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Le phénomène des autorités administratives indépendantes

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Le phénomène des autorités administratives indépendantes

BELLANGER, François

BELLANGER, François. Le phénomène des autorités administratives indépendantes. In:

Bellanger, François ; Tanquerel, Thierry. Les autorités administratives indépendantes : Journée de droit administratif 2010. Genève : Schulthess, 2011. p. 9-36

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:28672

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Le phénomène des autorités administratives indépendantes

FRANÇOIS BELLANGER

Avocat, Professeur à l'Université de Genève *

Introduction

Les autorités administratives indépendantes existent en Suisse depuis de nombreuses années. Elles ont eu traditionnellement une fonction de contrôle financier' ou de surveillance de certaines activités, conune l'an- cienne Commission fédérale des banques (CFB)2. Conçues sous la forme d'une autorité indépendante rattachée à l'administration, elles accom- 'pJlISSalt:m leur mission conformément à la loi qui les avait créées, sous

réserve d'un contrôle judiciaire.

Depuis quelques années, le nombre d'autorités administratives indépen- dantes a augmenté, de même que le type de structure juridique utilisé à cette fin a évolué. Ce changement est motivé tant par l'apparition de nouveaux besoins de régulation, suite à la libéralisation de certaines que par la volonté de l'Etat fédéral de réformer l'administration

* Nous remercions Monsieur RENÉ OPROIU, assistant à la Faculté de droit, qui a procédé à la mise au point de l'appareil critique de cet article.

Voir, par exemple, le Contrôle fédéral des finances (CDF), la «Cour des comptes» fédérale instituée par la loi fédérale sur le Contrôle fédéral des finances du 28 juin 1967 (LCF - RS 614.0).

Voir, par exemple, la CFB chargée de la surveillance des banques, des caisses d'épargne et des fonds de placement, conformément à la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne du 8 novembre 1934 (LB - RS 952.0) (version jusqu'au 31.12.2008).

J Voü, par exemple, l'Autorité de régulation postale (PostReg) ou la Commission d'arbitrage dans le domaine des chemins de fer (CACF). La première contrôle si le service universel est garanti et surveille le marché afin de permettre une concur- rence efficace dans le cadre de l'ouverture progressive du marché. La seconde est chargée de juger les litiges afférents à l'octroi de J'accès au réseau et au calcul de la redevance d'utilisation de J'infrastructure.

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en externalisant des tâches non ministérielles, notamment les tâches de surveillance de l'économie ou de la sécurité4

Parallèlement, en Europe, les autorités administratives indépendantes se multiplient, généralement en relation avec des réformes de l'adminis- tration ou la libéralisation de certaines activités. Que ce soit en France, Allemagne, Belgique ou Italie, ou encore simplement au niveau de l'Union Européenne, les deux dernières décennies sont celles du déve-

loppement de ces autorités.

Face à ce phénomène, il est intéressant de faire un état des lieux en droit suisse à la fois en présentant les différents types d'autorités, mais aussi les problèmes importants du contrôle de leur activité ou de leur responsabilité.

Dans le cadre de ce rapport, nous présenterons les principales caracté- ristiques des autorités indépendantes. Après avoir essayé de cerner la notion d'aurorité administrative indépendante, nous présenterons les grandes lignes de leurs fonctions et pouvoirs, avant d'examiner les en- jeux du contrôle sur ces autorités.

II. La notion d'autorité administrative indépendante A. Qu'est une autorité administrative et indépendante?

Les autorités administratives indépendantes sont d'abord des «autori- tés". Elles appartiennent à la branche exécutive de l'Etat. Pour ce motif, elles sont «administratives" et non pas politiques, législatives ou judi- ciaires. Elles interviennent donc dans le cadre de l'application des lois.

La notion «d'autorité administrative" est importante pour effectuer une distinction entre ces autorités et les entreprises publiques ou en- tités administratives chargées d'une tâche de service public. Une au- torité administrative indépendante est une «autorité" car elle exerce

4 Rapport du Conseil fédéral du 13 septembre 2006 sur l'externalisation et la ges- tion de tâches de la Confédération (rapport sur le gouvernement d'entreprise), FF 2006 7799. Ce document est disponible à l'adresse www.efd.admin.ch/

dokttmentation/zah/en/00578/010611index.html?lang=fr, ainsi que le rapport ex- plicatif de PAdministration fédérale des finances du 13 septembre 2006 concernant ce rapport du Conseil fédéral; Ce document est également disponible à l'adresse:

www.erd.admin.chldDk umentatiDnizahlelll00S 78/0 1 061lindex. h Iml !lang=fr.

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une fonction de ce type, qui relève de la surveillance, de la régulation, de l'arbitrage ou d'une autre fonction impliquant la prise de décisions administratives. Les grandes entreprises fédérales, comme les Chemins de fer fédéraux (CFF), la Poste, Swisscom ou le RUAG5 ne sont donc pas des autorités administratives indépendantes. Il en va de même des Ecoles polytechniques fédérales qui ont une fonction de service public dans le cadre de l'enseignement.

Il s'agit enfin d'une autorité administrative «indépendante". Pour me- surer la portée de cette indépendance, il faut commencer par un rappel du fonctionnement du système hiérarchique au sein des administrations centrales. Le pouvoir hiérarchique comprend le droit de diriger et de donner des instructions aux autorités de rang inférieur. Cette faculté concerne aussi bien les objectifs à poursuivre que les moyens à mettre en œuvre pour les atteindre. Elle découle de la relation de subordina- tion hiérarchique entre l'autorité exécutive supérieure et les services qui en dépendent. Dans l'administration fédérale, les articles 1, alinéa 1, et 2, alinéa 1, de la loi sur l'organisation du gouvernement et de l'ad- ministration du 21 mars 1997 (LOGA) 6 posent comme principe que le Conseil fédéral est l'autorité directoriale et exécutive suprême de la Confédération; à ce titre, l'administration fédérale lui est subordonnée.

Ce même pouvoir se retrouve à chaque niveau de la hiérarchie. Ainsi, l'article 38 LOGA prévoit qu'au" sein du département, le chef de dé- partement a toujours qualité pour donner des instructions, procéder à des contrôles et intervenir personnellement dans une affaire [ ... ]". Ce pouvoir donne au gouvernement, qui est chargé de la direction de l'ad- ministration et doit assumer la responsabilité politique de son fonction- nement ou de ses dysfonctionnements, la possibilité d'exercer une sur- veillance constante et systématique de l'administration fédérale, comme l'y invite l'article 8, alinéa 3 LOGA.

