Université Claude Bernard Lyon 1 Semestre printemps 2016 - 2017 Préparation aux épreuves écrites du CAPES
Fiche 4 SÉRIES ENTIÈRES
Notions abordées
• Domaine de convergence et rayon de convergence des séries entières
• Critère de d’Alembert de de Cauchy
• Opérations sur les séries entières
• Fonctions développables en séries entières : notions de base, résultats d’existence
• Applications : fonctions trigonométriques et exponentielle, logarithme, résolution d’équations différentielles, somme des inverses des carrés
PARTIE I : Séries entières
Dans cette partie, K = R ou C.
On note R+= R+∪ {+∞}, avec les conventions 1
+∞ = 0 et 1
0 = +∞.
Dans ce qui suit, pour tout r > 0, on note Dr= {z ∈ K , |z| < r}.
A - RÉSULTATS DE BASE
1 - Premières définitions et exemples
Définition. On appelle série entière toute série de fonctions de la formeX
anznoù z ∈ K et (an)n∈N est une suite d’éléments de K.
Définition. On appelle domaine de convergence l’ensemble D des éléments z de K tels que la sérieX
anzn converge. On définit alors la fonction somme :
∀z ∈ D ,
+∞
X
n=0
anzn.
Remarque : D est toujours non vide car il contient 0.
Exemples.
• Les polynômes sont des cas particuliers de séries entières, pour lesquels la suite (an)n∈N est nulle à partir d’un certain rang. Leur domaine de convergence est D = K.
• La série entièreX
zn admet D = {z ∈ K , |z| < 1} pour domaine de convergence, et on a f (z) = 1
1 − z pour tout z ∈ D.
(b) En déduire que l’ensemble
B =r ∈ R+ , (anrn)n∈N est bornée est soit un intervalle de R+ contenant 0, soit réduit à {0}.
Définition. Le rayon de convergence d’une série entièreX
anznest le réel R = supr ∈ R+ , (anrn)n∈N est bornée .
DR= {z ∈ K , |z| < R} est appelée le disque de convergence (c) Démontrer le théorème suivant :
Théorème. Soit X
anzn une série entière, de rayon de convergence R.
- si |z| < R, alorsX
anzn converge.
- si |z| > R, alorsX
anzn diverge.
- si |z| = R, on ne peut rien conclure.
3 - Résultats de convergence
Proposition (Convergence uniforme). Soit X
anzn une série entière de rayon de convergence R. Alors X
anzn converge uniformément sur tout disque fermé inclus dans le disque de convergence. Plus précisément, pour tout réel r tel que 0 < r < R, on a :
∀ε > 0 , ∃N ∈ N , ∀n ≥ N , ∀z ∈ K , |z| ≤ r ⇒
n
X
k=0
akzk−
+∞
X
k=0
akzk
< ε .
(a) Démontrer la proposition suivante :
Proposition (Critère de d’Alembert). Soit X
anzn une série entière telle que an 6= 0 à partir d’un certain rang. Si lim
n→+∞
an+1
an
= ` ∈ R+, alors son rayon de convergence est R = 1
`.
(b) Application. Déterminer le rayon de convergence de la série entièreXn!
nnzn. (c) Démontrer la proposition suivante :
Proposition (Critère de Cauchy). SoitX
anznune série entière. Si lim
n→+∞
p|an n| =
` ∈ R+, alors son rayon de convergence est R = 1
`.
(d) Application. Déterminer le rayon de convergence de la série entièreX 1 nln nzn. 4 - Opérations sur les séries
A titre d’exercice, on pourra proposer une démonstration des théorèmes suivants.
Théorème (somme). Soient X
anzn et X
bnzn deux séries de rayons de convergence respectifs Ra et Rb. On note R le rayon de convergence de la série entière X
(an+ bn)zn. - Si Ra6= Rb, alors R = min(Ra, Rb).
- Si Ra= Rb, alors R ≥ min(Ra, Rb).
Pour tout z ∈ K vérifiant |z| < min(Ra, Rb), on a
+∞
X
n=0
anzn+
+∞
X
n=0
bnzn=
+∞
X
n=0
(an+ bn)zn
Théorème (multiplication scalaire). SoitX
anznune série entière de rayon de conver- gence R et λ un réel non nul. Alors la sérieX
(λan)znadmet R pour rayon de convergence.
Théorème (produit). Soient X
anzn et X
bnzn deux séries de rayons de convergence respectifs Ra et Rb. On note R le rayon de convergence de la série somme produit définie par X
cnzn, où l’on a posé cn =
n
X
k=0
akbn−k pour tout n ∈ N. On a R ≥ min(Ra, Rb), et pour tout z ∈ K vérifiant |z| < min(Ra, Rb) :
+∞
X
n=0
cnzn=
+∞
X
n=0
anzn
! +∞
X
n=0
bnzn
! .
