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Une médecine nouvelle en évolution et en transformation

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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Professeur René BAYLET, médecin biologiste, Professeur de santé publique, biologiste des hôpitaux 5, rue du grenache - 34090 Montpellier

Adresse Email : secretariat.ibb@bouisson-bertrand.fr

Jean-Paul GUYONNET,

Médecin inspecteur de santé publique 154, rue du Bosquet

34980 Saint Gely du Fesc

Adresse Email : jean-paul.guyonnet@ars.sante.fr

UNE MEDECINE NOUVELLE EN EVOLUTION ET EN TRANSFORMATION La médecine est depuis toujours en ébullition. Notre époque est marquée de nouveautés qu’il faut définir et analyser.

En ce début de troisième millénaire, une médecine nouvelle se développe rapidement. Elle envahit les différents espaces du soin, depuis la médecine hospitalière jusqu’à la médecine de ville mais aussi dans la prise en charge de populations plus vulnérables comme celle des personnes handicapées.

Elle se caractérise par trois phénomènes notables :

- les effets de la révolution numérique et de la révolution génomique,

- une réorganisation des pratiques du soin au travers du suivi coordonné dans le parcours du malade,

- une modification radicale de la relation médecin patient avec l’adoption de comportements plus empathiques face à un malade mieux informé, base d’une relation apaisée avec les acteurs du soin et qui modifie le cadre médical.

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1.1 - les évolutions

La révolution numérique, résultat de la rencontre de l’informatique et des télécommunications qui a donné naissance à Internet puis aux réseaux sociaux a conduit à une informatisation généralisée de la société et à sa mise en réseau. Elle a aussi modifié le contexte médical.

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L’accès démultiplié à l’information sur le Web, à flux continu, a augmenté la quantité et l’accessibilité des données cliniques et paracliniques avec la possibilité d’en tirer des conclusions utiles, de donner des connaissances et au-delà certaines compétences.

Portée par la conjonction des avancées en matière de technologies et en matière d’intelligence artificielle, la révolution génomique a aussi provoqué une vague de nouvelles avancées et bouleversé le système de soins.

« L’interrogation complète du génome pour l’étude de multiples maladies, de traits, de risques, remplace l’analyse par variant spécifique pour un gène particulier »1.

Publiée dans Science Translational Medicine, une étude montre que "le génome fœtal est intégralement présent dans le sang de la mère"2. De nombreuses maladies génétiques pourraient être recherchées de la sorte, permettant d’aller jusqu’à la vérification de la compatibilité entre génomes.

Les scientifiques peuvent modifier, supprimer en réorganisant une séquence d’ADN chez un organisme vivant. Par la méthode CRISPR-Cas 9, il est désormais possible de reconfigurer des gènes pour corriger des anomalies génétiques.

De plus, le laboratoire sait aller à la rencontre du malade : le diagnostic biologique est révolutionné par des dispositifs miniaturisés, comme les bio-puces connectées à des smartphones, à partir d’une goutte de sang prélevée sans aiguille au doigt, indolore. Trente paramètres biochimiques sont ainsi déjà analysés, rendant la surveillance du patient de plus en plus rapprochée.

Deux applications sont d’ores et déjà présentes dans l’environnement du clinicien.

La première est le recueil d’ADN fœtal dans le sang maternel chez les femmes à risque qui permet le dépistage de la trisomie et de délations et duplications chromosomiques associées à des troubles du comportement, ce qui fait dire au docteur François Jacquemard : « on a changé

1 Techniques d’analyse Du Génome Et De Son Expression : Applications Médicales. Académie Nationale De Médecine. Jean-Yves Le Gall. Séance Du 17 Janvier 2012

2 Science Translational Medicine, "Maternal Plasma DNA Sequencing Reveals the Genome-Wide Genetic and Mutational Profile of the Fetus", Y. M. Dennis Lo, K. C. Allen Chan, Hao Sun, Eric Z. Chen, Peiyong Jiang, Fiona M. F. Lun, Yama W. Zheng, Tak Y. Leung, Tze K. Lau, Charles R. Cantor and Rossa W. K. Chiu

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d’époque en évitant le recours aux amniocentèses et aux biopsies du trophoblaste, avec une fiabilité de 99 % »3.

La seconde est le test multigénique Onco DX® pour identifier les patientes à risque de cancer du sein. Il permet de quantifier par anticipation le risque de rechute et aide à personnaliser le traitement de chaque malade selon le niveau de gravité.

Dans l’avenir, d’autres voies prometteuses se dessinent. L’utopie des transhumanistes de guérir les hémophiles se profile avec la correction de l’anomalie génétique de leurs cellules souches par la méthode révolutionnaire CRIPS-Cas 9, cette technique permettant de repeupler de cellules sanguines saines le système sanguin de l’hémophile.

Mais « Jusqu’où manipuler le vivant ? »4 ? Il s'agit d'un enjeu majeur pour l’humanité du 21ième siècle.

1.2 – L’utilisation en médecine des nouvelles techniques

Différentes applications de ces révolutions vont être présentées dans les paragraphes suivants.

1.2.1 Les objets connectés

Le développement des objets connectés modifie la pratique médicale. Ils se multiplient dans différents champs sanitaires.

Ils sont définis par leur usage et doivent répondre aux exigences de qualité et de sécurité attendues dans le soin. Basés sur le portage d’un biocapteur qui communique avec un récepteur, smartphone ou PC par le biais d’une liaison sans fil, ils permettent une analyse et la lecture facilitée des constantes médicales à surveiller.

Les dispositifs suivants sont couramment utilisés dans le domaine commun : mesure du poids, bracelets indiquant les calories dépensées, calcul du rythme cardiaque, du temps de sommeil...

Dans le domaine santé on trouve le tensiomètre ou le pilulier électronique, l’appel automatique à une personne à contacter en cas d’urgence, la lecture de la glycémie en continue et bien d’autres applications.

3 François Jacquemard : « Avec l’accès à l’ADN fœtal, on change d’époque » LE MONDE SCIENCE ET TECHNO 02.11.2015

4 Jusqu’où manipuler le vivant ? CNRS Le journal, 09.04.2014

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L’arrivée des objets connectés qui mesurent en continu les paramètres de santé génère une masse de données monumentale. Un tri doit être fait entre l’utile et le superflu pour être profitable au professionnel de santé, au chercheur. De son côté, le patient a le pouvoir de partager les informations médicales le concernant, de savoir et de se fabriquer son propre suivi personnalisé de santé.

1.2.2 Les pratiques de diagnostic et de traitement

La médecine qui soigne bénéficie d’aides précieuses par le biais de dispositifs sans cesse plus pointus de diagnostic et de traitement.

Ainsi, en dermatologie le diagnostic standard a été amélioré par une technologie non invasive d’imagerie : la microscopie confocale par réflectance in vivo. Cette technique d’imagerie non invasive permet d’obtenir in vivo et en temps réel des images de différents tissus de la peau avec une résolution proche de l’histologie, avec toutefois une profondeur limitée au derme superficiel.