Ce modèle hiérarchique n'est pas approprié pour la réalisation de toutes les missions de l'Etat. Cela est évident pour les fonctions de contrôle de l'Etat lui-même. Il n'apparait ainsi pas concevable de charger une

5 Société suisse spécialisée dans l'aviation et des voyages dans l'espace ainsi que dans les technologies de défense militaire: www.ruag.com/en/Group/Group_Home/

AbouCus.

6 RS 172.010.

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autorité qui serait hiérarchiquement dépendante du gouvernement de contrôler sa gestion financière. Pour ce motif, le Contrôle fédéral des finances a été conçu, dès l'origine, comme une autorité fédérale in- dépendante du pouvoir politique. Il assiste l'Assemblée fédérale dans l'exercice de ses attributions financières constitutionnelles et de sa haute surveillance de l'administration comme de la justice fédérale ainsi que le Conseil fédéral dans l'exercice de sa surveillance de l'administration. Il mène cette mission de manière autonome et indépendante. La même approche peut être transposée à d'autres autorités chargées de missions de contrôle ou de régulation de certains domaines d'activité, voire d'une politique publique pour la conduite de laquelle une grande indépen- dance est essentielle".

Le concept d'autorité indépendante vise ainsi la création d'une autorité, liée ou non à l'administration centrale, qui bénéficie d'une indépendance par rapport au pouvoir politique pour mener à bien la mission qui lui est confiée. Cette indépendance peut aller de faible, uniquement technique, à forte, avec l'octroi d'une complète autonomie et de la personnalité ju- ridique. L'indépendance suppose donc en principe une rupture totale ou partielle du lien hiérarchique. Cette rupture impose de trouver ensuite d'autres mécanismes de contrôle de l'autorité indépendante palliant l'ab- sence de lien hiérarchique.

Deux systèmes sont envisageables: l'indépendance de décision avec un rattachement administratif à l'administration et la création d'une entité de droit public autonome par un processus de décentralisation.

1. L'indépendance de décision avec rattachement

Dans le premier cas, le législateur crée une structure détachée du pouvoir hiérarchique de l'exécutif, mais intégrée partiellement ou totalement à l'administration centrale pour les questions d'intendance, notamment les locaux, le financement et le personnel. L'unité en cause acquiert une autonomie décisionnelle. Pour ce motif, ce type d'organisation est qualifié de rapport d'indépendance avec rattachement à l'administra-

7 Voie, par exemple, la loi fédérale sur la Banque nationale suisse du 3 octobre 2003 (LBN - RS 951.11) qui crée une société anonyme spéciale chargée de conduire la politique monétaire dans l'intérêt général du pays, en assurant la stabilité des prix tout en tenant compte de J'évolution de la conjoncture (art. 1 et 5 LBN).

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tion centrale. Elle appartient à l'administration décentralisée au sens de l'article 2, alinéa 3, LOGA et 7a, alinéa 1, litt. b, de l'ordonnance sur l'organisation du gouvernement et de l'administration du 25 novembre 1998 (OLOGA)8.

Cette forme particulière d'organisation de l'administration centrale est admise depuis de nombreuses années pour des unités qui doivent dis- poser d'une autonomie pour accomplir les tâches qui leur sont confiées, notamment pour les autorités ayant une fonction de contrôle ou de ré- gulatiou. L'exemple probablement le plus connu est celui de la défunte CFB. Dans ce cas, l'unité est rattachée administrativement à un dépar- tement de tutelle, qui lui fournit, contre indemnisation et dans le respect des normes pertinentes de l'administration fédérale générale, les services logistiques nécessaires en matière de personnel, de finances, de locaux, d'équipement et d'informatique'.

L'autorité indépendante agit au nom et pour le compte de l'Etat, mais sans lui être subordonnée, en dépit de son rattachement. Elle ne peut recevoir d'instructions sur la manière d'exécuter les tâches étatiques qui lui sont confiées. Au plan fédéral, l'article 7a, alinéa 2 OLOGA prévoit ainsi expressément que les unités rattachées administrativement exécu- tent leurs tâches sans être liées par des instructions. L'activité de ces commissions fait principalement l'objet d'un contrôle judiciaire10 Ce principe est généralement repris dans les lois spéciales. La loi peut af- firmer l'indépendance de l'autorité de l'administration 1 1 ou affirmer ex- pressément qu'elle ne doit prendre aucune instruction en considération pour ses décisions 12.

Au plan fédéral, il existe à l'heure actuelle plusieurs unités de ce type, notamment:

RS 172.010.1.

Voir, par exemple, pour la Commission fédérale des Maisons de Jeux (CFM]) les art. 47, al. 2 de loi fédérale sur les jeux de hasard et les maisons de jeu du 18 dé- cembre 1998 (LM] - RS 935.52) et 97, al. 2 de l'ordonnance sur les jeux de hasard et les maisons de jeu du 24 septembre 2004 (OLM] - RS 935.521).

10 Voir, par exemple, SJ 1996 363 (TF, 31.01.1996).

11 Art. 97, al. 1 OLMJ.

12 Art. 55, al. 3 de la loi fédérale sur le droit d'auteur et les droits voisins du 9 octobre 1992 (LDA - RS 231.1).

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I~,:~~~~;~j'~~~~; pfI?teçtion de:s ,~olrmée,; et à la transparence

-1

nO>ffilmé: 'p:arleCcms:eil il s'acquitte de ses tâches maiOii~re autollOJme- et: e';t!'atltac:hé administrativement à la Chan-

Dé:partelmelrrt fédéral des finances (DFF);

plainte en matière de radio-télévision (AIEP) 14, char- gée de traiter les plaintes concernant le contenu d'émissions ré- dactionnelles ou des plaintes liées au refus d'accorder l'accès à un programme; l'AIEP est rattachée au Département fédéral de l'en- vironnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC);

la Commission de la concurrence (ComCo)", rattachée adminis- trativement au Département fédéral de l'économie (DFE);

la Commission fédérale de la communication (ComCom) 16, ratta- chée administrativement au DETEC;

la CFMJ17, rattachée administrativement au Département fédéral de justice et police (DFJP);

le Préposé à la surveillance des prix 18, rattaché administrativement au DFE.

