoreilles, des traces d'anciennes otites moyennes suppurées. A droite, où le maladeéprouve une sensation de plénitude, la membrane de Schrapnellforme,avec letympan lui-même, une membrane cicatri¬
cielle épaissesur laquelle on ne distingue ni le manche du marteau, ni la courte apophyse.A l'aide du spéculum de Siegle on réussit à peine
àimprimer quelques mouvements à cette membrane.
Audition :
0 D= contact,
t)
G = 0,20.Diapason vertex, mieux à droite.
Rinne(ut2, ut3,
ut4)
0 D — négatif.— —
0 G = diapason placé sur l'apo¬
physe mastoïde gauche est entendu par l'oreille droite.
Au niveau de la paroi postérieure de la partie osseuse du conduit auditif, on aperçoit une masse peu saillante,
jaunâtre,
velvétique. qui résiste à tout essai d'extraction avecla pince.A lapremièreinjection d'eau tiède,le maladeestpris de vertiges,cequi
nous oblige à suspendre ces irrigations. Ce n'estquelelendemain, après des instillations répétées de glycérinecarbonatée, que nous réussissonsà rendre mobile avec lapince la masse dont nous avons parlé. En tirant
assez fortement, nous amenons une tumeur volumineuse, infundibuli- forme, àsurfacebosselée etluisante.
— 19 -
Dans laparoi postérieure
du conduit,
onvoit alors, à la place occupée
par la tumeur, unevaste
excavation de même volume, qui permet l'in¬
troduction d'unstylet dansles cellules
mastoïdiennes jusqu'à
une pro¬fondeur de 1 centimètre environ. Un pont osseux de 3 à 4
millimètres
d'épaisseur sépare cetorifice du cadre tympanique. La paroi de cette
cavitéartificielle est luisante comme la surface de la tumeur qui se moulait exactement sur elle.
Aussitôtaprès l'extraction
de
cette tumeur,le malade
sesent la tête
très dégagée. Audition 0,08
centimètres; il
serappelle qu'il
y adeux
ans, un confrère de Varsovie a
enlevé de
sonoreille
une masseanalo¬
gue, mais moins volumineuse.
Kxcimen hislologique. —Latumeur a
été examinée
:A)Par
dissociation dans le picro-carmin
:elle est constituée
pardes
lamelles cornées dépourvues denoyau,
étroitement accolées les
unes aux autres,difficilesà dissocier et par de nombreuxcristaux de choles-
térine.
B) Sur descoupes
d'ensemble qui montrent des stratifications de tissu
corné disposées en couches
continues, lesquelles sont incomplètement
isolées les unes des autres et s'envoient des anastomoses, les couches profondes forment unetrame
très serrée, décomposable
enfines lamelles
imbriquées, privées de noyaux,
dont la section donne à
unfaible gros¬
sissement comme une apparence
fibrillaire. Cette
zoneprofonde est
sinueuse, très ondulée, ets'est laissée
colorer
enjaune rosé
parle picro-
carmin.
Les partiesjaunes sont
moins découpées et sont représentées par des
bandes lamelleusesà directionlongitudinale. Entre
elles sont situées de
nombreusesgranulations
punctiformes, la plupart de nature graisseuse,
mais dont quelques-unes ont
les réactions colorantes des granulations
protéiques; on y voit aussi
des cristaux de cholestérine teintés en rose
pâlepar le carmin.Leslamelles de lasuperficiesont
dissociées,
envoie de desquamation,
etforment des amas acuminés etcratériformes.
Enrésumé, ces productions sont
purement cornées, elles sont distri¬
buées encouchesconcentriques,
emboîtées les
unesdans les autres; dans
leursinterstices sontemprisonnées des
granulations diverses, ainsi que
des cristaux decholestérine.
- 20 -
De toutes les théories que nous avons passées en revue, celle-ci évidemment doit être considérée comme, la plus
satisfaisante,
quoique passible de quelques objections. Cer¬tains auteurs, et
Schmiegelow
en particulier,objectent,
eneffet, qu'on ne rencontre pas de faits analogues sur les diffé¬
rentes muqueuses voisines de la peau. Mais Walle signale
un cas
d'épidermisation
du sinus frontal à la suite de l'ouverture de ce sinus àl'extérieur,
et d'autre part onpeut remarquer avec Politzer que si dans les cavités acces¬
soires du nez, où
l'épithélium
est à peu près celui del'oreille,
l'épidermisation ne se fait pas ou très rarement, c'est qu'il n'y a pas entre cette muqueuse et la peau de rapport de continuité. Enfin, on a le droit de se demander comment pourraits'expliquer
par cette théorie la formation de ces cholestéatomes qui n'ont étéprécédés ni d'inflamma¬tion ni deperforation
tympaniques.