Elle se développe pour les dermatoses inflammatoires, les infections cutanées, les angiomes, la cosmétologie mais aussi lors d’excision pour préciser les limites d’une lésion ou la zone d’intérêt à biopsier.

En neurologie, le traitement par stimulation cérébrale profonde consiste à implanter des électrodes au cœur du cerveau et permet de délivrer un courant électrique qui modifie le fonctionnement de groupes précis de neurones. Cette technique permet de traiter certains patients atteints de la maladie de Parkinson ou encore de dystonies et de troubles obsessionnels compulsifs ; elle est en cours d’évaluation notamment pour l’épilepsie, les dépressions sévères et l’anorexie mentale.

1.2.3 La médecine réparatrice

La médecine réparatrice permet de redonner vie à des mains paralysées en contournant une moelle épinière lésée, en plaçant dans le cortex moteur cérébral un implant avec sa centaine d’électrodes reliées à la partie distale de la moelle.

Dans la main artificielle de Bertolt-Meyer, une contraction rapide des muscles du bras permet d’ouvrir tous les doigts de la main. Par contre, deux contractions permettent d’accéder à d’autres fonctions comme plier le pouce ou pointer l’index.

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Le bras bionique d’Evan Reynolds est capable de répondre directement aux ordres qu’on lui donne par la pensée. Il suffit de penser à saisir une balle de sa main bionique, pour que le bras s’active et que la main saisisse la balle, tout comme chacun de nous le fait avec son propre bras.

Dans un autre registre, le développement des nano produits permet de traiter plus efficacement et exclusivement une zone affectée par une inflammation ou d’autres lésions. Si les médicaments

« classiques » et notamment les chimiothérapies se répandent aujourd’hui dans l’organisme de manière peu ciblée, les nanotechnologies permettent de « vectoriser » la substance active de médicament, afin qu’elle atteigne spécifiquement les cellules à détruire et n’attaque pas les cellules saines.

1.2.4 De la médecine réparatrice à la médecine régénérative

La médecine qui fabrique et remplace est une ingénierie des tissus et des organes. Si la médecine réparatrice se contente de restaurer une fonction, un tissu ou un organe lésé, la médecine régénérative va bien plus loin en remplaçant les parties endommagées par un nouveau tissu cellulaire. Elle repose sur la thérapie cellulaire consistant à cultiver des cellules avant de les transplanter à partir de l’utilisation des cellules souches.

Les progrès de l’impression 3D permettent aujourd’hui de fabriquer à la demande des objets simples ou complexes sur mesure, tels une prothèse osseuse personnalisée.

Pour demain, on imagine une imprimante fixée au lit du malade et qui « imprimerait » aux endroits nécessaires, couche par couche, un jet de cellules vivantes permettant de reconstruire in situ une portion anatomique disparue.

En imprimant des tissus, des cartilages, il devient possible de fabriquer du corps humain pour remplacer certains de ses organes !

1.2.5 Vers des organes de substitution

Le cœur synthétique, prothèse intracorporelle extraordinaire, a été créé à partir des propres cellules du malade, des cellules souches générées à partir de cellules cutanées cultivées sur une tapisserie de tissus bovins élastiques, avec une partie électronique de pointe composée de batteries, de capteurs de mesure des besoins, de microprocesseurs qui régulent les pressions et les débits, ...

Le pancréas artificiel destiné aux malades diabétiques se perfectionne progressivement. Il permet une substitution ergonomique et autonome de la fonction pancréatique en intégrant un lecteur de

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glycémie en continue connecté à un smartphone doseur d’insuline qui transmet les données de mesure à la pompe à insuline portée sur le bras. Il permet un suivi à distance par le médecin.

Faut-il espérer un œil bionique en remplacement de l’organe défaillant, ayant reçu un « gène porté par un virus bovin, les structures tissulaires ayant été remplacées par des cellules souches et des implants » ? C’est probable.

1.2.6 Des robots

La robotique représente une étape majeure de l’automatisation au temps du numérique.

Dans le domaine industriel, le robot est identifié comme un outil de travail se substituant aux activités humaines, un « appareil » effectuant grâce à un système de commande automatique à base de micro-processeurs une tâche précise pour laquelle elle a été programmée.

Dans le monde médical, son objectif est d’être un outil de l’automatisation de tâches, c’est une machine mobile, elle sait exécuter une action précise, de façon sûre et utile dans un environnement déterminé, elle communique avec son pilote face à la complexité de l’action engagée.

Dans une médecine de plus en plus technique, le robot modifie le diagnostic et la thérapeutique.

Il est l’automate qui aide l’anesthésiste, pilotant l’endormissement du malade opéré.

L’« appareil Da Vinci » est le bras armé du chirurgien qui va participer directement à l’ablation de la prostate, le néo-praticien au contact direct de la zone opératoire intervient guidé par le guide fixé devant son écran en dehors de la salle opératoire.

Une assistance identique est en cours de développement pour la prothèse de la hanche ou du genou.

La revue Science Translational Medicine de mai 20165 rapporte qu’un robot chirurgien autonome a réussi à suturer, sous la supervision d’un chirurgien, deux parties de l’intestin d’un porc, une grande avancée dans la chirurgie délicate des tissus mous de l’organisme où le risque de complications est élevé.

Les micro-robots de très petites tailles sont en mesure de se diriger dans le réseau sanguin pour apporter un médicament.

5 Supervised autonomous robotic soft tissue surgery. Azad Shademan1, Ryan S. Decker1, Justin D. Opfermann1, Simon Leonard2, Axel Krieger1 and Peter C. W. Kim1. Science Translational Medicine 04 May 2016:Vol. 8, Issue 337, pp. 337

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Dans le champ de la neuropsychiatrie, des robots humanoïdes peuvent pratiquer une stimulation visant à établir une relation personnelle permettant de vivre une expérience sensorielle subjective et constructive adaptée aux réactions d’une personne. Ce type de robot est expérimenté dans les soins consacrés à l’enfant autiste où il propose un mode d’apprentissage par l’imitation pour déclencher la communication.

Dans la maladie d’Alzheimer, le « robot émotionnel » aide à déceler les émotions et leurs causes.

Il dispose d’un programme interactif, d’un dialogue, il encourage, il peut développer les sens de façon ludique. Au chevet du patient, il va aider dans la rééducation et la réhabilitation du malade en présentant des exercices, en entretenant sa mémoire par des jeux.

Les robots d’assistance destinés aux personnes âgées et à leur famille sont des robots compagnons, domotiques, mais aussi connectés ou munis de dispositifs d’appels d’urgence, ils libèrent le personnel de certaines tâches répétitives.

1.3 - Les limites de l’automatisation

En voulant donner des qualités et des atouts qui dépassent « l'homme naturel » le processus d’automatisation peut vouloir améliorer l’homme de manière « illégale » comme par exemple dans la pratique du dopage chez les sportifs ou satisfaire l’utopie transhumaniste quand elle veut modifier les caractéristiques physiques et mentales pour une transgression de l’homme.