Ce modèle d'organisation limite la flexibilité de l'unité administrative en matière de personnel ou de financement, à la différence de ce qni est possible avec le second type de structure marqué par un détachement complet de l'administration. En effet, l'autorité indépendante et ratta- chée a généralement un statut du personnel similaire à celui de l'admi-

13 Art. 26, al. 1 et 2 de la loi fédérale sur la protection des données du 19 juin 1992 (LPD - RS 235.1).

14 Art. 82 à 85 de la loi fédérale sur la radio et la télévision du 24 mars 2006 (LRTV - RS 784.40).

15 Art. 18 à 25 de la loi fédérale sur les cartels et autres restrictions à la concurrence du 6 octobre 1995 (Leart - RS 251).

16 Art. 56 et 57 de la loi sur les télécommunications du 30 avril 1997 (LTC - RS 784.10).

17 Art. 46 à 53 LM].

HI Art. 3 à 5 de la loi fédérale concernant la surveillance des prix du 20 décembre 1985 (LSPr - RS 942.20).

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nistration centrale mais bénéficiera de son propre budget. De plus, elle n'est pas dotée de la personnalité morale, ce qui limite également sa capacité d'action". Cette structure est également utilisée pour des com- missions consultatives ou d'experts20

2. La création d'une entité de droit public

Dans le cadre de la réforme de l'administration fédérale, la Confédéra- tion a, dès les années 1990, décentralisé des services de l'administration afin de les rendre plus efficients2! et indépendants financièrement. Il a ensuite appliqué la même approche pour des autorités de régulation. La forme organisationnelle de l'établissement de droit public est désormais systématiquement préconisée pour les entités chargées de la surveillance de l'économie ou de la sécurité lorsque l'entité se doit d'être autonome sur le plan juridique 22.

L'établissement de droit public constitue la forme ordinaire de la décen- tralisation. Il est défini comme une unité juridique distincte disposant d'un ensemble de moyens en personnel et en matériel affectés durable- ment à l'exécution d'une tâche publique 23 • En principe, une telle entité a la personnalité juridique, qui lui garantit une existence propre tout en la rendant responsable de ses engagements 24.

Les douze dernières années ont vu une multiplication de tels établis- sements.

En 1996, sur la base de l'article 40 de la loi fédérale sur l'aviation du 21 décembre 1948 (LA) 25, le service de la navigation aérienne a été

19 Rapport sur le gouvernement d'entreprise (n. 4) p. 7834.

20 Voir, par exemple, l'art. 9 de la loi fédérale sur l'information des consommatrices et des consommateurs du 5 octobre 1990 (LIC - RS 944.0), à teneur duquel le Conseil fédéral institue une commission fédérale de la consommation qui com- prend des représentants des consommateurs, de l'économie et de la science, et qui est chargée d'assister, à titre consultatif, le Conseil fédéral et les départements dans les questions touchant à la consommation.

21 Rapport sur le gouvernement d'entreprise (n. 4) pp. 7812-7813.

22 Rapport sur le gouvernement d'entreprise (n. 4) p. 7851.

23 ATF 98/1972 lb 63, 67, Architektura,

24 Voir, par exemple, l'art. 80 de la loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux du 15 décembre 2000 (LPTh - RS 812,21),

25 RS 748,0,

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confié à une société anonyme d'économie mixte sans but lucratif dont la majorité du capital appartient à la Confédération er dont les statuts sont approuvés par le Conseil fédéral. Cette société, qui a pris la raison sociale Skyguide, est, depuis 2001, responsable tant du contrôle aérien civil que militaire sur l'ensemble du territoire suisse.

Créé en 1997, l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle (IFP!) est chargé de la gestion des droits de propriété intellectuelle (brevets, marques, designs) (art. 2 de la loi fédérale sur le statut et les tâches de l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle du 24 mars 199526).

En 2000, une entité intercantonale chargée de contrôler l'importation et la mise en vente de médicaments en Suisse a été également «fédé- ralisée" à la même époque sous la forme d'un établissement de droir public autonome, dénommé Institut suisse des produits thérapeutiques ou Swissmedic".

Depuis le 1" septembre 2007, l'Autorité fédérale de surveillance en ma- tière de révision (ASR) est chargée d'agréer les réviseurs et d'exercer la surveillance des organes de révision de sociétés ouvertes au public". Dotée d'un statut d'établissement public autonome, l'ASR est indépen- dante dans son organisation et dans la conduite de son exploitation.

Le 1" janvier 2008 est entrée en vigueur la loi fédérale sur l'Inspecrion fédérale de la sécurité nucléaire du 22 juin 2007 (LIFSN)29. Ce nouvel établissement de droit public a succédé à l'ancienne Division principale de la Sécutité des Installations Nucléaires, rattachée à l'Office fédéral de l'énergie.

Le 1" janvier 2009, l'Autorité fédérale de surveillance des marchés fi- nanciers (FINMA) a pris ses fonctions. Cet établissement de droit pu- blic regroupe les organes exerçant la surveillance étatique des intenné- diaires financiers, soit la CFB, une autorité déjà indépendante mais avec

. 2. LIPI- RS 172.010.31.

27· L'Institut suisse des produits thérapeutiques, SwissMedic, est l'autorité chargée de l'autorisation de mise sur le marché, du contrôle de la fabrication et de la qualité ainsi que de la surveillance du marché des produits thérapeutiques en application LPTh.

28 Voir les art. 1 et 28 de la loi fédérale sur l'agrément et la surveillance des réviseurs du 16 décembre 2005 (LSR - RS 221.302).

29 RS 732.2.

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rattachement, ainsi que l'Office fédéral des assurances privées (OFAP) et l'Autorité de contrôle en matière de lutte contre le blanchiment d'ar- gent (Autorité de contrôle LBA), qui étaient den x services de l'adminis- tration fédérale.

Généralement, l'usage de la structure de l'établissement de droit pu- blic permet à la Confédération d'appliquer des règles particulières pour la gestion du personnel. Si SwissMedic engage son personnel en tant qu'employeur de droit public, il peut conclure des contrats selon le COJO si cela est justifié'l. Le Conseil fédéral édicte sous la forme d'une ordon- nance les dispositions régissant le statut du personnel". La situation est identique pour l'IFPI, qui dispose d'un statut du personnel particulier, soumis au droit public, adopté par le Conseil fédéral sous la forme d'une ordonnance"". Il dispose de toutes les compétences pour engager et gé- rer son personnel" . Ponr l'ASR, le législateur a fait un choix différent:

elle peut engager son personnel selon les règles du droit privé". La loi exige qu'elle évite dans ce cadre les conflits d'intérêts conformément aux règles fixées par le Conseil fédéral 36 • En dépit de cet engagement selon les règles ordinaires du droit public, l'article 34 LSR soumet le person- nel au secret de fonction. Ce mélange des règles du droit privé avec une contrainte propre au droit privé illustre la difficulté de recourir au seul droit privé pou r une tâche publique de contrôle.

