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Réintégrer les départements annexés : le gouvernement et les services d’Alsace-Lorraine (1914-1919)

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Academic year: 2021

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Submitted on 12 Feb 2019

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Réintégrer les départements annexés : le gouvernement et les services d’Alsace-Lorraine (1914-1919)

Joseph Schmauch

To cite this version:

Joseph Schmauch. Réintégrer les départements annexés : le gouvernement et les services d’Alsace- Lorraine (1914-1919). Histoire. Université de Lorraine, 2016. Français. �NNT : 2016LORR0252�.

�tel-01752401�

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AVERTISSEMENT

Ce document est le fruit d'un long travail approuvé par le jury de soutenance et mis à disposition de l'ensemble de la communauté universitaire élargie.

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LIENS

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http://www.culture.gouv.fr/culture/infos-pratiques/droits/protection.htm

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École doctorale Fernand Braudel (ED 411) Centre de Recherche Universitaire Lorrain d’Histoire (E

RÉINTÉGRER LES DÉPARTEMENTS

Le gouvernement et

Thèse pour le doctorat en histoire contemporaine soutenue par Joseph Schmauch

M. Jean-Noël Grandhomme, professeur des universités

M. François Cochet, professeur des universités (université de Lorraine M. Olivier Dard, professeur des universités (université de

M. Paul Dietschy, professeur des universités (université de Franche M. Bertrand Joly, professeur des universités (université de Nantes M. Étienne Thévenin,

UNIVERSITÉ DE LORRAINE

École doctorale Fernand Braudel (ED 411) Centre de Recherche Universitaire Lorrain d’Histoire (EA

RÉINTÉGRER LES DÉPARTEMENTS ANNEXÉS

Le gouvernement et les services d’Alsace-Lorraine

Thèse pour le doctorat en histoire contemporaine soutenue par Joseph Schmauch, archiviste-paléographe

Directeur de recherche :

Noël Grandhomme, professeur des universités (université de Lorraine

Membres du Jury :

François Cochet, professeur des universités (université de Lorraine Olivier Dard, professeur des universités (université de Paris-Sorbonne

hy, professeur des universités (université de Franche Bertrand Joly, professeur des universités (université de Nantes Étienne Thévenin, maitre de conférences HdR (université de Lorraine

Nancy - 1er décembre 2016

3945)

ANNEXÉS

(1914-1919)

paléographe

(université de Lorraine)

François Cochet, professeur des universités (université de Lorraine) Sorbonne) hy, professeur des universités (université de Franche-Comté) Bertrand Joly, professeur des universités (université de Nantes)

de conférences HdR (université de Lorraine)

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Remerciements

La soutenance de cette thèse vient conclure un travail initié en 2001 dans le cadre de ma scolarité à l’École nationale des Chartes. Monsieur le professeur Jean-Marie Mayeur† (université Paris IV Sorbonne) m’a orienté vers le fonds de l’administration d’Alsace-Lorraine conservé aux Archives nationales et messieurs les professeurs Georges-Henri Soutou (université Paris IV Sorbonne) et Bruno Delmas (École nationale des Chartes) m’ont accompagné dans la réalisation de ma thèse d’École des Chartes soutenue en 2004. Monsieur le professeur Jean-Noël Grandhomme m’a proposé, en 2012, de remettre mon ouvrage sur le métier. Qu’il soit remercié de son écoute, de sa disponibilité, des pistes de recherche stimulantes qu’il m’a suggérées et des opportunités intellectuelles offertes au travers des nombreuses manifestations scientifiques auxquelles il m’a invité à prendre part. Je souhaite remercier également l’ensemble des historiens-chercheurs qui, à l’occasion de colloques, de rencontres, m’ont orienté vers des sources inexploitées et prodigué de judicieux conseils. J’aimerais rendre un hommage plus particulier au professeur François Roth†, auteur d’une thèse sur la Lorraine annexée, spécialiste des institutions du Reichsland et fin connaisseur des archives berlinoises, qui s’est éteint cette année.

Ma gratitude va également à mes confrères et consoeurs archivistes, qui m’ont toujours facilité l’accès aux documents dont ils assurent la conservation, ainsi qu’au personnel des services d’archives et des bibliothèques. J’aimerais remercier en particulier madame Michèle Conchon, conservatrice en chef aux Archives nationales (département de l’Exécutif et du Législatif), qui a dressé un répertoire numérique détaillé du fonds de l’administration provisoire de l’Alsace-Lorraine après 1914, ainsi que madame Françoise Aujogue, conservatrice aux Archives diplomatiques, qui a eu la gentillesse de classer les archives de l’ambassadeur Maurice Bompard. Mes remerciements vont à la Maison de Wittelsbach (Haus Wittelsbach), aux Archives secrètes du Vatican (Archivio Segreto Vaticano), à l’Institut de France et à la Fondation de Wendel, qui m’ont accordé les autorisations nécessaires à la consultation de fonds d’archives qui se sont révélés fort utiles. Merci également à messieurs Robert Blumenthal, André Hugel et Jean-Noël Jeanneney, qui ont eu la diligence de me communiquer des documents de famille inédits.

L’écriture d’une thèse est une aventure longue et difficile. Je remercie toutes les personnes qui m’ont accordé leur soutien et leur amitié dans la réalisation de ce travail, en particulier mon épouse Roseline, Mathieu, pour ses précieux conseils et l’examen attentif de mes écrits, ainsi que tous les patients relecteurs venus prêter main forte dans la dernière ligne droite (Christian, David, Delphine, Ludovic, Mathilde, Nathalie et Stéphane). Je me tourne enfin vers Xavier, qui m’a initié au déchiffrement de l’allemand gothique.

J’aimerais dédier cette thèse à mon grand-père homonyme, Joseph Schmauch† (1922-2013), Ancien de Tambow, qui a vécu au plus près le drame des Alsaciens-Lorrains et œuvré à la préservation du patrimoine linguistique de sa région à travers son engagement en faveur du théâtre alsacien.