B - APPLICATIONS
Exercice 1 : Calcul de rayon de convergence
Déterminer le rayon de convergence des séries entières suivantes : 1 -
+∞
X
n=0
(−1)nn!zn 2 -
+∞
X
n=0
nnzn 3 -
+∞
X
n=0
2n n
zn 4 -
+∞
X
n=0
sin(n)zn
Exercice 2 : Etude au bord
1 - Déterminer le rayon de convergence R de la série
+∞
X
n=1
sin
1
√n
zn. 2 - Etudier la convergence en −R et R.
Exercice 3 : Relations entre rayons de convergence Les questions1, 2 et 3 sont indépendantes.
1 - On considère une série entière
+∞
X
n=0
anzn. On suppose qu’elle converge pour z = 3i − 4 et qu’elle diverge pour z = 5. Que peut-on dire sur son rayon de convergence ?
(b) Soit r ∈ R+ tel que r < Ra. Montrer que la suite (nαanrn) est bornée. En déduire que Ra= Rb.
3 - On considère une série entière
+∞
X
n=0
anzn de rayon de convergence R > 0. Déterminer le rayon
de convergence de la série entière
+∞
X
n=0
an n!zn.
Exercice 4 : Convergence d’une somme 1 - On considère une série entière X
anzn de rayon de convergence R. Déterminer le rayon de convergence des sériesX
anz2n. etX
anz2n+1. 2 - On considère la série entièreX
anzn où an=
1 +(−1)n n
n2
pour tout n ∈ N∗.
(a) Pour tout p ∈ N∗, on pose up = a2p. Déterminer le rayon de convergence de la série Xupzp. En déduire le rayon de convergence de la série X
a2pz2p.
(b) Pour tout p ∈ N, on pose vp = a2p+1. Déterminer le rayon de convergence de la série Xvpzp. En déduire le rayon de convergence de la série X
a2p+1z2p+1. (c) En déduire le rayon de convergence deX
anzn.
PARTIE II : Fonctions développables en série entière
A - RÉSULATS DE BASE
1 - Notions essentielles
Définition. Soit R > 0 et f une fonction de DR dans K. On dit que f est développable en série entière (DSE) sur DR s’il existe une série entièreX
anzn, convergente sur DR, telle que
∀z ∈ DR , f (z) =
+∞
X
n=0
anzn.
Exemple. La fonction définie par f (z) = 1
1 − z pour tout z ∈] − 1, 1[ est développable en série entière sur cet intervalle. On a :
∀ z ∈] − 1, 1[ , f (z) = 1 1 − z =
+∞
X
n=0
zn.
Les deux résultats suivants sont fondamentaux. Leur démonstration est laissée à titre d’exercice.
Théorème. Soit f une fonction réelle développable en série entière sur ] − R, R[. On pose f (z) =
+∞
X
n=0
anzn pour tout z ∈] − R, R[. On a les résultats suivants : - f est indéfiniment dérivable sur ] − R, R[. Sa dérivée est donnée par :
f0(z) =
+∞
X
n=1
nanzn−1.
- La primitive F de f qui s’annule en 0 converge sur ] − R, R[ et est donnée par :
F (z) = Z z
0
f (t)dt =
+∞
X
n=0
an
n + 1zn+1.
Théorème. Soit f une fonction développable en série entière sur ] − R, R[. Alors f (z) =
+∞
X
n=0
anzn avec an= f(n)(0)
n! pour tout n ∈ N . La série
+∞
X
n=0
f(n)(0)
n! zn est appelée développement de Taylor de f en 0.
Remarque 1. On déduit de ce théorème l’unicité d’un développement série entière : les an sont déterminés par f(n)(0)
n! . On en déduit la propriété suivante :
Corollaire. On considère une fonction f développable en série entière sur ] − R, R[. Alors f est une fonction paire (resp. impaire) si et seulement si les ande rang impair (resp. pair) sont nuls.
Remarque 2. Ce théorème ne fournit pas une condition suffisante : il se peut qu’une fonction admette un développement de Taylor en 0 sans pour autant admettre un développement en série entière sur un intervalle ouvert contentant 0. Un contrexemple classique est fourni par la fonction :
f : R −→ R x 7−→
exp
− 1 x2
si x 6= 0 , 0 sinon.
2 - Théorème fondamental d’existence Démontrer les théorèmes suivants :
Théorème (Taylor avec reste intégral). Soit f une fonction de classe Cn+1sur ]−R, R[.
Alors, pour tout z ∈] − R, R[ on a
f (z) = f (0) + f0(0)z + · · · +f(n)(0)
n! zn+ rn(z)
Théorème. Soit f une fonction de classe C∞ sur ] − R, R[. On suppose qu’il existe M ≥ 0 et λ ≥ 0 tels que pour tout n ∈ N et tout z ∈] − R, R[ :
|f(n)(z)| ≤ M λn. Alors f est développable en série entière sur ] − R, R[.