Du point de vue de la gestion, le législateur peut aussi imposer à l'entité décentralisée d'être gérée selon des principes similaires à ceux des entre- prises privées.

n

peut en outre être exigé de l'entité décentralisée qu'elle applique les règles de la société anonyme dans la présentation de son rapport de gestion". Ainsi, la transformation de l'ancien Office fédé- ral de la propriété intellectuelle en un établissement public autonome a

30 Code des obligations du 30 mars 1911 (RS 220).

31 Arr. 75, al. 1 LPTh.

32 Art. 75, al. 2 LPTh; ordonnance sur le personnel de l']nstitut suisse des produits thérapeutiques du 28 septembre 2001 (RS 812.215.4).

33 Art. 8, al. 1 UPI.

34 Art. 8, al. 2 UPI.

35 Art. 33, al. 1 LSR.

36 Art. 33, al. 2 LSR.

37 Rapport sur le gouvernement d'entreprise (n. 4) p. 7846.

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rendu possible l'adoption de règles de gestion propres à l'économie pri- vée, dont la mise en œuvre est plus délicate au sein de l'administration centrale. L'article 1, alinéa 3 UPI prévoit que cet établissement de droit public est géré selon les principes de l'économie d'entreprise.

B. Un concept nouveau ou relooké?

Nous venons d'exposer les structures généralement utilisées pour les autorités administratives indépendantes au plan fédéral. Il n'existe cer- tainement rien de nouveau de ce point de vue. Ces deux modes d'organi- sation existent depuis des décennies. De la même manière, des autorités administratives indépendantes sont présentes en Suisse depuis de nom- breuses années; mais, depuis le début des années 1990, on assiste à un triple phénomène.

En premier lieu, des autorités qui existaient depuis de nombreuses an- nées sont réorganisées dans le cadre d'une réforme législative en une forme moderne d'autorité indépendante. On peut penser dans ce cadre à l'absorption de l'ancien Office intercantonal de contrôle des médica- ments par Swissmedic ou encore l'incorporation de l'ancienne Commis- sion fédérale des banques dans la FINMA.

En deuxième lieu, la libéralisation de certains secteurs de l'économie a créé un besoin de régulation ou d'arbitrage, qui a donné lieu à la création de nombreuses autorités nouvelles, comme PostReg suite à la libéralisation partielle du marché des services postaux, la CACF par l'effet de la réforme des chemins de fer lancée en 1999, dont le point fort était l'introduction du libre accès au réseau, la ComCom, ou encore la Commission de l'électricité (ElCom), prévue par l'article 21 de la loi sur l'approvisionnement en électricité du 23 mars 2007 (LApEl)".

En troisième lieu, la réforme de l'administration fédérale a abouti à la création d'autorités indépendantes chargées de l'exécution de tâches administratives, comme l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle,

·qui était, jusqu'au 31 décembre 1996, un office de l'administration

avant d'être transformé en établissement de droit public. De la sorte, la Confédération lui a donné une autonomie administrative, mais surtout une autonomie financière. Cette autorité indépendante doit couvrir

.lB RS 734.7.

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ses coûts en les facturant à ses utilisateurs, y compris la Confédéra- tion pour les services généraux qu'elle lui rend. Il s'agit ainsi d'une création fondée sur des motifs de gestion et de transfert des coûts aux utilisateurs.

Avec des structures classiques de l'organisation administrative, on a créé un concept nouveau d'autorité administrative indépendante, adapté aux besoins nouveaux de l'administration ou à sa réforme.

C. Un phénomène européen

Le phénomène des autorités indépendantes n'est pas une exclusivité suisse.

En Belgique, PATRICK GOFFAUX, dans son dictionnaire élémentaire de droit administratif, définit l'autorité administrative indépendante comme" une autorité, dotée ou non de la personnalité juridique, à qui le législateur (voire le pouvoir exécutif dans le cadre de son pouvoir réglementaire autonome) entend reconnaître une marge d'autonomie incompatible avec la soumission de cette autorité à un contrôle hié- rarchique ou de tutelle et ce afiu, principalement de permettre à cette autorité d'exercer ses compétences avec la plus grande impartialité et objectivité ,,". Ces caractéristiques se retrouvent, avec une plus ou moins grande intensité, dans les principaux pays européens. A chaque fois que l'on évoque une autorité administrative indépendante, on décrit une autorité qui n'est pas soumise au pouvoir hiérarchique du gouverne- ment dans l'exercice de ses tâches.

Au niveau de l'Union Européenne, la situation est différente. Le système communautaire est issu des réflexions de ses pères fondateurs, notam- ment JEAN MONNET, sur le mode américain des agences'''. Toutefois, compte tenu des compétences, ou parfois de l'absence de compéteoces, de l'Union, ces agences Ont souvent un rôle de coordination des auto- rités nationales; c'est le cas, notamment, de l'Autorité européenne de

39 PATRICK GOFFAUX, Dictionnaire élémentaire de droit admittistratif, Bruylant, 2006, p. 34.

40 SOPHIE PEREZ, (( Les autorités administratives indépendanres, Rapport Union Eu- ropéenne », Annuaire Européen d'administratio11 publique 2008, Aix-Marseilles, 2009, pp. 289-291.

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sécurité alimentaire". Il existe également des autorités communautaires chargées de la mise en œuvre de politiques communautaires ou liées au fonctionnement institutionnel de l'Union, par exemple, l'Agence européenne de défense ou EUROPOL. Ces agences sont distinctes des institutions communautaires et possèdent en principe une personnalité juridique propre.

L'élément commun entre l'Union et les pays qui la composent est l'aug- mentation des autorités administratives indépendantes ou des agences.

Cerre augmentation résulte soit de la libéralisation de certains secteurs de l'économie ou la réforme de l'Etat, soit du développement de cer- taines tâches publiques pour lesquelles le modèle de l'autorité adminis- trative indépendante apparaît comme plus approprié. Ce mouvement n'est pas irréversible. Les autorités administratives indépendantes ne sont plus à la mode en Hollande, après que l'augmentation des salaires des dirigeants de certaines de ces autorités ait défrayé la chronique.

III. L'organisation des autorités indépendantes

A. Les fonctions

Les autorités administratives indépendantes exercent des fonctions va- riées allant du contrôle dn respect des lois à des activités de régulation en passant par le contrôle financier. Compte tenu de l'espace limité de ce rapport, nous nous limiterons à un inventaire rapide et non exhaustif.

