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FIGURINES
•e^if-^
EDOUARD CHAUVIN
«9jFIGURINES
— gazettes rimées
PREMIER MII.I-B
IMPRIMÉ AU DEVOIR MONTRÉAL
191S
PS
A
LIMINAIRE
:\
Liminaire
Cesvers sont du quartierlatin
Et
d'un poète Qui préfère le ton badinA
l'ode sombre et désuète.•Tp n'ai pas eu pourprofesseur
Un
ps3'chologue:Les grandsanalystes
du cœur
Ont
peu de vogue.10 FIGURINES
On
souffre assezdu
mal, hélas!Qui nous arrive,
Sans qu'un romantique, au
cœur
la»,En un
sonnet nousledécrive.D'ailleurs, de voir gémir
ks
gens Souventennuie:Trop
ont les airs décourageantsDes
jours de pluie.Je haisles pleurs in-octavo.
Vivela joie!
Que
ton œil rie, queton cerveau,Comme un
brasier ardent, flamboie!I
QUARTIER LATIN
Aux
BacheliersSalut! doctes collégiens,
Gavés
des beautés de la Grèce, Cicéronicns, Virgiliens,Amants
d'Horace et de Lucrèce.Au
diable les IMarais PontinsEt
lecombat
des Thermopj'les!Vivele grand Quartier Latin,
Rêve
de vosdortoirs tranquilles!14 FIGURINES
Parés
du
titre de B.A.,Vous
maudirez levieil Ovide;Vous
laisserez, d'un œil béat, Fuir Iphigénie en Tauride.Vous
oublierez Amaryllis Et les abeilles de l'IIymette, Pour dévorer desyeux PhyllisQui
met du
rouge à ses pommettes.C'est ça, vieux carabin d'un jour, Souffre que l'araignée agile
De
sa toile fasseletourDu
crâneénorme
de Virgile,Enterre Cicéron phraseur
Au
fond d'unevieille valise,Pour courir chez le confiseur Croquer
du
sucre avec Denise.AUX BACHELIERS
15Admire
son chapeau menu,Tout
en buvant une anisette;Souris par dessuston
menu A
ses jolisyeux do grisette.Ne
mêle pas l'amour de l'ArtAvec
lecauchemardu Code
:Pour
digérer ta fèveau lardÇa
te seraittrèsincommode.Garde
ton idéal bien netComme
ton plastron de chemise;Et
garde aussi dans ton carnetLe
portrait de quelque Arthémise.Afin que, serein sous les cieux,
Tu
puisses avoir dela femme,Comme
unelumière, sesyeux Et,comme
talisman, son âme.16 FIGURINES
Faii- ton devoir de chaque jour, Auréolé dansta besogne Par
un
rayon de son amour:C'est
mieux
que le meilleur bourgogne!Rondel
àRogerMaillet
Chapeau
blanc et boutons dorés, Ventre rondcomme
une galère,Bâton
ferme et cerveau timbi-c:C'est la force constabulaire!
Roi
du
« nolime
tangere»,Intelligence musculaire,
Chapeau
blanc et boutons dorés, Ventre rondcomme
une galère,18 FIGURINES
Semblableà l'Hercule sacré,
Devant
nos corpsmoléculaires, Passe, de bêtise bourré,Dans
lavoiture cellulaire,Chapeau
blanc etboutons doré».A
laBasoche
Auxétudiantsdemontemps.
Laisse-moi te chanter,
amante De
l'Art,du Code
etdu
Scalpel,De
tous nos cerveaux en tourmenteLe
sûr et tranquille archipel.O
promontoiredu
franc verbe,Nouveau
jardin d'Academus,De ma
prime jeunesse enherbe Entends les pieux oremus!20 FIGURINES
Que
j'ai passé de belles heuresA me
sentir jeune et vantard, Suivantlescours « sansfeunifourre »Où
j'étais toujoursen retard!les coursdans le froid matin!
Les uns Ixîillent, les autresdorment, Sachant devoir être demain
De
savants avocats. .. sousl'orme.O
les cours où, l'air ennuyé,Le
professeur lit et défricheLe Code
vagueet embrouillé Qui fait payer le client riche.Un
basochien qui vient d'Oka Et sent mauvais—
c'estsynonyme
!Frise, avec des aii-s délicats,
Un
brin demoustache minime.A
LA BASOCHE
21Sapiente université!
—
Soit dit sans repcntance,—
C'est dans tonsein que j'ai tété
Le
lait de lajurisprudence.Sonnet
bachiqueàRoland Maillit
Ton
rire ensoleillé de notes Estaussi bruyant qu'unbarnum, Et
tes petits yeux de cocotteMe
soûlent plus que ce vieux rhum.Ton
bec sucré queje bécotte Estun
bouquet de géraniums.Ton
minoism'emberlificote, Tes seins fanés fleurent l'opium.24 FIGURINES
J'accours... mais lu t'enfuis, frivole!
