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FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNEE 1899-1900 N° 92
ÉTUDE MÉDICALE
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MÉDECINE
présentée et soutenue publiquement
le 1H Juillet 1900
Jean-Louis-Marie-Auguste-Albert DARRIGAN
Né à Habas(Landes),le 7 Janvier 1859
EX-PHARMACIEN AIDE-MAJOR DE L'ARMÉE
Examinateurs de laThèse.:•
MM. PICOT FERRÉ
^
CARLES CASSAET
professeur.... Président professeur—\ agrégé > Juges.
agrégé )
Le Candidat répondra aux questions qui
lui
serontï'aites
surles
diverses parties de l'Enseignement
médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE DU MIDI, P. GASSIGNOL
91 — RUE PORTE-DIJEAUX -
1900
Faculté de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux
M. DE NABIAS,doyen — M. PITRES, doyen honoraire.
PROFESSEURS MM. M1CE
DUPUY...
MOUSSOUS.
Professeurs honoraires.
Clinique interne...
Clinique externe...
Pathologie et théra¬
peutique générales.
Thérapeutique Médecine opératoire.
Clinique d'accouche¬
ments
Anatomie pathologi¬
que Anatomie
Anatomie générale et histologie
Physiologie Hygiène
MM.
PICOT.
PITRES.
DEMONS.
LANELONGUE.
VERGELY.
ARNOZAN.
MASSE.
LEFOUR.
COYNE.
CANNIEU VIAULT.
JOLYET.
LAYET.
QRÉ&ÉS E.l
Médecine légale...
Physique
Chimie
Histoire naturelle ...
Pharmacie
Matière médicale....
Médecine expérimen¬
tale
Clinique ophtalmolo¬
gique
Clinique des maladies chirurgicales des en¬
fants
Clinique gynécologique Clinique médicale des maladiesdesenfants Chimiebiologique...
EXERCICE :
MM.
MORACHE.
BERGONIÉ.
BLAREZ.
GUILLAUI).
FIGUIER.
de NABIAS FERRÉ.
BADAL.
PIECHAUD.
BOURSIER.
A. MOUSSOUS DENIGÈS.
sectionde médecine (Pathologie interneetMédecine légale.)
MM. CASSA ET. | MM. LE DANTEC.
AUCHÉ. | HOBBS.
SABRAZÈS.
section de chirurgie et accouchements
/MM. DENUCÉ. | Pathologieexternei
VILLAR BRAQUEHAYE CHAVANNAZ.
Accouchements.XMM. CHAMBRERENT FIEUX.
Anatomie.
section dessciences anatom1ques et physiologiques
jMM.
N.PRINCETE^U |
IPhysiologie
Histoire naturelleMM. PACHON.
BEILLE.Physique.
section des sciencesphysiques
MM. SIGALAS. I Pharmacie... M. BARTHE COURS C O M PIiFIIF PliTA I K FS
Clinique desmaladies cutanées et
syphilitiques
Clinique desmaladies des voies urinaires
Maladies du larynx, des oreilles etdu nez Maladies mentales
Pathologie interne
Pathologieexterne .'
Accouchements Chimie
Physiologie Embryologie Ophtalmologie
Hydrologie etMinéralogie Pathologie exotique
Le Secrétaire dela Faculté:
MM. DUBREUILH.
POUSSON.
MOURE.
RÉGIS.
RONDOT.
DENUCÉ?
CHAMBRELENT.
DUPOUY.
PACHON.
N.
LAGRANGE.
CARLES.
LE DANTEC.
LEMA1RE.
Pardélibération du 5 août1879, la Faculté aarrêté que les opinions émisesdansles
Thèsesquiluisontprésentéesdoivent êtreconsidérées comme propresà leurs auteurs,
et
qu'elle n'entend leurdonner niapprobation niimprobation.
A mon Président de Thèse MONSIEUR LE DOCTEUR
PICOT
professeur de clinique médicale a la
faculté
demédecine
médecin des hopitaux chevalier de la légion d'honneur 'officier de l'instruction publique
membre correspondant de l'académie de
médecine
INTRODUCTION
La
quinine, découverte
parCaventou et Pelletier,
en1900,
constitue un desagents les
plus précieux de la matière médi¬
cale; cet alcaloïdeest peu
usité à l'état de quinine seulement;
on ne fait usage que de ses
combinaisons
avecles acides et
en particulier.avec
les acides sulfurique, chlorhydrique,
bromhydrique,
valérianique, etc.
Lessulfate et chlorhydrate
de quinine sont les sels de qui¬
nine que l'on emploie
dans la pratique médicale, les bromhy-
drate et valérianate ont des indications qui
limitent leur
emploi à descas spéciaux.Nous n'avons certes pas
la prétention de
nousélever
con¬tre les services rendus par
le sulfate de quinine depuis'
son introduction dans la thérapeutique;mais l'examen de
sa composition d'une part,etl'importance attachée à l'action de
laquinine d'autre part, nous ont
conduit à chercher
une meilleureutilisation despropriétés
de cetalcaloïdépar l'em¬
ploi d'une autre combinaison de laquinine; enun
mot,
nous pensons que le sulfate dequinine
nerépond
pasà tous les
desiderata del'administration de la quinine.
