A NNALES DE L ’I. H. P., SECTION A
C HRISTIANE C AROLI
Contribution à l’étude des excitations dans les supraconducteurs
Annales de l’I. H. P., section A, tome 4, n
o3 (1966), p. 159-261
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p. 159-2
Contribution à l’étude des excitations dans les supraconducteurs (*)
Christiane CAROLI (Faculté des Sciences,
Orsay)
Vol. IV, no
3,
1966 Physique théorique.SOMMAIRE. - On étudie le spectre des excitations d’un
supraconducteur
dans trois cas où le
paramètre
d’ordre varie dansl’espace.
1)
Dans unsupraconducteur
pur de deuxièmeespèce
dans laphase
deSchubnikov il
apparaît
des états localisésd’énergie
très inférieure au seuil d’excitation enchamp nul, qui
modifient lespropriétés
de bassetempérature
du métal
(chaleur spécifique,
relaxation nucléaire...).
2)
Unsupraconducteur
pur depremière espèce
en état de « surchauffe »magnétique
contient des excitations de basseénergie
localisées auvoisinage
de la surface. La densité d’états
correspondante
est mesurable par effet tunnel.3)
Uneimpureté
nonmagnétique
induit des variationsspatiales
du para- mètre d’ordre d’unsupraconducteur.
A cetteperturbation
est associéeune variation de la
température
de transition d’unalliage supraconducteur
« sale ».
SUMMARY. - The excitation spectrum of a
superconductor
is studied for three different situations ofspace-varying
order parameter.1)
When a pure type IIsuperconductor
is in the Schubnikov state, its spectrum contains localized states with energy much smaller than the gap in zéro field. Theselow-lying
excitations have animportant
effect on the(*) Cet article représente la thèse de doctorat d’état es sciences physiques de
Mme Caroli, présentée à la Faculté des Sciences de l’Université de Paris enre- gistrée au Service des Archives Originales du Centre National de la Recherche Scientifique sous le n° 428, et qui sera soutenue au cours de l’année 1966.
ANN. INST. POINCARÉ. A-I V-3 12
low
température properties
of the metal(specific heat,
nuclearrelaxation...).
2)
In the metastable state ofsuperheating
a pure type 1superconductor
contains low energy excitations localized in the
vicinity
of the surface. Thecorresponding density
of states can be measuredby
atunneling experiment.
3)
A nonmagnetic impurity
induces space variations of the order para- meter of asuperconducting
solvent. Thisperturbation
is correlated witha modification of the transition temperature of a
dirty superconducting alloy.
INTRODUCTION
En
1957, Bardeen, Cooper
et Schrieffer[1] (1)
ont élaboré une théoriemicroscopique
de lasupraconductivité.
Leprincipe
en est le suivant : si dans un métal il existe une interaction attractive entre les électrons cette interaction nepeut
pas être traitée comme uneperturbation.
Ladivergence
de la série de
perturbation
traduit un faitphysique, qui
a été mis en évi-dence par
Cooper [2] :
pour deux électrons de moments et despins opposés ajoutés
au métalsupposé normal,
l’état leplus
bas enénergie
n’est pas celui où les électrons viennentsimplement
seplacer juste
au-dessus du niveau de Fermi. A cause de l’interaction attractive ils peuvent abaisser leurénergie
en formant un état lié. Suivant ce processus les électrons dusupraconducteur
se « condensent )) en un ensemble depaires
liées de momentset de
spins opposés.
L’interaction attractive estcréée,
dans le modèleBCS,
par l’intermédiaire des
phonons.
BCS la schématisent de la
façon
suivante(et
nous ferons la mêmehypo-
thèse dans tout ce
travail).
1)
L’interaction attractive n’est pas instantanée :- On traduit ce retard de l’interaction en disant
qu’elle
n’existe entredeux électrons que si ces deux électrons ont dans la
phase
normale desénergies comprises
entre EF - CùD et Ep + CùD’ c~D est lafréquence
deDebye,
Epl’énergie
de Fermi du métal.2)
Elle est locale :- En réalité la
portée
de l’interaction dansl’espace
est de l’ordre du rayonde Thomas-Fermi du
métal,
donccomparable
à la distanceinteratomique.
Cette
approximation néglige
les variations des différentescaractéristiques
dusupraconducteur
à une échelleplus
fine que la distanceinteratomique.
(1) Nous désignerons dans la suite cet article par BCS.