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Sommaire

Abréviations utilisées

Introduction générale

I. Périmètre de l’étude, sources et méthodologie de recherche A. Définition du sujet, historiographie

B. Les sources

II. Les problématiques soulevées

A. Une étude s’inscrivant dans un prisme régional B. La France et l’Alsace-Lorraine

C. Gouvernement, organisation administrative et pratiques du pouvoir

I. Préparer le retour à la France

Chapitre 1. Le temps des initiatives : la création de la Conférence d’Alsace-Lorraine et des premiers organismes consacrés aux provinces annexées (1914-1916)

I. Les hommes

A. Alsaciens de Paris, de Nancy, de Belfort : un groupe social et un réseau politique B. Août 1914 : départ en France de membres du parti francophile alsacien

II. Union sacrée et espérance : le gouvernement et la question d’Alsace-Lorraine (1914-1915) A. Aux origines de la Conférence d’Alsace-Lorraine

B. Mise en place de la Conférence d’Alsace-Lorraine

III. Une nébuleuse d’organismes dans le sillage de la Conférence d’Alsace-Lorraine A. Le Comité d’études économiques et administratives

B. François de Wendel et le Groupe lorrain C. Autres initiatives et groupes de réflexion

Chapitre 2. De l’ « année trouble » à la paix : l’Alsace-Lorraine au cœur des buts de guerre français (1917-1918)

I. L’Alsace-Lorraine dans le jeu politique et diplomatique

A. 1914-1917 : l’Alsace-Lorraine, un but de guerre parmi d’autres…

B. Diplomatie secrète et tentatives de paix : vers une issue négociée ?

C. L’Alsace-Lorraine, au cœur de la redéfinition des buts de guerre français D. Le parti socialiste et l’Alsace-Lorraine : un positionnement original, mais ambigu II. Les organismes chargés d’une mission de préfiguration (1917-1918)

A. Aristide Briand, le Comité d’études et l’Alsace-Lorraine B. Le service d’Alsace-Lorraine au ministère de la Guerre C. Création de sous-commissions thématiques et attributions

D. Une évolution des missions dévolues à la Conférence d’Alsace-Lorraine

E. Ultimes réflexions et décrets pris dans la perspective d’une occupation prochaine de l’Alsace-Lorraine

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Chapitre 3. Les projets français pour l’Alsace-Lorraine d’après-guerre I. Organisation administrative

A. Organisation départementale et régionale B. Organisation communale

C. La question des fonctionnaires : recrutement, salaires, pensions D. Élections et droit électoral

E. Service militaire des Alsaciens-Lorrains et constitution d’une gendarmerie II. Législation

A. Caractère de l’occupation française en Alsace-Lorraine B. Réintroduire la législation française : lois civiles et pénales C. Le droit immobilier : Livre foncier et hypothèques

D. L’organisation judiciaire E. Questions de nationalité III. Questions économiques

A. Approvisionnement en matières premières, commerce extérieur et régime douanier B. Les mines de potasse d’Alsace

C. La viticulture alsacienne

D. Questions relatives aux transports : chemins de fer et navigation sur le Rhin E. Banques, crédits et retrait des capitaux allemands en Alsace-Lorraine F. Législation du travail, professions réglementées

G. Les assurances sociales IV. Questions financières

A. La fiscalité directe

B. Fiscalité indirecte, valeurs mobilières, timbre et enregistrement C. Les finances locales

D. Dommages de guerre, pensions des fonctionnaires, questions monétaires, PTT V. Enseignement primaire et secondaire

A. L’enseignement primaire B. L’enseignement secondaire C. L’enseignement privé

D. L’enseignement technique et professionnel VI. L’avenir de l’université de Strasbourg

A. Quelle organisation pour l’université française de Strasbourg ? B. Une université fer de lance de la France

C. La bibliothèque de l’université de Strasbourg VII. La question linguistique

A. La situation en 1914

B. Les services d’Alsace-Lorraine et la question linguistique C. La question de l’accent alsacien

VIII. Le statut des cultes

IX. Beaux-Arts et politiques culturelles

A. Architecture et monuments historiques B. Politique culturelle et musées

Chapitre 4. Intégration dans le Royaume de Prusse, partage ou octroi de l’autonomie : les projets allemands pour l’Alsace-Lorraine

I. Un pays déloyal

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7 II. Le temps des plans de partage (1914 à mai 1917)

A. Premières propositions, premières divergences B. Une alternative bavaroise pour l’Alsace

C. La réponse du gouvernement impérial

D. Bade, Wurtemberg, Saxe : front commun contre les positions bavaroises E. Une question devenue politique

F. Réception à l’étranger

III. L’heure de l’autonomie pour l’Alsace-Lorraine ? (juin – décembre 1917) A. La situation politique : renforcement du Reichstag et crise ministérielle B. Les socio-démocrates et l’autonomie de l’Alsace-Lorraine

C. Vers la paix ?

D. Les débats sur l’autonomie de l’Alsace-Lorraine E. Vers un grand-duché d’Alsace-Lorraine ? F. La campagne d’opinion des pangermanistes G. La grande consultation du chancelier Hertling IV. Les derniers atermoiements (1917-1918)

A. L’état-major impose ses vues

B. Poursuite des querelles entre États fédérés C. L’ultime tentative

II. Faire « aimer la France »

Chapitre 5. Réfugiés, évacués, prisonniers de guerre : la prise en charge des Alsaciens- Lorrains déplacés

I. Organiser l’accueil des réfugiés civils

A. Otages et évacués : les premiers déplacements de populations

B. L’automne 1914 : des incertitudes aux premières mesures administratives

C. Mise en place de la commission interministérielle de classement des Alsaciens-Lorrains D. Structuration des lieux du refuge, difficultés persistantes dans l’accueil des évacués E. Un sujet politiquement embarrassant

F. L’application de la convention franco-allemande sur l’échange d’internés civils G. Les évacués, la commission interministérielle et la conclusion de l’Armistice II. Camps, dépôts et refuges : typologie des lieux d’accueil et études de cas

A. Les lieux du refuge

B. Le camp d’Ajain (Creuse), un dépôt de suspects

C. À l’arrière du front : des Alsaciens évacués dans le département des Vosges

D. L’accueil des Alsaciens-Lorrains en « maison de refuge » : l’exemple d’Ornans (Doubs) III. Prendre en charge les Alsaciens-Lorrains sous uniforme allemand

A. La nébuleuse des camps de prisonniers de guerre B. La vie dans les camps

C. Susciter l’engagement dans l’armée : Albert Carré et le service des Alsaciens-Lorrains

Chapitre 6. Au Pays de la Marseillaise. La propagande française et l’Alsace-Lorraine.