Mon
front de douleur virevoleEt
se cogne surun
poteau.Je vois tournerle réverbère.
Je flirte avec la lune, en-haut,
Dont
le gros ventre s'exubère.Soliloque
Matinal
à Léopold HouLÉ
Ce
matin,jeme
couche avecun
airfurieux.J'arrive chiffonné d'un bal cérémonieux
Où
les fleurssevendaient les deux yeux dela tête ;Où
j'ai dansé des waltzs, des fox-trots de tempête,Où
lesviergesmontraientle hautseuldeleursseins, Afin de nous donner de fort troublants desseins ;Où
jem'ingurgitai defroides limonadesEt
d'oùjereviensseul, latêteenmarmelade,Avec un
plastron flasque,un
faux-coltout mouillé,]\Ion gousset au passif,
mon
bilan embrouillé...
26 riGURixES
Pendant un
mois, grand Dieu! j'engouffrerai des [fèvesPour
avoir,un
beausoir, voulu desfilles (UËveLe
troublant deleursseins, la flannnede leursyeuxEt
pour avoirhumé
leparfum
des cheveux...
Me
voilàde retour enfin de ce grandmonde Où
les blasésvousont des gueules de Joconde!...
Mes
piedsserrésfontmal
dansces souliers vernis...
Eh
bien ! j'en ai soupe ! X. I. ni c'est fini !Adieu fleurs et parfums, plastrons blancs et coi'sa- [gcs!
J'ai trompéle
bohème
et roturier usageDe manger mon
pain sec et de faire des vers:Car
la danse embourgeoise et nousmet
à l'envers.Rêvasseurde
poème
etamant
dela Muse,J'ai trahi
ma
maîtresse avec d'autres méduses...Pour comble de bêtise, en allant
me
coucher, J'ai complété la gaffe en payantun
cocher!lespassés
.
. .
O
les passés perclus des vieux quartiers latins !Fumistes à deux sou.s, échevelés, folâtres,
Allcz-vous-en les bons amis des jours lointains,
Des
béretsde velours et des pipes de plâtre!Le siècle du veau d'or forge des philistins,
La
femme, les cafés, les cartes, le théâtre<)nt remplacé les soirs d'étude et les matins
Des
bérets de velours et des pipes de plâtre!28 FIGURINES
Adieu Philippe. Ubald, Roger, Jean, Paul, Victor,
Et
toi, Marcel, vieux frère,aust3'le et aucœur
d'or.Amants
desbérets noirs etdes pipesde plâtre!O
les passés perdus des vieux quartiers latins,Des
bérets de velourset des pipes deplâtre. . .Allez-vous-en les vieux, les vieux passés lointain!
!
II
A
«L'ARCHE
»«Nousreverronsle triste temps,
«Qu'onraclaitdesairsdo bohêm(r
«Etrêvions demansardesblêmes.
»
HenryBataille.
Le Bohême
AUbaldPaquin
Il a la face toujours blême,
Mais
ilest très gras en poèmes.Son pantalonest déchire
Et
ses deux coudestonsurés.Son chapeau lui sert de toiture;
Son
lit estun
lieu de torture.32 FIGURINES
Il s'appeîle roger-bon-temps, Gousset à plat et
cœur
content.Son grenier i<ale est
un
Parnasse Plein de bouquins, de paperasses.Il aimeBacchus etl'amour
Et
tourne bien le calembour.Poui' lui, vouloir payer ses délies Estla bêtise la plus bête.
Son cœur
est souvent en lambeaux.Mais
il guéritquand
il fait beau.Sa bourseestune « île escarpée »
Où
l'orestun
conte de fée.Pensant à rien et
mangeant
peu,Il vit et meurt.. . bah!...
comme
ilpeut.fai
rêvé d'elleAPhilippePanneton
Dans mon
grenier auxmurs
gercés,A
la chandelle,Avec
desmots
tristes, lassés, Je parle d'Elle.Le
froidmonte
parl'escalier.Parla fenêtre.. .
On
diraitun
bruit de soulier:C'est vous, peut-être?
34 FIGURINES
Oh! oui, que tu es bonne, toi,
D'être venue. . .
Tu
ne trouves pas qu'il fait froid.Tes mainssont nues.
Viens! là, je vais te réchauffer.
Que
tues belleCe
soir!.. . Tiens, tu t'es fait coiffer.Quelle nouvelle?
Non. Ne
parle pas. Situ veux Oublions l'heure.Mon
frontseperddanstescheveux.Comment
! tu pleures?Je baiseraijusqu'à
demain
Tes yeux candides. ..
Mais
quoi, jene sens plus ta main!....
Ma chambre
est vide.j'ai
rêvé
d'elle 35Dans mon
grenier auxrniirs gercés,A
la chandelle,En
un songe triste, lassé, J'ai rêvé d'Elle.La
tribu des casoarsdédiéaux bonsziguesde"l'Arche'
Ce
soir, loin de l'été brûlant, Assisauprèsdelafournaise Quime
donneun
refletsanglant, Je songe à la saison mauvaise,Et mon cœur
estun
gueuxtremblant.Lo
(( Cerbère» et VaHomo
» s'entêtentA
défricherle jeu des rois,— Le
jeu d'échecs—
. ]Moi, ça m'embête.Par cestempsde guerre on en voit,
Par malheur, trop de ces sornettes!