Une question se pose : le rêve scientifique point de départ de son accomplissement dans une sorte d’homme artificiel va-t-il se réaliser ? Les robots vont-ils remplacer les hommes, l’intelligence artificielle va-t-elle se substituer à l’intelligence humaine ?

Ces nouveaux artisans utilisant l’ingéniosité des machines seront-ils capables de création humaine ? interroge Lawrence Katz6. Le Parlement européen étudie un statut juridique qui reconnaîtrait les robots comme des personnes électroniques avec des droits et des devoirs ! Mais demain des robots seront-ils capables comme les gens autonomes de méditations authentiques et

6 A quoi rêvent les robots ? LE MONDE 18 janv. 2016

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non de contrefaçons habilement copiées-collées7 ? Seront-ils doués de tous les liens entre idées, techniques d’organisation, analyse des concepts8.

Alors, le rêve du transhumanisme fasciné par les machines ferait négliger la nature du vivant, la culture, le sentiment. Les acteurs de santé vivent dans le domaine du relationnel avec une forte capacité d’adaptation psychologique et de résolution de problèmes.

Pour répondre à la question posée, Bertrand Kiefer9 affirme que la machinisation des décisions court-cuiterait la culture médicale. J.M. Besnier10 pense qu’un robot n’a pas suffisamment de cœur, d’âme, de pensée complexe. Les progrès scientifiques, la technologisation de la médecine ne sauraient nous dispenser de l’ambition de rester humain. Pour Bruno Bonnel11 « dans le monde des robots, l’uniquement humain reste irremplaçable ».

Aucune analyse informatisée ne peut s’affranchir de l’homme et de ses qualités exclusives : le non routinier, la flexibilité relevant du relationnel, de la résolution des problèmes.

L’intelligence artificielle médicalisée ouvre le monde de la complexité des raisonnements humains ne doit pas neutraliser l’idéal de l’humanité.

1.4 - Des précautions dans l’utilisation des techniques nouvelles

L’algorithmisation de la vie humaine ne suffit pas pour connaître la vision complète d’un malade, « être libre doté d’une complexité épaisse et obscure » (B. Kiefer), il ne connaît pas tout de l’humain, des comportements. « Le calcul ignore : la souffrance, le bonheur, le malheur, la joie, ce qui fait notre humanité »12 (Edgard Morin). Les informations produites à partir du Big data sont des moyennes réductives obtenues dans diverses populations, tout au plus des normes.

En médecine nous situons les traits de l’individu par rapport à la norme.

7 Méditations d’un robot philosophe Roger-Pol Droit, LE MONDE DES LIVRES du 14.01.2016

8 Tous formatés par les machines. F. Joignot, LE MONDE du 18.02.2018

9 Kiefer B., 2014, « La déshumanisation au cœur de la médecine », Revue Médicale Suisse, 10 :1528

10 Jean-Michel BESNIER « Demain les post humains, le futur a-t-il besoin de nous » (Hachette Littératures, 2009)

11 Bruno Bonnell chef d’entreprise Spécialisé dans le domaine des technologies numériques.

12 Edgar Morin : "Humanisons le transhumanisme !", Le Monde du 8 novembre 2016

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Pour traiter le cas d’un individu à soigner, il conviendra de ne pas utiliser telle ou telle technique de façon systématique mais de le faire de manière raisonnée.

« Les objets avec qui penser » sont devenus les compagnons quotidiens doués d’une forme de psychologie (smartphone, réseaux sociaux, applications de réalité augmentée), ils modifient notre identité en accaparant notre attention à tout moment. Le moi social est capturé par le numérique Internet, le flux informatif nous contrôle alors que la conversation face à face fonde la personnalité, cultive l’empathie « encourage l’autoréflexion, la pensée indépendante »13.

La cyber sécurité, c’est-à-dire la sécurité informatique, doit s’organiser pour éviter la diffusion des données médicales individuelles, pour éviter la prise de contrôle extérieure malveillante des dispositifs médicaux robotisés (stimulateurs cardiaque, pompes à insuline).

La révolution numérique a et aura plus encore des conséquences sociales, tout d’abord par la perte d’emplois, et surtout humainement par le risque de déshumanisation, d’une révolution de vie, de modification dans les rapports.

L’importance des relations humaines dans la médecine fait que ce n’est pas demain que la machine remplacera le médecin. L’empathie et la compassion envers les patients restent, encore pour un temps, l’apanage des femmes et des hommes.

1.5 - Les évolutions, de quoi demain sera-t-il fait ?

Il faut s’attendre à une évolution rapide. Les technologies-outils de l’homme seront développées par le numérique et l’informatique.

Actuellement, des traitements cibles se développent adaptés à chaque malade en fonction des spécifications génétiques et biologiques de la tumeur dont il est porteur. La technologie renforce les approches diagnostiques et thérapeutiques.

Demain, un virus de synthèse inoffensif sera capable d’apporter le médicament jusqu’au cœur des cellules malignes, une chirurgie robotisée et miniaturisée plus performante réparera les tissus lésés en réduisant considérablement les conséquences délétères de l’intervention.

Après demain, ce sera la correction des gènes défectueux ou le remplacement des organes déficients en utilisant les cellules souches du malade.

13 Sherry Turkle, Seuls ensemble. De plus en plus de technologies de moins en moins de relations humaines, Paris, L'Échappée, 2015, 525 p., ISBN : 978-2915830

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Dans dix ans, avec le développement des biotechnologies, on pourra obtenir à distance du malade le résultat de l’analyse de séquences d’ADN appartenant à des agents infectieux (VIH, paludisme,...) et caractériser ainsi au plus près le germe pour mieux le combattre. Au lit du malade un test génomique permettra de dépister telle prédisposition à développer des effets indésirables de certains médicaments, une toxicité médicamenteuse, de surveiller en continu la présence de marqueurs de rejet d’une greffe, ou alerter du risque de survenue d’un infarctus du myocarde.

Les Trophées de la Santé Mobile qui récompensent annuellement les meilleures applications mobiles de santé et décernent le prix de l’objet de santé connecté de l’année nous montrent la progression d’applications innovantes dans des champs très diversifiés : surveillance de la consommation de cigarettes, surveillance du diabète, choisir le bon pansement selon le type de plaies, signaler aux autorités les effets indésirables d’un médicament, la livraison de médicaments par drones.

L’utilisation des techniques nouvelles entraîne des avancées dans les stratégies thérapeutiques, dans l’organisation des soins. Disposant de plusieurs techniques ayant des effets différents chez un même malade il est possible de les associer simultanément ou successivement pour obtenir de meilleurs résultats. On peut par exemple coupler l’acte chirurgical robotisé à d’autres techniques comme les ultra-sons de haute densité, la photothérapie dynamique, les traitements médicamenteux in situ.