1. Les tâches de puissance publique a. Le respect des droits des citoyens

Deux autorités indépendantes fédérales sont actives dans le domaine des droits des citoyens: le PFPDT est chargé la protection des données ainsi que l'AIEP. Dans les deux cas, ces autorités ont un rôle de contrôle des actes des autorités fédérales ou de personnes privées soumises à des . obligations par le droit fédéral. Elles assurent tout à la fois une média-

tion et un contrôle sur ces actes, lequel aboutit parfois à la prise d'nne décision:

41 PEREZ (n. 40) p. 292.

20

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En application de la LPD, le PFPDT est chargé la protection des don- nées au plan fédéral". Il accomplit notamment les tâches suivantes: la surveillance des organes fédéraux et des personnes privées, le conseil aux personnes privées", le soutien et conseil aux organes fédéraux et cantonaux, la fourniture d'avis sur les projets législatifs de la Confédé- ration, la collaboration avec les organes de protection des données na- tionaux et internationaux, l'information du public et la tenue comme la publication du registre des fichiers". Il agit d'office ou à la demande de tiers". Aux fins d'établir les faits, il peut exiger la production de pièces, demander des renseignements et se faire présenter des traitements. Les organes fédéraux sont tenus de collaborer à l'établissement des faits".

Dans ce domaine, il dispose uniquement d'un pouvoir de recomman- dation". Si une recommandation est rejetée ou n'est pas suivie, il peut porter l'affaire pour décision auprès du département compétent ou de la Chancellerie fédérale. La décision de cette autorité est communiquée aux personnes concernées". Le Préposé a la qualité pour recourir contre cette décision ainsi que contre celle de l'autorité de recours".

De plus, le PFPDT est chargé de l'application de la loi fédérale sur le principe de la transparence dans l'administration'o. Il conduit la procé- dure de médiation en cas de désaccord sur l'accès à des documents.

Enfin, le PFPDT a des attributions particulières en matière de recherche médicale·lI. Il conseille la Commission d'experts du secret professionnel

42 Art. 16, al. 1 LPD.

43 Art. 28 LPD.

44 Art. 31 LPD.

" Art. 27, al. 2 et 29 LPD.

'6 Art. 27, al. 3 LPD.

47 Art. 27, al. 4 LPD: «S'il apparaît que des prescriptions sur la protection des don- nées ont été violées, le préposé recommande à l'organe fédéral responsable de modifier ou de cesser le traitement. JI informe le département compétent ou la Chancellerie fédérale de sa recommandation ».

" Art. 27, al. 5 LPD.

49 Art. 27, al. 6 LPD.

50 Art. 31, al. 1, let. g LPD et art. 18 à 20 de la loi fédérale sur le principe de la trans- parence dans l'administration du 17 décembre 2004 (LTrans - RS 152.3).

51 Art. 32 LPD et l'ordonnance concernant les autorisations de lever le secret profes- sionnel en matière de recherche médicale du 14 juin 1993 (OALSP - RS 235.154).

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dans ce domaine. De plus, si cette commission a autorisé la lev~e du f · 1'1 '11 1 ect des charges qUI grevent secret pro eSSlonne, 1 survel e e re~p , . . . 1, autOrIsation. . . Il peu e t 'gaIement recourIr aupres . ' du Tnbunal ) admmls-

'f f'd' 1 t e les de' cisions de la commiSSIOn d experts. Dans tous

tratl e era con r . . , .

1 es cas, 1 '1 f aIt . en sa rte que les patients sOient mformes de leurs droits.

L'AlEP, composée de neuf men:bres: est i~stituée par l'article 82 L~:V.

Elle statue sur les plaintes relatives a des emlsslons de radiO et de televI- sion qui ont été diffusées par des diffuseurs suisses. En particulier, elle vérifie si les émissions respectent les principes applicables au contenu des programmes, comme l'obligation de respect des droits fondamentaux". Peut déposer plainte contre une émission ou contre le refus d'accorder l'accès à un programme toute personne53 qui était partie à la procédure de réclamation devant l'organe de médiation et qui prouve que l'objet de l'émission contestée le touche de près ou que sa demande d'accès au programme a été refusée". Les personnes physiques qui n'apportent pas la preuve que l'objet de l'émission contestée les touche de près ont aussi qualité pour agir si leur plainte est co-signée par 20 personnes au moÎns55.

Dans l'exercice de son mandat, l'AlEP n'est liée par aucune instruction émanant de l'Assemblée fédérale, du Conseil fédéral ou de l'administra- tion fédérale".

Cette autorité exerce une forme très accessible de contrôle puisqu'une plainte collective y est possible alors que dans la suite de la procédure devant le Tribunal fédéral, à caractère juridictionnel, seuls peuvent re- courir les personnes ayant un intérêt digne de protection57

52 Voir art. 4 LRTV.

53 An. 83 et 92, al. 1 LRTV.

" An. 94 al. 1 LRTV.

55 An. 94 al. 2 LRTV.

" Art.84 LRTV.

57 Voir, par exemple, ATF du 21 février 2008 (2C_74912007) dans lequel le Tribu- nal fédéral a jugé que le recourant ne se trouve pas, en ce qui concerne le sujet de l'émission, dans un rappon plus étroit et plus spécial que n'Împorte quel autre téléspectateur, de sorte qu'il n'a pas qualité pour interjeter un recours en matière de droit public contre la décision de l'AutorÎté de plainte alors même que sa plainte avait été recevable et examinée par cette autorité.

22

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Le phénomène des autorités administratives indépendantes

b. Le contrôle administratif de certaines activités

Les autorités indépendantes ont un rôle majeur en matière de contrôle administratif de certaines activités. Elles sont investies par la loi de la mission d'assurer son application par l'usage d'instruments classiques du droit administratif comme la décision ou des mesures d'enquêtes. La Confédération a plusieurs autorités de ce type.

L'Institut suisse des produits thérapeutiques ou Swissmedic", créé par l'article 68 LPTh est chargé de l'application de la loi, notamment de la délivrance des autorisations de fabriquer, mettre sur le marché, impor- ter ou encore distribuer des produits thérapeutiques". Il est l'un des organes de surveillance du marché des médicaments. En outre, il est chargé de surveiller la sécurité des produits thérapeutiques". En plus de ces tâches légales, l'Institut peut se voir confier d'autres missions dans le cadre d'un mandat quadriennal de prestations, complété par un contrat annuel de prestations, conclu avec le Conseil fédéral".