38 FIGURINES
La
lune argentéleschromos Clouésàlamuraillel:)lanche.,J'écris, currentecalamo,
Des
tasde vers en avalancheQue
jedébitemot
àmot.La
molle chandelle s'écrase;La
cire pend au chandelierComme
des glaçonsdu
Caucase.Le
vent grimpe parl'escalier,Mais
jeme
f... de son ukase.Ses doigts sautillant sur les trous,
Le
« Sphinx » joueun
air sur safliite.Jescande
mes
versen courroux;Mais, bang! une chaise culbute:
Zut!je metsla
Muse
à l'écrou.Le
pouls del'horloge est pluslent: L'heure doit allonger sa marche.L'(( Hiérophante» est là, ronflant Sur le meilleur grabat de r« Arche ».
LA
TRIBU DESCASOARS
39Et
cela se passait en l'an.Note:Lelecteurremarquera, aveceffroi!,lesnomsbaroques autant que mystérieux qui se sont glissés dans cette pièce.
Ceux qui n'ont pas eu le bonheur d'assister à ces galas de r«Arche»,devivifiante mémoire, seront peut-être heureux de savoir que chaque membre de la «Tribu desCasoars«,
—
société littéraire non moins qu'artistique—
est affublé, lorsde soninitiationdans!'«Arche»,d'unpseudonyme sym-bolique. Il seraitpeut-être bon, aupointdevuehistorique, delivrer aupubliclesnoms des Casoars,aucasoùcetterace tendrait à disparaître! Ce sont donc: le «Tsé-tsé humani- taire», la «Fourmisavante», !'«Hiérophanteessentiel», le
«Vibrion sceptique»,le «Trombone galUnacé», r«
Homo
cavernarum», le «Sphinxd'Halifax», le «Cerbèrethésauri- seur», le «Diamant natatoire», le «Xiphias édenté» et r«Icare illuné».
Chanson
desBohèmes
àHonoré Parent
On
nousappelle gens de rien, Toqués, blasés etgrands vauriens.Mais
nous N-ivonsheureuxquand même,
A
laBohême.
Nous sommes
pauvres enargent,Mais
noussommes
intelligents !Pom-
nousl'Art sert de diadème,A
laBohême.
42 FIGURINES
« L'Arche » estlelieu de nos amours, Pour nous, c'est notre
Luxembourg,
C'est le parrain de nos poèmes,
A
laBohême.
Nos
jours sont, desfois, pasmal
gris.Mais
on fait des charivaris Pour éclairer notre front blême,A
laBohême.
On
suitle jeûne avec ardeur;Par chance on rencontre
un
noceur.Mais
d'ordinaire on fait carême,A
laBohême.
Quand
on est cassécomme un
clou,Sans gêne, on
emprunte
cent sous C'esttoujours le meilleur sj'stème,A
laBohême.
CHANSON
DESBOHÈMES
43Parfois ontâte de l'amour,
On
apprend le truc desmamours;
Mais
on neva
pas à l'extrême !A
laBohême.
D'habitude, ça n'est paslong, Alor?, adieu! les cheveux blonds Et les parfums de chrj'santhème,
A
laBohême.
Muni printemps
AMlleMimiD.
Le
Printemps, en gogiietto, est entré ce matinDans
(( l'Arche » réveillée à son rire de fille.Ses blondscheveux auventetson
cœur
qui babille,La
voicima
saison, en robe de satin!Au
diable les soirs gris demon
grenier latinBourré de vieuxbouquins et poudreux deguenilles!
Je mêle
ma
chanson aux oiseaux des charinilles, Je m'emplib le regard de lilas et de thym.46 FIGURINES
Tends-moi par lafenêtre ouverte, hospitalière, Teslèvresde
parfum
ettoncou de lumièreEt
défais ton corsage aux baisersdu
Zéphir.Embaume mon
taudis de chants, de pâquerettes;A
ton vieil amoureux, viens-t'en conter fleurette Et remplis-moi les yeuxde tesyeuxde saphir.En
entendantun graphophone
àMlleAlineG.
Ce
soir,un
grinçant graphophone Joueun
aircru de hipanar,Chez
les voisins.Ça me
chiffonne D'entendre ce disque traînard.Transperçant,
quand même, ma chambre Et
transperçantmon cœur
aussi,Cette voix détonne, se canil)re, S'égoiiillcà donner le si.