I. Du constat à l’action : l’organisation des services chargés de la propagande sur l’Alsace-Lorraine A. L’organisation française de la propagande

B. Au cœur de l’effort : le Bureau spécial d’études d’Alsace-Lorraine II. En France : une propagande sur tous les fronts

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A. La propagande sur l’Alsace-Lorraine : modes d’action B. Les fronts nouveaux de la propagande

III. À l’étranger : mobiliser les Alliés, convaincre les Neutres A. La propagande auprès des alliés de la France

B. Les propagandistes, les États-Unis et la question d’Alsace-Lorraine C. Une attention particulière portée aux pays neutres et non engagés IV. Les thèmes de la propagande française

A. La Conférence d’Alsace-Lorraine face à la question de la propagande B. La lettre de mission donnée au Bureau d’études d’Alsace-Lorraine C. La propagande sur l’Alsace-Lorraine à travers le matériel diffusé D. Quelques figures de propagandistes

III. Administrer l’Alsace et la Lorraine

Chapitre 7. Les vallées vosgiennes : un laboratoire de l’Alsace française I. L’organisation administrative et judiciaire

A. Un territoire sous occupation militaire

B. 1917 : la réorganisation du cadre administratif C. La gestion des affaires communales

D. Législation allemande et procédures françaises : l’organisation judiciaire des vallées vosgiennes

II. Économie, éducation, affaires civiles : les politiques mises en œuvre A. Des promesses très politiques

B. Un territoire sous régime concordataire

C. Le poids de la guerre : évacués, réfugiés, « landwéhriens » D. Politique économique et sociale

E. À l’école de la République III. L’Alsace française, une vitrine

Chapitre 8. La « Constitution de novembre », les débuts de l’administration française en Alsace-Lorraine

I. Novembre-décembre 1918 : la France s’installe en Alsace-Lorraine A. L’entrée des généraux et des troupes militaires

B. Des commissaires de la République à Strasbourg, Metz et Colmar C. L’arrivée des fonctionnaires d’autorité et l’organisation des services

D. La visite de Raymond Poincaré et de Georges Clemenceau dans les provinces reconquises II. Centralisme ou déconcentration : quelle organisation administrative pour l’Alsace-Lorraine reconquise ?

A. Le service général d’Alsace-Lorraine, une administration parisienne B. Les moyens : des fonctionnaires, un budget, des procédures de travail C. La liquidation du Reichsland

III. Affaires militaires, Justice, administration des communes : le rétablissement de la souveraineté française

A. L’installation des autorités militaires, l’accueil des démobilisés et des prisonniers de guerre B. L’installation de la Justice française

C. Les services de l’Intérieur, la police et la gendarmerie D. L’administration des communes

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Chapitre 9. Classement, expulsions et commissions de triage : les politiques d’épuration I. L’expulsion des Allemands

A. Les premières mesures

B. La circulaire Clemenceau du 24 janvier 1919 C. Le déroulement des expulsions

D. Les expulsés : quel profil sociologique ? E. Le regard des contemporains

II. Le criblage des Alsaciens-Lorrains

A. Des cartes d'identité pour répartir la population

B. Les Alsaciens-Lorrains devant les commissions de triage C. Le regard porté sur les commissions de triage

Chapitre 10. Economie, transports, monde du travail. Les premières réalisations de l’administration française

I. Réorienter les échanges économiques

A. Changer de monnaie et lever l'impôt : les problématiques financières B. Agriculture, Eaux et Forêts

C. La reprise industrielle

D. L'exploitation minière et l'approvisionnement en combustible E. La reprise des échanges commerciaux

II. Transports et moyens de communication en Alsace et en Lorraine reconquises A. Travaux publics et voirie

B. Quel avenir pour la Kaiserliche ? Les chemins de fer d’Alsace-Lorraine C. La France s’installe sur l’axe rhénan : navigation et port de Strasbourg D. Poste, télégraphe et téléphone en Alsace-Lorraine reconquise

III. L’administration française face au mouvement ouvrier et aux questions sociales A. Panser les séquelles de la guerre

B. L’Administration d’Alsace-Lorraine face aux conflits sociaux

C. La question des fonctionnaires, la nouvelle administration du Travail et le chômage

Chapitre 11. Questions culturelles et religieuses

I. Un système d’enseignement au service de la cause française

A. La mise en place des structures d’enseignement (primaire et secondaire) B. D’une université à l’autre

II. Une politique linguistique contestée

A. Le français, langue de l’administration B. Le français, langue de l’enseignement C. Des cours du soir pour apprendre le français

III. La querelle religieuse : statut des cultes et confessionnalité de l’école A. Le statut des cultes

B. L’école confessionnelle

IV. L’action culturelle française : écrit, image, théâtre et cinéma A. La propagande française dans les provinces recouvrées B. Le théâtre

C. La propagande par le cinéma

V. La conservation du patrimoine historique et documentaire

A. L’administration des Beaux-Arts et les monuments historiques

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10 B. Réclamations, transferts et retour d’œuvres d’art C. Les services départementaux d’archives

Chapitre 12. Les signes du « malaise » et la réorganisation de l’administration d’Alsace- Lorraine

I. La reconstitution des partis et leur rôle dans l’évolution de l’opinion publique A. L’administration française face au Conseil national

B. La reprise de la vie politique

C. Premiers mouvements à caractère autonomiste II. Les premiers signes du malaise alsacien

A. La multiplication des critiques dans la presse B. L’administration face au revirement de l’opinion III. Vers une résolution de la crise administrative

A. Les premières interventions auprès de Georges Clemenceau et de Raymond Poincaré B. Le Conseil supérieur d’Alsace-Lorraine face à la crise

IV. La nomination d’Alexandre Millerand et la mise en place du Commissariat général de la République

A. Tractations autour de la nomination de Charles Jonnart B. La solution Millerand

C. L’organisation du Commissariat général de la République

Conclusion générale État des sources Bibliographie Annexes

Notices biographiques de membres de la conférence d’Alsace-Loraine Organigramme des services d’Alsace-Lorraine au 1er avril 1917

