S ARRUS
Géométrie appliqué. Traité abrégé de gnomonique graphique
Annales de Mathématiques pures et appliquées, tome 15 (1824-1825), p. 219-227
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2I9
GÉOMÉTRIE APPLIQUÉE.
Traité abrégé de gnomonique graphique (*) ;
Par M. SARRUS , docteur agrégé ès sciences.
C A D R À N S SOLAIRES.
D ANS
lesapplications
de lagnomonique qui
ne sontpas
de purecuriosité,
la surface surlaquelle
ils’agit
de tracer un cadran estune surface
plane, qui peut
d’ailleurs avoir dansl’espace
un situationquelconque.
Les heures sontindiquées
par la coïncidence de l’ombre solaire d’une vergerectiligne partant
d’irnpoint
de la surface ducadran ,
et dirigée parallèlement
à l’axe de la terre , avec une suite de droitespartant
du mêmepoint.
Ces droites sont cequ’on appelle
leslignes horaires ;
leurpoint
de concours est le centredu
cadran,
et la vergerectiligne
dont l’ombreindique
les heuresen est dite l’axe ou le
style.
Onappelle soustylaire
laprojection orthogonale
dustyle
sur leplan
du cadran.Dans les cadrans les
plus soignés,
onremplace
lestyle
par un?plaque métallique circulaire 3 percée
à son centre d’un trou dequelques
millimètres de diamètre. Cetteplaque
est solidementfixée,
à
l’avance ,
en avant duplan
ducadran ;
et les heures sont indi-quées
par la coïncidence successive du rayon solairequi passe par
(*) On peut
consulter ,
sur le mêmesujet ,
deux articles de M. Franc0153ur, insérés aux pages 233 du tome VIII.e et gt du tome IX.e des Annales.J. D. G.
220
CADRANS
le trou dont elle est
percée
avec chacunedes lignes horaires.
Dansce cas, la droite menée du centre du trou au
point
de concoursdes
lignes
horaires doit êtreparallèle
à l’axe de la terre ; c’est l’axe du cadranpartant
de son centre ; et la droitequi joint
cecentre à la
projection orthogonale
du centre du trou sur leplan
du cadran est la
soustylaire.
Nous supposerons constamment, danstout ce
qui
vasuivre,
que les heures sontindiquées
par une telleplaque,
d’autant que rien n’estplus
facileque
de passer de cette dernièresupposition
à lapremière.
Les méthodes que l’on
prescrit
ordinairement pour tracer uncadran solaire sur un
plan supposent
d’abord que l’on connaît la latitude dulieu ;
ellesexigent
ensuite que l’ondétermine,
pardes
procédés plus
ou moinspénibles
etdélicats,
l’inclinaison etla déclinaison du
plan
ducadran, desquelles
on déduit ensuite la situation du centre et la direction de lasoustylaire.
Alors lesligues
horaires se tracent par des
procédés
connus.Nous nous proposons ici
d’enseigner
à tracer un cadransolaire
.dans
un lieu dont la latitude estinconnue ,
sur unplan
dont onignore
lasituation,
enremplaçant
la détermination de ces élémens par troispoints
d’ombremarqués
sur le cadran à des intervalles dequelques
heures d’une mêmejournée,
choisie depréférence
vers l’un des
solstices ;
afinqu’on puisse
considérer la déclinaison du soleil comme sensiblement constante dans l’intervallequ’embras-
seront les observations.
Mais,
pour la commodité despraticiens ,
et pour mieux faire voir en même
temps
combien la méthode estfacile ,
nous donnerons d’abord lesdéveloppemens théoriques ,
quenous
ferons suivre
duprocédé pratique , dépouillé de
tous rai-sonnemens.
POLAIRES.
§.
1.Développemens théoriques.
En faisant abstraction de son mouvement en
déclinaison ,
cequi
estpermis ,
sous les conditions que nous venonsd’indiquer,
le soleil décrit
chaque jour
unparallèle
àl’équateur.
Si l’on ima-gine
par son centre mobile et par le centre fixe du trou de laplaque
une droiteindéfillie, prolongée jusqu’au plan
ducadran ,
cette droite
décrira,
dans l’intervalle devingt-quatre heures ,
unedouble surface
conique
derévolution ,
dont les deux .nappes auront leur sommet commun au centre du trou. Leplan
du cadran cou-pera l’une de ces nappes suivant une
ligne
du second ordrequi
suivra constamment dans son mouvement
l’image
mobile du troude la
plaque.
L’axe du doublecône, parallèle
à l’axe de la terre,sera aussi l’axe du
cadran , qu’il
ira percer à son centre ,point
de concours des
lignes
horaires.Soit S
(fig. 7)
le sommet commun de deuxcônes,
centre dutrou de la
plaque.