48 FIGURINES
Et moi
qui voulais,ma
chérie,Pendant
cette nuit, te chanterUn
tas de foHchonneries,—
Histoire dete taquiner—
J'allais te dire combien douce Estlamusiciue de tavoix,
Comme un
ruisseau surde la mousseOu comme un
baiser, quelquefois!J'allais te dire qu'en sourdine
Mon cœur accompagne
toujoursTon
petitcœur
qui se dandine Entre la pudeuret l'amour.J'allais te dire quejerêve
Au
froufroude ton blanc juponQui fait « crich-crich »,
quand
le soulèveLe
vent d'automne polisson.EX ENTENDANT UN
GIIAPHOPIIONE 49J'allai& te dire.. . oh!tant de chofees
Qui bouillent dans
mon
lourd cojvpnu;j\Iais ce graphophone qui glose Et braille connue un jeune veau
Éteint en moi la sérénade
Que
je voulais t'expédier Et, lecœur
pesantet malade, Je regagnemon
vieuxgrenier.III
FIGURINES DU PAVE
LAdo7îis
kM.EdouardMomtpbtit
On
le connaît par pas grand'chose:Ila surlui tousses tiroirs
Et
il parfume à l'eau-cle-roseSes gants couleur d'œuf «au-miroir ».
II porte des cravates ((
Tooke
>>Et
des chemises de chez << Peck )).Il
fume
dansune chibouque, Pourfaire le snob turc avec.FIGURINES
Il ne débite que fadaises,
Coups
d'encensoir et lieuxcommuns.
Son
frac est chic, mais bien niaise Est sabelle tête d'emprunt.Il fréquente les grands théâtres;
Il est toquéde Vu
Orpheum
)),Où
son plastron blanccomme
plâtreBrille plus que son décorum.
Il sait, d'un clin d'œ'û olympique,
Charmer
celles dont les cheveux Sontdu
plusbeau safranchimique:— On
comprendra, mais sil'on veutSa voix anglophile soupii-e
Après Girt}-, Helen, Ethel.
Dans
lalangue de ShakespeareIllance son galant appel:
l'adoxis 55
« Let us go :it is not toolate ;
« Corne to thc « movies »,
my
dear ;« ril
buy you
sonie chocolaté.. .« Listen, nn' hcavt jump.s like a clcor ! «
C'e<. ain&i qu'il passe savie,
Toujours ])eau
comme un
Phidias, Alais n'ayant point îa moindre envie D'être moins âne que Midas.Et ces pauvres petits
bonshommes, Avec
la badine à la main,Nourris de « scopes » et de
gomme,
Ce
sont nos honnnes de demain !Le gueux
àPhilippe L.vferrieri
L'orage gronde dansla nuit, L'eau dégoutte des réverbères.
Jesuis
un
pauvre gueux qui fuit,Tâchant d'oublier
mes
misères.Je n'ai pas dîné, ce midi;
J'ai la figure famélique.
Je traîne
mon
pied engourdi Surle pavé mélancolique.58 FIGURINES
Jevais, bo)teiix, exténué,
Le
dos rompu, leregard sombre, Par latempête bafoué;Les chiensjappent après
mon
ombre.Dans
les crevasses du trottoir Je pense trouver quelque pièceQu'un
noceur aurait laissé choir,En
revenantun
soir d'i^Te?se.Des
fois, j'auraisvoulu voler,Comme un
malfaiteurouun
lâche, Parce qu'enmoi
j'entends hurlerLe
loup de lafaim qui sefâche.C'est mal; mais delongtemps souffrir
On
finit par haïrleshommes.
Le cœur
ne sait plus s'attendrir, C'estlamisère quil'assomme.Le
PhilistinJ'aidel'argenttout plein
mes
poche», Jesuiscourtieret je suis fort,Je mange, je dorset j'embroche;
jMort, vous mettrez sur uneroche:
« Ci-gît,
un
ventru coffre-fort !»* * *
L'optimiste
Qu'importe la tombe, je chante Lesjours, la
femme
et la liqueur.La
vieest rose et pasméchante.Sur
mon tombeau
je veux qu'on plante:(( Ci-gît l'éternel Jean Bonheur. »
GO FIGURINES
Le
pessimisteJe n'ai connu quela misère, J'aile
cœur
flasque etalangui;J'aile
mal
d'unebelle-mère!Et puis, je
meurs
sans avoirri:« Ci-gît la louve de Vignj' ! »
^ îj; ^
Le
poèteJe rêve d'éternels poèmes,
Plusforts quelemarbreet l'airain!
Je chantel'Idéal quej'aime,
Et
jem'en
vaislefront serein:« Ci-gît, Muse,
un
poète blême ! »Le jeune homme
gaiàmonfrère .Iran
Il était gai, très gailuron!
Il ignoraitles airs moroses,
Et
il avaitla bouche en rondA
force de sourire aux cho&es.Il était gai, très gailurot!
Ilavait
du
feu plein latête;Il aimait levin, mais pastrop, Et les femmes, aux j'eux en fête.
62 FIGURINES
Il était gai, trèsgai lura!
Fût-il cassé
comme
une cruche,A
seccomme
le SaharaEt n'y eût-il rien dans sa huche.