Cette théorie rend bien compte des
principales propriétés
des supra-conducteurs purs et massifs : effet
Meissner, absorption
des micro-ondes et des ultra-sons.... Elle met en évidence une descaractéristiques
lesplus spectaculaires
dessupraconducteurs,
l’existence d’un seuil finid’énergie
d’excitation
(que
nousappellerons
« bandeinterdite »).
Dans un métal normal il existe des excitations
d’énergie
infinitésimale(on
les obtient en créant unquasi-trou
et unequasi-particule qui
ont tousles deux des
impulsions
trèsproches
del’impulsion
de FermipF).
Dans unsupraconducteur
pour créer une excitation élémentaire il faut détruire unepaire liée,
donc fournirl’énergie
deliaison,
cequi implique
l’existence d’une bande interdite dans le spectre desénergies
d’excitation.Il est clair que cette
description,
faite en termes d’états propresd’impul-
sion bien
définie,
nes’applique qu’à
un métal massif ethomogène.
Ellene permet pas, au moins sous sa forme
originale,
de décrire lesalliages supraconducteurs
ou lesspécimens
de trèspetites
dimensions.En milieu
inhomogène
ceprincipe d’explication
de lasupraconductivité
doit certainement subsister. Considérons le cas où la structure du supra- conducteur varie très lentement dans
l’espace :
on serait alors tenté de supposer que le modèle BCSs’applique localement,
dans unerégion
del’espace petite
par rapport à la distancecaractéristique
surlaquelle
varie lastructure. On voit sur ce cas
simple
que toutes lespropriétés locales,
parexemple
la densité decharge,
ont alors des variationsspatiales.
Enparti-
culier le
paramètre 0394 qui représente
dans la théorie BCS lalargeur
de labande interdite devient variable dans
l’espace.
Dans ce cas,(r)
nepeut plus représenter
un seuild’énergie
d’excitation. En effet le spectre des exci- tations est unepropriété
de l’ensemble dusystème,
et leseuil,
s’il existeencore, ne peut pas varier dans
l’espace.
Pour calculer les
propriétés
d’unsupraconducteur inhomogène,
il fautdonc
généraliser
la théorie de BCS defaçon
àpouvoir :
1) définir,
si c’estpossible, (r)
àpartir
des donnéesmicroscopiques,
et essayer de lui donner un sens
physique ;
2)
calculer la bande interdite dans lespectre
desénergies
d’excitation dusystème,
si elle existe.La solution du
premier problème
a été fournie enpartie,
en fait bienavant que ne soit élaborée la théorie
microscopique BCS,
par la théoriephénoménologique
de Landau etGinzburg [3].
Cette théorie décrit unsupraconducteur
auvoisinage
de satempérature critique
T~. On sait que la transitionnormal-supraconducteur
enchamp magnétique
nul est dusecond ordre. Landau a
appliqué
à ce cas sa théoriegénérale
des transitions du second ordre[4] :
pour cela il faut supposer que dans l’état « ordonné » il existe un «paramètre
d’ordre » ’Y nonnul, qui
s’annule auxtempéra-
tures T >
Te.
Dans le cas d’une transitionferromagnétique,
parexemple,
ce
paramètre
est l’aimantationspontanée.
Deplus
Landau etGinzburg supposent
que ceparamètre
d’ordre peut varier dansl’espace,
et associentà ces variations une «
énergie
de courbure »proportionnelle à 2.
Enfin ils introduisent le
champ magnétique H(r)
enimposant
quel’énergie
libre du
supraconducteur
soit invariante dans une transformation dejauge.
On obtient ainsi uneexpression
locale del’énergie libre, qui
doitêtre minimisée par rapport aux variations du
paramètre
d’ordre et duchamp magnétique (ou
dupotentiel
vecteurA(r)).
Ceciimpose
queF(r)
etA(r)
soient solutions de deux
équations
différentiellescouplées (équations
deLandau-Ginzburg).
L’uned’elles,
enparticulier,
donne la valeur de rotH,
c’est-à-dire du courant : leshypothèses
faites sur la nature duparamètre
d’ordre et sa covariance de
jauge
suffisent àimpliquer
l’existence de courantspermanents.
En résolvant ces deuxéquations (auxquelles
il fautajouter
desconditions aux
limites)
on peut trouver la forme duparamètre
d’ordre dans des situationsinhomogènes.
Les
équations
deLandau-Ginzburg
fontapparaître
deuxlongueurs caractéristiques
dusupraconducteur :
- la
portée
dansl’espace
des variations duparamètre
d’ordre autourde sa valeur
d’équilibre
en milieu infini~(T).