Soit 0 laprojection orthogonale
de ce sommetsur le
plan
ducadran ;
et soient P et pl deuxquelconques
despoints
dupérmiètre
de la section de l’un des cônes par ceplan.
Soit enfin C le
point
où leplan
du cadran estpercé
parl’axe
commun SC des deux
cônes , lequel
sera aussi l’axe du cadran dont le centre sera en C.Soient menées les droites
PP’, OP, OP/, SP ,
SP’. Sur lesdeux
dernières ,
soientprises ,
àpartir
deS,
leslongueurs égales
arbitraires SA et
SA/ ;
despoints
A et A’ soientrespectivement abaissées ,
sur OP etOP/,
lesperpendiculaires
AB etA’B’,
etsoient menées AAI et
BB’;
la dernière de ces deux droites serala
projection orthogonale
de lapremière
sur leplan
du cadran.Soit divisé
l’angle
PSP’ en deuxparties égales ,
par une droitecoupant
AA’ en E" et PP/ enD";
lepoint
E" sera le milieu deTom. XV. 30
222 CADRANS
AA’;
etsi ,
par la droiteSD",
onconçoit
unplan perpendi-
culaire à
AA’,
ceplan
contiendra évidemment l’axe ducône ,
desorte que sa trace sur le
plan
du cadran passera par lepoint C ,
et sera ainsi
dirigée
suivant D"C.Or,
il est connu , et il est d’ailleurs facile de démontrer que ,lorsqu’un plan
et une droite sontperpendiculaires
l’un àl’autre
la trace du
plan ,
sur un autreplan quelconque,
estperpendicu-
laire à la
projection orthogonale
de la droite sur ce même dernierplan ; donc,
dans le casqui
nous occupe , la trace DIIC duplan
D"SC,
sur leplan
ducadran ,
doit êtreperpendiculaire
à la pro-jection orthogonale
BBI de la droite AA’ sur ce mêmeplan.
Il résulte de là que , connaissant seulement la hauteur perpen- diculaire du centre du trou de la
plaque
au-dessus duplan
ducadran ,
laprojection
de ce centre sur le mêmeplan
et en outredeux
images
du même centre sur ceplan, marquées
à deuxépoques quelconques
d’un mêmejour,
onpeut ,
par une constructionplane,
exécutée sur ce cadran
même 3
obtenir une droitequi
en contiennele centre.
Supposons,
eneffet
,( fig. 8)
que leplan
de lafigure
soit leplan même
ducadran ,
que lepoint 0
soit laprojection
ortho-gonale
du centre du trou et que lespoints
P et pl soient lescentres des
images
du même trou , pour deux heures différentesquelconques.
Soient menéesOP,
Opl et PP/. Aupoint
0 soientélevées des
perpendiculaires OS ,
OS’ à OP etOP’,
d’une mêmelongueur égale
à la hauteurperpendiculaire
du centre du trouau-dessus du
point
0. Soient menées les deux droites SP et S’P’sur
lesquelles
soientprises ,
àpartir
despoints S , S’,
deslongueurs égales
arbitraires SA et S’,A’. Despoints
A et A’ soient abaisséesrespectivement,
sur OP etOP’,
lesperpendiculaires
AB etA’B’,
etsoit menée BB/. Sur ppl comme base soit construit un
triangle Ps"P’,
dont les deux autres côtés Ps" et P’s" soient
respectivement égaux
auxdroites
PS,
P’S’. Soitdivisé l’angle
s" de cetriangle
endeu$ parties
S O L A I R E
S.égales
par une droitecoupant
le cûtéopposé
en D". Soit enfinmenée ,
par lepoint DI/ ,
uneperpendiculaire
indéfinie àBB’,
etcette
perpendiculaire
contiendra le centre du cadran. Cela est ma-nifeste, puisque
lafigure
8 n’est autre que ledéveloppement
dutétraèdre SPOpl de la
figure 7
sur leplan
de sa base.Si
donc ,
au lieu de deuximages
du centre du trou sur leplan
ducadran ,
on en atrois ;
en les combinant deux àdeux,
on obtiendra trois droites
qui
contiendront toutes le centre ducadran ;
de sorte que si la construction est bienfaite ,
ces trois droitesdevront concourir en un même
point C qui
sera le centre de cecadran.
Ce
point
C ainsiobtenu ,
en lejoignant
aupoint 0
par unedroite,
cette droite sera laprojection
de l’axe sur leplan
ducadran,
c’est-à-dire lasoustylaire.