Il était gai, très gailuri!
Il était toujours de la noce:
Faut pas mourir sansavoir ri,
Toujours grogner, ça rendféroce.
Il était gai, très gai luré!
S'ilfréquentait les sales bouges,
Ce
n'était pas pour s'écœurer,Mais
pour brûlersa gaîté rouge.Il était gai, très gai luru!
Il adoraitlesmarguerites.
Fleurs ou femmes... ça pousse dru!
Et c'était ses deux favorites.
LE JEU
NE HOMME
(JAI 03Il était gai, très gai, gai, gai!
L'hiver, l'été, sans diffcrenco,
Et mangeait, sans se fatiguer, Son pain sec et son l)eurre ranee.
Il resta gai jusqu'àla fin!
La
mort le prit sans trop de peine, Persuadé, lecœur
serein,Qu'il allait voir l'île aux Sirènes!
Les Bacchantes
à VictorJBar«ba«
C'estdansquelque quartier fripon
Où
la lune fait la grimace.Des
femmes, traînantle jupuii, Passent, les cheveuxen filas.sc.Un
gros cocher, les bras ballants, Dort surson siège, dans la l^rumr.
Un
réverbère aux reflets lilanc*Mire son œil sur le bitume.
GO FIGURINES
Tandisqu'à traversles faubourgs, S'en vont auxsaletés fiévreuses
Des femmes
et deshommes
lourdsDe
vin, en soie et en vareuse.Laissant dépasser leur mollet,
La
])oueheamère et l'œil sans flamme, Le teint phtisiqueet violet.Le coi'jxs défait, l'âme sans âme,
Des
rosessont dans leurscheveuxDont
les corolles effeuilléesTombent;
et le fond de leurs yeux N'ont que des clartésendeuillées.Silongtemps elles ont couru Aprèb le lourd venin des villes Qu'elles n'ont gardé que le cru Et le froid de^ voluptés viles.
LES BACCITANTES 67
Mordant
leurs lèvresjusqu'au sans, Pleines du poison qui les brûle, Elles ne peuvent vivresans Cettel)oue et cette crapule.La
lèvre peinte de carmin, Épaves de chairs dégoûtantes, Faisant de l'œillade auxgamins, Passent les modernes bacchantes.A
ellesII
Plo\'ant,sous vos râpéscorsages, Vos hanchesà des
amants
soûls,D'un
imperturbablevisage,Vous
vous donnez pourquelques sou*.Délicieusement féroces, Fornicatrices de beauté,
Tout
ce qu'ily
a de plus rosseEst, pour vous, dela volupté!
70 FIGURIXES
Que
vosbaisers ont de morsures,Que
vosmots
bavent de liqueurs!Que
jevous plains, car vos blessures Saignent jusqu'au fond de vos cœurs!Un
soir, j'ai compi'is la tristesseDe
ce toxique sensuelQui, sournoiset caché, vousIplesse,
Dans
vos erotiques duels.Que
je vous plains, prostituées,Ames
en détresses de nuit,Ames
tiistes,âmes
tuées.Qu'on devrait fuir. .. mais que l'on feuit.
Que
je vous plain.^^, que je vous pleure!Que
je voudrais tant vous sauver,Vous
pour (lui l'amour est un l(>urre.Vous
qui ne savez plus prier.. .Pri}itemps
urbain
:\EustaohpLETKi.i.iKitiloSt-Jl^t
Le printemps ouvre
ma
fenêtre Et nie fait son premier clin d'œil.L'hiverest mort au thermomètre:
La
neige veuve pleure, en deuil!Les oiseaux célèbrent leur fête, Là-haut, très gais, sur leurs orteils:
Ils sesont tous drogués la tête Avec
un
ravon de soleil.72 FIGURINES
La
rueest uneimmense mare Où
jx'itaugcnt tous les passants.Les trannva3's font
un
tintamarre Sur le bitume éclaboussant.^Nlais il y a, clans la lumière,
Tant
de chaleuret tant de feu Qu'on divinii^e cette ornière Et ces pavés ci'ottés, boueux.Le
tohu-bohu des voitures, Lescris des petits camelots,Les
moineaux
piaillant des toitures,Lescloches branlantleurs grelots,
Tout
celame
vient à l'oreille,Colnme un
chant ivre de gaîté.Tiens!
du
sud accourt la corneille:Postillon noir tlu clair été.
PRINTEMPS
URBAIX
73Et
lesquare se désendeuille.L'espoir chantedans les rayons.
L'on voit des petits becs defeuilles Percerles bourgeons vermillons.
Les fillesen chapeaux de paille,
Offrant leurgorge au doux zéphir, Passent avecleursairs canailles
Et
leurs jolis yeux de saphir,Tandis queles bachotsà canne.
Avec
leurs moustachesen crocs,Leur débitent,
comme
lamanne,
Des
compliments très allégros.IV
FIGURINES SOUS L'ABAT-JOUR
Adieu,
notrepetite table!àMlleC.D.