Organigramme des services d’Alsace-Loraine au 1er janvier 1918 Organigramme des services d’Alsace-Lorraine au 1er janvier 1919 Organigramme des services d’Alsace-Lorraine au 1er juin 1919

Les lieux d’évacuation et d’internement des Alsaciens-Lorrains pendant la Première Guerre mondiale

Pièces justificatives

Rapport d’Anselme Laugel sur l’organisation administrative de l’Alsace-Lorraine, 6 juillet 1916

Lettre-pétition adressée par l’Assemblée des réformés conservateurs de Strasbourg au grand-duc de Bade Frédéric II, 23 août 1917

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Lettre adressée par le cardinal Alfred Baudrillart à Jules Cambon au sujet de la situation en Alsace reconquise, 18 septembre 1917

Décret du 15 septembre 1918 portant création du service général d’Alsace-Lorraine près la présidence du Conseil

Rapport du commissaire de la République à Metz Léon Mirman sur son installation, 28 novembre 1918

Rapport du maire de la commune de Hazembourg, 11 décembre 1918

Rapport du commissaire de la République en Lorraine sur la question linguistique à l’école, 28 février 1919

Index

Table des illustrations Table des matières

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Abréviations utilisées

Arch. nat. Archives nationales

Arch. Aff. étrangères Archives du ministère des Affaires étrangères Serv. hist. Défense Service historique de la Défense

Arch. dép. -- Archives départementales + nom du département

Arch. mun. -- Archives municipales + nom de la commune

Arch. Cons. israél. Bas-Rhin Archives du Consistoire israélite du Bas-Rhin BnF, manuscrits Bibliothèque nationale de France, département des

manuscrits

Bib. Institut Bibliothèque de l’Institut de France

Bundesarch. Abt. DR Archives fédérales allemandes, section « Empire allemand » - Bundesarchiv, Abteilung « Deutsches Reich »

Pol. Arch. Auswärtiges Amt Archives du ministère allemand des Affaires étrangères - Politischesarchiv des auswärtigen Amts

Geh. Staatsarch. Preuss. Kulturbesitz Archives d’État prussiennes – Geheimes Staatsarchiv Preussischer Kulturbesitz

Bay. HptStaatsarch. Archives d’État de Bavière, dépôt central - Bayerisches Hauptstaatsarchiv

Bay. Geh. Hausarch. Archives de la Maison Souveraine de Bavière – Geheimes Hausarchiv

Landesarch. BW Stuttgart Archives de Bade-Wurtemberg, Stuttgart - Landesarchiv Baden-Württemberg, Hauptstaatsarchiv Stuttgart Landesarch. BW Karlsruhe Archives de Bade-Wurtemberg, Karlsruhe - Landesarchiv

Baden-Württemberg, Generallandesarchiv Karlsruhe Landesarch. BW Freiburg-i.-B. Archives de Bade-Wurtemberg, Fribourg-en-Brisgau -

Landesarchiv Baden-Württemberg, Staatsarchiv Freiburg-im-Breisgau

Arch. féd. suisses Archives fédérales suisses

Staatsarch. Basel-S. Archives cantonales de Bâle-Ville – Staatsarchiv Basel- Stadt

Staatsarch. Basel-L. Archives cantonales de Bâle Campagne – Staatsarchiv Basel-Land

Arch. Segr. Vaticano Archives secrètes du Vatican - Archivio Segreto Vaticano Arch. Palais Monaco Archives du Palais Princier de Monaco

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Introduction générale

I.PÉRIMETRE DE LÉTUDE, SOURCES ET MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE A. Définition du sujet, historiographie

Les services d’Alsace-Lorraine, mis en place par la France entre 1914 et 1919, constituent un exemple significatif d’organisme administratif né des besoins de la guerre1. Dès le déclenchement du conflit, le gouvernement de René Viviani se préoccupe des problèmes que poserait la reconquête des Provinces perdues. La prise de Mulhouse le 7 août 1914, si elle suscite un bel enthousiasme et accrédite un temps l’idée d’une victoire rapide sur l’Allemagne, représente aussi l’occasion d’un premier contact entre les troupes françaises et les Alsaciens. Dès la nuit du 9 août, la ville est reprise, mais une partie de la Haute-Alsace est désormais occupée et administrée par les armées françaises.

Dès lors, des difficultés surgissent et cette première confrontation avec le terrain permet de commencer à prendre la mesure des problèmes administratifs et juridiques que soulèverait le retour à la France des pays annexés dans leur totalité.

Par « services d’Alsace-Lorraine », on entend l’ensemble des administrations civiles chargées des affaires d’Alsace-Lorraine : on ne s’étendra pas sur les organes militaires d’occupation (états- majors et organismes rattachés, gouvernements militaires de Strasbourg et de Metz), qui ne seront abordés que dans leurs relations avec les administrations civiles. L’histoire de ces institutions, chargées d’abord d’un travail de préparation et de prévision, investies au lendemain de l’Armistice du 11 novembre 1918 d’un pouvoir d’administration, constitue la matière de cette étude. Ma thèse de doctorat vise à approfondir des recherches déjà menées dans le cadre d’une thèse d’École des Chartes soutenue en 20042, consacrée aux organes administratifs liés à l’Alsace-Lorraine, en ouvrant le sujet sur une perspective plus politique. Cette étude s’intéressera aux choix faits par le gouvernement face aux problèmes que soulève la réintégration de l’Alsace-Lorraine dans la communauté nationale : définition d’un régime administratif, conditions d’introduction de la législation française, intégration à l’espace économique français, poursuite des politiques sociales développées du temps allemand, politiques à mettre en œuvre dans les domaines linguistique ou cultuel, application de mesures d’ « épuration ». Elle évaluera le rôle joué par la question d’Alsace- Lorraine dans la définition des buts de guerre (aux heures d’optimisme comme aux heures de doute), et dans la politique étrangère de la France (notamment à travers les négociations secrètes avec les empires centraux). Cette thèse étudiera enfin la perception française de l’Alsace-Lorraine, s’intéressant aux positionnements adoptés par les différentes composantes politiques, mais aussi au message délivré par la propagande de guerre. L’espace géographique dans lequel s’inscrit ce sujet de recherches – une région au cœur d’un contentieux international, s’appuyant sur une double culture – permet d’y intégrer une dimension comparatiste. D’autres territoires européens s’inscrivent à cette époque dans des contentieux territoriaux. C’est le cas du Trentin, territoire autrichien (Welsch-Tirol

1 La Première Guerre mondiale a vu, dans l’ensemble des États belligérants, une floraison d’institutions nouvelles destinées à satisfaire les besoins militaires, administratifs et économiques. L’administration de l’Alsace constitue l’un des sujets brûlants de l’été 1914, auquel la République se doit d’apporter une réponse politique et institutionnelle.