Construisant ensuite surCO ,
comme côté de
l’angle droit,
untriangle rectangle
dont l’autrecôté de
l’angle
droit O03A3 soitégal
à la hauteur du centre du trou au-dessus duplan
ducadran , l’angle
03A3CO de cetriangle
mesu-rera l’Inclinaison de l’axe sur ce
plan.
Si enfin onconçoit,
par lecentre du trou , une verticale rencontrant le
plan
du cadran enM,
la
ligne
OM sera la méridienne ou laligne
horaire demidi ,
desorte
qu’il
ne resteraplus
à tracer que les autreslignes horaires, Voyons
doncquels principes
doiventprésider
à leur construction.Les
lignes
horaires d’nn cadranplan quelconque
ne sont autrechose
que
les intersections duplan
de ce cadran avec douze autresassujettis
aux conditionssuivantes ,
1.0 de passer tous par la di-rection
de l’axe ducadran ;
2.0 de former autour de cet axe, comme arête commune ,vingt-quatre angles
dièdreségaux
entre eux ; 3.°d’être tellement situés que l’un
d’eux , qui
déterminera la situation de tous les autres, soit vertical. Celui-ci est leplan
du méridien.Si l’on coupe ce
système
de douzeplans
par un autreplan quel-
conque y les intersections seront les
lignes
horaires d’un nouveaucadran
tracé sur ce dernierplan , ayant
même axeque
lepremier.
224 C A D R A N S
Si l’on
représente
par X et Y ces deuxcadrans,
le cadran Xpourra
être
considéré comme laperspective
du cadranY,
pour un0153il situé en un
quelconque
despoints
de l’axe commun ; et , si lesplans
des deux cadrans ne sont pasparallèles,
leur communesection sera
coupée
aux mêmespoints
par leslignes
horaires de l’un et de l’autre.Le
plan
du cadran X étantdonné ;
à cause del’indétermination
duplan
du cadranY ,
onpeut
le choisir tel que le tracé de seslignes
horaires soit desplus faciles ,
et se servir ensuite de ce tracé pour exécuter celui deslignes
horaires du cadranX ,
à l’aide des remarquesqui précèdent.
Or ,
de tous lescadrans,
leplus
facile à construire est , sanscontredit,
le cadranéquinoxial , c’est-à-dire,
celui dont leplan
est
perpendiculaire
à son axe ouparallèle
auplan
del’équateur.
Seslignes horaires ,
eneffet,
font desangles égaux
autour de son centre ,et la
ligne
demidi , qui
détermine toutes les autres , est l’inter- section de sonplan
avec leplan
vertical conduit par son axe.Soient donc
( fig. 9)
S le centre du trou de laplaque ,
0 saprojection orthogonale
sur leplan
ducadran,
et C le centre de cecadran,
de manière que CS ensoit
l’axe et CO lasoustylaire.
Concevons
par cepoint S,
unplan perpendiculaire
à l’axe SC ducadran,
etcoupant
leplan
de ce cadran suivant une droiteGII
rencontrée
en T par leprolongement
deCO ;
ceplan
seracelui d’un cadran
équinoxial ayant
même axe que lepremier ;
desorte que , si du
point
S comme centre et avec STperpendiculaire
à
GH , prise
pour rayon, on décrit un cercle sur ce secondcadran ,
il ne
s’agira
que dediviser
sa circonférence envingt-quatre parties égales
et de menerdu point
S des rayons auxpoints
dedivision ,
pour en obtenir les
lignes horaires
pourvuqu’un
seul de cespoints
dedivision,
celui demidi,
parexemple
soitdonné.
Or ,
soit M lepoint
où leplan
dupremier
cadran estpercé
par la verticale SM menée par le centre du trou ; CM sera la méri-ridienne
de cepremier cadran , coupant
la droite GR aupoint
I2.SOLAIRES.
d’où il suit que la
droite SI2 , coupant
lacirconférence
enM’,
sera la méridienne du
second cadran ,
et lepoint
M’ lepoint
dedépart
des divisions de cette circonférence.Or,
si l’onconçoit
que leplan
du secoxd cadran tourne autourde GH
jusqu’à
se confondre avec celui dupremier ,
TS deviendrale
prolongement
deCT,
et enprolongeant
leslignes
horaires dece dernier
jusqu’à GH,
les droites menées dupoint
C auxpoints
de division de cette droite -seront les
lignes
horaires dupremier.
La construction d’un cadran solaire sur un
plan quelconque,
seréduit
donc à cequi suit.
§.
ILProcédé
pratique.