On répondra d'abord que cette inflammation et cette perforation ont pu parfaitement exister etéchapper
à l'attention del'entourage,
c'est là le fait d'un certain nombre de ces cholestéatomes. Mais s'il était bien démontré qu'il n'y a jamais eud'inflammation,
quele
tympan
est bien intact, pourquoi ne pas ranger la tumeur en question dans lacatégorie
relativement res¬treinte, mais que nous admettrons cependant avec M. Blau, de tumeur
d'origine
absolument primitive.CHAPITRE II
TRAITEMENT
Pournous, le chapitre de la
pathogénie
etcelui du traite¬
ment sont intimement, liés, et du premier nous pouvons presquedéduire le second. Si le cholestéatome, en
effet, est
dans la majorité des cas la conséquence
d'un écoulement
d'oreille que d'ailleurs, une fois
constitué, il contribue à
entretenir; il ne suffira pas dedébarrasser l'oreille
moyenneou l'antre des masses desécrétion que nous avons
décrites,
mais il faudra le plus souvent
aller plus loin et supprimer le
point de départ de la
suppuration.
C'est pourcette raison que nous sommes un peu
scepti¬
que à l'endroit du traitement
médical qui, hâtons-nous de
le dire, donne
cependant dans quelques
casde très bons
résultats.
Ce traitement médical doit être avant tout préventif. Nous
avons insisté à dessein surle mode le plus
fréquent de
pro¬duction decholesléatomes; aussitôt donc que
l'on constatera
un écoulement d'oreille, au lieu de le laisser se
prolonger
sousprélexte que
l'otorrhée guérira d'elle-même
ou que sa suppression brusque sera une caused'accidents,
oncher¬
chera à l'arrêter partouslesmoyens.
L'examen du naso-pha-
rynx révélera
peut-être la présence de végétations adénoïdes
— 22 —
que l'on
s'empressera
de supprimer, petite intervention àlaquelle
succédera souvent la cessation rapide de l'écoule¬ment de pus.Des injections auriculaires àl'alcool
boriqué
en solution pourrontégalement fairedisparaître
l'otorrhée, et si lesirrigations échouent,
on aura recours auxpansementssecs. Ceux-ci, pratiqués avec
beaucoup
de soins, seront très souventsuffisants. Il est des cas rebelles cependant où tousces moyens
employés
successivement resteront sansrésultat. Dans ces conditions, on sera forcé d'intervenir chi-
rurgicalement,
car, et cela surtout chez les enfants, cet écoulement pourrait devenir dangereux non seulement àcausede laformationpossible d'un cholestéatome,mais aussi
en raison
des'complications
fâcheuses qui peuvent surveniren raison du
voisinage d'organes importants
avec un foyerde suppuration. Il va sans dire que l'intervention chirurgi¬
cale
s'imposera
encore et à plusforte raison lorsqu'on aurareconnu la présence d'un
cholestéatome,
intervention qui consistera non seulement à enlever la tumeur, mais aussi àen prévenir la récidive.
L'enlever par les voies naturelles ne sera pas toujours chose facile et, de plus, cen'est pas là le traitement sûr et par excellence de cette affection. Il est cependant prudent, logique et d'une saine
thérapeutique, d'employer
toutd'abord cette méthode. On enlèvera au préalable toutce qui peut gêner la vue du tympan,
fongosités,
formationspoly-
peuses pouvant obstruer les points perforés de la mem¬
brane de
Schrapnell,
puis on fera par le conduit ou latrompe
des injections qui suffiront quelquefois àdéblayer
la caisse et à fairedisparaître
laplupart
des troubles.On pourra parfois, dans les lésions de
l'attique,
recourir avantageusementàdesinjections pratiquéesparlamembrane deSchrapnell
avec la canule deHartmann,
et dans le cas où les masses seraient trop denses et ne pourraient être chas¬séesau dehors, essayer de lesdissocier soit avec un
stylet,
soit avec une petite cuiller tranchante. D'ailleurs, cetteinter¬
vention souvent sera d'autant plus aisée que la marche
— 23 —
envahissantedes lésions aura
parfois détruit
enpartie Pat-
tique.En somme, les
procédés à employer d'abord seront les
instillations, lesinjections,
le curettage, après quoi on cher¬
chera à modifier la cavitépar une
thérapeutique appropriée.