Depuis quelques
années, l'acide glycéro-phosphorique
com¬biné avecles bases alcalineset alcalino-terreuses a.pris une placeprépondérante dans la
thérapeutique. La nomencla¬
ture des communications et mémoires auxquels
les glycéro- phosphates
ont donné lieu tant enFrance qu'à l'étranger,
démontre clairement
l'importancé
descombinaisons glycéro- phosphatées
au point de vuede leur meilleure assimilation,
et de la
propriété
quel'acide glycéro-phosphorique possède
en propre d'aider à la régénération de la cellule nerveuse; il
nous a donc paru intéressant : 1° d'étudier les combinaisons de l'acide
glycéro-phosphorique
avec la quinine,et enparticu¬lier le
glycérophosphate basique
de quinine ; 2° de compa¬rerce dernier avecles
chlorhydrate
et sulfate de quinine qui sont les sels de quinine les plusemployés jusqu'à
cejour.Nous diviserons notre travail en trois
chapitres
:Le premiercomprendra l'étudechimique du•
glycérophos¬
phate de quinine.
Dans ledeuxième, nous résumerons les expériences faites
sur nous-même au point de vuede l'absorption, de l'assimi¬
lation et de l'élimination du
glycérophosphate
de quinine comparativement avec les sulfate etchlorhydrate
de qui¬nine.
Le troisième chapitre comprendra les observations qu'il
nous a étépossible de réunirsur l'emploi médical duglycéro¬
phosphatede quinine,de date encore trop récente pour figu¬
rersur lès traités de
thérapeutique.
Desconclusions tirées des faits exposés dans les chapitres précédents terminerontce travail.
CHAPITRE PREMIER
Etude
chimique du glycérophosphate de quinine.
Lestravaux de M. Ad. Wurtz
ayant démontré
quela qui¬
nineétaitdiacide, la théorie
prévoit deux glycérophosphates
dé quinine,
le glycérophosphate basique et le glycérophos¬
phate neutre,
le premier correspond au sulfate basique
officinal; c'est lui
qui fait l'objet de notre travail.
E. Merck (de
Darmstadt)
ale premier indiqué les caractères
physiques et
chimiques du glycérophosphate de quinine
basique, qui
correspond à la formule suivante
0 C2uH24Az202
C3H703P0 CLT——
4-7 H20
0 C20H24Az2O2
« Petits cristaux incolores, en forme
d'aiguilles facilement et
» complètement
solubles dans l'eau chaude et l'esprit de vin.
» Lacontenanceen
quinine de cette préparation est de 68 0/0.
» Le
glycérophosphate de quinine réunit les propriétés de la
» quinine à celles de
l'acide glycéro-phosphorique dont les
» sels nous sont connuscomme toniques nerveux par
excel¬
lence. » (Merck,
Annales de 1896, publiées en 1897.)
Depuis, l'étude du
glycérophosphate de quinine a été
repriseparE. Falières
(de Libourne), qui, le 13 janvier 1898,
a
communiqué
àla Société de Pharmacie de Bordeaux un
mode de préparation que nous
reproduisons in extenso, car
c'estcelui que nous avons
suivi
pourla préparation du gly¬
cérophosphate
dequinine nécessaire à nos expériences.
- 10 -
« Dans 400ou 500 grammes d'éther à 65° on fait dissoudre
» 75 gr. 6 (2 10 de molécule en
grammes) de
quinine cristal-» lisée. On ajouteà cette solution 17 gr. 2 (1/10 de molécule
» en
grammes)
d'acideglycéro-phosphorique,
bien privé de» glycérineet dissousdans 50 ou 60 grammes d'alcool à 96°.
» Il se produit un abondantprécipité blanc, qui se rassemble
» très rapidement au fond du flacon. L'examen au micros-
» cope le montrecomme constitué par de longues et fines
»
aiguilles;
leliquide
surnageant, leprécipité
necontientque» des traces d'acide
glycéro-phosphorique
et de quinine.» On agite fréquemment le
mélange
pendant quelques» heures. Le précipité est recueilli sur un filtreet lavéà deux
» ou trois reprises avec 40 ou 50 grammes d'éther à 65°.
» Quand la masse peutse détacher convenablement du filtre,
» on l'étalé sans pression sur des
plaques
de porcelaine dé-» gourdie, où elle achèvedesedessécherspontanément à l'air
» libre. La dessiccation est complète quand on ne
perçoitplhs
« l'odeur de l'éther. »
Quelques
jours après la publicationde M.Falières, M. Mon-cour faisait paraître un travail (Journal de Pharmacie etde Chimie, 1898, t. VII, p. 384) sur le
glycérophosphate
de qui¬nine, qu'il obtient de deux façons.
« 1° En neutralisant une solution titrée d'acide glycéro-
»
phosphorique
par une quantitééquivalente
dequinine;
» 2° en pratiquant la double
décomposition
entre deux solu-» tions, l'une de sel de quinine, l'autre de
glycérophosphate
» dechaux, solutions
employées
toutes deux en proportions» équivalentes. »
Nous avons préparé du
glycérophosphate
de quinine parces deux méthodeset nousn'avons à aucun moment obtenu
un aussi beau produit que celui donné par le procédé Faliè¬
res. Déplus, les lavages doivent être multipliés si on veut avoir un produit puret ils exposent à des pertes; enfin le
glycérophosphate
de quinine fourni par la seconde méthode est le plussouvent souilléd'impuretés
provenant du glycé¬rophosphate
de chaux-.— 11 —
Le sel basique
iso-lé
parMoncourcristalliserait, d'après cet
auteur, avecquatre
molécules d'eau
:A la fin de son travail, M. Moncour fait bien remarquer que
le glycérophosphate de quinine
a uneamertume beau¬
coup moins prononcéeque
celle
dusulfate de quinine,
cequ'il
estfacile de constater ensoumettant
cesdeux sels à
l'appréciation du goût de plusieurs personnes nonprévenues;
toutes constatent sans hésitation que le
glycérophosphate
estmoins amer que le
sulfate.