Elle devient infinie à latempérature
de transition. On retrouve ici unepropriété caractéristique
destransitions du second
ordre;
- la
profondeur
depénétration X(T)
d’unchamp magnétique
faible dans lesupraconducteur, qui
devient aussi infinie à la transition.Enfin,
dans cette théorie le carré duparamètre d’ordre 2
est inter-prété
dans le cadre du modèle à deux fluides[5],
comme la densité locale d’électronssuperfluides.
Cependant
lesapplications
de ce modèle sont limitées pourplusieurs
raisons :
- il est valable pour un matériau de structure
microscopique homogène.
Les
inhomogénéités (qui
se traduisent par des variations de W dansl’espace)
ne
peuvent
être créées que par laprésence
d’unchamp magnétique,
ou àpartir
de conditions aux limites traduisant l’effet d’uneperturbation
exté-rieure
(surface libre,
contact avec un autre métal ou unisolant, etc.),
Nous
appellerons
ce type de variationsspatiales
«inhomogénéités
macro-scopiques
» car elles se font sur unelongueur caractéristique ~(T)
ouX(T) toujours
trèssupérieure
aux dimensionsatomiques :
- les conditions aux limites pour un
problème
donné ne peuvent être définiesqu’à partir
d’un calculmicroscopique ;
- enfin il n’est valable
qu’au voisinage
de latempérature
de transition.Même en tenant
compte
de ces limitations la théorie de Landau et Ginz-burg
est extrêmement riche enapplications :
elle apermis
parexemple
demettre en évidence l’existence des
supraconducteurs
de secondeespèce
et de calculer leurs
propriétés magnétiques [6].
En
1958,
Gor’kov[7]
a reformulé la théorie de BCS en termes de fonc- tions de Green. Ce traitement ne fait aucunehypothèse d’homogénéité spatiale.
Lasupraconductivité
se traduit dans ce modèle de lafaçon
suivante :en
plus
de la fonction de Green à uneparticule
ordinaire(2)
il existe une fonction de Green anormale
F+(j,
liée à l’existence despaires,
définie parF+(r, ~)
=( T { ~~(~0)~~(r~) } ).
Laquantité
est
appelée
«amplitude
de condensation » despaires.
Elle est, trèsqualita- tivement,
une mesure de la densité depaires
enchaque point.
C’est le faitque cette
amplitude
ait une valeur non nullequi
est lacaractéristique
laplus générale
de l’étatsupraconducteur.
Enfin on définit unparamètre
d’ordre par
A(r)
=V ( r)03C8~ (r)> (V
étant la force de l’interaction attractive entre lesélectrons)
dans unsupraconducteur homogène
et massifen
champ
nul A estsimplement
la bande interdite de BCS.A
partir
de cette formulation Gor’kov[8]
a pu obtenir leséquations
deLandau et
Ginzburg,
évidemment comme résultat d’uneapproximation.
En effet le
paramètre
d’ordreA(r)
doit être déterminé defaçon
self-consis- tence. Auvoisinage
de latempérature
detransition, l’équation
de self-(2) 03C8(r,
t) et sont les opérateurs qui détruisent et créent un électron aupoint r
et
autemps t (~(~,
0) est relatif au temps t = 0), T est l’opérateur qui ordonne les temps, et () symbolise
la moyennethermodynamique.
consistence pour
(r)
est uneéquation intégrale
linéaire(3)
dont le noyaua dans
l’espace
pour unsupraconducteur
pur uneportée Ço, portée
descorrélations de
position
dans lesupraconducteur.
La valeur de en unpoint dépend
donc de ses valeurs(et
de celles duchamp magnétique)
dansune
sphère
de rayonÇo
centrée aupoint
r. On ne peutobtenir,
àpartir
decette
équation
nonlocale,
leséquations
locales deLandau-Ginzburg,
que si les variationsspatiales
de(r)
et duchamp magnétique
se font sur desdistances très
supérieures à 03BE0, donc
siÀ(T) » 03BE0 4 .
Ces conditions sontremplies
si « 1. On montre alors que leparamètre
d’ordrephéno- ménologique
de Landau etGinzburg F(r)
estsimplement proportionnel
à
A(r), qui
est lui-même relié aux donnéesmicroscopiques.
Enfin des méthodes
analogues permettent
decalculer,
pour des situations très variées[9],
les conditions aux limites «microscopiques » qui
doivents’ajouter
auxéquations
de Landau etGinzburg.
Il serait évidemment souhaitable de
disposer
d’unedescription
localedu type
Landau-Ginzburg
à toutetempérature
et toutchamp magnétique.