Supposons ( fig. I0)
que leplan
de lafigure
soit celui du cadran.En avant de ce
plan,
soit solidement établie uneplaque percée
d’untrou
circulaire ;
leplan
de cetteplaque
étant à peuprès dirigé
vers le
pôle
et tourné d’ailleurs de telle sorte que versmidi , à
une
époque
peuéloignée
de l’une deséqumoxes, l’image
solairedu trou soit la
plus
nette et laplus
circulairequ’il
se pourra.Soient
marqués arbitrairement,
sur leplan
ducadran ,
troispoints à
une mêmedistance quelconque
du centre du trou de laplaque,
et soient considérés ces troispoints
comme lestrois sommets
d’un
triangle ;
lesperpendiculaires
sur les milieux de ses côtésdevront se couper toutes trois en un même
point 0 , qui
sera laprojection orthogonale
du centre du trou de laplaque
auplan
ducadran.
Soit mesurée la distance de ce centre à saprojection.
,En un même
jour,
peu distant de l’un dessolstices , soient
marquées
sur le cadran troisimages
solaires du centre du trou de laplaque,
lapremière
entre huit et neuf heures dumatin,
laseconde vers les
midi,
et la troisième de trois àquatre
heures du soir. SoientP, P’,
P" ces troispoints ;
etsoient
menéesOP
OPI, OP", P’P", P"P ,
PP’.226 CADRANS
Soient élevées
respectivement
àOP, OP’, OP",
aupoint 0
des
perpendiculaires OS, OS’, OS" égales
entre elles et à la dis-tance du centre du trou de la
plaque
à saprojection ;
soientmenées
SP, S’P’, S"P";
soientprises
sur cesdroites ,
àpartir
de
S, S’, S",
deslongueurs
arbitrairesSA , S’A’, S"A", égales
entre elles
(*) ;
soient abaissées despoints A , A’,
A"respecti-
vement, sur
OP , OP’, OP",
lesperpendiculaires AB , A’B’, A"B",
et soit formé letriangle
BB’B".Sur
P’P", P/IP ,
ppl comme bases soient construits destriangles P’sP", P"s’P, Ps"P’,
dont les deux autres côtés soientégaux
à
P’S’,
P"S" pour lepremier ; P"S",
PS pour lesecond ; PS ,
P’S’ pour le
troisième ;
soient divisés lesangles s , si ,
s" deces
triangles
en deuxparties égales,
par des droitescoupant
les côtésopposés
enD, D’, D";
enfin despoints D, D’,
Iin soientconduites des droites
respectivement perpendiculaires à B’B", B"B,
BB’;
ces troisperpendiculaires
concourront en un mêmepoint C , qui
sera le centre du cadran.Ce centre ainsi
déterminé,
on achèvera la construction comme il suit.Soit menée la
soustylaire
OC(fig. II),
et, par lepoint 0 ,
soit élevée à cette droite laperpendiculaire
02égale
à la distance du centre dutrou de la
plaque
à saprojection ;
alorsl’angle
CCS déterminera l’inclinaison de l’axe du cadran sur sonplan.
Soit menée à03A3C,
par le
point 03A3,
uneperpendiculaire
rencontrant en T leprolon-
gement
de CO. Soit menée àCT,
par lepoint T
une perpen- diculaire indéfinieGII,
et soitprolongée
CT au-delà de cette per-pendiculaire
d’unequantité T03C3=T03A3 ;
enfin dupoint
7 commecentre et avec 03C3T comme rayon soit décrite une circonférence.
(*)
Leplus simple
serait deprendre
ces troislongueurs égales
à lamoins
longue
des trois droites SP , S’P’, S"P". Si nous ne le faisons pas ici, c’est pour conserver lasymétrie
des notations.227
Supposons présentement qu’en
laissant tomber un fil àplomb
du centre du trou de la
plaque
sa direction rencontre leplan
ducadran en un
point M ;
alors en menantCM ,
rencontrant GI-1en un
point 12 ;
cette droite sera la méridienne du cadran. Me-nant ensuite 03C3I2 ,
coupant
la circonférence enM’,
on diviseracette circonférence en
vingt-quatre parties égales,
àpartir du point
M’;
on mènera du centre a auxpoints
dedivision
des rayonsprolongés jusqu’à
la rencontre de l’indéfinieGH ;
et alors lesdroites menées du
point
C auxpoints
ainsi déterminés sur GHferont les
lignes
horaires du cadran(*).
Le peu
qu’on
vient de lire nousparaît comprendre
toute lagnomonique usuelle ,
surlaquelle
on a écrit tant de traitésvolumineux ;
comme cequ’on
lit à lapage
181 du tome XHIcomprend
toute laperspective.
(*) Il se
pourrait quelquefois
que certaines droites partant dupoint 03B1
ne rencontrassent GH que fort loin du
point
T; mais on sait , et mêmeen