Essai du
glycérophosphate basique de quinine.
—Ce sel,
quand il est pur.et après dissolution dans
l'eau acidulée
par l'acide nitrique, ne doit pas précipiterpar :iu Le chlorure debaryum
(absence de sulfates)
; 2° L'azotate acide d'argent (absence dechlorures)
;3° Le nitromolybdate d'ammoniaque
à froid (absence
d'acide phosphorique etde
phosphates)
;4° Une portion de la solution nitrique
traitée
par unexcès d'ammoniaque
et filtrée ne doit pas précipiter parl'oxalate d'ammoniaque
(absence dechaux).
5° Quelques centigrammes
de glycérophosphate de quinine
calcinéau rouge avec quelques centigrammes
d'azotate de
potasse pur fournissent un précipitéjaune très abondant
avecle
nitromolybdate d'ammoniaque.
Dosage.
—On dissout àunedouce chaleur Ogr. 50 de glycéro¬
phosphate
dequinine dans25ou30gra m m esd'alcool bien
neu- treà50°; on ajoute 25 à 30 grammes d'eaudistillée
etquelques
gouttes de phtaléine(1/30). On
versedans la solution de la
potasse jusqu'à production
de la teinte
rosede la phta¬
léine. Le produit pur consomme
11 centimètres cubes de
KOH—et comme chaque
centimètre cube de solution -j—
correspond à 0,0086 d'acide glycéro-phosphorique et à 0,0324
O C3H702
OH, C20H24Az2O2 + 4
H20
OH, C20H24Az2O2— 12 -
de quinine, 1 gramme de glycérophosphate de quinine pur renfermedonc :
0,0086 X 11 X 2 = Ogr.
1892d'acideglycéro-phosphorique.
0,0324X 11 X 2 =0 gr. 7128 de quinine.
M. Moncour dose le glycérophosphate de quinine de la
façon
suivante : on porte à l'étuve à 100° un poids connu de sel ; la perte représente l'eau de cristallisation. Le sel est dis¬sous dans l'eau aiguisée d'acide
chlorhydrique,
puis la solu¬tion obtenue estadditionnée d'alcali qui précipite la quinine
que l'on pèse après lavage. La liqueur filtrée sert au dosage de l'acide glycéro-phosphorique; elle est concentrée, puisle
résidu est incinéré en présence de nitrataet de carbonate de potasse.
On reprend par l'eau, et dans la solution on dose l'acide phosphorique soit par Lucane, soit à
l'état
de pyrophosphatede magnésie. Le poids de l'acide
phosphorique
étant, connu, il est facile de calculer celui de l'acideglycéro-phospho¬
rique.
Propriétés physiques
etchimiques.
— Leglycérophosphate
de quinine basique cristallise en aiguilles fines, très blan¬
ches, soyeuses, légères, inaltérables à l'air. Il est soluble dans l'eau chaude et les acides faibles sans subiraucune
décomposition, contrairement à ce qui a lieu pour d'autres
glycérophosphates,
et en particulier pour le glycérophos¬phate de chaux ; c'est donc un composé très stable.
L'acide
glycéro-phosphorique
facilite égalementsa solution dans l'eau en le transformant englycérophosphate
neutre analogue au sulfate neutre de quinine. Insoluble dans l'étheret le chloroforme, sa teneur en quinine est de 72,64 0/0 et de 19,28 d'acide
glycéro-phosphorique (Moncour).
Une partie de
glycérophosphate
basique de quinineest
soluble dans 350 parties d'eau distillée à 15° et 26
parties
d'alcool absolu.
Nous auronsoccasion de comparer sa solubilité avec celle du sulfateet du
chlorhydrate
de quinine.CHAPITRE II
Expériences comparatives sur l'absorption et
l'élimination du
glycérophosphate basique de quinine.
Lesulfate dequinine,
disons-nous
audébut de cette étude,
présente
des inconvénients.
Nous avons pu
observer,
eneffet,
quedans bien des cas, particulièrement après
unusage prolongé, l'ingestion du
sulfatede quinine provoque une
irritation de l'intestin, sou¬
vent très tenace.
« Lesdoses supérieures
à 25 centigrammes doivent presque
» toujours être
fractionnées afin d'éviter d'abord l'irritation
» gastrique,
ensuite le quinisme exagéré pouvant acquérir
» les proportions
d'un véritable empoisonnement.
»(Gubler
et Labbé, Comm.
thérap. du Codex Medicam,
p.965.)
Les troubles gastriques se
manifestent de différentes façons,
suivantles
caset les sujets
: parla diarrhée ou la
constipation.
« Le sulfate de quinine peut
produire la diarrhée, mais il
» constipe d'autres
fois, et même d'une manière si remar-
» quable, que l'on a vu
des malades n'avoir
pasde selles
» pendant huit à dix
jours
sousl'influence de 2 grammes de
» sulfate dequinine par
jour.
»(Rabuteau, Thérapeutique et
»
Pharmacologie,
p.655.)
Cependant, dans
les
paysoù la lutte contre la fièvre est de chaque
jour,combien sont fréquents les
casoù les doses
habituelles sont de 1 à 2 grammes par jour
pendant des
périodes parfoisfort longues.
