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Submitted on 1 Jan 1976
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NOUVELLES INSTABILITÉS DE CISAILLEMENT DANS LES NÉMATIQUES
P. Pieranski, E. Guyon, S. Pikin
To cite this version:
P. Pieranski, E. Guyon, S. Pikin. NOUVELLES INSTABILITÉS DE CISAILLEMENT DANS LES NÉMATIQUES. Journal de Physique Colloques, 1976, 37 (C1), pp.C1-3-C1-6.
�10.1051/jphyscol:1976102�. �jpa-00216429�
JOURNAL DE PHYSIQUE Colloque Cl, supplément du n° 1, Tome 37, Janvier 1976, page Cl-3
NOUVELLES INSTABILITÉS DE CISAILLEMENT DANS LES NÉMATIQUES (*)
P. PIERANSKI, E. GUYON et S. A. PIKIN (**) Physique des Solides, Université Paris-Sud, 91405 Orsay, France
Résumé. — On étudie la stabilité d'un écoulement du cisaillement simple dans un nématique dans deux situations complémentaires :
à) molécules parallèles à la vitesse vy(z) dans les matériaux où le couple hydrodynamique rx ne s'annule que pour des molécules parallèles à x (a 3 > 0). Deux modes d'instabilité sont observés : un mode symétrique où les molécules basculent tout en restant dans le plan yz des vitesses et un mode asymétrique pour lequel apparaît une composante de l'orientation hors de ce plan ;
b) molécules le long de y. Dans les matériaux où le couple hydrodynamique rx s'annule aussi pour une position des molécules dans le plan yz (a 3 < 0) des modes d'instabilité homogène et convec- tifs ont été déjà décrits.
Abstract. — The stability of a simple shear flow experiment in a nematic is studied in two complementary cases :
a) molecules parallel to the velocity vv(z) in materials where the hydrodynamic torque rx
vanishes only for molecules parallel to x (<x3 > 0). Two instability modes are found :
V) a symmetrical one where the molecules tumble while remaining in the plane (yz) of the velocity ; 2) an asymmetrical one associated with a component of the director along x ;
b) molecules along y. In materials where the hydrodynamic torque rx vanishes also for an align- ment of the molecules in the yz plane (a 3 < 0), the homogeneous and convective modes which are obtained have already been described.
1. Introduction. — Le comportement hydrodyna- mique des nématiques [1] peut être décrit à partir d'expériences de cisaillement du cristal liquide contenu entre deux plaques parallèles. La figure 1 donne les
A - / / - / / -> /
a b a3 <o c
FIG. 1. — Le long des trois directions principales, les viscosités Va > riz, > r/b sont mesurées. Le signe du couple A) exercé par le cisaillement sur le directeur ainsi que l'existence d'un angle de saturation 0o (compté négativement) aux forts cisaillements correspondent au cas «3 < 0 (A, est de signe opposé pour a3 > 0).
3 configurations principales, caractérisées par la direc- tion de l'orientation moléculaire définie à l'aide du directeur n ( | n | = 1) par rapport à l'écoulement.
Lorsque l'alignement est maintenu constant en volume par un champ magnétique H suffisamment intense (n s'aligne le long de H) ou en présence d'un cisaille- ment suffisamment faible, 3 viscosités >ya, tjb, r\c ( ~ 0,1 à 1 poise) sont obtenues. Dans les géométries
(*) New shear flow instabilities in nematics.
(**) Crystallography Institute Académie des Sciences de l'URSS.
b et c, deux couples proportionnels aux taux de cisaillement S = dvy/dz s'exercent sur les molécules rb = - a3 S, rc = - a2 S avec | a2 | > I a3 I • Le signe du grand couple rc est toujours tel qu'il est défini sur la figure ; par contre le faible couple Tb peut prendre deux signes différents (a3 ^ 0) suivant les matériaux et les conditions de température. Nous nous intéresserons à partir de maintenant à des situations où l'alignement moléculaire est fixé par un ancrage rigide sur les surfaces limites (z = + d/2). La modification d'orientation dans le volume sous l'effet des couples hydrodynamiques est limitée par l'action de couples élastiques de rappel, caractéristiques de la phase nématique.