Une telle extension a été faite par Werthamer
[10]
et Tewordt[11],
maiselle n’est valable que si le
paramètre
d’ordre varie peu sur unelongueur
decohérence. Pour avoir une idée des limitations
qu’impose
cettecondition,
nous calculons dans
l’Appendice
B laportée çLl(T)
des variationsspatiales
«
macroscopiques »
duparamètre
d’ordre pour un métal pur ou unalliage
sale
(dans lequel
le libre parcours moyen des électrons 1 est très inférieur à lalongueur
de cohérenceÇo
dusolvant).
Nous trouvons que, à T = 0 et enchamp nul, ÇLl
est de l’ordre de lalongueur
de cohérence. La limitation est donc sérieuse. -Il est clair que les
équations
deLandau-Ginzburg, qui négligent
les variations deparamètre
d’ordre sur des distances de l’ordre deçg,
très (8) Au voisinage de Tc comme la transition normal-supraconducteur est dusecond ordre, A(r) est petit et la condition de self-consistence générale peut être développée en puissances de A.
(4) Il faut insister sur la différence physique entre ~o et La longueur
de cohérence 03BE0 = 0,18 vF Tc une quantité indépendante de la température (c’est
la portée des corrélations de position dans la phase supraconductrice). Par contre
la portée ia des variations spatiales du paramètre d’ordre dépend de la tempéra-
ture (elle devient infinie à la température critique). C’est une longueur analogue
à la portée des corrélations d’aimantation dans un ferromagnétique, qui devient
infinie à la température de Curie. ’
supérieures
aux distancesinteratomiques (5)
nepeuvent
pas décrire lesinhomogénéités
«microscopiques »
éventuelles. Pour en rendrecompte
il faut chercher une solutionplus
« fine » del’équation
de self-consistence pour(r).
Par
ailleurs,
mêmequand
nousconnaissons,
d’unefaçon
ou d’une autre, la formespatiale
de0(r),
il reste à résoudre le deuxièmeproblème :
calculer le spectre des
excitations,
et enparticulier
lalargeur
de la bande interdite si elle existe. Pour obtenir le spectre dans une situationinhomogène,
et les
propriétés qui
en découlent(phénomènes dissipatifs,
detransport...),
il faut revenir au calcul
microscopique.
On rencontre alors deux types de situations àinhomogénéités macroscopiques :
1)
il arrivequ’on puisse,
auvoisinage
d’une transition du secondordre,
calculer directement toutes lespropriétés
dusupraconducteur,
à toutetempérature,
par undéveloppement
enpuissances
duparamètre d’ordre, qui
est alorspetit.
C’est le cas des matériaux de 2eespèce
auvoisinage
deleur
champ critique supérieur
traité par de Gennes[12]
et Maki[13].
Pourle cas « sale »
(/« ~o)
sous l’effet duchamp magnétique,
leparamètre
d’ordre varie fortement dans
l’espace,
mais a une moyenne nonnulle,
alors que le spectre des
énergies
d’excitation neprésente plus
de bandeinterdite
[14] ;
2)
cesdéveloppements
en série depuissances
de A ne convergent pastoujours.
Pour unsupraconducteur BCS,
parexemple,
on ne peut pas déve-lopper
la densité d’états en série depuissances
de A. Ledéveloppement
converge seulement
quand
lesupraconducteur
est du type « sans bande interdite ». On doit revenir alors danschaque
casprécis
auxéquations microscopiques
pour calculer parexemple
le spectre desénergies
d’exci-tation. C’est cette méthode que nous
employons :
- au
chapitre
1 pour calculer la densitéd’états, l’absorption
des ultra-sons et la relaxation nucléaire dans un
supraconducteur
de secondeespèce
contenant une faible densité de
lignes
de vortex(le champ magnétique
est alors un peu
supérieur
auchamp
depremière pénétration Hci);
- au
chapitre
II pour calculer la densité d’états mesurable par effet tunnel dans unsupraconducteur
depremière espèce
dans un état métastablede « surchauffe »
(phase supraconductrice
dans unchamp supérieur
auchamp critique);
(5) La plus courte longueur de cohérence que l’on connaisse actuellement pour un corps pur est celle de Nb3Sn, estimée à environ 50 à 100Â. Dans les supra- conducteurs de lre espèce (Sn, In, Al... ) ~o vaut toujours plusieurs milliers d’angstrôms.
- enfin dans le
chapitre
III nous étudions latempérature
de transition desalliages supraconducteurs
àimpuretés
nonmagnétiques.