Le traitement du cancer associe depuis plusieurs années le diagnostic par imagerie (scanner, RMN) et l’intervention chirurgicale, classique, endoscopique ou robotisée.

Ces rapports étroits entre technologies médicales et chirurgicales dans le parcours de soins coordonnés du patient seront soulignés dans le chapitre suivant.

II - LA MEDECINE EN PERPETUELLE EVOLUTION DANS LA COMPLEXITE CONSERVE CEPENDANT LE MEME DEFI : « SOULAGER LA SOUFFRANCE ET MAINTENIRLASANTE »

Nous sommes confrontés à de multiples défis, le développement de la technologie évoqué dans le précédent chapitre, la pénurie de médecins initiée en médecine générale dans les zones rurales,

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a gagné aujourd’hui de nombreux secteurs de soins, elle est aujourd’hui particulièrement marquée dans le secteur médico-social où les établissements pour enfants et adultes handicapées peinent à recruter des médecins vacataires pour assurer le suivi des résidents et dans les EHPAD confrontés à des difficultés majeures de recrutement de médecins coordonnateurs14. Le vieillissement de la population, la prévalence des maladies chroniques et mentales créent de nouveaux enjeux d’organisation des structures de santé.

L’utilisation du mot patient s’est trop centrée sur la personne, sur un organe ou sur une pathologie décomposée en spécialités. Il faut intégrer les facteurs externes de l’environnement physique et du milieu social. Le malade doit être identifié dans sa globalité tout au long d’un parcours de vie unique.

Nous avons besoin de retrouver « les conseils » de la prévention primaire sur le mode de vie, l’activité, les consommations. Cette prévention permet d’appréhender les facteurs de risque tout en respectant l’autonomie du patient. Chainon manquant dans l’organisation des soins, la prévention est partie intégrante de la politique socio-sanitaire et de la santé.

La réorganisation du système de santé pêche toujours de son manque de coordination du parcours de soins. La mise en place du Dossier Médical Partagé parviendra t-il à effacer l’échec du carnet de suivi médical instauré en 1996 avec le double but d'améliorer le suivi des soins médicaux et de limiter les gaspillages ?

Un malade de plus en plus fractionné

Si le système de santé français est considéré comme l’un des meilleurs au monde, la fragmentation de son organisation affecte son efficacité et sa qualité. Depuis des années, les différents acteurs invoquent la nécessité de mieux coordonner les soins et les services, particulièrement dans le cadre des maladies chroniques.

De même, chez les personnes âgées ou handicapées les difficultés de santé vont prendre une dimension toute particulière du fait de leur fragilité. Chez elles, il est indispensable de rechercher

14 Difficultés de recrutements en établissements et services pour personnes âgées et personnes en situation de handicap. Résultats de l’enquête Flash du réseau Uniopss-Uriopss. Septembre 2019

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des prises en charge qui préservent au mieux la qualité de vie et les suivis qui conjuguent les impératifs du soin et les exigences de l’autonomie.

La recherche d’une approche globale, la prise en compte des problématiques d’ordre médical, social et psycho-social appellent la mise en place de formes nouvelles de coopération entre professionnels du soin et professionnels de l’accompagnement, mais aussi entre institutions de culture aussi différentes que le sont l’hôpital d’une part, les soins de ville ou les établissements ou services médico-sociaux de l’autre.

À partir du recensement des besoins des malades et de l’analyse des pratiques, le désir d’innover et de générer des solutions originales adaptées à chaque contexte doit conduire à une remise à plat totale de tout le dispositif du soin et du « prendre soin » du patient.

Il existe de profondes ruptures dans la continuité des soins, depuis le diagnostic du praticien de ville jusqu’à l’hospitalisation en service spécialisé, puis de la transition en retour vers le médecin traitant au domicile, vers la structure de rééducation ou un hébergement dans le médico-social, de la prise en charge au domicile par les différents accompagnants. Il s’agit d’un long parcours chaotique.

Malgré la nécessité prônée depuis des décennies par le ministère de la santé d’articuler les systèmes de prise en charge du patient, de mobiliser les différents acteurs pour des parcours de santé sans rupture afin de mieux coordonner l’ensemble des prestations sanitaires, médico- sociales et sociales, afin de mieux répondre aux besoins de prévention et de soins des personnes, en priorité pour celles souffrant de pathologies chroniques, de polypathologies ou de perte d’autonomie, force est de constater qu’il continue aujourd'hui de s’afficher deux parcours bien dissociés :

- un parcours technique hospitalier qui délivre des soins de plus en plus complexes à un patient sur un plateau technique de plus en plus spécialisé,

- un parcours d’accompagnement médical et social soit au domicile, soit en établissement spécialisé d’hébergement pour personnes âgées dépendantes ou personnes handicapées.

Les deux systèmes restent par trop étanches.

La mise en place du Dossier Médical Partagé qui reste un outil d’échange d’informations ne pourra pas se substituer à une véritable politique de coordination des soins.

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Ces ruptures sont renforcées par les crises que traversent actuellement ces différentes institutions. De nombreuses craintes et critiques ont été émises ces derniers mois sur la dégradation du système de santé. L’austérité et les réformes libérales ont conduit à une dégradation sans précédent des conditions de travail des personnels de soin, dans les établissements hospitaliers privés et publics comme dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ou personnes handicapées.

« Cette crise est violente et multiforme : une crise d'efficacité, de financement, de gouvernance et de confiance. Certainement pas une crise de ressources, notre système n'en a jamais eu autant et c'est le paradoxe de la situation »15.

2.1 - Un système de soins hospitalier public exsangue

L’austérité et les réformes libérales ont conduit à une dégradation sans précédent des conditions de travail des personnels de soin, dans les établissements hospitaliers comme dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

À l’hôpital, les baisses de tarif hospitaliers alors que le nombre de séjours hospitaliers progresse chaque année conduisent les établissements à l’asphyxie budgétaire. Le déficit de l’assistance publique des hôpitaux de Paris génère une baisse des effectifs. Face à la dégradation de leurs conditions de travail, les soignants dénoncent « une mue douloureuse de l’hôpital, un sentiment de lassitude et de souffrance »16. Les médecins s’insurgent contre la « gouvernance toxique ».

Épuisement, dépressions, suicide, moyens réduits pour raison de rentabilité, « ce beau métier devient une galère » disent les professionnels de santé.

Les médecins urgentistes dénoncent les pénuries de personnel, les services supprimés qui privent les malades de lits hospitaliers et les obligent à occuper des brancards pendant de longues demi- journées. La presse rapporte qu’à Lyon, en raison des personnels exaspérés en grève, les personnes âgées sont reçues dans les couloirs et reçoivent un plat unique au repas. Un nouveau site, créé par des médecins en colère, permet de compter chaque jour les patients obligés de passer la nuit dans les couloirs, dénommés « les couloirs de la honte des services d’urgences ».