1.1 CAS A. — Considérons le cas d'un alignement initial le long de v : n ( + d/2) = (0,1,0). L'angle d'équi- libre 6 dans le plan yz est obtenu à partir de l'égalité des couples
S(a3 cos2 9 - a2 sin2 6) = K^O/àz2) (1) où Kx est la constante d'élasticité en éventail.
Lorsque q3 < 0 et pour des forts cisaillements, la distorsion est uniforme dans l'épaisseur de la couche avec une valeur limite de l'angle d'équilibre, 90 [2, 3], tel que
tg2 0O = « (2>
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Cl-4 P. PIERANSKT, E. GUYON ET S. A. PIKIN avec
Lorsque la distorsion sera dans le sens de 8, nous parlerons d'angle de basculement négatif.
Lorsque a, > O, les deux couples Tb et Tc agissent dans le même sens et le problème plus complexe de la stabilité du basculement positif obtenu dans ce cas et évoqué dans les références [3, 41 sera discuté en détail dans la suite de l'article.
1.2 CAS B.-Le cas n ( + d/2) = ( 1 , 0, O), où l'orientation initiale est perpendiculaire à la fois à v et au gradient de vitesse, a été étudié en détail lorsque a, < O [5, 61. Pour des faibles cisaillements, l'équilibre stable correspond à une situation moléculaire non distordue. Au-dessus d'un seuil associé à une transition du 2 e ordre, il apparaît une distorsion finie à la fois en éventail (n, fini) et en torsion (n, fini) due à l'action couplée de couples proportionnels à a, et a,. Le mécanisme de cette instabilité peut être compris simple- ment à partir de la figure 2 de [ 6 ] . Par contre, dans le cas a, > O, le couple associé à ce terme est stabilisant et l'orientation initiale [l, 0, O] est stable jusqu'à des cisaillements très élevés.
2. Instabilités homogènes de nématiques avec a, > 0. - Les techniques expérimentales sont iden- tiques à celles décrites par exemple en [6]. Nous avons utilisé du p-n hexyloxybenzilidène p1-aminobenzo- nitrile (HBAB) [3, 41 qui est nématique à
et où le signe de a, est < O près de Tc et positif en dessous d'une température d'inversion TI
-
Tc - 100.2.1 EXPÉRIENCES. - Pour accéder à la connaissance de l'orientation moléculaire dans l'échantillon soumis au cisaillement, nous avons mesuré l'angle de bascule-.
ment 8 de la figure conoscopique formée en lumière monochromatique convergente. Cet angle est en effet proportionnel ,., à l'angle moyen de basculement des molécules : 8 cc n. < O >, où n est un indice de réfraction du nématique et < O > une moyenne sur l'épaisseur du film.
La figure 2 donne les mesures d'angle de bascule- ment
z
en fonction de la vitesse de déplacement d'une plaque par rapport à l'autre v = Sd.Au voisinage w de Tc ( T = 940C), la valeur de l'angle O tend, aux forts cisaillements, vers la valeur limite n.8, négative donnée éq. (2). A plus basse température ( T = 77 OC) le signe de 8 est opposé, indiquant un changement de signe de a,. La pente initiale des courbes aux faibles cisaillements est unique- ment fonction de la,valeur de a, ; par contre la cour- bure pour des plus grandes valeurs de S traduit la prise .en compte des effets de couple de type Tc, pour des distorsions suffisamment importantes (typiquement
..
,
FIG. 2. - Variation expérimentale de l'angle 0 de rotation de la figure conoscopique proportionnel à l'angle de distorsion maxi- mum de distorsion dans le cas us < O (courbe T = 94 OC) où existe un angle limite et dans le cas u3 > O (courbe T = 77 O C )
pour lequel existe un seuil d'instabilité vc.
quand a, 8, n'est plus négligeable devant a,). Pour des ci~aillements importants et lorsque v
-
vc la varia- tion 8(v) présente une pente verticale. Pour v > v, des régimes d'instabilité sont observés que l'on discu- tera dans le paragraphe 2.3.2.2 THÉORIE ET ANALYSE DES RÉSULTATS. - A partir d'une analyse détaillée des seuils, un de nous [7]
a prédit l'existence de plusieurs modes d'instabilité suivant la valeur de E . Nous redécrivons schématique- ment les solutions théoriques qui apparaissent dans la présente étude expérimentale.
