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Véronique Blanchard, David Niget, Mauvaises filles, incorrigibles et rebelles. ed. Textuel, 2016.

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Sociétés et jeunesses en difficulté

Revue pluridisciplinaire de recherche 19 | Automne 2017

Varia

Véronique Blanchard, David Niget, Mauvaises filles, incorrigibles et rebelles

ed. Textuel, 2016.

Séverine Depoilly

Édition électronique

URL : http://journals.openedition.org/sejed/8476 ISSN : 1953-8375

Éditeur

École nationale de la protection judiciaire de la jeunesse

Référence électronique

Séverine Depoilly, « Véronique Blanchard, David Niget, Mauvaises filles, incorrigibles et rebelles », Sociétés et jeunesses en difficulté [En ligne], 19 | Automne 2017, mis en ligne le 15 janvier 2018, consulté le 19 avril 2019. URL : http://journals.openedition.org/sejed/8476

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Véronique Blanchard, David Niget, Mauvaises filles, incorrigibles et rebelles

ed. Textuel, 2016.

Séverine Depoilly

RÉFÉRENCE

Véronique Blanchard, David Niget, Mauvaises filles, incorrigibles et rebelles, ed. Textuel, 2016.

1 A l’heure où les déviances féminines font, à intervalles réguliers, l’objet d’emballements médiatique et politique, l’ouvrage Mauvaises filles, incorrigibles et rebelles coécrit par deux historiens Véronique Blanchard et David Niget et publié aux éditions textuel en 2016 arrive à point nommé. Il invite ses lecteurs à un véritable voyage dans le temps au sujet d’une double question longtemps invisibilisée dans le champ des recherches en sciences humaines et sociales : la déviance des filles et la manière dont le corps social la traite.

Véronique Blanchard et David Niget viennent en bref mettre de l’histoire là où il en a toujours cruellement manqué.

2 Les deux auteurs ont, de fait, relevé un véritable défi en travaillant, sur la base d’une exploitation d’archives, elles-mêmes parfois peu prolixes, à faire état de ce que le corps social tend à nier, disqualifier, discréditer, à reconstruire des trajectoires de filles désignées comme de « mauvaises filles ».

3 Dans cet ouvrage vivant, richement illustré, offrant aux lecteurs un accès à des documents variés – photographies, reproductions d’articles de presse, archives judiciaires et policières - David Niget et Véronique Blanchard donnent corps à 19 jeunes filles dont ils dressent les portraits. Ainsi nous offrent-ils la possibilité d’accéder non pas à ce qu’est

« la mauvaise fille », qui n’existe pas en soi, mais à ces mécanismes par lesquels des jeunes filles, presque toutes issues des milieux populaires, se trouvent étiquetées comme

« mauvaises filles ». Les portraits nous apprennent tant sur les normes sociales, juridiques, familiales, religieuses que sur les modalités du contrôle social, les formes du

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discours moral qui pèsent sur les jeunes filles, les paniques morales que leurs transgressions suscitent, bref sur tout ce qui enserre les vies de ces jeunes filles des milieux populaires au cours de l’histoire. Mais, l’ouvrage va plus loin - ne cédant en cela ni au misérabilisme, ni au populisme - puisque les filles ne nous sont pas seulement présentées comme victimes ou soumises à un corps social qui tend à les redresser, elles nous apparaissent aussi comme pouvant subvertir les normes dominantes par les révoltes et les rébellions qu’elles engagent.

4 Sont distinguées trois grandes périodes de 1840 aux années 2000, chacune de ces périodes nous permettant de comprendre qui sont ces filles, ce qu’elles ont fait, les règles qu’elles ont enfreintes, les modalités de contrôle social qui s’exercent sur elles.

5 L’ouvrage est organisé en trois chapitres, chacun de ces chapitres correspondant aux trois temps de l’histoire de ces « mauvaises filles ». Six grands thèmes pour lesquels ces filles sont mises en cause et pour lesquelles elles sont suspectes structurent les différents chapitres l’ouvrage : les crimes et délits, la prostitution, l’errance, la folie, la rébellion et la maternité précoce.

6 La première période, celle des filles perdues, s’étend de 1840 à 1918. Les mauvaises filles de cette période prennent corps dans les portraits de l’incorrigible, de la vagabonde et de la prostituée. A l’image de l’oie blanche construite au XIXème siècle comme l’archétype de la fille pure, vierge, retirée dans l’univers domestique répondent ces images de

« mauvaises filles » - toujours soupçonnées de mettre à mal l’ordre moral - que les dispositifs d’encadrement et de contrôle social visent à corriger, enfermer et surveiller.

Le temps de ces filles perdues nous rappelle à un invariant de l’histoire des jeunes filles et des femmes : le contrôle des mobilités est en l’occurrence la garantie du maintien de l’ordre moral de ces femmes.

7 La seconde période, celle des filles modernes, s’étend des années 1920 aux années 1960. Si ce moment de l’histoire des filles signifie un gain d’autonomie rendu possible par les transformations économiques et sociales de la période, l’accès à la société de consommation, le travail des femmes, n’en persistent pas moins des normes très strictes rappelant que les voies d’émancipation restent fragiles et étroites. Insoumises, rebelles, voleuses, toutes manifestent leur désir d’émancipation, voire de subversion de certaines des normes de l’ordre du genre qui les enjoint à la soumission et, une fois encore, l’enfermement dans les institutions est la réponse apportée à leurs déviances. Les actes de délinquance dont elles sont les auteures se trouvent régulièrement minorées, les mouvements de rébellion et de révolte contre les familles ou les institutions pathologisées, leur est de fait déniée toute capacité à se révolter et à tenir une parole de revendication.

8 La dernière période des années 1968 aux années 2000 est le temps des filles rebelles. La maîtrise de la fécondité, l’allongement des scolarités, la majorité à 18 ans, et la place prise par le féminisme de la deuxième vague, sont autant des phénomènes qui participent à changer le regard sur les filles. Enjointes à maîtriser leur corps, leur sexualité, et à affirmer leur désir d’égalité, les rebelles - de la hippie à la punk, de l’avortée à la crapuleuse - toutes travaillent à conquérir leur autonomie mais sont toujours en risque d’être rattrapées par les normes qui continuent de pathologiser, psychiatriser leurs manières d’être au monde. Les violences de ces jeunes filles, qui sans cesse échappent au traitement judiciaire et pénal pour être cantonnées au traitement civil et médical, le déni du potentiel subversif de leurs actes de rébellion et de révolte sont autant des manifestations de l’impossibilité de penser l’agir des femmes.

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9 Cet ouvrage, en dressant les portraits complexes et foisonnants de ces jeunes femmes oubliées de l’histoire, nous invite à bouleverser une vision souvent trop uniforme de ces trajectoires féminines. Malgré le poids des normes sociales qui enserrent leur corps, leur sexualité, leur quotidien, leur vie, chacune de ces histoires singulières montrent que les femmes ont largement manifesté leur volonté de résistance, se confrontant aux normes qui les enferment. Les transgressions et déviances dont elles sont les auteures nous rappellent que l’ordre du genre peut aussi être, si ce n’est totalement subverti, à tout le moins déstabilisé. Par la lecture de cet ouvrage, notre vision des femmes et du féminin se trouve indéniablement déstabilisée.

AUTEUR

SÉVERINE DEPOILLY

Maîtresse de conférences en sociologie, ESPE de l’Université de Poitiers - Laboratoire Gresco, Université de Poitiers. Chercheure associée au laboratoire Escol – Université Paris 8.

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