15 Politiques de santé Réussir le changement. Frédéric BIZARD septembre 2015. Éditions DUNOD

16 Martin HIRSCH. LE MONDE | 17.03.2018 à 10h08

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La psychiatrie traverse une crise sans précédent marquée une offre de soins déficitaire, hétérogène et incohérente. Des manquements graves ont également été relevés par le contrôleur général des lieux de privation de liberté en début d'année 2018 dans les unités de psychiatrie du CHU de Saint Étienne. Certains patients faisaient l'objet de pratiques jugées abusives de placement en chambre d’isolement ou de contention ne respectant pas les bonnes pratiques en la matière. Tout ceci est sous tendu par un déficit en personnel.

La souffrance avec ses conséquences sur l’épuisement et la dégradation de la santé des soignants devient une réelle inquiétude.

2.2 - La sous médicalisation des EHPAD

La fin de l’année 2017 a vu émerger une crise profonde dans le fonctionnement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

Une étude de l’INSEE publiée le 5 juillet 2017 révélait un turn-over important des personnels soignants dans les Ehpad privés en France : « le taux de départ moyen des infirmiers est de 61 % et celui des aides-soignants s’élève à 68% »17. Les causes sont identifiées : la dépendance croissante des résidents alourdit les charges de travail avec pour corollaire des aides-soignants usés par les cadences, des infirmiers qui dénoncent le manque de dignité des soins.

Les raisons de cette insécurité grandissante, d’une situation tendue pour mener un accompagnement efficace sont liées à un taux d’encadrement insuffisant par manque de budget.

Alors que les besoins augmentent, ces établissements qui doivent assurer les fonctions essentielles d’autonomisation du malade et d’anticipation de la perte d’autonomie remplissent avec difficultés leurs missions face à la limitation des budgets, ceux arrêtés par l’Assurance Maladie qui concernent les soins et ceux des Départements via l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) qui financent la dépendance.

Enfin, ici aussi le manque de ressources en médecin conduit à des déficits de présence médicale.

S’agissant de la difficulté de recrutement de médecin coordonnateur, la commission des affaires

17 Turnover élevé du personnel soignant dans les Ehpad privés en France : impact de l’environnement local et du salaire. Cécile Martin et Mélina Ramos-Gorand. INSEE. ECONOMIE ET STATISTIQUE / ECONOMICS AND STATISTICS. N° 493-05/07/2017

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sociales sur les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes indiquait le mercredi 13 septembre 2017 qu’un établissement sur trois n'en avait pas.

Conjugué à une disponibilité insuffisante du médecin généraliste traitant, ce déficit en temps médical conduit à un suivi insuffisant qui conduit à un transfert hospitalier en cas de problème de santé insuffisamment traité d'où l'encombrement des services d’accueil des urgences en cas d'épidémie hivernale de grippe18.

2.3 - Les difficultés de la coordination

Le bon soin doit respecter l’unicité du patient, il doit transformer l’exercice médical ponctuel, trop souvent individuel, en pratiques de soins collaboratives inter et pluridisciplinaires, il doit se déporter en intégrant le personnel non médical, les partenaires des sciences humaines et les ingénieurs (médicaux).

Plusieurs raisons justifient la structuration pluridisciplinaire totale du réseau de soins. Arnaud François et Frédéric Worms19 ont écrit : « La maladie est moment du vivant qui n’est plus comme un problème délimité, local, cantonné à la biologie ou à l’histoire des sciences, il traverse une vaste série de problématiques ».

La maladie est un moment multiforme qui demande d’associer les professionnels médicaux, socio-sanitaires et le patient dans les divers lieux de soins. Aucun acteur du dispositif médical ne peut répondre à lui tout seul aux attentes du patient et à ses proches. Prendre en compte la complexité de la situation de chaque patient nécessite de prévoir une réaction adaptée donnant accès à de multiples disciplines, coordonnées, dans un parcours qui va du diagnostic initial à la réhabilitation.

La coordination des soins est un concept à la mode dont les contours sont souvent flous. Chaque professionnel, chaque institution, pense que ses actions sont coordonnées avec les autres prestataires de soins.

Pourtant trop souvent le constat sur le terrain est tout autre: « Cette situation est particulièrement inquiétante au moment où la maladie chronique, qui requiert la continuité des soins grâce à l'intervention coordonnée de tous les prestataires impliqués dans la prise en

18 EHPAD : Comment réduire les transferts évitables à l’hôpital ?Journal of the American Geriatrics Society 13 February 2018

19 Arnaud François et Frédéric Worms (dir.), Le Moment du vivant, PUF, coll. Philosophie française contemporaine

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charge du patient, occupe une place de plus en plus importante dans le tableau épidémiologique20».

Les difficultés à coordonner les actions et les contributions de chaque prestataire de soin résulte des fragmentations que connaît notre système de santé.

La construction segmentée des dispositifs de soins est renforcée par le financement par catégorie des prestations.

Bien que dénoncée depuis des années par les politiques, une révision en profondeur des méthodes, des mécanismes et de l’organisation de notre modèle sanitaire avance à petit pas, chaque changement envisagé soulevant la résistance de chaque professionnel de santé qui s'arc- boute sur ses périmètres de compétence.

2.4 - En route vers une réforme globale du système de santé ?

« L'hôpital n'est plus à la verticale de son temps » écrivait récemment Laurent Vercoustre, « Ce n'est pas à l'hôpital que se joue notre santé. La technologie médicale nous fascine, nous lui prêtons des pouvoirs quasi magiques, mais quand il faudrait apprendre aux patients à mieux se nourrir, nous leur proposons le by-pass ».

En février 2018, le premier ministre et la ministre de la santé ont annoncés lors d’une conférence commune une « réforme globale du système de santé »21. Cette annonce intervient après plusieurs prises de positions très critiques de Mme Buzyn sur le fonctionnement actuel de l’offre de soins puisqu’elle considérait en décembre 2017 que « Sur l’hôpital, nous sommes arrivés au bout d’un système ».

Le chantier du lien entre médecine de ville, hôpital, médico-social et accompagnement psycho- social est à nouveau remis sur le tapis.

Le gouvernement veut lancer des expérimentations sur plusieurs territoires qui pourront

« proposer des modèles d’organisation totalement nouveaux, qui prendront en charge la santé de toute une population, transcendant les clivages actuels ville/hôpital ».

Ces transformations requièrent une évolution des cultures professionnelles.

20 Continuité, coordination, intégration des soins : entre théorie et pratique. Rev Med Suisse 2008 ; 4 : 2034-9

21 Le gouvernement promet une « réforme globale » pour le système de santé. LE MONDE du 13.02.2018

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De fait, un certain nombre de germes de changement, préludes à une véritable mutation des organisations sont déjà identifiables :

- Les maisons de santé regroupant plusieurs professionnels de santé dans des locaux communs se développent dans les territoires. On assiste, depuis 2008, au développement des pôles de santé et des maisons de santé pluriprofessionnelles. Ces nouvelles structures ont été conçues pour répondre aux attentes des jeunes professionnels de santé libéraux qui sont censés y trouver un environnement adapté répondant mieux à leurs aspirations en matière de pratique. Elles permettent d’attirer et de maintenir des médecins en zones sous-dotées.