Nous parlerons d'abord d'un premier type de solu- tion que nous appelons symétrique pour indiquer que le directeur reste dans le plan de symétrie yz.
Lorsque O est suffisamment petit, éq. (1) se met sous la forme réduite
d28,/dzS = Er 1 E I1l2(tr: 1 '+ O:) (4) avec les variables réduites z, = z/d, 8, = O/1 8 1112. Le nombre d7Ericksen sans dimension
proportionnel au cisaillement, exprime le rapport de l'inverse du temps associé au déplacement, vld, à celui associé à la diffusivité de l'orientation, (Kl/a,)/d2.
- et + correspondent respectivement aux signes a3 < O et > 0.
Une forme analytique de la solution de l'éq. (4) est donnée e.n [7]. Par intégration numérique, nous avons obtenu la solution générale présentée en figure 3 pour
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FIG. 3. - Résultat du calcul correspondant à la figure 2 en unités normalisées. La branche en tirets ne correspond pas à des
valeurs stables de l'angle moyen < 0 >.
c: 2 O. La forme de la solution théorique est tout à fait analogue au comportement expérimental. En particu- lier l'existence d'un seuil
Er, ( E ( I l 2 = 4,8 (6)
au-delà duquel il n'existe pas de solution < 8 >.
On peut vérifier expérimentalement l'existence de l'invariant (éq. (6)) en étudiant la variation de la vitesse critique v, pour diverses épaisseurs d et différentes températures T (différents E).
La figure 4 montre la variation linéaire de l'inverse de la vitesse en fonction de l'épaisseur à température fixe, T = TI - 8,5O (le nombre Er, cc v, d reste cons-
RG. 4. - Variation de la vitesse critique pour des couches cisaillées, d'épaisseur variable. On a obtenu un très bon accord quantitatif avec le calcul exprimé en termes de la valeur du
nombre critique Erc ~ 1 1 2 .
tant). Une comparaison quantitative à 'partir des résultats des références [3] et [4] a, = 0,32;
a, = 0,35 x et à partir de la valeur de la cons- tante élastique KI
-
5 x [8] donne(ud)-l = 1,35 x 104 s/cm2
en bon accord avec la valeur expérimentale 1,45 x 104 s/cm2.
La dépendance en température est donnée, au-des- sous de la température d'inversion, sur la figure 5. La
FIG. 5. - La vitesse critique mesurée expérimentalement diverge à la température d'inversion du signe de as comme
ai1'', c'est-à-dire comme (TI - T)-112.
vitesse critique v,(T) diverge à TI, c'est-à-dire lorsque
E -+ O. Cette divergence est en accord avec une varia- tion linéaire, près de TI, de
CC a3 GC (TI - T ) .
2.3 COMPORTEMENT AU-DESSUS DE V, : SOLUTION
asymétrique. - Expérimentalement on observe, au- dessus du seuil, que les molécules quittent leur plan de symétrie yz. Effectivement pour des très forts cisaille- ments la configuration décrite en 1 .2 où les molécules sont le long de x est stable lorsque E c O. Pour des cisaillements intermédiaires on observe une situation distordue mettant en jeu un angle fini positif 8 et une distorsion de torsion q hors du plan yz, qui augmente avec le cisaillement (Fig. 6 ) .
On peut évaluer le seuil linéaire (q + O continûment au seuil) d'une instabilité mettant en jeu les distorsions couplées 0 et p, par analogie avec le cas de l'instabilité de cisaillement simple décrite en [5] et rappelée en 1 .2. L'égalité des composantes verticales des couples hydrodynamique déstabilisant et élastique de rappel (caractérisé par la constante K2 de torsion) s'écrit :
P. PIERANSKT, E. GUYON ET S. A. PIKIN
FIG. 6. - Modèle de l'instabilité asymétrique : Partant de molé- cules parallèles à la vitesse v (a), le gradient de vitesse cause un basculement positif de l'angle û dans le cas cc3 > O caractérisé par un couple suivant x (b). S'il existe un léger basculement 9 hors du plan de symétrie (c), un couple déstabilisant parallèle à z et pro- portionnel à la distorsion 9 tend à augmenter encore ce bascule- ment. (Notons que ce mode n'existe que parce qu'il existe au
préalable un basculement fini O.)