Dans ce cas leparamètre
d’ordreprésente
des variations à l’échelleatomique,
que leséquations
de Landau etGinzburg
ne décrivent pas. Nous cherchons doncune solution
plus
détaillée del’équation
de self-consistence pourqu’on
peut ensuite utiliser pour étudier le spectre d’excitations del’alliage.
I. - EXCITATIONS DE BASSE
ÉNERGIE
DANS LES SUPRACONDUCTEURS DE 2e
ESPÈCE
1.1 Phase de
Schubnikov.
Description
d’uneligne
de Vortex.Comme nous le verrons dans le
chapitre III,
on peut créer des inhomo-généités
«microscopiques »
dans unsupraconducteur
aussi bien que dansun métal normal par l’addition
d’impuretés.
Il existecependant
un moyen de créeruniquement
lesinhomogénéités spatiales
«macroscopiques » particulières
auxsupraconducteurs (métaux
purs oualliages) :
c’estl’appli-
cation d’un
champ magnétique
assez fort. Eneffet,
laprofondeur
depéné-
tration du
champ X(T)
estfinie,
donc laprésence
duchamp
suffit àplacer
dans une situation
inhomogène
unsupraconducteur
- même s’ils’agit
d’un métal pur -.
En
champ
faible unsupraconducteur
exclutcomplètement
le fluxmagné- tique,
sauf sur uneépaisseur X(T)
auvoisinage
de sa surface. Dans les supra- conducteurs depremière espèce (Sn, Al, In, ...)
cediamagnétisme
totalcesse
brusquement quand
H =Hc (Hc
est lechamp critique) (6). Cependant
on a observé
depuis longtemps [15]
que dans certainssupraconducteurs,
dits de 2e
espèce,
lediamagnétisme
diminueprogressivement
àpartir
d’unseuil
Hci jusqu’à
unchamp critique supérieur Hc2,
où l’aimantation s’annule continûment. Ces corps sont engrande majorité
desalliages,
mais peuvent aussi être des corps purs, commeNb,
ou descomposés
définis commeV 3Ga,
Landau et
Ginzburg [3]
avaientdéjà remarqué
l’existence de ces deux types desupraconducteurs,
que l’on peutdistinguer qualitativement
en calculant(6)
Nous considérons ici une géométrie de cylindre infiniment long, parallèleau champ, ce qui exclut les effets de désaimantation, donc la possibilité d’observer
l’état intermédiaire.
l’énergie
de surface d’uneparoi normal-supraconducteur (ces parois
appa- raissent dans l’étatintermédiaire). L’aspect
d’uneparoi
estreprésenté qualitativement figure
1. Dans larégion
CM leparamètre
d’ordre et lechamp magnétique
sont tous deuxpetits,
lesystème perd
uneénergie
decondensation
H2c 803C0
par unité de volume(Hc
étant lechamp critique thermo-’
dynamique),
et ne gagne pasd’énergie magnétique. L’énergie
par unité de surface de laparoi
estdonc,
en ordre degrandeur
FIG. 1. - Aspect qualitatif d’une paroi métal normal-supraconducteur.
Cette
énergie
devientnégative quand X(T)
>~,1(T)
ouquand
K= ~
> 1.Un calcul
plus précis
montre que la limite exacte est K = Onappelle supraconducteurs
depremière espèce
ceux pourlesquels
Ki/~/2.
Ilsont une
énergie
deparoi positive,
il est donc défavorable de former uneparoi,
le fluxmagnétique
nepénètre
pas(sauf
dans l’état intermédiaire où lapénétration
duchamp
est liée non pas à la structure dusupraconducteur,
mais à la forme
géométrique
duspécimen).
Par contre dans les supra- conducteurs de secondeespèce (K > 1/~/2)
le matériau devrait gagner del’énergie
en se subdivisant enrégions
N etS,
defaçon
à laisserpénétrer
aumoins
partiellement
lechamp magnétique.
C’est cequ’on
observe dans larégion
dediamagnétisme partiel
HHC2)
de leurs courbes d’aiman- tation(fig. 2).
L’observation des surfaces a montré
qu’il
nes’agit
pas ici d’état inter- médiaire mais d’une nouvellephase, appelée phase
deSchubnikov,
dont lastructure a été étudiée par Abrikosov
[6]
en utilisant leséquations
de Landau-Ginzburg.
Il aproposé
unepénétration du champ
sous forme de «lignes
de vortex »
parallèles
auchamp appliqué.