- 14 —
En outre, 011 sait que
l'usage
du sulfate dequinine s'ac¬compagne généralement de phénomènes
d'étourdissement,
de
céphalalgie,
de prostration, que certains tempéraments supportent difficilement. Lorsqu'ondépasse
la dosede 2 gram¬mes parjour, même à titre exceptionnel, ces troubles pren¬
nent une intensité qui leur donne, comme le dit
Gùbler,
les allures d'un empoisonnement.C'est ce qu'a décrit Favier, rapportantson observationper¬
sonnelle à Bogliar
(Algérie).
(Rabuteau,Thérapeutique
et Pharmacologie.)
« Du 16 au 19janvier, les doses étant de 1 gr. 60 par jour,
» j'éprouvais de la somnolence, du trouble ou plutôt du vide
» dans les idées, le bourdonnementd'oreilles devint tellement
» intense quej'arrivais presque à la surdité ;
l'appétit
avait» disparu, et
j'éprouvais
non pas de la faim, mais ce senti-» ment qui
indique
que nous avons des forces à réparer,» sentiment qui se manifeste par des tiraillement d'es-
» tomac.
» Puis dans les troisjours qui suivirent, les doses étant de
» 3 gr. 2 :
» Le sommeil, la solitude dans un lieu peu éclairé était
» tout ceque je cherchais, toutce queje demandais.
» J'étais sourd ; il me semblait que toutes les forces de
» l'économie m'avaient abandonné; j'avais des vertiges, il
» m'était impossible de marcher.
J'éprouvais
en un mot tous» les symptômes que détermine chez un individu bien por-
» tant un jeune trop prolongé. Le pouls était tellement petit
» que c'était à peine si je pouvais le sentir; il était tombé à
» 45 pulsations, quelquefois même il ne donnait pas40.
» Lorsque jecessai
l'emploi
du sulfate dequinine,
cessè-» rent aussi la plupart des phénomènes queje viens de rap-
» porter. L'appétit revint, la surdité, lé bourdonnement
» d'oreilles, le vide des idées
disparurent
au bout de trois» jours, le pouls reprit avec un peu plus de force son rythme
» ordinaire. Il n'y eut qu'une chose qui fut longue à revenir
» à son état naturel, les forces rpusculaires. »
— 15 —
Faut-il en conclure que le sulfate de quinine ne peut être administré qu'avec beaucoup de précautions et qu'il est des
tempéraments chez lesquels il
doive être proscrit ? Nous ne nous permettronspas d'aller aussi loin danscette voie; maisnous restons persuadéque l'emploi de doses élevées, sou¬
vent indiquées contre les manifestations de la fièvre, n'est pas sans danger.
Enfin les cas d'insuccès ne sont pas rares. La littérature de la médecine militaireou navale encite bien des exemples.
Notamment, au cours de
l'expédition
encore récente de Madagascar, on a pu constater que l'emploi du sulfate de quinine n'a pas toujours donné les résultats qu'on en attendait.D'ailleurs, la composition même du sulfate indique qu'il est à certain point de vue un médicament incomplet, ou, pour mieux dire, un médicament qui pourrait être plus complet,
sousun même poids ou volume.
Il contient, en effet, outre la quinine alcaloïde qui possède lespropriétés
spécifiques
connues, l'acide sulfurique qui leconstitue à l'étal de sel. Une fois introduit dans l'organisme il perd son caractèred'espèce saline, et l'acide sulfurique
disparaît
pourlaisser la place à l'action pure et simple de la quinine.Ce fait constaté nous ramène à la composition du
glycéro- phosphate
de quinine.Ce sel est une combinaison de l'alcaloïde avec l'acide
glycéro-phosphorique,
dont il renferme, avons-nous vu, 19 gr. 28 0/0.11 a donc surle sulfate*et le chlorhydrate toute la supé¬
riorité que lui donne son caractère de
glycérophosphate,
supériorité que rendent incontestable les travaux remar¬quables parus sur la matière et appuyés par les résultats d'uneexpérimentation de dix années.
Nous ne nous permettrons pas d'insister sur ce point, lé rôle de l'acide
glycéro-phosphorique
enthérapeutique
n'étantplus à démontrer; il nous aura suffi de signalercette
- 16 -
particularité pour
qu'on soit aisément persuadé des
avan¬tages résultant de l'association de
l'antithermique
et du toniqueneuro-musculaire.Avant d'exposer les
expériences comparatives
que nous avons faites sur nous-même au sujet del'absorption
et de l'élimination desglycérophosphate, sulfate
etchlorhydrate
de quinine, nous indiquerons
brièvement les propriétés
physiqueset chimiques desdeux derniers
sansrevenir
sur celles du glycérophosphatedéjà traitées dans le chapitre précédent.
Le sulfate
basique de quinine cristallise
enaiguilles bril¬
lantes ressemblant à celles des sulfates de sodium et de
magnésium. Il
sedissout dans 755 parties d'eau à 15°,
oumieux,
d'après
M.Barthe [Bulletin de la Soc. de Pharm. de
Bordeaux, 1893, p. 37), un litre
d'eau à 20° distillée dissout
1 gr. 744 de
sulfate
pur;il est également soluble dans
30 parties d'eau
bouillante, dans 60 parties d'alcool absolu et
dans 36 deglycérine.
Il
estinsoluble dans Téther et le chlo¬
roforme; quand on
l'évaporé à l'air il s'efiieurit et perd cinq
molécules d'eau de cristallisation, aussi faut-il le sécher
à
basse températurepour ne pas
l'altérer. Il contient 74.35 0/0
de quinine, il g. 24
d'acide sulfurique.