Nous prenons un peu au
hasard des -observations où l'in¬
terventionchirurgicale limitée,
le traitement médical plutôt,
a donné de bons résultats ; nous
les empruntons à l'article publié, dans la Revue de laryngologie, par le DrLacoarret, de
Toulouse.
Observation III
(Lacoarret).
[Revuecle
laryngologie, 1895,
p.566.)
M. L..., âgé de
trente-neuf
ans,d'un tempérament lymphatique pro¬
noncé,vint nous
consulter dans le courant de l'année 1893, pour des
bourdonnements etune
aggravation de la surdité de l'oreille gauche
survenue dernièrement à la suited'un
rhume de
cerveau.Ce malade
nous ditavoirétésoigné àParis,
il
yaquinze
ouvingt
ans,pour une
affection de cette mêmeoreille. On luien
aurait, prétend-il, extrait
unkyste II est
probable cependant, étant données les constatations que
nous faisonsquelques
instants plus tard, qu'il s'agissait plutôt d'une
otorrhéeavec
prolifération de bourgeons et qui aurait nécessité l'extrac¬
tion de quelque
polype.
L'examen fonctionnel del'organe donne
les résultats suivants
:P. C. D.
bonne P. C. G.
f
0. D., 0,25 centimètres
0. G.,0,04 centimètres
DiapasonM. à G.
R. 0. D.
j
R.0. G.
\ ~
Bourdonnements, vapeurs.
La voix estperçue en
voix de polichinelle.
A l'examen direct, nous constatons des
lésions d'otite catarrhale
ancienne. Agauche,un tissu
cicatriciel moule les osselets et s'applique
fortementsurle manche du marteau,qui està peu
près immobile. Cet
— 24 —
osseletparaîtmêmeabaisséetrejetésur la paroipostérieureoù il s'adosse
et où il est maintenu par des adhérencesrésistantes. Le fond de l'oreille esthumide, il existe un suintement léger, mais très fétide. Nouspres¬
crivons des lavages etdes instillations
antiseptiques
et nous pratiquons le cathétérisme de latrompe d'Eustache. Aprèsquelquesjours
de traite¬ment, une amélioration sensible s'étant produite
(0
D, 1 mètre, 0 G, 0,10centimètres),
nous ne revoyons plus le malade. Cinqou six mois plus tard, nous sommes appelé auprès de lui. Depuis trois ou qua¬trejours, il est atteint sans cause appréciable de bourdonnements et de crisesvertigineuses intenses. Levertige est tellement violent, qu'étendu
sur le lit il luiestimpossible de faire un mouvement, de soulever ou de remuer la têteàdroiteet à gauche, d'ouvrir même les yeux, sans être pris immédiatementde nausées et de vomissements. L'état vertigineux
est permanent. Bien que le malade, par coquetterie, n'ait jamais avoué àsa femme qu'il souffraitd'uneoreilleet n'en ait pas davantage parlé
à son médecin, M. le professeurAndré, qui le soigne,
diagnostique
unvertige deMénièreet veutbien nous faireappelerpour avoirnotre avis.
Nousconstatonsun léger suintement fétide par le conduit, mais il ne nous est pas possible, du moins pour le moment, de faire un examen
complet.
Irrigations abondantes à l'acide borique. Révulsions sur
l'apophyse
mastoïde, purgatifs, sulfate de quinineetbromure, etc.Après douze ou quinzejours de cetraitement,les crisesvont en s'atté- nuant. Ilne reste que du vide cérébral, à la condition cependant que le malade nes'agite pas, ne setourne pas ou ne se baisse pas brusque¬
ment.
Quelques joursplus tard, M. L... peut se rendre à notre consultation.
Nous explorons alors plus minutieusement l'oreille gauche, et nous constatons ainsi qu'entrelamarge tympanique etle col inclinédu mar¬
teau,se trouve unemince fente par laquelle on peut (le tympan étant détruitdepuis
longtemps)
pénétrer directement dans l'attique. Ornous sentons avec le stylet que le recessusepitympanicus au lieu d'être libre est encombré de masses molles etnous ramenons au dehorsune parcelle de matière caséeuse extrêmement fétide. Avec une fine curette, puis au moyend'injectionsfaites directement dans la logette avec la seringue d'Hartmann,nous arrivonsaprès plusieurs efforts à expulser quelques— 25 -
blocsde la mêmesubstance.