La mort
a passé dans les plats!Un
céleri pique unetêteDans
une tasseà chocolat:—
Derniermonument
dela fête.—
Un noyau
dur rêve, affaisséSurson ventre écailleux etrêche, Pauvre
cœur
sec et crevassé, Triste squelette d'une pêche.78 FIGURINES
Le
thé, remplissant le boudoirDe
sonoriental arôme,Estlà, stagnant
comme un
lac noir,Dedans
lathéière qui chôme.Une
cigarette s'éteintAu
fond d'une assiette salie Et, dansles coupes, ini vieux vin Surit avec mélancolie.Penchant son cahce fané.
Une
rose blême s'effeuille.Et
sonparfum abandonné
Est
comme un
beau jour qui s'endeuille.Hélas!la nuit assombrit tout!
L'heure exquise devient souffrance,
Le
passétombe
on ne sait où: C'estleprésent quirecommence. .ADIEU,
NOTRE
PETITETABLE
! 79On
dirait que meurt pour toujoursLe
bonheurquand
s'en va lafemme.La chambre
voit naître lejour.Et
il faitfroid au fond de l'âme!..
.
Tout
s'efface dans le matin;Les baisers, les brins d'amourettes,
Le
riremousseux du
festin,Lesfleurs, levin, les cigarettes.. .
La chambre
àLouisSaint-Jacques
Douce
ambiance de lachambre Où
flotte une odeur de tabac,Fumé
dans une pipe d'ambreAu
fourneaucomme un
ventrebas.Sur le tapisrouge le livre,
Tel
un cœur
ouvert^ abîmé, Repose, essayant derevivre Lesyeuxrêveurs qui l'ont aimé.82 FIGURINES
Une
peinture estune phrase.La
tablea ses propos défunts.Un parfum
est danschaquevase• Quiravive d'autres parfums.
Les rideaux, paisiblesfantômes, Ont, reflétés par l'abat-jour,
Des
proj&lsindécis demômes Aux
lèvresrouges de l'amour.Oui, la
chambre
c'est toute une âme,Un
souvenirtristeou joyeux;Un
ruban rappelleunefemme,
,Le
miroir aconnu
ses yeux.C'estle
monde
de nos pensées,Des
projets de nos lendemains,Des
espérancestrépasséesQu'ontenait, la veille, ennos mains.
LA CHAMBRE
83On
découvreun
peude soi-mêmeDans
chaque coin, dans chaque pli:C'est le secret, c'estle
poème De
l'âme intime qu'ony
lit.Ah!
l'aimer d'une bontéforte,La bonne
chambre, ah! oui, l'aimer.Car, lorsqu'on enfermela porte, C'estson
cœur
qui reste enfermé.Nocturne
àIsaïeNantais
J'écoute dans le soir,
— Tous
les arbres frissonnent.J'écoutedanslesoir
Mes
désirs qui résonnent.J'écoute dans
mon cœur Tous
les battements d'ailesDe
quelque oiseaumoqueur
Quichanteraitcomme
Elle.86 FIGURINES
J'écoutele jet d'eau
Du
square qui verdoie;J'écoutelejet d'eau
— Et
l'ordu
soir poudroie!J'écoute tousles nids Quibabillent en rêve;
J'écoutetous lesnids,
Car
lanuitesttrop brève.J'écoute dans nos corps
La même
ardeur devivre.Il n'est pas jom*encor.. .
Je t'aimeetje suis ivre!
Béguin
seniimenlalPourtouslesbéguinsquel'auteur aeus.secrètoment!
« Depuis que jevous ai connue».
.
— Ce
versestbanal, j'enrépond»!Je rêve, oh! nedites pas non,
A
votre prochaine venue.Je rêveetj'ai de longsfrissons;
Je ne dors plus desnuits entières:
Votre fin minois d'écolière
M'a
fait tomberen pâmoison.FIGURINES
J'ai des
amours
de Bucoliques!Mon cœur
résonnecomme un
luîh.—
Tel celui deBooz
et deRut
h,Aux
heureuses moissons bibliques!Je rêve à vos douces chansons:
Vous
gazouillerez sur la rive Près des roseaux àladérive,Ou
près des nids dans les buissons.Je rêve aux soirs,
quand
le vent pleure,Où
l'on a besoin de sentir,Tout
près, quelqu'un pours'y blottir,Pour
oublierle vent et l'heure.Alors, près de l'abat-jour bleu.
Dans
le complet oubli des choses.Comme
le vent berce les roses, Jebercerai ton corps frileux.BÉGUIN SENTIMENTAL
89Sur
un
légerthème
quigrise, Je vous ferai des vers d'amour;Je serai votre troubadour,
Ce
soir-là, vous serez marquise.Ou
bien, frissonnante àmon
bras,Nous
irons, au sein des étoiles,Nous
aimerseuls,quand
dans ses voilesLa
nuit couvrira tout, en bas.. .Voilà
comment,
àma
fenêtre,—
Pardonnez-moi, c'estmon
travers,—
J'ai chanté, ce soir, en desvers.