Une telleligne
isolée estrepré-
sentée
figure
3. ,FIG. 2. - Courbe d’aimantation d’un cylindre supraconducteur
en champ parallèle à l’axe : a) matériau de première espèce,
b) matériau de deuxième espèce.
Le module du
paramètre
d’ordre s’annule au centre de laligne, puis
croît linéairement. Au-delà d’une distance de l’ordre de
~(T).
il a à peuprès rejoint
sa valeurd’équilibre
enchamp
nul Cetteinhomogénéité macroscopique
se superpose auxinhomogénéités microscopiques
éven-tuelles. Le
champ magnétique
est maximum au centre de laligne.
Il décroîtquand
ons’éloigne
de laligne,
et est à peuprès
nul pour r >X(T) (r
étant ladistance au centre de la
ligne). Chaque ligne
de vortex contient un quantumde
hc
-- 2.10-~ G cm2.Quand
on augmente lechamp extérieur,
le nombre n delignes
par centi- mètre carré augmente, l’inductionmagnétique
est B =Deux
lignes
de vortexparallèles
serepoussent,
la densité n delignes
estfixée par
l’équilibre
entre ces forces derépulsion
et lapression magnétique
extérieure. Dans un
spécimen
pur l’ensemble deslignes
s’ordonne enréseau compact
triangulaire [16].
Ce résultat a été confirmé par des
expériences
de diffraction des neutro.nssur le niobium
[17]
auvoisinage
duchamp critique supérieur He2 (?).
Au
voisinage
duchamp
depremière pénétration Hel
l’induction est encorefaible,
leslignes
sont trèséloignées
les unes des autres, on peut considérerqu’elles n’interagissent
pas, et que la structure dechaque ligne
est celle d’une
ligne
isolée. Dans ce cas nous connaissons en détail le para- mètre d’ordre0394(r)
et lechamp magnétique (ou
lepotentiel
vecteurA(r))
dans le domaine de validité des
équations
deLandau-Ginzburg Te).
Ils nous sont donnés par la solution d’Abrikosov
[6].
Leur forme estrepré-
sentée sur la
figure
3 et doit resterqualitativement
la même à toutetempé-
rature. Nous allons calculer le
spectre
desquasi-particules
pour une telleligne.
FIG. 3. - Structure d’une ligne de vortex.
1.2
Spectre
d’excitations de basseénergie.
Nous nous limitons pour ce calcul à des matériaux purs dans
lesquels :
2014 le
paramètre
deLandau-Ginzburg
K= 03BB(T) 03BE0394(T)
»1,
- le
champ magnétique
H est très inférieur auchamp critique supé-
rieur HC2
(mais supérieur
auchamp
depremière pénétration Hel).
(7) Au voisinage de Hci les résultats de la diffraction de neutrons ne permettent
pas de décider si les lignes de vortex forment un réseau triangulaire ou une struc-
ture « liquide » avec un ordre à courte distance.
"
(ceci
estpossible puisque
nous nous limitons à K »1,
cequi
entraîneHel
«He2).
De
plus,
comme nous ne connaissons la forme duparamètre
d’ordre etdu
potentiel
vecteur que par la solutiond’Abrikosov, qui
dérive deséqua-
tions de
Landau-Ginzburg,
notre calcul n’est strictement valable quepour T ci
Te (8)..
Le domaine des
énergies supérieures
oucomparables
à lalargeur
de labande interdite du
supraconducteur
enchamp nul Aoo
a été examiné parCyrot [18]
dansl’approximation
suivante : ilnéglige
cequi
se passe dans le« c0153ur» d’une
ligne (r ~(T))
et peut donc considérer le module duparamètre
d’ordre commeconstant : ~(r) ~
== Aoo. La seuleperturbation
due à la
ligne
est donc l’existence d’unchamp magnétique,
ou d’une vitessesuperfluide vs(r), qui
varie sur des distances de l’ordre deX(T),
trèssupé-
rieures à la taille
~o
d’un paquet d’onde formé d’excitations du type BCS.Il peut donc calculer un spectre en
chaque point :
c’est celui d’un supra- conducteur du type BCS animé d’une vitessesuperfluide
constante etégale
à
vs(r).
La densité d’états ainsi obtenue estreprésentée figure
4.Cette
approximation
de variation lente n’est pas valable pour décrire les états de basseénergie qui
nous intéressent. En effet cesétats,
s’ilsexistent,
sont certainement localisés dans le coeur des
lignes
de vortex, où le para- mètre d’ordre estpetit
mais varie fortement sur unelongueur
Il faut donc chercher une solution des
équations microscopiques qui
décrivent le
système
en tenant compte de la forme détaillée duparamètre
d’ordre et du
potentiel
vecteur. Il estcommode,
pourcela,
de décrire lesupraconducteur
dans le formalisme du «champ
self consistent »[19]
dérivé de la méthode de
Bogoliubov [20].