2 Les services d’Alsace-Lorraine face à la réintégration des départements de l’Est (1914-1918), thèse pour le diplôme d’archiviste-paléographe, sous la direction de Bruno Delmas (École nationale des Chartes) et de Georges-Henri Soutou (université de Paris IV Sorbonne), Paris, 2004.

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autour de Trente, Süd-Tirol autour de Bozen [Bolzano]), mixte sur le plan linguistique, dont le désir de conquête par le royaume d’Italie s’inscrit dans une volonté d’achèvement de l’Unité du pays et la revendication des Terre irredente (terres irrédentes). La Transylvanie, territoire peuplé de Roumains, de Hongrois et de Saxons, intégré en Transleithanie à la suite du compromis de 1867 et revendiqué par le Royaume de Roumanie en constitue un second exemple. On mentionnera également le cas du Nord-Schleswig (ou Juitland du Sud), annexé par la Prusse en 1864 lors de la guerre des Duchés et revendiqué par le gouvernement de Copenhague3. Le cas du Nord-Schleswig est peut-être celui qui se rapproche le plus de l’Alsace-Lorraine, dans la mesure où la revendication danoise est fondée sur un « droit d’antériorité ». L’annexion par la Prusse s’est traduite par l’exil, volontaire ou contraint, de nombreux danophiles, incarnant un courant favorable à la reconquête de ces territoires. L’Empire allemand y pratique une politique d’assimilation modérée, conditionnée par des considérations de politique étrangère, Berlin comptant sur la neutralité danoise dans l’hypothèse d’une guerre européenne. Le début du règne de Guillaume II est marqué toutefois par un renforcement des politiques de germanisation, mises en œuvre par le Président supérieur von Köller, ancien secrétaire d’État d’Alsace-Lorraine4. Tandis que le gouvernement français élabore ses plans, quels sont les projets échafaudés de l’autre côté de la ligne de front ? Dans quelle mesure ces réflexions allemandes ont-elles influé sur les orientations du gouvernement français ? Un chapitre de cette étude cherchera à débrouiller les réflexions engagées, dans le même temps, par le gouvernement impérial allemand quant à l’avenir du Reichsland.

Les limites chronologiques imposées par le sujet correspondent à celles du premier conflit mondial. Si l’occupation des vallées vosgiennes, dans les semaines qui suivent la déclaration de guerre, constitue un jalon chronologique initial naturel, il s’est avéré plus délicat de fixer une date de terme à mes recherches. L’étude institutionnelle des services d’Alsace-Lorraine serait susceptible, en effet, de déborder au-delà de la fin de la Grande Guerre : des services administratifs spécifiques à l’Alsace-Lorraine sont maintenus jusqu’en 1947, date à laquelle les préfets du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle cessent de relever directement de la Présidence du Conseil. Au vu de l’étendue des sources disponibles et de la nécessité de conserver une cohérence à ce travail, le choix a été fait de borner le sujet au printemps 1919, marqué par deux évènements majeurs : la mise en place, au mois d’avril, du Commissariat général de la République à Strasbourg, qui a vocation à administrer de manière pérenne les provinces reconquises, la signature du traité de Versailles, le 6 juin 1919, portant réintégration de l’Alsace-Lorraine dans la souveraineté française5. Du fait de ce champ chronologique, cette étude s’inscrit dans l’historiographie de la Première Guerre mondiale, qui a connu un fort regain dans le contexte des commémorations du Centenaire. Se penchant sur les enjeux des commémorations, Jean-Noël Jeanneney souhaitait « qu'un anniversaire de la dimension de celui qui s'annonce soit habité par les Français d'aujourd'hui d'une manière qui leur soit diversement féconde6 ». L’évènement s’est révélé particulièrement productif sur le plan scientifique

3 Baechler (Christian), « Le Reich allemand et les minorités nationales (1871-1918) », dans Revue d’Allemagne et des pays de langue allemande, n° 28, 1996, p. 40-41. Jusqu’en 1864, le duché du Schleswig constituait un fief de la couronne danoise, jusqu’à sa conquête par la Prusse, en même temps que les provinces allemandes du Holstein et de Lauenbourg dirigées par le Danemark. L'article 5 du traité de Prague (1866) entre l'Autriche et la Prusse stipulait qu'un plébiscite devait intervenir dans les six ans dans la partie nord du Schleswig ; cette promesse ne fut pas tenue. La question du Schleswig sera débattue dans le cadre du Congrès de la Paix de 1919 et débouchera sur la tenue d’un plébiscite en 1920. À l’issue de cette consultation, le Nord-Schleswig fera retour au Danemark, tandis que le Schleswig central sera maintenu dans la souveraineté allemande.

4 Ibidem.

5 L’étude portera sur des organismes politiques et administratifs provisoires, liés à l’état de guerre et ayant vocation à disparaître à l’issue des hostilités.