Nos amours
de demain, peut-être.I
V
FIGURINES DE COUVENT
i
Dans un
parloir denonnes
à ErnestTremblât
Un
matin que j'étais entréDans un
petit parloirde nonnesOù
le soleils'était cloîtréDans
de grands rideaux de cretonnes,Je vis la nudité
du
mur, Les petites chaises enligne,La
table avec sontapismûr,Lesportraits des saints àl'air digne,
Q4 FIGURINES
Au
fond, le grandtableau d'honneur,La
statuette d'une Vierge,Un
Christ, le front plein de douleur,Aux
pieds duquel s'écraseun
cierge.Dans
sa boîte de styleancienDort
le vieuxcœur
d'une pendule;En un
coin, veuf de musicien,Un
piano dont lepied bascule.. .Et,
comme
en unevision,Passaient despetites sœurs, lentes,
Avec
des gestes d'onctionMurmurant
des chosesdolentes,Tandis que des cantiques vieux
Comme
des airs de villanelle,—
J'en ai des larmes danslesyeux
Venaientdu
fond de lachapelle...
Et, cejour-là, j'ai priéDieu.
Lettre de couvent
àPaulRaxger
Huit heures.
Cher ami, Je suis
Dans
la grandesalle d'étude.Révérende
Mère me
suitDe
ses yeux de sollicitude.J'ai reçu, le
cœur
plein d'émoi, Votre lettre par une élève.Jel'ai relueune et centfois,
Au
dortoir, et j'ai faitun
rêve!.96 FIGURINES
Demain, Mère
Saint-Stanislas Corrigera nos analysesSur Louis Veuillot. Je crains, hélas, D'avoir écrit bien dessottises.
Oh! je pense à vous trèssouvent!
On
s'amuse dans legrandmonde Hein?
C'est ennuj'eux le couvent,Quand
on est jeune, aimante et blonde.Tenez: l'autre jour, on secret,
Mère
a visité nos valises;J'avaiscaché votre portrait, Sans cela, j'auraisété prise.
Bon!
la cloche vient de sonner.Mon
Dieu! queletemps
passeviteAvec
vous!P. S.
— Répondez
Sans faute.Un
gros bec.Marguerite.
VI
FIGURINES PAYSAGISTES
Paysage
blanca MlleCécile P..
Les sillons dorment sons la neige.-
La
l^ourrasqiie siffle en sacrant.Le grand vent
du Nord
désagrège Les bancs de neige dans le « rang »,A
l'hoi'izon des routes l)lanches, Se tassent les sapins frileux,Et l'on n'entend plus sur les branches Les engueulades des "siffleux".
100 FIGURINES
Les toits dansla
campagne
morte Veillent. Le froid cerne la porte.Et la Grand'Ourse, au firmament,
Là-haut, à cent mille lieues,
Segèlele bout de la queue.
Sansgrogner... éternellement!
Le pauvre moineau
all<'goriedupoète
C'était
un
pauvre etsale oiseau,Aux
maigres ailes dénudées, Qui barbotait dansle ruisseau,Ne
pouvant atteindre aux nuées.Son tapisétait le pavé.
Il logeait au borddes gouttières.
Ce
n'était pasun
gros gavé:Son
nid n'avait point de portières.102 FIGURINES
Ilne savait qu'une chan^'on Qui lui causait bien des critiques
De
la part de Monsieur Pinson Qui riaitde ses airs rustiques.Ce
n'était pasun
orgueilleux, Il ne suivait jamaislamode:
Toujours rester saleet pouilleux
Ça
n'est pas chic, mais c'estcommode.
Ilignorait les
champs
de blé Et les beaux arbres où l'on chante,Dans
l'épais feuillage assemblés, Bien loin de la villeméchante.Désireux d'horizons
nouveaux Et
blasé de la vie urbaine, Il s'en alla par monts, par vaux.En
quête de meilleure aubaine.LE
PAUVRE MOIXEAU
103Ilpartit sans revoirson nid,
Sans dire adieu au voisinage Et, le
cœur
rempli d'infini, Il entreprit son grand voyage.Mais, faible et n'ayant point mangé,
Il
tomba mort
dansun
boissombre.L'orage, ayant tout saccagé.
Emporta
ses plumes dans l'ombre.Et son pauvre nid délaissé Aujourd'hui pend à la gouttière,
Comme un
crêpe de trépasséPourl'oiseau mort dans la poussière.
Les
petites feuillesàMlle AliceT.