Nous exposons sonprincipe
dansl’Appendice
A.Nous passons
donc,
par une transformation de typeBogoliubov,
desopérateurs
de création et d’annihilation d’uneparticule
en unpoint ~+(r)
et
~(r)
auxopérateurs y,~
et ynqui
créent et annihilent uneexcitation,
ouquasi-particule,
dusupraconducteur.
(8) Les applications
(relaxation
nucléaire, chaleurspécifique,
atténuation des ultra-sons) seront développées pour T « Tc, en supposant que les résultats restent au moins qualitativement les mêmes.FIG. 4. - Densité des états d’énergie E/Aoo autour d’une ligne de vortex
d est la distance moyenne entre deux lignes de vortex (d’après CYROT
[18]).
Les fonctions
un(r)
etvn(r), qu’on appelle
les «amplitudes
debogo-
liubons » sont solutions du
système d’équations couplées
La valeur propre
En
de cesystème
estl’énergie
de l’excitation(n).
T contient
l’énergie cinétique
etl’énergie potentielle
à un électron. Lesénergies
sontcomptées
àpartir
du niveau de FermiEF.
En
présence
d’unpotentiel
vecteurA
et en l’absenced’impuretés
T et T*sont définis par
Le
paramètre
d’ordre(r)
est défini comme d’habitude(Appendice A)
par :
"
~ -
(Le signe ( ) représente
la valeur moyennethermodynamique).
Onpeut
transformer(1.4) grâce
à(1.1),
et écrire que l’étatd’énergie
En créé pary~
a sa
population d’équilibre thermique f(En).
Cette distribution est la distri- bution de Fermi(1.4)
devient alors :On voit sur les
équations (1.2)
que un et vndépendent
deA(r) (1.5)
est doncune
équation
de self-consistence pour leparamètre
d’ordre.Dans le cas
qui
nousintéresse,
nous connaissons directement la solution de cetteéquation
auvoisinage
de latempérature critique.
Elle nous estdonnée par la solution des
équations
deLandau-Ginzburg (qui
satisfaitautomatiquement
à la condition de self-consistencepuisque l’équation
deLandau-Ginzburg
pour leparamètre
d’ordre estéquivalente
à(1.5) quand
T ~
T~).
Il suffit alors de résoudre leséquations
deBogoliubov (1.2),
enprenant
pour0394(r)
etA(r)
la solution d’Abrikosov.Nous nous
plaçons
dans le domaine dechamp
H «Hcs,
la distance d entrelignes
de vortex est trèssupérieure
à~(T) [6],
donc au rayon desétats
qui
nous intéressent. Nous pouvons, à une bonneapproximation
considérer pour calculer ces états que les
lignes
sontindépendantes.
Nouscalculons donc
simplement
les excitations autour d’uneligne
isolée.D’après
le calculd’Abrikosov,
il existeune jauge
danslaquelle
leparamètre
d’ordre à la forme
(9)
f (r)
estréel,
nul à r =0,
croît linéairement pour r « et tend pourr » vers la limite finie Õ. 00. Dans cette
jauge
A esttangentiel,
etpour r «
~(T),
Hr.D’après
la deuxièmeéquation
deLandau-Ginzburg,
le courant super-fluide est donné en fonction de
A(r)
et de laphase 03A6
de par(9) (r, 6, z) sont des coordonnées cylindriques, l’axe z est l’axe de la ligne de
vortex.
Le fait que
A(r)
ait unephase 1> = -
0correspond
à l’existence de courantssuperfluides
autour de laligne.
On élimine cette
phase
en posantce
qui
revientsimplement
à faire unchangement
dejauge.
Les
équations (1.2)
s’écrivent alorsNous utilisons pour
simplifier
l’écriture une notationspinorielle,
en posantL’équation (1.8)
s’écrit alors :«x,
03C3y et
az sont les matrices de Pauli.On peut remarquer que e|A| c -
- quand
r estpetit,
et-2 = 2-.
c c 2r
Nous nous intéressons aux excitations de
portée
r Dans cecas
car le
champ critique supérieur HC2
et lalongueur
sont liés dans le domaine deLandau-Ginzburg
par la relationComme nous avons
supposé
H «HC2
le terme depotentiel
vecteur estnégligeable. Cependant
laprésence
duchamp magnétique
autour de laligne
de vortex se traduit surl’équation (1.9)
par leterme V 0, proportionnel
au courant
superfluide.
