INTÉGRATION
I) Préliminaire : suites adjacentes
Définition 1
On dit que deux suites(un)et (vn)sontadjacentessi l’une est croissante, l’autre décroissante, et si lim
n→+∞(un−vn) = 0.
Exemple
Les suites(un)et(vn)définies parun= 1
n et vn=−1
n sont adjacentes.
Théorème 2
Si deux suites(un)et(vn)sontadjacentes,(un)étant la suite croissante et(vn)la suite décroissante, alors : 1. Pour toutn∈N,un≤vn
2. Les deux suites(un)et (vn)convergent, et elles ont lamême limiteλ.
3. Pour toutn∈N,un≤λ≤vn.
Démonstration
| | | | | | | |
u0 u1 u2 un vn v2 v1 v0
λ|
vn−un
1.
2.
3.
Remarque
La dernière assertion du théorème 2 nous permet d’obtenir des encadrements de la limite λ de plus en plus précis lorsquenaugmente (leur amplitude tend vers0 en décroissant lorsquentend vers+∞).
II) Notion d’intégrale pour une fonction positive
Le plan étant muni d’un repèreorthogonal(O;~ı, ~), on définit les points I,J etK par−→
OI =~i,−−→
OJ =~jetOIKJ rectangle.
L’aire du rectangleOIKJ est appelée une unité d’aire notée1u.a. |
I
|J
x y
K
O
1 u.a
Par exemple, si||~i||= 1,7cmet||~j||= 1cmalors1u.a= 1,7cm2.
Définition 3
Soitf une fonctioncontinueet positivesur un intervalle[a;b](aveca≤b) etC sa courbe représentative dans le repère(O;~ı, ~).
L’aire sous la courbe C sur l’intervalle[a;b] est l’aire, exprimée en unités d’aire, du domaineD délimité parC, l’axe des abscisses, et les droites d’équationsx=aet x=b.
On note Z b
a
f(x)dxcette aire, et on lit«somme dea à b de f(x)dx»ou«intégrale dea à b de f».
aet b sont lesbornes de l’intégrale etxest une variable muette : elle n’intervient pas dans le résultat. On peut utiliser une autre lettre (courammentt ouu) :
Z b a
f(x)dx= Z b
a
f(t)dt= Z b
a
f(u)du.
Remarque
Le domaineD peut aussi être caractérisé comme l’ensemble des pointsM du plan de coordonnées(x;y)dans le repère(O;~ı, ~)vérifiant :a≤x≤b et0≤y≤f(x).
a| b| x
y
Z b
a
f(x)dx=Aire sous la courbe
D
Exemples
• Pour m >0, Z b
a
mdx=
En effet, le domaineD est | |
a b
|m
• Z 3
0
xdx=
En effet, le domaineD est
|
O 3
|3
• Z 3
1
xdx=
En effet, le domaineD est
|
1
|
3
|3
|1
• Si a=b, alors Z b
a
f(x)dx= En effet, le domaineD est
|
a=b
Remarque : les résultats sont exprimés en unités d’aire, les unités prises sur l’avant-dernier dessin ne sont manifestement pas lecm.
Théorème 4 (ADMIS)
Soitf une fonction continue, positiveet croissantesur un intervalle [a;b](aveca≤b) etC sa courbe représentative dans le repère(O;~ı, ~).
L’aire sous la courbe C sur l’intervalle[a;b] est égale à la limite commune des deux suites (un)et (vn) définies par :
un= b−a n
n−1
X
k=0
f
a+kb−a n
et vn= b−a n
n
X
k=1
f
a+kb−a n
oùn∈N∗
Interprétation graphique
Pour tout entiernnon nul, on divise l’intervalle[a; b]ennintervalles de même longueur b−a n . Parcequef est croissante,
- le termeun correspond à l’aire des rectangles situés sous la courbe(en bleu).
- le termevn correspond à l’aire des rectangles situés au dessus de la courbe(en rouge).
Pour toutn, on aun≤ Z b
a
f(x)dx≤vn.