6 Jeanneney (Jean-Noël), La Grande Guerre, si loin, si proche, Réflexions sur un centenaire, Paris, Seuil, 2013, 158 p.

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et éditorial, donnant lieu à des publications touchant l’ensemble des prismes d’étude possibles (militaire, politique, économique, social, méthodologique). On relève la publication de plusieurs synthèses, précisant certains faits, interrogeant les responsabilités ou battant en brèche quelques idées reçues encore largement répandues7 : citons les travaux de François Cochet8, de Jean-Yves Le Naour9, ou, pour l’historiographie britannique, de Jay Winter10. Sur le plan régional, signalons les deux opus publiés sous la direction de Jean-Noël Grandhomme (Boches ou tricolores11 et Les Alsaciens-Lorrains dans la Grande Guerre12). À partir de nombreux documents, publics ou de famille, les auteurs du second ouvrage sont parvenus à restituer les mémoires des ressortissants du Reichsland, ceux qui se sont battus sous l’uniforme feldgrau ou bleu horizon, comme ceux qui ont vécu, à l’arrière, quatre années de dictature militaire. On relève également la publication récente d’un ouvrage collectif retraçant les années de guerre dans la capitale du Reichsland13, ou encore la publication conjointe du Landesarchiv de Bade-Wurtemberg et des Archives départementales du Haut-Rhin accompagnant une exposition itinérante présentée de part et d’autre du Rhin14. Ces publications ont stimulé la recherche portant sur cet espace géographique, et plusieurs études intéressant l’Alsace-Lorraine dans la Première Guerre mondiale sont en cours d’élaboration15. L’approche internationale et diplomatique du conflit n’est pas demeurée en reste, donnant lieu aux publications remarquées de Christopher Clark16 ou de Georges-Henri Soutou17. Une myriade de publications régionales (qui traduisent la vitalité des sociétés savantes), sont venues enrichir cette floraison, appuyant la recherche historique sur des exemples locaux et souvent très concrets18. Le Centenaire a permis d’enrichir également les ressources offertes au chercheur, à travers les actions volontaristes de collecte ou de numérisation de documents conduites par le réseau des archives ou des bibliothèques (éditions successives de La Grande collecte, numérisation des registres matricules militaires et des journaux des marche et opérations, base Grand mémorial, portail Europeana 14-18).

7 Cochet (François), Idées reçues sur la Première Guerre mondiale, Paris, Le Cavalier bleu, 2014, 208 p. L’auteur se penche, en particulier, sur les acceptions suivantes : « L’assassinat de François-Ferdinand a déclenché le début des hostilités », « Ce fut principalement une guerre de tranchées », « Les femmes sont mises au travail », « Clemenceau et Pétain ont fait gagner la guerre », « Sans les États-Unis, la guerre aurait été perdue », « Toute une génération a été inutilement sacrifiée ».

8 Cochet (François), La Première Guerre mondiale, Paris, Le Cavalier Bleu, 2008, 126 p.

9 Le Naour (Jean-Yves), 1914, La Grande illusion, Paris, Perrin, 2012, 408 p. 1915, L’enlisement, Paris, Perrin, 2013, 408 p.

1916, L’enfer, Paris, Perrin, 2014, 396 p. 1917, La paix impossible, Paris, Perrin, 2015, 420 p. Une synthèse particulièrement minutieuse et documentée, même si celle-ci pèche, peut-être, par un parti pris tendant à la mise en cause systématique de l’état-major et du général Joffre en particulier.

10 Winter (Jay), dir., La Première Guerre mondiale. Tome 1 : Combats, Paris, Fayard, 2013, 816 p. Tome 2 : États, Paris, Fayard, 2014, 850 p. Tome 3 : Sociétés, Paris, Fayard, 2014, 912 p.

11 Grandhomme (Jean-Noël), dir., Boches ou Tricolores ? Les Alsaciens-Lorrains dans la Grande Guerre, Strasbourg, La Nuée Bleue, 2008, 460 p.

12 Grandhomme (Jean-Noël et Francis), Les Alsaciens-Lorrains dans la Grande Guerre, Strasbourg, La Nuée Bleue, 2013, 509 p.

13 Strasbourg en guerre, 1914-1918. Une ville allemande à l’arrière du front, Strasbourg, Le Verger Éditeur / Archives de la Ville et de la Communauté urbaine de Strasbourg, 2014, 158 p.

14 Landesarchivdirektion Baden-Württemberg, Archives départementales du Haut-Rhin, Vivre en temps de guerre des deux côtés du Rhin, 1914-1918 [Texte imprimé] : [catalogue de l'exposition itinérante franco-allemande, mars 2014-2015].

15 Citons les thèses en préparation de Raphaël Georges, Les soldats alsaciens-lorrains de la Première Guerre mondiale dans la société française (1918-1939) et de Florian Hensel, Subir, rebâtir innover, commémorer. La destruction et la reconstruction des édifices religieux alsaciens pendant et au lendemain de la Première Guerre mondiale (1914-1932).

16 Clark (Christopher Munro), Les somnambules, Été 1914 : comment l'Europe a marché vers la guerre, traduction de The sleepwalkers : how Europe went to war in 1914, Paris, Flammarion, 2014, 927 p.

17 Soutou (Georges-Henri), La Grande illusion. Quand la France perdait la paix (1914-1920), Paris, Tallandier, 2015, 377 p.

18 On citera, à titre d’exemple, la publication de la Société belfortaine d’émulation : Belfort ancien arrondissement du Haut- Rhin annexé et la reconquête des provinces perdues : Alsace-Lorraine, Bulletin de la Société belfortaine d’émulation, n° 105, 2014, ou encore celle de la Société des amis de Thann : Rohmer (André), Entre larmes et honneurs, Thann, ville de front, 1914-1918, Société d’histoire « Les Amis de Thann », 2014, 372 p.

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On relève enfin la publication d’outils méthodologiques, d’instruments de recherche dans les fonds19 ou de témoignages inédits d’acteurs du conflit20. De nombreux colloques ont été organisés pendant cette période, permettant de confronter les problématiques de recherche dans une perspective internationale et comparatiste21.

La période a également été traversée par des controverses historiographiques portant sur des enjeux propres à la Première Guerre mondiale. Le débat sur le « consentement » a été introduit par des chercheurs affiliés au Centre international de recherche de l’Historial de Péronne, Stéphane Audoin-Rouzeau et Annette Becker22. Ceux-ci ont vu dans le « consentement » au conflit et sa violence le fait central d’étude pour la période, se heurtant à une remise en cause de la part d’historiens venus du Centre de recherche international et de débat sur la guerre 1914-1918 (CRID 1914-1918), ces derniers préférant mettre l’accent sur les mesures d’évitement et la culture du refus de la guerre, accordant un intérêt, parfois démesuré au regard de la réalité des faits, aux mutineries et à la désobéissance du soldat23. D’autres auteurs, comme François Cochet, ont préféré relativiser cette querelle, constatant qu’il y a « continuation » de la guerre, préférant parler de « ténacité » et d’« imprégnation de la culture militaire », se refusant à chercher dans les combattants des « civils en uniforme24 ». Au concept de « culture de guerre », cet historien préfère les « cultures d’une guerre », qui rend mieux compte d’une société nécessairement plurielle, invitant le chercheur à « renoncer à voir un sens unique de combat, là où il y a une inévitable complexité25 ». Dans son Petit répertoire critique des concepts de la Grande Guerre26, l’historien André Loez décrit trois écueils dans lequel l’historien de la Première Guerre mondiale est susceptible de tomber : la séparation des historiographies nationales (des publications récentes attestent, a contrario, des convergences épistémologiques possibles entre chercheurs français et allemands27), les effets de mode qui assurent la promotion indue de concepts peu rigoureux, à l’endroit desquels il convient de se montrer particulièrement prudent28 ; enfin, « la tentation du refus conceptuel », au risque de décrire sans jamais expliquer. L’on tentera de se prémunir de ces trois dangers.