Le
chlorhydrate basique de quinine, beaucoup plus stable
que le sulfate,
cristallise
enlongs prismes brillants solubles
dans 23,73 parties d'eau
à 12° (J. Regnauld et Villejean)
dans 2 fois leur poids
d'eau bouillante, dans 2 fois leur poids
d'alcool et dans 2 fois leur poids de
chloroforme. Il cristal¬
lise avec 4 molécules d'eau etrenferme 81,71 0/0 de
quinine
et 9,21 d'acide
chlorhydrique.
Résumant les propriétés
respectives de chacun des trois
sels de quinine au
point de.vue de leur solubilité dans l'eau
et de leur constitution chimique, nous voyons que
le glycéro¬
phosphate est
moins soluble
quele chlorhydrate et deux
fois plus
soluble
quele sulfate;
sacomposition est plus
rationnelle, il renferme 72,64 de
quinine et 19,28 d'acide
glycéro-phosphorique, qui,
aulieu de disparaître comme les
— 17 -
acides sulfurique et
chlorhydrique, apporte
sonaction spéciale régénératrice de la cellule
nerveuse.Cet acide glyeéro-phospliorique n'est
pascaustique, il
nepossède à
aucun degré les
propriétés corrosives des acides minéraux, il
nedoit doncpas
influencer
la muqueusestomacale.
Lessels de
quinine
sontsolubilisés dans l'estomac qui les
absorbe presque en
entier, les matières fécales
encontien¬
nentà peine.
«Kerner avait admis quela quinine se
transformait dans
»le sang en
dihydroxylquinine, mais Guyochin (Thèse de
»Paris 1872. — Guyochin.
Action 'physiologique de la quinine
»dans
l'économie,)
a reconnu quela quinine réactionnée
par»ce sang ne produit pas ce corps, qui est
d'ailleurs inerte,
»mais se change seulement en quinidine. »
(Fonssagrives.)
Personne admet que la quinine
s'élimine
en nature sans subir de transformation.Quoi qu'il en soit, la quinine
absorbée
accuse sa présencedans l'urine une heure environ
après
avoir été ingérée, eton constate par l'action de Piodure double de potassium etde
mercure(réactif de
Mayer)
quel'élimination
est au summum six heures après l'ingestion de cette substance et peutdurer
encore pendant trois jours.
Pour déterminer la quantité de quinine
éliminée
nousavons procédé à des dosages rigoureux de cetalcaloïde dans l'urine après l'ingestion de glycérophosphate, sulfate et
chlorhydrate
basique de quinine. Pourcela
nous avons em¬ployé la méthode de M. Byas'son, qui consiste
à
précipiterla
quinine par Piodure double de potassium et de mercure; leprécipité
mixte est additionné de soude caustique; on agite alorslemélange avecduchloroforme
quidissout l'alcaloïde;
lasolution chloroformique est évaporée
à
basse tempéra¬ture; le résidu est dissous dans l'acide chlorhydrique dilué,
et cette dernière liqueur est
à
son tour traitée parde l'am¬
moniaque
jusqu'à
réactionalcaline.
Laquinine ainsi préci¬
pitée, jetée sur filtreetlavéeavecde Peau distilléeest ensuite desséchée à l'étuve: 100 — 105°, et enfinon
pèse.
D.
'
gPremière Expérience
Absorption du glycérophosphate de quinine.
Nous avons pris 2 grammes de
glycérophosphate
de qui¬nine en deuxjours, soit deux cachets par jour, de 50 centi¬
grammeschacun.
Environ une heure après
l'ingestion
de la première dose,- l'urine recueillie accusait nettement laprésence de la quinineau réactif de Mayer. Toutes les urines ont été recueillies
avec soin et placées dans des
flacons
séparés. A la fin de chaque journée nous réduisions leur volume par évapora- tion au bain-marie; nous précipitions la quinine par un excès de réactif de Mayer et ajoutions quelques gouttes de solution de thymol au ——lUuU pour prévenir toute altération.Dans la soirée du cinquième jour, l'absence de quinine
dans les urines était constatée.
Les précipités quiniques fournis par l'urine de chaque jour, traitéspar la soude caustique en présence du chloro¬
forme, nous ont donné les résultats suivants, résumés dans le tableau ci-joint :
Volume
DES URINES
des 24 heures
en c.cubes.
GLYCÉROPHOSPHATE dequinine
ingéré journellement.
QUININE éliminée journellement.
QUININE éliminée dans les5jours.
1erjour.. 1.350 1 gramme. 0.092 2e jour.. 1,150 1 gramme. 0.153
3e jour.. 1,220 0 0,146 0gr. 580
4e jour.. 1,430 0 0,115
5e jour.. 1.380 0 0.08
Reprenant notre expérience quelques jours plus
tard
en procédant suivant la même méthode, nous avonsconstaté
— 19 —
l'apparition de la quinine dans
nosurines après moins de
uneheure et sa
disparition à la fin du cinquième jour.
Opérant cette fois
surle précipité total formé
parl'urine
des cinq
jours,
nous avonsrecueilli après évaporation du
chloroforme 0,598 de quinine pure. La
concordance des deux
chiffres totaux 0,586 et 0,598 trouvés
dans deux opérations
différentes nous a
permis de
supposer que nousavions
observé toutes les précautions
susceptibles de
nousfournir
des indications rigoureuses. En prenant
0,59 centigrammes
dequinine pure
extraite de l'urine des cinq jours et
conver¬tissant cette proportion en
glycérophosphate de quinine, il vient1110 X
— o,8L centigrammes.72,bb .