Lorsquentend vers+∞, l’écart entre les aires des deux séries de rectangles tend vers0. Les suites(un)et(vn) tendent alors vers l’aire sous la courbeC. On les appelle lessommes de Riemannassociées à la fonctionf.
u4≥u2 v4≤v2
Remarques
• Les suites(un)et (vn)ne sont pas forcément adjacentes : v4≤v2 mais on ne peut pas à priori comparer v3et v2 car les subdivisions n’ont pas de points communs.
• Si f est continue, positive et décroissantesur l’intervalle [a; b], on peut construire les deux suites de la même façon, mais c’est alorsvn qui correspond à l’aire des rectangles sous la courbe etun qui correspond à l’aire des rectangles situés au dessus de la courbe.
• La propriété se généralise sif est seulement continue (c’est à dire pas forcément monotone) sur l’intervalle [a;b]: les suites (un)et (vn)convergent vers la même limite, qui est l’aire sous la courbe def.
• Si f est croissante, les suites obtenues par découpage en deux de chaque intervalle puis de chaque sous- intervalle :(u2n)et(v2n)sont adjacentes :u2≤u4≤u2n. . .≤v2n ≤v4≤v2. Et lim
n→+∞v2n−u2n= 0.
Définition 5
Soitf une fonctioncontinueetpositivesur un intervalle [a;b],avec a < b.
On appellevaleur moyennede la fonction f sur l’intervalle [a;b]le nombre réelµ= 1 b−a
Z b a
f(x)dx.
Interprétation graphique
µ= 1 b−a
Z b a
f(x)dxéquivaut àµ(b−a) = Z b
a
f(x)dx.
La valeur moyenne sur[a;b]est le réelµtel que le rectangle de dimen- sionsµ et b−asoit de même aire que le domaine situé sous la courbe def.
C’est la valeur qu’il faudrait donner à une fonction constante g sur l’intervalle [a;b] pour que l’aire sous la courbe de g soit égale à l’aire sous la courbe def.
a| b| x
y Z b a
f(x)dx=µ(b−a)
|µ
III) Intégrale d’une fonction de signe quelconque
Le plan est muni d’un repèreorthogonal(O;~ı, ~).
Définition 6 : cas d’une fonction négative
Soitf une fonctioncontinueetnégative sur un intervalle[a;b],avec a < b.
On définit l’intégrale deaàbdef par :
Z b a
f(x)dx=−A
oùA est l’aire du domaineD délimité par la courbe def, l’axe des abscisses, et les droites d’équationsx=a et x=b.
Exemple
Soitf définie surRparf(x) =1 2x−2.
La fonctionf est continue et négative sur [0 ; 3].
L’aire deDest celle du trapèzeOABE, d’où le calcul : Z 3
0
f(x)dx=
Définition 7 : cas d’une fonction changeant de signe
Soit f une fonction continue qui change de signe sur un intervalle [a;b], avec a < b, et C sa courbe représentative.
Soit A1 l’aire de la partie du plan délimitée par la courbeC, l’axe des abscisses et les droites d’équations x=aet x=b, etsituée au dessus de l’axe des abscisses.
Soit A2 l’aire de la partie du plan délimitée par la courbeC, l’axe des abscisses et les droites d’équations x=aet x=b, etsituée en dessous de l’axe des abscisses.
On définit alors Z b
a
f(x)dx=A1−A2.
a| |b x
y Z b
a
f(x)dx=A1−A2
A1
A2
Exemple
On reprend la fonction de l’exemple précédent :f(x) = 1 2x−2.
Z 6 0
f(x)dx=A1−A2, avecA1= et A2= Ainsi,
Z 6
0
f(x)dx=
x y
On étend alors la notion de valeur moyenne d’une fonction continuef de signe quelconque sur[a;b](aveca < b) en donnant la définition :
Définition 8
Soitf une fonctioncontinuesur un intervalle[a;b],avec a < b.
On appellevaleur moyennede la fonction f sur l’intervalle [a;b] le nombre réel µ= 1
b−a Z b
a
f(x)dx
IV) Intégrale et primitive
Si f est continue, positive et croissante sur un intervalle [a;b], alors la fonction x7−→
Z x a
f(t) dt est la primitive def sur[a;b]qui s’annule ena.
a| x| t
y
F(x) = Z x
a
f(t)dt
Onadmetque ce résultat se généralise :
Théorème 9 (ADMIS)
Soitf une fonctioncontinuesur un intervalleI, etaun élément quelconque deI.