19 Nivet (Philippe), Coutant-Daydé (Coraline), Stoll (Mathieu), dir., Archives de la Grande Guerre. Des sources pour l’histoire, Rennes, Presses universitaires de Rennes/ Archives de France, Collection « Histoire », 2014, 576 p.

Service historique de la Défense, Archives de la Grande Guerre, Guide des sources conservées par le Service historique de la Défense relatives à la Première Guerre mondiale, Vincennes, Service historique de la Défense, 2014, 656 p.

1914-1918, la Première Guerre mondiale dans le Territoire-de-Belfort : guide des ressources disponibles aux Archives départementales, Joseph Schmauch (dir.), Belfort : Archives départementales du Territoire-de-Belfort, 51 p.

20 André (Isidore), La Grande Guerre dans la vallée de Masevaux. D’après le journal de guerre d’Isidore André, éd. Daniel Willmé, Société d’Histoire de la vallée de Masevaux, 2014, 279 p.

21 On peut mentionner les colloques internationaux suivants : Les mises en guerre de l’État. 14-18 en perspective, CRID 14- 18, Paris, Laon, Craonne, 29 octobre-1er novembre 2014 ; Guerre des Vosges. Guerres de montagne, Département des Vosges, Département du Haut-Rhin, Épinal, Colmar, 21-23 mai 2015 ; World War I – The other faces of War, Cluj-Napoca, université Babes-Bolyai, Academia Romana, 12-14 octobre 2015.

22 Audoin-Rouzeau (Stéphane) et Becker (Annette), « Violence et consentement : la culture de guerre du premier conflit mondial », dans Jean-Pierre Rioux et Jean-François Sirinelli (dir.), Pour une histoire culturelle, Paris, Seuil, 1997, p. 251-271.

23 Offenstadt (Nicolas), Les fusillés de la grande guerre et la mémoire collective (1914-1999), Paris, Odile Jacob, 1999, 285 p.

24 Cochet (François), Survivre au front 1914-1918. Les poilus entre contrainte et consentement, Saint-Cloud, 14-18 Éd., 2005, p. 165 et suivantes.

25 Cochet (François), Idées reçues sur la Première Guerre mondiale, op. cit., p. 172.

26 Loez (André), Petit répertoire critique des concepts de la Grande Guerre, décembre 2005.

crid1418.org/espace_scientifique/textes/conceptsgg_01.htm.

27 Becker (Jean-Jacques), Krumeich (Gerd), La Grande Guerre. Une histoire franco-allemande, Paris, Tallandier (collection

« Texto »), 2012, 376 p.

28 Particulièrement illustrative est l’attention accordée à la notion de « brutalisation », au sens où les combattants seraient

« rendus brutaux » par une violence qu’ils auraient massivement exercée durant la guerre, ce phénomène servant de matrice aux développements politiques de l’entre-deux guerres. Peu ou pas étayé par des sources, ce concept introduit par l’historien germano-américain George Mosse conduit à une analyse simpliste des évènements politiques postérieurs à l’Armistice.

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19 B. Les sources

L’une des particularités du sujet tient à la grande dispersion des sources se rapportant aux différentes administrations d’Alsace-Lorraine. Cette dispersion n’est elle-même que le reflet du caractère prolifique et transitoire de l’organisation administrative mise en place durant la guerre et au lendemain de l’Armistice29. Cet éclatement documentaire permet cependant de recouper un certain nombre de thématiques, les qualités d’un fonds compensant les lacunes d’un autre. Parmi l’ensemble des ressources consultées, c’est le fonds conservé aux Archives nationales qui a subi le plus d’avatars et de déménagements, impliquant toujours un certain nombre de pertes. D’autres fonds ont subi les outrages du temps, les dégâts du feu ou de l’eau : c’est le cas des archives administratives de la préfecture du Haut-Rhin, en grande partie détruites en juin 1940, et dont il ne subsiste que des épaves (ayant fait toutefois l’objet d’un important travail de reclassement), mais aussi des archives de l’évêché de Strasbourg. Les archives du sous-secrétariat d’État de Jules Jeanneney ont subi le sort de nombreuses archives d’hommes politiques de cette période : elles n’ont pas été versées aux Archives nationales et ont, par la suite, été en grande partie détruites (du fait de l’incendie de la demeure familiale située à Rioz, Haute-Saône, pendant la Seconde guerre mondiale)30. Les archives conservées dans les trois départements de l’Est compensent cependant les lacunes que présente le fonds conservé par les Archives nationales.

La recherche en histoire est largement tributaire de la présence ou de l’absence de tel type de sources, et l’appel à des documents autres qu’administratifs est nécessaire pour éclairer une question donnée. La consultation de fonds privés (fonds Millerand, Wetterlé, Peirotes) m’a offert le regard particulier d’un acteur, un point de vue plus personnel et engagé que celui du fonctionnaire. Au cours de mes recherches, j’ai voulu tendre à la plus grande exhaustivité possible ; mais devant l’ampleur et la variété des sources à ma disposition, effectuer des choix s’est révélé nécessaire. J’ai privilégié les documents publics, et, parmi ceux-ci, les archives produites par l’institution qui fait l’objet de cette étude. J’ai sondé aussi les archives des ministères qui ont pu correspondre avec les services d’Alsace- Lorraine : excepté quelques liasses d’archives, au demeurant connues des historiens, cette recherche est demeurée infructueuse. Les conditions d’accès difficiles aux fonds conservés par le département des manuscrits de la Bibliothèque nationale de France, du fait de travaux prolongés sur le site Richelieu, m’ont conduit à limiter mes recherches dans les papiers Poincaré31 à de simples sondages (cette lacune étant toutefois, pour partie, compensée par l’accès aux fonds de la Bibliothèque de l’Institut).