L'IFPI doit notamment préparer les textes législatifs dans le domaine de la propriété intellectuelle, pour autant qu'ils ne relèvent pas de la compétence d'autres unités administratives de la Confédération, exécu- ter, conformément à la législation spéciale, les actes législatifs dans ce domaine ainsi que les traités internationaux du domaine de la propriété intellectuelle". Il a également pour mission de conseiller le Conseil fé- dérai et les autres autorités fédérales dans le domaine de I"économie générale sur les questions relatives à la propriété intellectuelle. Il re- présente la Suisse, le cas échéant en collaboration avec d'autres unités administratives de la Confédération, dans le cadre des organisations et conventions internationales du domaine de la propriété intellectuelle.

Enfin, il peut fournir dans le domaine relevant de sa compétence, des prestations de service sur la base du droit privé; il s'occupe notamment de la diffusion d'informations sur les systèmes de protection des biens immatériels, les titres de protection et I"état de la technique. Le Conseil fédéral a en outre la possibilité de lui confier d'autres tâches.

58 Art. 2 de J'ordonnance sur J'organisation de l'Institut suisse des produits théra- peutiques du 28 septembre 2001 (RS 812.216).

59 Art. 5, 9, 18 et 28 LPTh.

60 Art. 58, al. 2 et 3 LPTh.

61 Art. 69, al. 2 et 70 LPTh.

62 Art. 2 UPI.

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FRANÇOIS BELLANGER

Depuis le 1" janvier 2009, la FINMA, organisé sous la forme d'éta- blissement de droit public, est chargé de la surveillance générale des marchés financiers (art. 4, al. 1 de la loi fédérale sur l'Autorité de sur- veillance des marchés financiers du 22 juin 20076').

La CFMJ assure la surveillance des maisons de jeu, veille à ce que les dispositions légales soient respectées et prend les décisions nécessaires à l'application de la loi". Elle a notamment pour mission de contrôler la gestion et l'exploitation des maisons de jeu, de veiller à ce que les obliga- tions découlant de la loi sur le blanchiment d'argent du 10 octobre 1997 (LBA) 65 soient respectées et de veiller à ce que le programme de mesures de sécurité et le programme de mesures sociales soient mis en œuvre". Pour mener à bien ses tâches, la CFM] a de larges pouvoirs. Elle peur exiger des maisons de jeu, des entreprises de fabrication ou de com- merce d'installations de jeu et des organes de révision de ces établisse- ments tous les renseignements et documents nécessaires, mandater des experts, confier des mandats spéciaux à l'organe de révision, instaurer des liaisons en ligne permettant le contrôle des installations informa- tiques des maisons de jeu", et prendre les mesures nécessaires au réta- blissement de l'ordre légal ou à la suppression d'infractions ou d'irré- gularités". Elle a également un pouvoir d'instruction et de sanctions". Elle peur recourir devant le Tribunal fédéral contre les décisions rendues par le Tribunal administratif fédéral en application de la présente loi et de ses dispositions d'exécution7oPour remplir sa mission, la CFMJ est dotée d'un secrétariat permanent7J, qui prépare les affaires de la com- mission, lui soumet des propositions et exécute ses décisions 72.

6J LFINMA - RS 956.1.

" Arr. 48, al. 1 LMJ et 96 OLMJ.

65 RS 955.0.

66 Art. 48, al. 2 LM].

. 67 Art. 48, al. 3 LMJ.

68 Art. 50, al. 1 LMJ.

69 Art. 51 LM].

70 Art. 48, al. 3, let. e LM].

71 Art. 47, al. 3 LM]. Les membres du personnel du secrétariat ne sont pas soumis au plafonnement du montant affecté aux rétributions du personnel de la Confé- dération (art. 98, al. 3 OLM]).

72 Art. 99, al. 1 OLM].

24

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Le phénomène des autorités administra6ves indépendantes

L'Autorité fédérale de surveillance en matière de révision est chargée de l'agrément et la surveillance des personnes qui fournissent des presta- tions en matière de révision conformément à l'article 28 LSR.

Nous mentionnerons enfin également la ComCo7J, qui met en œuvre des obligations découlant de la LCart. Elle prend, à ce titre, des décisions et peut émettre des recommandations, préavis on avis 74. La ComCo est indépendante des autorités administratives et est rattachée adminis- trativement au DFE 75. Elle est assistée d'un secrétariat qui ptépare les affaires de la commission, mène les enquêtes, prend, avec un membre de sa présidence, les décisions de procédure, fait des propositions à la com- mission, exécute ses décisions et traite directement avec les intéressés, les tiers et les autorités 76. Le Conseil fédéral désigne uniquement la di- rection du secrétariat77Au surplus, la Commission est compétente pour nommer son personnel dont le statut est régi par la législation applicable au personnel de l'administration fédérale". L'ensemble des membres de la ComCo et du secrétariat sont soumis au secret de fonction".

c. Les fonctions d'inspection

Le droit fédéral a créé plusieurs autorités indépendantes en parrena- riat avec des associations professionnelles, en leur confiant des missions d'inspection dans des domaines très techniques.

Conformément à l'article 21, alinéa 2, de la loi fédérale concernant les installations électriques à faible et à forr courant du 24 juin 1902 (LIE) 80, l'Inspection fédérale des installations à courant fort ou ESTI est l'organe de contrôle pour les installations à couraut fort et les ins- tallations à courant faible et l'organisme de certification suisse pour le matériel électrique non soumis à agrément selon l'ordonnance sur les

7.\ Voir le site lnrernet de la CornCo: www.weko.admin.ch/?lang=fr.

74 Art. 18, al. 3 LCart.

75 Art. 19 LC"t.

76 Art. 23, al. 1 LCart.

77 Art. 24, al. l LCart.

78 Art. 24, aL 2 LCart.

79 Art. 25, al. 1 LCart.

'0 RS 734.0.

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FRANÇOIS BELLA NGER

matériels électriques à basse tension du 9 avril 1997 (OMBT)81. Cet organe est géré comme un service spécial au nom de l'Etat fédéral par Electrosuisse SEV, Association pour l'électrotechnique, les technologies de l'énergie et de l'information".