La fonctionF définie surIparF(x) = Z x
a
f(t)dtest l’unique primitive def surI qui s’annule ena.
a| |b
x| t
y
F(x) = Z x
a
f(t)dt
Remarques
• On ne peut pas employer la même lettre pour une borne de l’intégrale (ici x) et la variable «muette»
d’intégration, notée ici t.
• La fonction F définie dans le théorème est doncdérivablesurI,de dérivée f.
Exemple
La fonctiont7−→ 1
t est continue sur]0 ; +∞[; son unique primitive s’annulant en1 est la fonction logarithme népérien. Ainsi, pour toutx∈]0 ; +∞[, on a lnx=
Z x 1
1 t dt
Théorème 10 : Calcul d’une intégrale à l’aide d’une primitive Soitf une fonctioncontinuesur un intervalleI. Pour tous réelsaetb deI, on a :
Z b a
f(x)dx=F(b)−F(a) oùF estune primitive quelconque def sur I.
Démonstration
Exemple
La fonction f : x7−→x2−2xest continue surR. L’une de ses primitives surRestF : x7−→
Pour présenter les calculs, on peut écrire Z b
a
f(x)dx=
F(x) b
a
=F(b)−F(a).
Ainsi, Z 2
1
(x2−2x)dx=
2
1
=
V) Propriétés de l’intégrale
Les démonstrations reposent en général sur le calcul d’une intégrale à l’aide d’une primitive, mais l’interprétation en termes d’aire permet de visualiser ces propriétés dans certains cas ; et c’est cette interprétation qu’il faut retenir.
Propriétés algébriques
Proposition 11 : Relation de Chasles
Soitf une fonctioncontinuesur un intervalleI. Pour tous réelsa,b etcdeI, on a : Z c
a
f(x)dx= Z b
a
f(x)dx+ Z c
b
f(x)dx
Démonstration
Remarques
On a le cas particulier suivant : Z b
a
f(x)dx+ Z a
b
f(x)dx= Z a
a
f(x)dx= Ainsi, Z a
b
f(x)dx=− Z b
a
f(x)dx C’est à dire que lorsqu’on intègre dans l’« autre sens », l’intégrale change de signe.
En termes d’aire, lorsque f est continue et positive sur I et a ≤ b ≤ c, la relation de Chasles traduit que l’aire du domaine hachuré est la somme des aires des domainesD1etD2.
a| b|
c| x
y Z c
a
f(x)dx= Z b
a
f(x)dx+ Z c
b
f(x)dx
Exemple
Z 3
0
(|2−t|+|1−t|)dt=
|
3
|3
Proposition 12 : Linéarité
Soientf et gdeux fonctions continues sur un intervalleI, etαun réel. Pour tous réelsaetb deI, on a : Z b
a
(f+g)(x)dx= Z b
a
f(x)dx+ Z b
a
g(x)dx et
Z b a
(αf)(x)dx=α Z b
a
f(x)dx
Démonstration
Intégrale et inégalités
Proposition 13 : Positivité
Soitf une fonction continue sur un intervalleI,aetbdeux réels de Itels que a≤b.
Si f est positivesur[a;b], alors Z b
a
f(x)dx≥0.
Cette propriété est liée à la définition de l’intégrale, pour une fonction positive, comme aire située sous la courbe représentative de la fonction sur[a;b].
ATTENTION : La réciproque n’est pas vraie : une fonctionf peut très bien avoir une intégrale positive sur l’intervalle[a;b]sans être elle-même positive sur tout cet intervalle ! Donnez un exemple à l’aide d’un graphique
Proposition 14 : Signe d’une intégrale
si f ≥0 sur I aveca≤b, Z b
a
f(x)dx 0 aveca≥b, Z b
a
f(x)dx 0 si f ≤0 sur I aveca≤b,
Z b a
f(x)dx 0 aveca≥b, Z b
a
f(x)dx 0
Exemple
Sans calculs, on a les inégalités suivantes : Z 0
−2
(1 + sin2(x))dx 0; Z 1
2
√xdx 0; Z 0,8
0,5
lnxdx 0
Proposition 15 : Conservation de l’ordre
Soientf et gdeux fonctions continues sur un intervalleI,aetb deux réels deI tels quea≤b.