symétrique obtenue à partir d'une distorsion dans le plan yz qui est attendue la première en accord avec l'expérience. Cependant l'analyse du seuil développée en 2.2 ne permet pas de prévoir la nature des solutions au-dessus du seuil. Il semble bien que la distorsion que l'on observe pour v > v, soit à rapprocher du compor- tement que l'on s'attend à trouver au-dessus du seuil de l'instabilité de type asymétrique que nous venons de calculer. Notons de plus l'analogie formelle entre la forme de la solution (10) et celle de l'instabilité de cisaillement étudiée dans la référence [5] dans le cas a, < O : il suffit de remplacer a, par - a, dans (10) pour retrouver le nombre sans dimension caractérisant le seuil de cet autre problème.
Un autre type d'instabilité au-delà du seuil v,, que l'on peut concevoir aisément, correspond à un mode de moulin à eau où le directeur bascule tout en restant dans le plan de symétrie. Une telle distorsion demande une énergie élastique importante et c'est pour cette raison que la distorsion hors du plan lui est préférée. En pratique l'observation au microscope montre une alternance de régions d'instabilités de type asymétrique et de régions où le directeur a tourné de 2 z. Nous avons entrepris l'étude de la production et de la dynamique des défauts d'inclinaisons, ou disclinaisons, séparant ces régions. L'hydrodynamique des défauts qui est à analyser dans le cadre de la description viscoélastique que nous avons utilisée plus haut pour des distorsions où fini ,g est donné en première approxi- continues reste encore largement à étudier.
mation par une solution de l'éq. (1) Enfin, il convient de noter [7] que, à la différence des instabilités décrites dans [5] et 161, au-dessus du seuil 0 = Er 1 E (.(z: - z,)/2 . (8) d'instabilité 8, il n'existe pas de solutions stationnaires.
Après un changement de variable z: = 2 z, - 1,
l'éq. (7) se met sous la forme Remerciements. - Nous remercions M. Kleman pour une discussion sur ce sujet. Cette recherche a été a s d 2
d2v/dz:2 = -?--.-
.
E;(Z;~ - 1)-cp (9) subventionnée en partie par une A. T. P. du C. N. R. S.32 K z
et en utilisant la plus petite valeur propre de cette équation aux valeurs propres on trouve
(1 0) où
Er, 1 E = 7,59 . (1 1)
Ce seuil a exactement la même forme que celui calculé pour le mode gymétrique (éq. (6)) qui est tel que n reste dans le plan yz. Comme il lui correspond une valeur plus grande de Er,, c'est en fait l'instabilité
Note ajoutée aux épreuves. - Dans un travail indé- pendant, Cladis & Torza (phYs. Rev. Lett. 35 (1975) 1283) ont étudié les instabilités de cisaillement pro- duites lorsqu'un nématique (CBOOA) à coefficient
a, > O était cisaillé entre deux cylindres concentriques.
Ils ont mis en particulier en évidence une instabilité de type moulin (tumbling) semblable à celle que nous décrivons. Il semble cependant que dans leur géométrie la configuration résultante soit stable. Une étude comparative de leurs résultats et de l'analyse présentée ici et s'appuyant sur la forte dépendance en T de a,(T) dans CBOOA, a été donnée dans une note récente (P. Pieranski & E. Guyon, Commun. Phys. 1 (1976) 33).
Bibliographie
[l] DE GENNES, P. G., The physics of liquid crystals (Clarendon [5] PIERANSKI, P. et GUYON, E., SolidState Commun. 13 (1973) 435.
Press, Oxford) 1974 chapitre 5. [6] PIERANSKI, P. et GUYON, E., Phys. Rev. A 9 (1974) 404.
[2] FISHER, J. et WAHL, J., Opt. Commun. 5 (1972) 341. [7] PIKIN, S. A., SOV. Phys. JETP 38 (1974) 1246.
[3] GAHWILLER, C. H., Mol. Cryst. liq. cryst. 20 (1973) 301. [8] DEULING, D. H., GUYON, E. et PIERANSKI, P., Solid State [4] PIERANSKI, P. et. GUYON, E., Phys. Rev. Lett. 32 (1974) 924. Commun. 15 (1974) 277.