- L’infirmier en pratique avancée défini par la loi de 2016 de modernisation de notre système de santé pourraient « combler un déficit dans l'offre de soins, assurer des prises en charge complexes en particulier sur la coordination en médecine de proximité et/ou entre la ville et l'hôpital évitant ainsi des ré hospitalisations dramatiques et coûteuses » explique l'Ordre National des Infirmiers.

Dans le cadre de regroupements, de maisons de santé, de pôles mais également d'équipes de soins primaires sans regroupement physique mais dans une logique pluriprofessionnelle, l'infirmier en pratique avancée de premier recours pourra assurer une coordination soignante et sociale, une consultation infirmière de première ligne, une consultation longue de suivi des pathologies chroniques, la prescription infirmière et un champ élargi de la vaccination sans prescription, l'éducation thérapeutique du patient et enfin, un accès plus rapide au médecin spécialiste.

- La participation des patients et des associations de patients aux évolutions de notre système de santé par le biais du développement des patients-experts, de la démocratie sanitaire, des comités territoriaux de santé, dès lors que ces instances ne se cantonneront pas à un rôle de chambre d’enregistrement de politiques sanitaires descendantes mais sauront faire réellement valoir leurs ambitions en matière d’organisation sanitaire nationale et locale.

- Les pharmaciens, acteur de santé de proximité, au contact des patients, diversifient leurs missions et élargissent leur champ d’intervention. Le grand chamboulement en cours et à venir, c’est « l’accompagnement plus personnalisé des malades pour les

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pharmaciens en officine »22. Il quitte ses fonctions « d’exécutant d’une ordonnance ».

On exige une prise en charge plus globale, on lui demande de faire de la prévention, de suivre de plus près le parcours du patient, de collaborer davantage avec les autres professionnels de santé ». Deux régions expérimentent depuis octobre 2017, la vaccination des patients contre la grippe par les pharmaciens d'officine.

« Face à l’évolution radicale de notre monde, conséquence d’une triple transition (démographique, épidémiologique et technologique), notre système de santé n’a pas d’autre choix que de structurellement s’adapter »23.

Cette mutation devra se faire à marche forcée pour rester en phase avec les besoins et les attentes des patients.

III – LENOUVEAUDEALDELARELATIONMEDECIN-MALADE

La relation médecin-patient se compose d’une dimension verbale d’échange suivi d’un acte de soin qui va définir une marche à suivre pour maintenir la santé, prévenir la maladie, accompagner le patient dans un parcours de soins.

3.1 - Le médecin face à une demande de plus grande humanité de la part du malade

« « L’humanité, enjeu majeur de la relation médecin/patient »24. Dans cet ouvrage, les auteurs indiquent que si le patient apprécie le plus souvent la qualité et la technicité des soins prodigués, il souhaiterait bénéficier de plus d’explications, d’attention, de considération. Le soin requiert une attention portée au non-sens et aux souffrances multiples que la maladie implique pour la personne qui en est affectée. La spécialisation des disciplines, la fragmentation des suivis, l’organisation complexe et actuellement en pleine évolution du système de santé renforcent le risque de cette occultation de l’expérience subjective du malade.

22 Les études de pharmacie se mettent à la page. Le Monde, mercredi 31 janvier 2018.

23 Politique de santé : réussir le changement. Frédéric Bizard. 2015 - Collection : Santé Social, Éditeur : Dunod

24 La philosophie du soin. Marie Gaille et Nicolas Fourneur. 2010 - Presses Universitaires de France

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Depuis les années 1970 le paternalisme propre à chaque médecin a disparu qui lui donnait les pleins pouvoirs sans partage du diagnostic, du choix du traitement, sans informations.

Dans cette relation de dépendance, le médecin seul était dépositaire du savoir, le patient infantilisé était sans connaissance médicale, incapable de prendre une décision, il devait juste consentir et s’abandonner aux mains du médecin. En contrepartie, le médecin s’engageait dans une relation naturelle de bienveillance. « Les médecins sont dans une relation thérapeutique qui établit un cadre de compétence médicale socialement reconnue et qui confère aux personnels soignants une autorité qui leur permet de prescrire et d’imposer au patient un ensemble de traitements qui impliquent des comportements à suivre »25. Le médecin apparaît comme un acteur pragmatique, adossé à une rationalité scientifique et personnellement engagé.

Actuellement la relation médecin-malade répond au « modèle informatif » : le médecin est de plus en plus un technicien expert informant un malade-client, demandeur autonome de soins et qui va décider in fine s’il accepte ou refuse le soin ou telle technique chirurgicale proposée. Ce contrat de soins s’inscrit dans un climat de confiance raisonnée.

Ainsi se dessine un modèle de « partenariat », sans patient, sans client mais entre deux partenaires. A la raison médicale se substitue une décision partagée et une action médicale conduite en commun, ce qui fait dire à Catherine Vincent : « Les soignants sont confrontés à une pratique très normative, à des situations complexes – malades chroniques, long séjour, fin de vie, à logique gestionnaire de plus en plus présente »26.

Dominique Lecourt écrit : « Le soin ne désigne pas qu’un domaine particulier de l’activité médicale mais un socle anthropologique sur lequel toute médecine fonde son humanité et son efficacité »27.

Le rôle spécifique du médecin glisse progressivement vers une aide technique et morale au patient, il s’agit de le conseiller pour aboutir à une décision partagée avec lui : « il doit produire et intégrer des données pour assister son patient dans les choix thérapeutiques proposés, le

25 L'observance thérapeutique : déterminants et modèles théoriques. Cyril Tarquinio M.-P. Tarquinio. Pratiques psychologiques 13 (2007) 1–19

26 A l’hôtel dieu, je panse donc je suis. Catherine Vincent. Le monde Idées 15.09.2016

27 LECOURT D. Avant-propos. In : La philosophie du soin, Ethique, médecine et société. Presses universitaires de France, 2010 ; 1-2

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rassurer, le guider dans l’interprétation des données vécues. Loin de mécaniser sa relation pratique une médecine humanisme face à une « technologie sans état d’âme » nous dit Jean- François Thebault28.

Une nouvelle fonction médicale a émergé qui conduit le médecin à respecter les besoins de son malade et à l’accompagner dans la recherche de ce qui lui convient au mieux, mais aussi à acquérir des compétences relationnelles de communication verbale et non verbale, à s’ouvrir à l’écoute ce qui suppose une mise en retrait, une ouverture à l’autre. L’écoute est une science à laquelle il faut être formé. Le médecin doit dialoguer pour connaître le vécu de son patient, intégrer dans sa réflexion la question de la qualité de vie et des priorités de vie, il doit s’appliquer à informer et à expliquer en évitant de heurter les sensibilités. Il apporte un appui sans critique.