Nous posons en
principe
que surles S
grammesde glycé¬
rophosphate de quinine
ingérés
par nous,il
enest passé dans
le sang 0,81 centigrammes,
soit très approximativement
400/0de glycérophosphate
de quinine absorbé.
Remarque.
—Pendantla durée de l'expérience,
nous avons observé que leglycérophosphate de quinine était très bien
toléré par notre estomac;
à
aucun moment nousn'avons
remarqué ni nausées, nitrouble de l'ouïe; l'appétit est resté
bon, toutou plus avons-nous
constaté
unelégère amertume
dans la bouche pendant
les premiers jours.
Deuxième Expérience
Absorption
du sulfate de quinine.
Nous avons pris 2grammes
de sulfate de quinine
endeux
jours,soit deuxcachets parjour de 50 centigrammes.
A la fin du cinquième
jour, les urines éliminées
nepréci¬
pitaient plus par le
réactif de Mayer.
Pendant la durée de
l'expérimentation, qui
aduré cinq
jours, nousavons recueilli dans unbocal de
verreles urines
enayant soin d'y ajouter
quelques gouttes de solution de
thymol à
1(|||() pour prévenir leur décomposition.
Ces urines
évaporées
ontété traitées
parl'iodure double
de potassium et de mercure,
le précipité formé
aété repris
— 20 -
par la soude caustique etle chloroforme pour dissoudre la quinine pure, que nous avons trouvpe
égale
à 38 centi¬grammes.
Si nous convertissons cette quinine en sulfate basique:
-1Q°74 3i'38 ^ sulfate de quinine basique, nous voyons que
surles 2 grammes de sulfate de quinine ingéré le quartseu¬
lement, soit 25
0/0,
a étéabsorbé.
Remarque.
—- Pendant la duréede
cettedernière
expé¬rience, nous avons éprouvé de légers bourdonnements d'oreilles, l'appétit n'a pas été modifié, pas d'amertume de la bouchecomme nous en avons remarqué après l'absorp¬
tion duglycérophosphate de quinine.
»
*
Troisième Expérience
Absorption du chlorhydrate de quinine.
. Nous avons absorbé 2 grammes de chlorhydrate de qui¬
nine en deux jours et par cachets de 50 centigrammes,
comme nousl'avons fait la semaine précédente pourle sul¬
fate de quinine.
Une heure après la première prisede chlorhydrate de
qui¬
nine les urines précipitaient abondamment par le
réactif de
Maver, mais le matin du
quatrième
jour elles neprécipi¬
taientplus du tout; donc toute la quinine avait été éliminée, malgré cela nous avons conservé les urines des cinqjours
enprenant les précautions habituelles pour en prévenir
la décomposition.
Le dosage de la quinine effectuépar le procédé déjà
décrit
nous donne le résultat suivant :
Quinine pure — 64 centigrammes,
qui, transformée en chlorhydrate = 71 centigrammes, pro¬
portion sensiblementégale à celle que nous avons trouvée
pour le glycérophosphate de quinine.
Remarque.
—Nous avons éprouvé une fatigue extrêmede
l'estomac pendant les deux premiers jours de cette
expé-
BHHi
siipàs
3:'■:■
- ■ '
I
- 21 -
rience,
avec-bourdonnements d'oreilles, saliva tiorï abondante
etamère,
constipation qui
apersisté pendant quatre jours.
Résumé
comparatif des expériences précédentes.
Le
glycérophosphate de quinine a été mieux toléré par
notre estomac que le
sulfate de quinine, et surtout que le
chlorhydrate
de quinine.
Lesulfate de
quinine, moins soluble que le glycérophos¬
phate
de quinine, s'absorbe aussi plus difficilement, bien que
la teneur en quinine
de
cesdeux sels soit à peu près identi¬
que.
Absorption
du sulfate de quinine 25 0/0
Absorption
du glycérophosphate 40 0/0
Quant au
chlorydrate de quinine, il est de beaucoup le plus
soluble des trois; sa teneuren
quinine est également plus
forte; malgré
cela,
nousn'en trouvons pas dans l'urine une
proportion
beaucoup plus élevée qu'après l'ingestion de gly¬
cérophosphate de quinine (64 centigrammes dans le premier
cas,59 centigrammes
dans le second cas). Nous* avons toute
raison de croire
qu'il s'en élimine autant par la salive que
par l'urine, vu
la salivation abondante et l'amertume cons¬
tatée pendant
les premiers jours de l'ingestion de ce sel.
L'élimination du
chlorhydrate de quinine est également
beaucoup plus
rapide
quecelle du glycérophosphate de qui¬
nine, cequi estun
avantage dans certains cas quand on veut
agir
promptement; mais si l'on désire donner la quinine à
dose préventive ou
tonique, il y a intérêt à ce que le sang
reste imprégné
le plus longtemps possible de quinine qui,
outre ses
propriétés antithermiques connues, possède celle
de fixer plus
intimement l'oxygène à l'hémoglobine des glo¬
bules rouges
(Hayemj.