Application directe. Exponentielle et fonctions trigonométriques
(a) Montrer que la fonction exp est développable en série entière sur tout intervalle de la forme ] − R, R[, avec :
exp(x) =
+∞
X
n=0
xn n! . (b) Montrer que pour tout x et tout n ∈ N, sin(n)(x) = sin
x + nπ 2
. En déduire que la fonction sin est développable en série entière sur tout intervalle de la forme ] − R, R[, avec :
sin(x) =
+∞
X
p=0
(−1)p
(2p + 1)!x2p+1.
(c) Par un raisonnement analogue, montrer que la fonction cos est développable en série entière sur tout intervalle de la forme ] − R, R[, avec :
cos(x) =
+∞
X
p=0
(−1)p (2p)!x2p.
B - APPLICATIONS
Exercice 1 : Autour de la fonction exponentielle Les questions1, 2 et 3 sont indépendantes.
1 - Utiliser le développement en série entière de l’exponentielle pour montrer l’égalité suivante :
∀x, y ∈ R , exp(x + y) = exp(x) exp(y) . 2 - Soit λ ∈ R.
(a) Montrer que le rayon de convergence de la série entière Xλn
n!xn est infini.
(b) Pour tout x ∈ R, on pose f (x) =
+∞
X
n=0
λn
n!xn. Montrer que f0(x) = λf (x).
3 - Montrer que pour tout x réel, on a :
+∞
X
n=0
n2
n!xn= (x2+ x) exp(x) .
Exercice 2 : Résolution d’équations différentielles Les questions 1, 2 et 3 sont indépendantes.
1 - Soit α ∈ R. On considère la fonction f définie par f (x) = (1 + x)α pour tout x ∈ R.
(a) Montrer que f est solution de l’équation différentielle
(1 + x)y0− αy = 0 , y(0) = 1 .
(b) Chercher une solution de l’équation précédente sous forme de série entière, en précisant son rayon de convergence.
(c) En déduire le développement en série entière de√
1 + x sur ] − 1, 1[.
(d) Montrer que pour tout x ∈] − 1, 1[.
√ 1
1 − x2 = 1 + 1 2z2+3
8z4+ · · · + (2n)!
22n(n!)2z2n+ · · · 2 - Résoudre l’équation différentielle suivante en utilisant les séries entières :
y00− xy = 0 ,
y(0) = 1 , y0(0) = 0 .
3 - On considère la fonction f définie par f (x) = ch(x) cos(x) pour tout x ∈ R.
Partie A
(a) Montrer que pour tout x ∈ R, f (x) = 1
4 e(1+i)x+ e(1−i)x+ e(−1−i)x+ e(−1+i)x (b) Montrer que pour tout n ∈ N
(1 + i)n+ (1 − i)n+ (−1 − i)n+ (−1 + i)n = 4(√
2)ncosnπ 4
cosnπ 2
. (c) En utilisant le développement en série entière de la fonction exponentielle, montrer que
pour tout x ∈ R :
f (x) =
+∞
X
p=0
(−1)p22p (4q)! x4p. Partie B
(a) En revenant à l’expression analytique de f , montrer que f est solution de l’équation différentielle y(4)+ 4y = 0.
(b) Retrouver le résultat de la question (c) de la partie précédente en résolvant cette équation avec les séries entières.
Exercice 3 : Somme des inverses des carrés 1 - Montrer que pour tout x ∈] − 1, 1[
arcsin(x) =
+∞
X
n=0
1
2n + 1
(2n)!
22n(n!)2x2n+1.
Indication : on pourra utiliser le fait que arcsin0(x) = 1
√
1 − x2 et le résultat 1(d) de l’exercice 2.
(a) Utiliser le développement en série entière de la fonction arcsin pour montrer que Z π/2
0
arcsin(sin(t))dt =
+∞
X
n=0
1 (2n + 1)2.
Indication : on admettra que Z π/2
0
sin2n+1(t)dt = 22n(n!)2 (2n + 1)!
(b) En déduire que
+∞
X
n=0
1
(2n + 1)2 = π2
8 , puis que
+∞
X
n=1
1 n2 = π2
6 .
Exercice 4 : Autour du logarithme
1 - Montrer que la fonction f définie par f (x) = ln(1 + x) pour tout x ∈] − 1, 1[ est développable en série entière sur cet intervalle.
Indication : considérer la série géométriqueX
(−1)nxn et utiliser le théorème d’intégration.
2 - (a) Montrer que pour tout x ∈]0, 1[, ln(1 + x)
x =
+∞
X
n=0
(−1)nxn n + 1 . (b) Montrer que la série précédente converge uniformément sur [0, 1].
(c) Montrer que
Z 1 0
ln(1 + t) t dt =
+∞
X
n=1
(−1)n−1 n2 . (d) En déduire que
Z 1 0
ln(1 + t)
t dt = π2 12.