Si f ≤g sur[a; b], alors Z b
a
f(x)dx Z b
a
g(x)dx.
Démonstration
En termes d’aires, si f et g sont continues et positives sur [a;b], l’inégalité traduit le fait que l’aire du domaineD1 situé sousCf est inférieure à l’aire deD2situé sous Cg.
Proposition 16 : Inégalités de la moyenne
Soitf une fonction continue sur un intervalleI, etaetb deux réels dansI.
• S’il existe deux réelsm etM tels quem≤f ≤M surI, et sia≤b, alors : m(b−a)≤
Z b a
f(x)dx≤M(b−a)
• S’il existe un réelM positif tel que|f| ≤M surI, alors
Z b a
f(x)dx
≤M |b−a|.
Démonstration
En termes d’aires,pourfpositive etm >0, cet encadrement traduit que l’aire du domaine D est comprise entre les aires des deux rec- tangles de hauteursmet M, de largeurb−a.
a| |b x
y
|M
|m
Exemple
Soit la fonction inverse sur l’intervalle[1 ; 2].
1 2 ≤ 1
x≤1, d’où 1 2 ≤
Z 2
1
1
x dx≤1, soit 1
2 ≤ln 2≤1.
VI) Intégration par parties
Dans certains cas où on ne peut pas utiliser les formules usuelles pour calculer des intégrales ou déterminer des primitives, on peut utiliser la formule suivante :
Proposition 17 : Intégration par parties
Soientuetv deux fonctions dérivables sur l’intervalleI, telles queu′ etv′ soientcontinuessurI.
Pour tous réelsaetb deI, on a : Z b
a
u(x)v′(x)dx=
u(x)v(x) b
a
− Z b
a
u′(x)v(x)dx
Démonstration
Remarque
L’intégration par parties est souvent utilisée pour calculer l’intégrale d’une fonction f dont on ne connaît pas de primitive et qui s’écrit sous la forme d’un produit. En particulier lorsquef(x)est de la forme :
P(x)×ln(x) , P(x)×ex , P(x)×cosx , P(x)×sinx oùP est une fonction polynôme.
Dans chacun de ces cas, on dérive le polynôme, sauf dans le cas deP(x)×ln(x)où on dériveln(x).
Exemples
• Calcul de Z 1
0
(2−t)etdt
On intègre par parties en posant :
u(t) = 2−t u′(t) =−1 v′(t) =et v(t) =et
et il vient :
Z 1
0
(2−t)etdt =
(2−t)et 1
0
− Z 1
0
−etdt
= (2−1)e1−2e0+ Z 1
0
etdt
= e−2 + Z 1
0
etdt
= e−2 +
et 1
0
=e−2 +e1−e0= 2e−3
• Calcul de I= Z 1
0
t2e3tdt
On intègre par parties en posant :
u(t) =t2 u′(t) = 2t v′(t) =e3t v(t) =e3t 3
et il vient :
I= Z 1
0
t2e3tdt = 1
3t2e3t 1
0
− Z 1
0
2 3te3tdt
= e3 3 −2
3 Z 1
0
te3tdt
On fait alors une seconde intégration par parties pour le calcul deJ = Z 1
0
te3tdten posant :
u(t) =t u′(t) = 1 v′(t) =e3t v(t) = e3t
3
et il vient :
J = Z 1
0
te3tdt = 1
3te3t 1
0
− Z 1
0
e3t 3 dt
= e3 3 −
e3t 3
1
0
=1 + 2e3 9
Par conséquent,I=e3 3 −2
3J =e3 3 −2
3
1 + 2e3 9
et enfin, on obtient Z 1
0
t2e3tdt= 5e3−2 27
• Calcul de Z 4
0
te−tdt −5e−4+ 1