De même, l'Inspection fédérale des pipelines contrôle, en Suisse et au Liechtenstein, la planification, la construction et l'exploitation d'instal- lations de transport par conduites pour des combustibles et carburants liquides ou gazeux, à condition que celles-ci soient soumises à la loi fédérale sur les installations de transporr par conduites de combustibles ou carburants liquides ou gazeux du 4 octobre 1963 (LITC)". L'ins- pection est un service particulier de l'Association suisse d'inspection technique (ASIT), dont l'intervention pour le compte de la Confédé- ration est réglée, outre les règles légales, par contrat entre l'office et l'ASIT". L'inspection traite directement avec les entreprises, les autori- tés et les tiers. Toutefois, en cas de différend, elle n'a pas de compétence décisionnelle, c'est l'office qui tranche".

d. Les fonctions d'enquêtes

Le droit fédéral a créé deux autorités indépendantes sous la forme d'une émanation de l'office compétent, en leur confiant des missions d'en- quêtes. Ils doivent intervenir en cas d'accident pour mener une enquête en toute indépendance et fournir à la Confédération les éléments de fait qui permettront ensuite à l'autorité compétente d'agir.

En application de l'article 15 LCdF, la Confédération a créé un ser- vice indépendant d'enquête en cas d'accidents pour examiner sur le plan technique les causes et les circonstances des accidents ferroviaires et des incidents qui auraient pu conduire à un accident. Ce service dispose de pouvoirs étendus. Il peut notamment ordonner des perquisitions, des confiscations, des autopsies et des expertises, citer et amener à com-

SI RS 734.26.

82 Site internet de la Confédération: www.esti.admin.ch/fr/esti_organisation.htm.

IlJ RS 746.1. Voir art. 4 de J'ordonnance sur les installations de transport par conduites du 2 février 2000 (OITC - RS 746.11).

84 Art. 34, al. 1 OITC.

85 Art. 34, al. 2 OITe.

26

(20)

Le phénomène des autorités administratives indépendantes

paraître des témoins et des personnes appelées à fournir des renseigne- ments, ou encore les entendre 86.

En 1960, en exécution des conventions internationales applicables dans le domaine de l'aviation, l'Assemblée fédérale a créé un bureau d'en- quête sur les accidents d'aviation (BEAA) dont les activités ont débuté en 1960. Ce bureau, rattaché au DETEC, mène l'enquête sur les acci- dents, le cas échéant en liaison avec les autorités judiciaires et admi- nistratives compétentes pour d'autres procédures; il établit ensuite un rapport d'enquête".

2. Les f011ctio11s de régulatio11 et d'arbitrage

La libéralisation de certaines activités économiques, auparavant sou- mises au monopole de l'Etat, fait passer des domaines importants comme les télécommunications ou les transports de la sphère de contrôle de l'Etat dans le giron du marché. Ce changement a naturellement pro- voqué un retrait de l'Etat qui a abandonné certaines activités à l'écono- mie privée. Toutefois, pour éviter des dysfonctionnements du marché, comme pour assurer à un accès équitable à tous les concurrents, le lé- gislateur fédéral a prévu sa régulation et a systématiquement coufié la mission de régulateur à une autorité indépendante.

On peut mentionner le rôle de PostReg dans ce domaine. Cette auto- rité a une fonction particulière, car elle s'est vue attribuer une mission étendue correspondant au double rôle de l'Etat: propriétaire de la Poste et régulateur du marché postaJ88. A ce titre, PostReg examine, d'une part, les questions de régulation et, d'autre part, à l'instar d'un office fédéral, elle accomplit les tâches qui, en matière de poste, relèvent de la souveraineté de l'Etat. PostReg est donc bien plus qu'un simple régula- teur du marché, à la différence des autres autorités indépendantes. Cette

86 Les compétences du service et la procédure sont décrites en détail dans l'ordon- nance sur les déclarations et les enquêtes en cas d'accidem ou d'incident grave survenant lors de l'exploitation des transports publics du 28 juin 2000 (OEATP- RS 742.161).

1'17 Art. 25 de la loifédérale sur l'aviation du 21 décembre 1948 (LA - RS 748.0), ainsi

que l'ordonnance relative aux enquêtes sur les accidents d'avion et sur les incidents graves du 23 novembre 1994 (OEAA - RS 748.126.3).

RS Voir le site Internet: www.postreg.admin.chlfrl.

(21)

U'-(;onlsé(~Uf:nceque son indépendance est aut()1·iti;s,Pc.st:Reg n'est indépendante

-."'7 -'-

la moins indépendante

'dnŒin,i~!'J:'aj:ivi;~0il1dépleil(j~rltes .. Elle garantit le contrôle in- service universel et de l'accès

'g~ra11til;[Je çOlnfrôle du respect des principes de la compta-

naly~iqJle des subventions croisées et traite les dèsuivieililanlce relatives au service universel".

foute:folls soumise au pouvoir hiérarchique accomplit pour le compte du DETEC de poste, relèvent de la souveraineté de l'Etat;

P}ifJiculie.r, elle répond de l'exécution en matière de concession, pré- s.dlécisÎc)lls du département en matière de prix et évalue la libéra-

pr()gress,ive du marché'o.

\r7~V/i<~' régulateurs interviennent dans les domaines des chemins de télécommunications et de l'électricité, avec des compétences d'arbitrage en plus de celles de régulation".

CACF a été créée à la suite de la réforme des chemins de fer lancée en 1999, dont le point fort était l'introduction du libre accès au réseau.

Elle est chargée par l'article 40a LCdF de juger les litiges afférents à l'octroi de l'accès au réseau et au calcul de la redevance d'utilisation de l'infrastructure par l'Office fédéral des transports".

La ComCom, instituée par l'article 56 LTC est l'autorité indépendante de régulation du marché des télécommunications. Elle octroie les concessions de service universel et celles relatives à la téléphonie mobile et aux autres services de radiocommunication nécessitant une mise au concours. Elle fait également office d'instance arbitrale en cas de litige en matière d'interconnexion. Enfin, elle approuve les plans de numéro- tation et d'attribution des fréquences.

L'El Corn, prévue par l'article 21 LApEI surveille le respect des disposi- tions de cette loi, prend les mesures et rend les décisions nécessaires à

89 Art. 41, al. 1 de l'ordonnance sur la poste du 26 novembre 2003 (OPO - RS 783.01).

'0 Art. 41, al. 2 OPO .

.91 Voir la contribution de STtl)HANE GRODECKI dans cer ouvrage.