Après des instillations de glycérine carbo-
natée et denouveaux
lavages,
nousarrivons à désobstruer complète¬
menttoutela
coupole.
Depuis
cette époque, et notre intervention date d'un an, la guérison
s'est maintenue.
Nous avonsencore revu
dernièrement notre malade ; il ne paraissait
riende suspectet
la logette des osselets était absolument libre. Du côté
droit,l'audition
delà montre se fait à 1 mètre ; du côté gauche, elle
s'estmaintenue à 10
centimètres. M. L... peut impunément se livrer à
toutes sesoccupations
et n'est désagréablement impressionné que lors¬
qu'il
sort
paruntemps de grand vent.
M]lc A...,fillette de
treize
ans, nousest amenée dans le courant du
moisde décembre 1892. Ses
parents paraissent jouir d'une bonne santé,
mais l'enfantatoujours
été chétive. A l'âge de sept ans, il y a par con¬
séquent
six
ans,elle fut atteinte de la rougeole qui amena à sa suite un
écoulementde l'oreille
droite. On remarqua également qu'à partir de
cetteépoque,
l'audition de l'oreille gauche avait baissé dans de notables
proportions. L'écoulement de l'oreille droite a toujours persisté avec
plus ou
moins d'abondance et, après quelquès mois, devint d'une grande
fétidité. Pendantl'été, il
paraît
cesser, cequi a fait croire à plusieurs
reprises à une
guérison
;mais au moindre froid humide, il reparaît
avec les mêmescaractères. Les
soins de propreté indiqués par un méde¬
cin, et consistanten
lavages
avecunedécoction de feuilles de noyer, n'ont
jusqu'à présent donné
aucuneamélioration appréciable.
L'examenfonctionnel de
l'oreille
nousdonne les résultats suivants :
ObservationIV
(Lacoarret).
(Revue de
laryngologie, 1895, p. 562.)
P. G. D
^ ~ ~ ) bonne Diapason M. à
D.
G. G.,0,08centimètres.
Bourdonnements, vertiges.
— 26 —
Après avoir lavéetséché l'oreilledroite, nousconstatons quele tym¬
pan a à peu près complètement disparu, il n'en reste qu'une étroite bandeen avant eten arrière. Lacaisse estvide de laplus grande partie
de sesosselets qui, cariés, ont été entraînés par la suppuration, mais
* elle est remplie de fongosités qui saignent au moindre contact. Ces fon- gosités sont surtout nombreusesen bas,en avant eten arrière. I/étrier est restéen place, mais il est enfoncé sous une masse granuleuse. Du côté gauche, nous constatons que le tympan est terne et déprimé. Le triangle lumineuxn'est plus quepunctiforme. Quelques adhérences as¬
sez lâchesse remarquent à la partie antérieure; la chaîne, unpeu raide,
est cependant mobilisable. En somme, ce sont les lésions de l'otite moyennecatarrhaleet de l'obstruction de latrompe d'Eustache. Les sé¬
crétions nasalessont abondantes, la muqueuse des cornetsest tuméfiée, la respiration nasaletrès diminuée. Végétations adénoïdes du pharynx
nasal.
Nousne nous étendrons pas bienlonguementsur le traitement de ces diverses lésions. Il nous suffira de dire quela petite maladese montrant
assez docile, nouspûmes, après insensibilisation à la cocaïne, détruire les fongositésde la caisse au moyende la curette,sansgrandes douleurs
etsans écoulement notable de sang. Le curettage de la caisse fut suivi de cautérisations à l'acide chromique liquide. La médication fut com¬
plétée par deslavages boriqués, par des instillations astringentes etan¬
tiseptiques.
D'un autrecôté, les insufflations avec la poire de Politzer améliorè¬
rentnotablementl'audition del'oreillegauche, surtout après l'ablation
des végétations adénoïdes.
Après troismois de traitement, la suppuration était complètementta¬
rie du côté droit, mais l'audition était sensiblement la même. Agauche,
la montreétaitperçue à 63 centimètres, la respiration nasale parfaite"
mentlibre. La petite malade pouvait être considérée comme guérie, mais, par mesurede précaution, nousrecommandâmes denous l'amener de temps en temps.
Au mois dejuin de la mêmeannée1893, les parentsfurent appelésen
Espagneet nous n'en eûmes plus de nouvelles jusqu'au mois d'octobre 1894. A ce moment, ils nous ramenèrent la fillette et nous racontèrent que la guérison s'était maintenuecomplèteen apparencejusqu'au milieu