Les Procès-verbaux de la Conférence d’Alsace-Lorraine, conservés à la Bibliothèque nationale de France, ont constitué la principale source pour l’étude des projets échafaudés à Paris. Conservée aux Archives nationales (Pierrefitte-sur-Seine), la sous-série AJ30 regroupe l’ensemble des fonds d’archives des administrations provisoires, chargées de l’Alsace-Lorraine pendant la Première Guerre mondiale. Elle comprend les archives du bureau d’études d’Alsace-Lorraine, des sous-commissions thématiques mises en place en 1917 par le ministère de Guerre et du service général d’Alsace- Lorraine créé en 1918. Les comptes-rendus hebdomadaires adressés à la Présidence du Conseil par les commissaires de la République, les administrateurs de cercle et les chefs de service nommés dans

29 Bock (Fabienne), « L’exubérance de l’État en France de 1914 à 1918 », dans Vingtième siècle. Revue d’Histoire, 1984, p. 41-51.

30 Dans le cadre de la préparation de ma thèse d’École des Chartes, j’avais toutefois eu accès aux archives familiales conservées par M. Jean-Noël Jeanneney, alors président de la Bibliothèque nationale de France.

31 Bibliothèque nationale de France, département des manuscrits, NAF 15992-16063.

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les provinces reconquises, au lendemain du 11 novembre 1918, se sont révélés particulièrement instructifs. S’agissant d’archives émanant de l’autorité publique, ces documents cherchent à valoriser l’action menée par les services ; ils laissent toutefois deviner, en creux, l’ampleur des difficultés auxquelles l’administration installée à Strasbourg, Metz et Colmar, se trouve confrontée. Ils constituent, en outre, un bon indicateur de la montée d’un « malaise » dans les pays recouvrés, témoignant de la recherche de solutions à la crise administrative au cours du printemps 1919. La consultation des archives de la commission des affaires étrangères de la Chambre des députés (en particulier le procès-verbal d’une audition de l’abbé Wetterlé et de Georges Weill), des archives privées d’Alexandre Millerand, de François de Wendel, ou des socialistes Albert Thomas et Jean Longuet ont apporté des éclairages complémentaires, en particulier sur le positionnement de la mouvance socialiste par rapport à la question d’Alsace-Lorraine. Le dépouillement minutieux de la correspondance de Stephen Pichon32 a permis de mettre au jour quelques échanges intéressants, au plus haut niveau de l’État. La lecture de la correspondance politique et commerciale conservée par les Archives du ministère des Affaires étrangères33 permet une meilleure compréhension de l’action diplomatique vis-à-vis des États de l’Entente, en particulier des efforts de propagande déployés par André Tardieu et Daniel Blumenthal pour rallier l’opinion américaine à la cause française. On trouve également, dans ce même fonds, les archives de la genèse, au début de 1915, de la Conférence d’Alsace-Lorraine. Ces dépouillements ont été complétés par l’étude des papiers des agents suivants : Jules Cambon, Louis Ducrocq, Stephen Pichon, André Tardieu et Maurice Bompard, fondateur du Groupe lorrain34. Au Service historique de la Défense, ont été mis à contribution les archives du cabinet Clemenceau35, les fonds des gouvernements militaires de Strasbourg et de Metz ainsi que les dossiers des principaux officiers36 chargés des affaires civiles d’Alsace-Lorraine.

La consultation des fonds locaux des Archives départementales du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle renseigne sur les mesures administratives prises localement, dans les vallées vosgiennes dès le mois d’août 1914, et dans le restant de l’Alsace au lendemain du 11 novembre 1918. Aux Archives départementales du Bas-Rhin, la série AL regroupe les dossiers de l’administration centrale du Reichsland (1871-1918), du Commissariat général de la République française (1918-1925) et de la direction générale des services d’Alsace et de Lorraine (1925-1939).

Les archives du haut-commissariat de la République à Strasbourg se trouvent conservées parmi ces fonds, constituant le complément naturel de la sous-série AJ30 des Archives nationales37. Particulièrement riches se sont révélées les archives de la direction des beaux-arts, apportant de nombreux renseignements sur la protection du patrimoine architectural, sur la restitution des œuvres d’art déplacées en Allemagne, sur la réorganisation des services d’archives, ou, à titre plus anecdotique, sur le sort réservé à la statuaire wilhelminienne. Aux Archives départementales du Haut-Rhin (Colmar), ont été consultés : le fonds de l’Administration de l’Alsace (1914-1918)38, le

32 Bibliothèque de l’Institut de France, Ms. 4396-4398. Cette correspondance comprend de nombreux échanges épistolaires entre Stephen Pichon et le président de la République, Raymond Poincaré.

33 Archives du ministère des Affaires étrangères, série Guerre 1914-1918, n° 162-165 ; série Guerre 1914-1918, sous-série Paix n° 255-262.

34 La réalisation de cette étude ayant motivé le classement du fonds Maurice Bompard (conservé par les Archives du ministère des Affaires étrangères), les documents consultés constituent des ressources inédites.

35 Service historique de la Défense. 6N Cabinets ministériels (fonds Clemenceau), en particulier 6 N 57 et 154. Ce fonds a apporté d’utiles précisions quant aux conditions de préparation du voyage présidentiel en Alsace-Lorraine réalisé au mois de décembre 1918.

36 Général Bourgeois, général Burckhardt, contrôleur général Boone, commandant Laurent-Atthalin.

37 Cf. Archives du Bas-Rhin, Répertoire numérique détaillé du fonds du Commissariat général de la République (1918-1925), par Guy de Lavareille, dir. François-Jacques Himly, Strasbourg, 1980, 2 vol., XXIX-179 + 111 p.

38 Dossiers relatifs à l’administration des territoires alsaciens sous administration française (Thann, Masevaux, Dannemarie).

On y trouve des documents émanant du Grand Quartier général des armées de l’Est, de l’état-major de l’armée des Vosges

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