Absorption
par voie rectale duglycérophosphate
de quinine.Ce mode
d'absorption
sifréquemment employé
dans la médecine infantile quand il s'agit de faire pénétrer dans l'économie les alcaloïdesde l'opium (lavement de laudanum, suppositoires dechlorhydrate
demorphine)
l'est fort peu quand il s'agitdes alcaloïdes duquinquina. La sécrétion rec¬tale est alcaline et les sels de quinine ne sont solubles que dans les milieux acides, ce qui fait qu'on hésite avant de prescrire un lavement, ou un suppositoire de sulfate de qui¬
nine additionné d'acide
sulfurique
ou d'acidechlorhydrique
qui ont des propriétés corrosives manifestes.Cette objection n'est pas applicable au
glycérophosphate.
de quinine solubilisé par quelquesgouttes d'acide glycéro-
phosphorique;
celui-ci, en effet, acide par sa fonction chimi¬que, n'est nullement caustique pour les muqueuses en
général, ce qui nous a conduit à préparer des suppositoires
répondant
à la formule suivante:Glycérophosphate
de quinine *0 gr. 50 centigr.Acide
glycéro-phosphorique
II gouttes.Beurre de cacao 4 grammes.
Nous avonsexpérimentéces suppositoires sur nous-même de la
façon
suivante : En pleine santé, les urines parfaite¬mentnormales,'nous avons introduit dans le rectum, matin et soir, pendant deuxjours, un suppositoire de
glycérophos¬
phate de quinine de 50 centigrammes, l'intestin avait été au
préalableévacué par un lavement d'eau bouillie tiède.
L'urine a été recueillie avec soin pendant cinq jours avec les précautions
indiquées
dans les expériences précédentes.Une heure après l'introduction du premier suppositoire
nous avons remarqué quela salive était devenue légèrement
amère, l'urine
précipitait
franchement par le réactif de Mayer.Lematin du
quatrième jour, l'urine n'accusait plus la pré¬
sencede la
quinine, dont tout l'alcaloïde était éliminé.
Laméthode de
dosage déjà décrite nous a permis de retirer
de l'urine
totale des cinq jours 82 centigrammes de quinine
pure
correspondant à 1 gr. 15 de glycérophosphate basique.
Dans ces
conditions, l'absorption rectale est une fois et
demi plus
grande
quel'absorption par voie stomacale.
Nous voyons
donc
quele glycérophosphate de quinine,
administré sous forme
de suppositoire, est appelé à rendre
de
grands services quand l'administration de la quinine par
lavoie stomacale est
rendue difficile chez les enfants par
exemple, ou
dans des
casde vomissements incoercibles.
CHAPITRE III
Observations médicales.
Le
glycérophosphate de quinine est
encorepeu connu
comme agent
thérapeutique, aussi
avons-nous euquelque
difficulté à nous procurer des
observations médicales à
l'appui denos
expériences personnelles.
MM. les Drs Durand et Mongour,
médecins des Hôpitaux,
emploient leglycérophosphate de quinine d'une façon suivie
dans leurservice de l'hôpital
Saint-André; ils ont
eul'ex¬
trêmeobligeance de nous
fournir quatre observations prises
avecle plus
grand soin et quotidiennement
aulit du malade,
nous les prions de
vouloir bien agréer
nossincères remer¬
ciements, car ils ont
singulièrement facilité notre travail
en lecomplétant.
Nous ne saurions oublier M. Rentes, interne du
service,
qui s'est misà
notreentière disposition
avecune bienveil¬
lance dont nous lui sommes reconnaissant.
M. le Dr Lowitz, médecin des
colonies, rentré
enFrance
malade de retour du Soudan, a bien voulu, sur nos
conseils,
user du
glycérophosphate de quinine
auxlieu et place du
sulfate qu'il
prenait journellement;
nousavons relaté fidè¬
lement l'observation
qu'il
abien voulu
nousdonner.
M. le Dr Lauga, chirurgien
de l'hôpital Saint-Jean, a employé
avecsuccès le glycérophosphate de quinine en
suppositoires; nous sommes
heureux de reproduire ses
observations et le
prions d'agréer
nossincères remercie¬
ments.
26 -
Observation I
(Dueà l'obligeance de MM les Dfs Durandet Mongour.)
Louis R..., âgé dequarante-six ans, exerce la profession de tailleur d'habits, entré à l'hôpitalSaint-Andréle 13 avril 1899, salle 12, lit 25.
Antécédents héréditaires. — Père mort alcoolique dans un asile d'aliénés à l'âge de soixante-quatorze ans, mère morte diabétique à soixante-six ans, frères etsœurs se portent bien.
Antécédentspersonnels. —- Maladifjusqu'à l'âge de septans, nirou¬
geole. ni scarlatine, a eu lasyphilis il y adeux ans, à Buenos-Ayres. et antérieurement quatre ou cinq blennorragies.
Histoire de lamaladie. — Appelé par le service militaire dans l'in¬
fanteriede marine, il acontracté desfièvres intermittentes à Rochefort avant tout voyage auxcolonies. Après un traitementde cinq mois par lesulfate de quinine, il va en Nouvelle-Calédonieoù ilreste deuxans et demi sans avoird'accès de fièvre. Rentré du servicemilitaire, ilséjourne
tantôt àBordeaux, tantôt à Toulouse; en 1889, il va dans l'Améri¬
que du Sud,il restequatre ans au Chili, dix-huit mois dans la Répu¬
bliqueArgentine; en 1895. il part pour Madagascar. Après un séjour d'un mois à Tamatave sans avoird'accès bien quele climaty soit mal¬
sain. il se rend, à Tananarive à pied dans la brousse. Pendant ce voyage, le malade prenait journellement de petites doses de sulfate de quinine; néanmoins, deuxou trois heures avantson arrivée à Tanana¬
rive, vers cinq heures du soir, ila eu unpremier accès de fièvre qui a duré trois heures, présentant les stades classiques, frissons, chaleurs,
sueurs. Pendant huitjours les accès se sontrépétés journellement vers le soir, précédés de diarrhée, vomissements sansictère, ni hématémèse ; le malade neprenait pas de quinine. Rentré àl'hôpital, ilen sort dix jours aprèsincomplètement guéri. Pendantenviron un mois et demi il
a continué à avoir des accèsirréguliers tous les trois, quatre ou cinq jours, la diarrhée persistait, puis les accès ont complètement disparu.