« À côté du gouffre existentiel que représentent les avancées technologiques, l’empathie et le sens aigu du contact et du dialogue porteront les changements »27.

Pour réinventer « l’écoute de proximité » des patients dans une médecine centrée sur l’humain, le personnel soignant devra plus que jamais intégrer dans son logiciel métier les sciences sociales, en formation initiale et en formation continue.

Actuellement dans leur formation, les étudiants sont écartelés entre les obligations d’acquérir des connaissances objectives toujours plus larges et l’intimation d’une maîtrise des enjeux de la communication.

Pour le jeune médecin, l’enjeu relationnel d’une consultation reste empreint de la figure de domination d’un « patron ». Il devra aujourd’hui être en mesure de réconcilier des postures en partie contradictoires, d’une part la formalisation et la standardisation des pratiques et d’autre part la capacité de prendre en compte les aspects non biomédicaux : « l’acquisition du savoir relationnel, la maîtrise de l’art de la communication »29.

Par ailleurs, le numérique transforme l’enseignement et offre de nouvelles possibilités aux pédagogues. Il permet des cours en ligne, à destination d’étudiants disséminés à partir d’un arsenal technologique central loin du traditionnel face à face entre enseignants et élèves dans un amphithéâtre.

28 « Éthique et data de santé » Jean-François Thébaut, Cardiologue, membre du collège de la HAS

29 Dimensions existentielles et identitaires d’une carrière médicale » Régis Marion–Veyron. La formation des médecins, entre scientificité et Bildungsroman. Rev Med Suisse 2016 ; 12 : 300-2

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Il apporte un progrès considérable dans l’entraînement à la gestuelle chirurgicale au travers de simulateurs qui permettent de répéter à volonté un geste, sans risque pour le patient. Cet entraînement virtuel régulier qui va jusqu’à proposer différentes procédures ne doit pas occulter toute l’importance du compagnonnage par le binôme et le tuteur.

Comment mieux placer l’étudiant au cœur du dispositif d’apprentissage ? Par une pédagogie active, mettant l’accent sur le travail en groupe et la créativité, essentielle pour les apprentissages aux compétences comportementales : empathie, écoute, aptitude à la discussion qui sont des fondamentaux indispensables dans le modèle du partenariat de la relations médecin-malade.

L’apprentissage doit rester personnalisé permettant à chacun d’apprendre à son rythme et de forger son expérience.

La formation continue des seniors s’appuie sur la lecture de revues médicales, leur participation à des sessions de Formation Médicale Continue, encore faudra-t-il se méfier de la mauvaise qualité de certains articles de synthèse sur des médicaments ou des maladies et des empreintes de motifs d’intérêt.

Dans ce créneau émergent également le développement de nouveaux programmes de formation en ligne, parfois complexes et contraignants, ce e-learning complémentaire permet d’effectuer son choix à tout moment, sans surcharge à l’activité clinique.

Ainsi, au décours de sa formation initiale ou continue, le médecin doit être apte à informer le malade ainsi que la bonne manière de le faire. Il devra « supporter les affects devant la souffrance du patient qui leur demande de leur faire du bien »30.

3.2 - Les nouveaux patients, s’informer et prendre la parole

Au cours d’une consultation le malade amène avec lui ses représentations, ses connaissances du corps et de sa maladie, constituées à partir de ses expériences et des informations reçues. Il réagit de manière émotionnelle selon un registre affectif qui va moduler l’adhérence au traitement, ses plaintes, sa demande d’aide.

30 Dimensions psychologiques de la douleur chronique chez les personnes âgées: pour une autre écoute de la plainte». CHRISTOPHE LUTHY, MÉDECIN. Département de Réhabilitation et Gériatrie, Hôpitaux Universitaires de Genève, Genève

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Historiquement, le patient avait une relation de soumission et de confiance en son médecin. Le numérique fait évoluer son comportement avec une prise partielle d’autonomie par le biais d’informations acquises en direct sur le net.

La maladie chronique exige du patient qu’il s’adapte à ses nouvelles conditions, voire qu’il trouve un nouveau sens à sa vie. On lui demande de participer activement à sa santé et à ses soins, de gérer sa nouvelle vie de malade soumis à un traitement.

Avant de se rendre à une consultation médicale, 64 % des patients sont allé sur le Net pour y rechercher des informations, soit pour mieux comprendre ce que le médecin va dire, pour discuter du traitement, pour poser de meilleures questions.

Après la consultation 34 % y retournent pour s’informer sur leur maladie, le traitement.

Durant la consultation, le malade sait et la relation médecin-malade va se déporter vers un patient qui a besoin d’un expert pour discuter avec lui des différentes hypothèses diagnostiques et thérapeutiques.

La prise en charge médicale devient partagée, elle va s’orienter en fonction de la capacité du malade d’entendre une certaine vérité, d’entrer dans une démarche de choix du traitement, de bien en comprendre les enjeux, d’en évaluer les conséquences. Au lit du malade, c’est ensemble qu’est proposée la meilleure stratégie de prise en charge thérapeutique.

Le mot « mon Patient » a disparu, connoté du sentiment de propriété. Le succès du traitement repose sur un dialogue suscité le plus tôt possible et sur une réflexion partagée.

Fondement de la pratique médicale le raisonnement clinique est « l’ensemble des processus cognitif et non cognitif permettant d’interagir avec un patient et son environnement afin de collecter et d’interpréter des données, peser les risques et les bénéfices des actions et comprendre les préférences du patient ; ceci afin de déterminer une démarche diagnostic et traitement »31.

Dans les années 80 puis 90, l’épidémie du Sida, ce virus face auquel malades et soignants étaient aussi démunis les uns que les autres, puis ensuite les scandales sanitaires, ont conduits non seulement à une nouvelle forme de relation dans le soin mais encore à une montée en puissance des associations de patients qui ont pris part aux débats sur la qualité des soins et la sécurité des patients et plus largement l’organisation du système de santé.

31 Coralie Galland-Decker, David Gachoud, Matteo Monti . Rev Med Suisse 2016; volume 12. 2004-2006

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Les représentants des usagers sont entrés en 1996 dans les conseils d’administration des hôpitaux. Leur présence au sein d’autres instances s’est peu à peu élargie. Plus tard a été introduite la notion de démocratie sanitaire pour évoquer l’exercice de ces nouveaux droits que l’on appelle aussi « droits collectifs ».

Par l’intermédiaire d’associations, les patients ont la possibilité de rapporter les effets secondaires des médicaments, de témoigner sur le vécu de leurs maladies, de décrire son impact sur la qualité de vie et l’entourage, de signaler les difficultés rencontrées. La parole est ainsi donnée aux patients et par là l’initiative « d’ouvrir un lieu de décision à la société civile ».