Oh
! les petitesfeuilles vertesDe
tes lèvres ont le velours, Oui, de teslèvres entr'ouvertes,Quand
tu souris,ma
naie, aujour.Oh! les petitesfeuilles frêles Qui semettentlabouche en
cœur
Pourrecevoir lesbaisers grêlesDes
oiseauxetdu
vent moqueur.106 FIGURINES
Oh! les petitesfeuilles folles Bniissent
comme
ton jupon,Quand
tu danses, fille frivole,Le
nez en l'air et l'œil fripon.Oh! les petites feuilles pâles C'est le miroir de tes yeuxpers Qui chatoient
comme
des opalesEt
mettentmon cœur
àl'envers.Dans
la petite feuille pâleTu
m'as donnétes grandsj-enx persEt
je m'en suis fait des opales Pour égayermes
froids hivers.Dans
la petitefeuille folle,Où
scintille une goutte d'eauTu
m'asdonné, fillefrivole,Une
larmecomme
cadeau.LES PK-riTES FEUILLES 107
Dans
la petite feuille grêleTu
m'as donné, pourmon
vieux cœur,Un
peu de ta jeunesse frêle,Coimne
on donneun
baiser moqueur.Dans
la petite feuille verteTu
m'as donné toutle velours, Oui, de tes lèvresentr'ou vertes.Lourdes de
mes
baisers d'amour!Chantez
! lesoiseaux
. . .àBernardLabergi
Chantez, pinsons, Sur une branche,
A
l'aube blanche, Chantez, pinsons!Dans
les buissonsOù
l'ombre pencheLe
nid s'épanche!Et
vos chansons,110 FIGURINES
Bouvreuils et merles,
Ce
sont les perlesDes
clairs taillis.Chantez! les feuilles
Entre elles cueillent
Vos
gazouillis.VII
FIGURINES DE POÈTES
Le
poète-misèreà MarcelDrcA»
Maigre
comme un
ratde prison,Le
pauvre poète-misère Était, ce soir, en oraisonDevant
saMuse
aventurière,Sa Muse
au bras des troubadours,Des
jouvenceauxdu moyen
âge,Des
vieuxseigneurs auxbeaux atours,Des
gueux et des grands personnages.114 FIGURINES
Des
poètesdu bon
vieuxtemps
:j\Iarot, Ronsard, Régnier, Malherbe, Villon, ce
bohème
épatant,Rabelais, ce conteur superbe,
Des
tristes, desgais amoureux,Des
maraudeurset des apôtres,Des
petits pierrotsmalheureux.Des
ironistes,... de tant d'autres.Ilen passa tant devant lui Qu'il les prit à la dérobée, Et, durant desjours et des nuits, Il écrivit une épopée.
Épuisé de ce jet sacré
Et
d'unehumeur
massacrante,Il s'endormit, l'esprit bourré
De
rimes abracadabrantes.LE POÈTE-MISÈRE 115
Ils'endormit... Le vent léger Déshabillait les branchesgrises.
Toutes les feuilles
du
verger Allaient titubant, sousla bise..,
Le ciel était
comme un
caveauOù
l'on dort entouré de cierges.L'n matin, on vit des corbeaux Dévorer un mortsur la berge.
Le
poète divague. . .àJoseph-L.Girouak»
J'ai pris
mon
vieuxbougon
de plâtre, J'ai prisma
tête entremes
mains, J'ai pris uneflamme
dans l'âtre.J'ai pris
un
pli de parchemin.J'aipris
mon
glossaire de rimes, J'aiprismon
génie avec moi.J'ai pris
mon
beau glaive d'escrime,Ma
plume, et, lecœur
plein d'émoi.118 FIGURIXES
J'aivoulu faireune satire;
Mais, dans
ma
naïve candeur,Rêvant
d'un poétique empire, Je n'ai gueule que des fadeurs!Je suis triste dans
ma
chambrette.La
nuit endortmon cœur
en deuil.Ma
lyre al'air d'une soubrette Qui cligne son premier clin d'œil.En
bas, desfugues de musiciueMe
grisent d'ivresse et despleen.Oh!
comme
jeme
sens phtisiqueA
cesaccords de Lohengrin!Ceux
ciui, le plimoqueur
aux lèvres,Ne
peuvent comprendrepoiu'quoiOn
peut avoir de telles fièvres Et, devant le Beau, rester coi;LE
POÈTE
DIVAGUE. . . 119Ceux
qui, jobards et prosaïques,Ne
sont que vulgaires musards,Pour
qui ce sont des archaïquesQue
les vers de Pierre Ronsard;Ceux-là riront de
me
voir faireLe
philosophe sous lestoits, ]\Ie prendront pourun
somnifèreEt
se diront : « Il est fou, quoi!»Mais
je m'enivre demon
rêve, J'adore l'éclatante nuitQui m'est conune un ful^^urant glaive Qui
me
donnela verve et luit!Je chante la folie ardente
De mes
strophesdansant en rond!Je vais, d'une allure pédante,
Avec mes
vers àla Piron!120 FIGURINES
J'ai pris quatre grains crellcbore
Et
j'ai relu—
sansun
remords— Tout
ce qu'aforgé Pj^thagore,Et
les « Dialogues desMorts
».Aux
coupes d'or j'aibu
la vie, Si bienque, sens dessus dessous, Afin d'éteindrema
folie,Je m'endormis tout à fait soid!