La forme de
l’équation (1.9) (qui
contient un «potentiel » dépendant uniquement
de la variableradiale) suggère
de chercher des solutions de la formeLes valeurs
de permises
sont liées auxpropriétés
de transformation des fonctions u et u(donc
decp)
dans une rotation de 21t autour de l’axe Oz.Il est
plus clair,
pour lesétudier,
de considérerd’abord,
au lieu de lagéo-
métrie
cylindrique,
le cas d’unsupraconducteur
en translation uniforme.Soit!
la vitesse moyenne d’entraînement(dirigée
selon l’axeOx).
Choi-sissons la
jauge
où A = 0 et A= 1 ~
En résolvant lesystème
deBogoliubov (1.2)
on aboutit auxamplitudes
où uk
et vk sont les fonctions BCS habituelles[1].
Imposons
maintenant une condition depériodicité
à la fonction d’ondeglobale
des électrons ...,rN)
quel
que soit i.La fonction C décrit des électrons
groupés
enpaires (k -f- q) t ,
(2014~+~.La
condition depériodicité
doit être satisfaite pour chacun des deux électrons de lapaire
On tire habituellement de ces
équations
la condition2qLx
== 2?? x entierqui
montre queD,(r)
est une fonction uniforme(Cette propriété
d’uniformité est à la base des effets dequantification
desflux).
En cequi
nous concernenous notons que dans la
jauge
choisie(~
estuniforme d’après (1.13)
et
(LU).
De la même
façon,
on montrerait pour notreligne
de vortexque 03C6
=(:);
défini dans la
jauge
où 0394=== |0394| e-i03B8,
est uniforme...Par contre
cp’
===change
designe
par une rotation de 2?? autour de l’axe du vortex. Nous obtenons doncNous posons d’autre
part k
=kF cos
« 0 (X 7t(Nous
nous limitons à larégion k ~ 1 kF).
L’équation (1.9)
s’écrit alors :On peut résoudre cette
équation complètement
dans différents domaines de valeursde ~
et «. Nous allons examinerd’abord,
et defaçon plus détaillée,
le domaine
(1°) ~,ç [J.
« sin «»1/(kF’E,)2/3 qui
fournit la contribu- tionprincipale
à la densité d’états de basseénergie.
On peut remarquer que estl’énergie
de Fermi dumétal,
, elle peut variertypiquement
entre 103 o K et 105 oK 0394~
0394~(T =0)
=1,75
Taest
toujours
inférieur à 300 Kenviron,
donc~) Région 1/2
(JL ~~~
sin a ~>i/(~~)~.
Nous choisissons un rayon de coupure rc tel que
dans
(1.15)
soitnégligeable.
Ceciimpose
rc
« 03BE (On
sait par l’étude du cas ~kF03BE
que l’abandon de ce terme dans larégion
intérieure n’entraînequ’une
erreurnégligeable
surl’énergie).
~
/~~B
Dans ce
( . )
a la forme :(1°) Nous écrirons partout dans ce chapitre pour simplifier les nota-
tions.
ANN. INST. POINCARÉ, A-lV-3 13
où
A+
sont des constantesarbitraires,
J des fonctions de Bessel etc == 20142014.2014 .
On asupposé F
sin oc,soit E
F « sin2 (x. On verraque dans le domaine que nous considérons ici cette
inégalité
est donc satisfaite
- pour r > rc nous posons
H,;
sont les fonctions deHankel,
uneenveloppe qui
varie peu sur unelongueur
d’onde,2014:2014
de la fonction de Hankel.F SIn ex
On vérifie a
posteriori
que cette condition de variation lente n’estremplie
que dans le domaine sin lX ~
1/(~)~. ~
satisfait àl’équation
On voit dans le second membre de
l’équation (1.18) qu’il s’ajoute
àFénergie
un est la vitessesuperfluide).
Ce terme,qui dépend
dusigne de ll,
traduit un effet deCoriolis,
c’est-à-dire l’interaction entre la « vitesse d’entraînement »vs(r)
et la« vitesse de rotation
)) -.
r
Si
kFrc sin
a » mdHm 1
20141 + ikF sin
x. Nous supposons cette conditionremplie
et nousnégligeons d2g dr2
par rapport àF
sin03B1dg dr
.(I.18) devient
Si E ~ Aoo
et ~ ~ p2014,
le second membre de(1.19)
pourra être traitécomme une