En donnant un rôle de contre-pouvoir face aux professionnels de santé et aux représentants de l’État et de l’assurance maladie, les pouvoirs publics ont imaginé que l’usager pouvait servir à rendre les débats plus transparents et plus concrets face à des logiques plus instrumentales qu’elles soient professionnelles ou technico-administratives. Malgré cette volonté politique, il faut se demander quelle a été la réalité de cette participation et ce qu’elle a pu apporter réellement et concrètement dans la définition et la mise en œuvre des politiques de santé32. A-t-il un réel pouvoir d’influer sur la marche du système de santé ou n’assure-t-il qu’une prestation cosmétique dans un dispositif de gouvernance totalement verrouillée par le haut ?

Au-delà « d’être acteur de sa santé », il est demandé au patient de s’approprier des gestes, des décisions, un investissement face à sa maladie et à son traitement. Il est appelé à reprendre un pouvoir sur sa propre vie (Empowerment).

L’observance désigne le comportement du patient qui suit le traitement qui lui a été prescrit et tient compte des recommandations médicales. Elle se réfère à la capacité du patient de s’inscrire dans les cadres médicaux qui devraient pouvoir optimiser sa santé, capacité se référant aux ressources mentales, sociales, physiques et psychologiques pour faire face à la maladie et aux exigences de soins. L’observance intègre une dimension affective de la relation médecin / malade, elle est un indicateur de la qualité de cette relation.

Dès 2003, l’OMS s’inquiétait de la non-observance des traitements prescrits dans les maladies chroniques, les pourcentages atteignant 50 % dans l’hypertension artérielle, 80 % dans l’asthme

32 USAGERS ET POLITIQUES DE SANTÉ : BILANS ET PERSPECTIVES. Pierre-Henri Bréchat, Alain Bérard, Christophe Segouin, D. Bertrand. S.F.S.P. | « Santé Publique ». 2006/2 Vol. 18 | pages 245 à 262

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ou le diabète, 73% des hospitalisations en psychiatrie sont des ré-hospitalisations avec abandon de la prise de médicaments33.

Ces causes sont diverses, elles peuvent être physiologiques en lien avec les effets indésirables des médicaments, psychologiques avec un système de croyance ou une attitude de suspicion, une lassitude face aux contraintes imposées par la maladie, un besoin de souffler ou « d’affirmer sa propre autorité »34.

Pour réduire la non-observance, le patient qui se trouve en face d’un étranger auquel il doit se confier a besoin d’être rassuré.

Le médecin a un rôle déterminant. Il doit avoir une attitude positive, favoriser un sentiment de confiance et de responsabilité, une participation, donner une dimension affective à sa consultation, prenant en compte sa souffrance psychologique tout en s’efforçant d’analyser le risque couru dans le parcours de soin du malade. Le médecin devra comprendre la perception qu’a le malade de sa maladie et du traitement.

Il devra éviter toute attitude autoritaire, tout jardon technique, des instructions imprécises ou confuses dans les prescriptions et les posologies.

Le succès thérapeutique sera évalué comme d’habitude sur la sécurité et l’efficacité mais il doit aussi incorporer les résultats subjectifs du patient.

3.3 - Les aidants, troisième acteur du soin en ambulatoire ou en institution

« La relation privilégiée médecin-malade s’inscrit dans un réseau social de proximité autour du patient à mobiliser pour créer sa santé regroupant soignants, aidants, soigné, famille »27.

A l’heure où le système de soins investit de façon croissante le domicile, les proches aidants jouent un rôle déterminant.

33 L’observance des traitements prescrits pour les maladies chroniques pose problème dans le monde entier.

OMS GENEVE, 1 JUILLET 2003.

34 D’Ivernois Jean-François, Gagnayre Rémi. Apprendre à éduquer le patient- Paris-Edition Vigot. 1995

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En France, les aidants familiaux seraient environ 3,5 millions et représenteraient aujourd'hui 7 % de la population active. On estime que l'entourage assure plus de 70 % des tâches d'accompagnement de la personne dépendante35.

Auprès d’un proche atteint dans son autonomie, ils consacrent une partie de leur temps à

« soigner » et à accompagner. Il s’agit d’une prise en charge qui va veiller au confort en favorisant la communication, la stimulation cognitive. Les activités généreuses de ces « non professionnels » dévoués et efficaces méritent d’être reconnues et considérées. Ne serait-il pas souhaitable d’en préciser plus officiellement la place, le rôle, de garantir leur insertion et même de leur accorder si nécessaire une aide ?

De programmes se développent afin de permettre aux aidants d’acquérir un savoir-faire précis face à certaines maladies déstabilisantes.

La formation des aidants constitue aujourd’hui un axe majeur dans l’action des associations de patients. Au Canada un programme a été développé de psycho-éducation destiné aux proches des personnes souffrant de schizophrénie36.

En médecine de premier recours, un exemple de l’importance de l’entourage est rapporté par Cédric Devillé et Françoise Narring dans la prise en charge des adolescents présentant des difficultés comportementales, des relations conflictuelles avec leur entourage ou des signes de souffrance psychiques37. L’intégration de l’entourage dans la démarche de soin peut agir comme un levier thérapeutique puissant et rapide.

IV - CONCLUSION

A l’issue de ces réflexions, il faut tenter de recherche quelle marque identitaire peut être donnée à la médecine dans ce premier quart du XXIème siècle ?

35 Question orale n° 0989S de Mme Maryvonne Blondin (Finistère - SOC) publiée dans le JO Sénat du 05/08/2010 - page 2001

36 Cité par le docteur Yann Hodé, psychiatre au centre hospitalier de Rouffach (Haut-Rhin) et chercheur, à l’initiative du développement du programme Profamille en France.

37 Pas sans ma famille ! L’importance de l’entourage en médecine de premier recours avec des jeunes. Cédric Devillé, Françoise Narring. Rev Med Suisse 2016; volume 12. 1141-1143

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Il s’agit d’une médecine technicisée, sans cesse enrichie de nouvelles technologies, d’une médecine en partie numérisée et totalement informatisée. C’est une médecine de précision de plus en plus personnalisée.

Au travers du parcours de soin coordonné difficile à rendre pleinement effectif, c’est une médecine multidisciplinaire qui ne peut plus agir sans la mobilisation active des différents professionnels de santé qui œuvrent ensemble dans la prise en charge du patient. Elle a besoin de recruter les aidants pour aboutir au-delà du résultat médical à un résultat psychosocial satisfaisant et durable dans le temps.

C’est une médecine collaborative fruit d’une alliance entre le médecin et son patient, fondée sur le dialogue permanent entre eux deux.

Sera-t-elle enfin toujours une médecine sociale ? Face à ses progrès spectaculaires, saura-t-elle conserver son fondement d’une meilleure santé répartie au mieux sur l’ensemble de la population ou ira-t-elle en se focalisant sur un petit nombre d’individus recevant des soins de plus en plus technicisés comme le craint Bertrand Kiefer38 ?

Il s’agit là du dernier et du plus important des défis à tenir.

38 Médecine, deviens ce que tu es. Bertrand Kiefer. Rev Med Suisse 2016; volume 12. 1784-1784

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