Rentréen France en avril 1898. le maladea eu quelques accès qui ont disparu sous l'influence du sulfate de quinine, mais depuis le
mois
d octobre ils sont revenus irrégulièrement d'abord tous les deux,
— 27 —
trois etcinqjours pour
prendre le type quotidien depuis environ quinze
jours,
et cela malgré le traitement au sulfate de quinine.
Etatactuel. —Le malade
amaigri, anémié,
a unteint terreux, il n'a
plusde
force, ni de volonté, il n'est plus que l'ombre de lui-même, son
ventre estun peu
ballonné, il
accuse unelégère douleur à la pression
dansla fosse iliaque
droite
;sonfoie, considérablement augmenté de
volume, n'estpas
douloureux,
sarate est hypertrophiée.
L'épreuve
de la glycosurie alimentaire a donné un résultat négatif.
Lelendemain dujour deson
entrée dans le service de M. le Dr Durand,
le 14 avril 1899,"lemaladeaun
premier accès le soir
verscinq heures,
lethermomètre monteà 38°6; le
lendemain, 15.avril, à 38°8.
Le 16avril ilprend 50
centigrammes de glycérophosphate de qui¬
nine; satempérature est
restée normale.
Apartir dece
jour, le malade
apris journellement 50 centigram¬
mesde
glycérophosphate de quinine, la température est restée normale,
sauf lejour où on luia
fait
uneinjection de Sirot, le 22 avril. Il est
sortiguéri le4
mai (voir courbe 1).
Observation II
(Due àl'obligeancede
MM. les D1S Durand et Mongour.)
A. L..., ajusteur,
âgé de quarante-trois ans, entré le 13 janvier 1899,
salle 12, lit38.
Antécédents héréditaires. — Père mort à
quarante-deux
ans,de
maladie inconnue. Mèrevivante etbien portante.
Un frère mort à qua¬
rante-deux ans ettroissœursbien portantes.
Antécédents personnels. —
N'a jamais été malade, sauf quelques
maladiessans importance;
reconnaît avoir fait des excès d'alcool.
Histoire de la maladie. — Depuis
di*x
ansle malade faisait les
voyagesde Bordeaux au
Sénégal; il lui est arrivé souvent de remonter
lefleuve. Enseptembre
dernier il est allé jusqu'à Kayes. A son retour
à Saint-Louis il a eu deux légers accès
de fièvre auxquels il
nefit pas
attention; pendant la
traversée de
cedernier port à Bordeaux il n'a pas
étémalade. Arrivé à Pauillac, le l01' octobre
1888, le malade
a eu unaccès extrêmement violentdansl'après-midi;
pendant quinze jours les
— 28 -
accès serenouvellent tous les jours après-midi, à une heure variable,
mais plus particulièrementvers cinq ou six heures; le malade prenait journellement50 centigrammes de sulfate de quinine. Lesjours suivants
les accèssesuccèdentirrégulièrement tousles deux, quatreetcinq jours,
avec une intensité variable au point que certains jours le malade n'éprouvequ'un léger malaise représentant l'ébauche d'accès.
Etal actuel. — Lemalade paraît considérablement amaigri, il était
trèsvigoureux, actuellement on sent àpeine la pression de sa main. Il présente une teintesubictérique, sa langue estrosée et humide,l'appétit
est conservé en dehors des accès, il n'a ni diarrhée ni constipation, les selles sont normales. Le foie, hypertrophié,estdouloureuxà lapression
au niveau de la portion qui déborde les faussescôtes. La rate,également hypertrophiée,est sensible quand le malade fait un effort pour tousser
ou pour se remuer dansson lit.
Lesurines,fortementcoloréesen rougebrun,laissent déposerun abon¬
dantprécipité d'urates, la réaction de (tmelin est caractéristique avec
ses urines; pas d'albumine. L'épreuve de la glycosurie alimentaire a donné les résultats suivants :
Le malade absorbe 200 grammes de sirop de sucre à cinq heures du
matin ; les urinesrecueillies à six heures etdemie ne réduisent pasla liqueur de Fehling; cellesde huit heures la réduisent; celles de dix heu¬
res. dosées, accusent moins de 1 gramme de sucre par litre.
Le 1? janvier, le malade a eu un accès bien
caractérisé, le stade de
frisson aduré une heure et demie, l'ensemble de l'accès a duré cinqou six heures, température 30°0.
Le 18, il n'apas
d'accès.
Le 10. le maladeest misaurégime lacté; il prend 50 centigrammes de glycérophosphate dequinine en un cachet. Depuis cejour il n'a plus eu d accès de fièvre {voie les courbes 2 et3). à peine tin frisson ébauché
au momentoù devait venir l'accès dans certains cas.
Le 22février, le glycérophosphatede quinine aété supprimé etrem¬
placé par de la poudre de quinquina.
Le 15 mars, le malade sort de l'hôpital, son état s'était considérable¬
ment amélioré, il n'avaitplus d'accès de fièvre, il pesait 58 lui. 500,ses forces étaientrevenues.