92 Art. 5 à 9b LedF.

28

(22)

Le phénomène des autorités administratives indépendantes

son exécution. Elle est notamment compétente" pour statuer, en cas de litige, sur l'accès au réseau, sur les conditions d'utilisation du réseau, sur les tarifs et la rémunération pour l'utilisation du réseau ainsi que sur les tarifs de l'électricité; les redevances et les prestations fournies à des col- lectivités publiques sont réservées; elle peut accorder l'accès au réseau à titre provisionnel. Elle a aussi pour mission de vérifier d'office les tarifs et la rémunération pour l'utilisation du réseau ainsi que les tarifs de l'électricité; les redevances et les prestations fournies à des collectivités publiques sont réservées; elle peut ordonner une réduction ou interdire une augmentation. En outre, l'E1Com observe et surveille l'évolution des marchés de l'électricité en vue d'assurer un approvisionnement sûr et abordable dans toutes les régions du pays. A cet effet, elle vérifie no- tamment l'état et l'entretien du réseau de transport ainsi que l'adéqua- tion régionale des investissements de la société nationale du réseau de transport. Si la sécurité de l'approvisionnement du pays est sérieusement compromise à moyen ou long terme, l'E1Com propose au Conseil fédé- ral de prendre les mesures pour augmenter l'efficacité de l'utilisation de l'électricité, acquérir de l'électricité, notamment au moyen de contrats d'achat à long terme et du développement des capacités de production ou encore renforcer et développer les réseaux électriques".

En matière d'arbitrage on peut encore citer la Commission arbitrale fé- dérale pour la gestion de droits d'auteur et de droits voisins (CAF) 9S.

Instituée par l'article 55, alinéa 1 LDA, cette commission est compé- tente pour approuver les tarifs des sociétés de gestion de droits d'auteur et voisins conformément aux articles 59 et 60 LDA.

3. La surveillance des prix ou de tarifs

La Confédération dispose également d'autorités indépendantes en ma- tière de surveillance générale des prix et, dans des domaines plus tech- niques, de surveillance de tarifs.

Selon l'article 3 LSPr, le Conseil fédéral nomme un préposé à la sur- veillance des prix (Surveillant des prix), qui relève du DFE. Il dispose de

93 Art. 22 LApE!.

94 Art. 22, al. 4 qui renvoie à l'art. 9 LApEl.

95 Voir le site Inrernet de la Commission: www.e;pd.admi1.l.ch/ejpd/(rlhome/die_

oe/organigramm_e;pd/kommissionen/eschk.html.

(23)

cemtine-i.ncléI)erld:lm:e qui n'est toute- reiJJalice:.d(!Sprix fait partie de la miSSion est d'observer l'évolution allg~!ilellta.fic'.lls d)prix abusives et le maintien public avec son activité". Pour i;,i1f~:ôlla~,§ie 0.",.,'1,>. autol"ités concernées, la Banque iU1térêts du crédit, ainsi que la ComCo

in.dépendanltes sont ttès variables.

""'_'-c SIPosellt de pouvoirs réglementaires. C'est notam- aUWlcllt:> appelées à contrôler une activité ad minis- à ce titte, compléter la loi fédérale et la ou les ordon- celle-ci. Tel est le cas de la FINMA (arr. 7 LFINMA).

autorités ont un pouvoir de décision. Tel est le cas des de régulation ou d'arbitrage. Appelées à trancher un litige ou à la régulation d'un marché, elles doivent pouvoir prendre des décisions susceptibles ensuite de recours". Il en va de même des autori- tés chargées d'une médiation à l'issue de celle-ci 100. Souvent, le pouvoir de décision est accompagné d'un pouvoir de sanction. La CFM] a ainsi non seulement un pouvoir d'instruction mais aussi celui de prononcer des sanctions 101.

Certaines autorités n'ont toutefois qu'un pouvoir de recommandation.

Tel est le cas du PFPDT102. Si sa recommandation est rejetée ou n'est

96 Message du Conseil fédéral du 30 mai 1984 à l'appui d'une loi concernant la sur- veillance des prix (LSPI), FF 1984 Il 781, pp. 797-798.

" AIt. 4 LSPr.

9R Art. 5 LSPr.

99 Voir, par exemple. Swissmedic. l'IFPI,la CM]. l'ASR.

100 Par exemple, l'AlEP.

101 Art. 51, al. 1 LM].

102 Art. 27, al. 4 LPD: «S'il apparaît que des prescriptions suc la protection des don- nées ont été violées, le préposé recommande à l'organe fédéral responsable de modifier ou de cesser le traitement. Il informe le département compétent ou la ChancellerÎe fédérale de sa recommandation ».

30

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Le phénomène des autorités administratives indépendantes

pas suivie, il peut porter l'affaire pour décision auprès du département ou de la Chancellerie fédérale. Les autorités qui n'ont qu'un pouvoir de recommandation bénéficient, à titre de compensation, d'un pouvoir d'information du public. La publicité qu'ils peuvent donner à leur action compense l'absence de droit de prendre des mesures obligatoires, voire leur pouvoir de décision limité IOl.

Les pouvoirs d'inspecrion ou d'enquêres qui appartiennent aux autorités ayant les fonctions éponymes.

Dans les affaires qui les concernent, les autorités indépendantes peuvent aussi bénéficier d'un droit de recours. Le recours de la FINMA contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral du 5 janvier 2010 relatif à la transmission de noms de clients de l'UBS aux Etats-Unis l'illustre "'.

C. Les ressources financières

La caractéristique des autorités indépendantes organisées sous la forme d'établissement de droit public est de devoir, en règle générale, fonction- ner de manière autonome sur le plan financier. Leurs revenus, prove- nant des émoluments payés par les personnes soumis à leur contrôle ou bénéficiant de leurs services, doivent couvrir leurs dépenses. En outre, dans la mesure où la Confédération bénéficie de prestations de l'auto- rité indépendante dans l'intérêt général, elle les rémunère sur la base d'un contrat de prestations. Parfois, enfin, les revenus de l'autorité indé- pendante peuvent être complétés par la vente de prestations au secteur privé; de telles prestations doivent intervenir au prix du marché pour éviter des distorsions de concurrence. Conflit d'intérêt?

A titre d'exemple, au niveau des ressources financières, pour assurer son auronomie, SwissMedic doit financer ses dépenses, notamment par la rémunération des tâches qui lui sont assignées par le mandat de presta- tions, par les recettes provenant de la perception des émoluments, par la rémunération de ses prestations d'intérêt général ainsi que par les recettes provenant des prestations de service fournies à des autorités et à des particuliers"'. Il a le droit de réaliser un bénéfice, mais doit

103 Par exemple, le Surveillant des prix renseigne le public selon art. 4, al. 3 LSPr.

104 ATAF du 5 janvier 2010 (B-1092/2009).

10.1 Art. 77, al. 3 LPTh.

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