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Changements climatiques, agriculture et sécurité alimentaire en Afrique subsaharienne : le cas de la Côte d’Ivoirepp. 5-15.

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Academic year: 2022

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CHANGEMENTS CLIMATIQUES, AGRICULTURE ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRE EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE : LE CAS DE LA CÔTE D’IVOIRE

N’GUESSAN ATSÉ ALEXIS BERNARD1 et DJE KOUAKOU BERNARD2

1- UFR SHS, Institut de Géographie Tropicale, Université de Cocody-Abidjan (Côte d’Ivoire) ; E-mail:

atsalexis1@yahoo.fr

2- Chef de département climatologie et agro-météorologie/SODEXAM ; Direction de la Météorologie Nationale de Côte d’Ivoire ; E-mail : dje_kbernard2003@yahoo.fr

RÉSUMÉ

Disposer d’un climat favorable assurant le bien- être des populations en termes de prélèvement ou de production de ressources alimentaires régulières, sans rompre les équilibres du milieu naturel, est aujourd’hui une des problématiques clés au centre des stratégies de développement, surtout pour les pays en voie de développement.

Les gouvernements des pays développés comme des pays pauvres sont conscients de ce qu’il faut agir, face aux pénuries alimentaires de plus en plus récurrentes, dues aux changements qui interviennent dans le milieu. Cette situation est si préoccupante que diverses actions sont menées à l’échelle mondiale, et particulièrement en Côte d’Ivoire, pays d’Afrique subsaharienne. Ceci dans une synergie d’actions engageant plusieurs acteurs (gouvernements, scien- tifiques, populations locales etc.).

Le présent article se propose de mettre en relief l’évolution climatique en Côte d’Ivoire et ses inci- dences sur le milieu naturel et l’agriculture, moteur de l’activité économique du pays. Cette étude mon- tre encore comment les changements climatiques rendent vulnérables les populations en matière de sécurité alimentaire par les mauvaises récoltes ou la destruction des cultures causées par les aléas climatiques. Ce qui pousse le pays à se tourner vers l’extérieur pour s’approvisionner en denrées de grande consommation (riz…).

Mots clés : Climat, Équilibre, Sécurité alimentaire, Agriculture, Développement

ABSTRACT

Having a suitable climate for the well-being of the population in terms of deduction or production of regular foods without disturbing the equilibrium of the natural, is today one of the key problems concer- ning the strategies of development above all for the developing countries.

The governments of the developed countries and the developing countries as well, are aware that something must be done concerning the lack of food which is more and more recurring due to the changes which intervene in the environment. This situation is so serious that various actions are done around the world and especially in Cote d’ivoire and in the sub-Saharan countries.

This in a synergism of actions appealing many actors (governments scientists ,local populations).

This article want to the highlight the climatic evolu- tion in cote d’Ivoire and the incident on the natural environment and the farming, mover of the country economic activities. That lead the country to turn towards the outside to stuck up with foodstuffs in great quantity (rice…).

Key words: Climate, Equilibrium, Food security, Farming, Development

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1. INTRODUCTION

Pays d’Afrique de l’ouest, au sud du Sahara, la Côte d’Ivoire a choisi de construire de façon straté- gique son développement sur le secteur agricole.

Les nombreuses ressources agricoles (cultures pérennes et vivrières) dont elle dispose grâce à ses riches atouts naturels expliquent cet état de fait. La variabilité climatique observée à l’échelle nationale depuis plus de quatre décennies pèse sur les diffé- rentes productions agricoles du pays, ce qui affecte directement l’économie (BROU, 2009), et met en mal le bien-être des populations. Dans le souci de pallier cette situation, les structures de recherche et d’appui au monde agricole (CNRA1, ANADER2…) travaillent à la mise en place des variétés agricoles adaptées aux variations climatiques. Les efforts entrepris jusque-là sont certes encourageants, mais ils ne permettent pas de couvrir les besoins des populations.

Cette situation justifie le recours aux denrées alimentaires en provenance de divers pays. Vue que le pays reste fortement tributaire des importations, principalement des denrées de grande consomma- tion, le riz notamment, il se pose plusieurs interro- gations parmi lesquelles la sécurité alimentaire des populations. Cette dernière est renforcée par l’usage de plus en plus répandu de produits chimiques (pes- ticides, herbicides, fongicides) dans le traitement des plantations pour des récoltes abondantes, et la persistance de maladies liées à l’alimentation telles que la fièvre typhoïde etc.

Le but de ce travail est de montrer la situation complexe de l’agriculture vivrière en Côte d’Ivoire face aux variations climatiques qui s’accentuent et aux faibles résultats des actions entreprises, malgré la volonté des acteurs engagés dans le processus.

2. MÉTHODOLOGIE

La réalisation de ce travail a reposé sur deux grands axes. Le premier est la collecte, le traitement et l’interprétation des données climatiques. Les relevés ont été faits sur plusieurs années dans les différentes stations météorologiques sur le territoire national. Il s’agit de la pluviométrie, de la tempéra- ture, la durée de l’ensoleillement… Elles sont conso- lidées au fur et à mesure au niveau des structures

1- Centre National de Recherches Agronomiques 2- Agence Nationale d’Appui au Développement Rural

nationales telles que la SODEXAM3 et la DNM4. Le second axe s’organise autour de la recherche documentaire. Celle-ci s’est faite par consultation de divers ouvrages (physique et en ligne) ; ce qui a permis de recueillir des informations utiles à la rédaction de l’article.

PLAN DE L’ÉTUDE

Suivant les informations collectées, nous proposons le plan suivant : une définition des concepts clés est suivie d’une observation de la variabilité climatique.

Nous abordons ensuite les changements climatiques et l’agriculture. Dans la phase de discussion, il est ques- tion d’une synthèse accompagnée de propositions.

3. RÉSULTATS

3.1 DÉFINITION DE CONCEPTS

Les questions abordées dans la thématique développée font appel à des notions qu’il importe d’expliciter. Les changements climatiques et la sé- curité alimentaire se définissent différemment selon les sensibilités. Dans le cas présent, les concepts exposés ci-après sont développés par des organis- mes de renom.

3.1.1. Les changements climatiques La Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques en son article premier, définit les changements climatiques comme « des changements qui sont attribués directement ou indi- rectement à une activité humaine altérant la composi- tion de l’atmosphère mondiale et qui viennent s’ajouter à la variabilité naturelle du climat observée au cours de périodes comparables ». Cette position diffère de celle de la communauté scientifique (GIEC5) qui définit les changements climatiques par l’effet conjoint de l’activité humaine et de la variabilité naturelle.

3.1.2. La sécurité alimentaire

Elle désigne l’accès de tous, en permanence, à une nourriture de qualité en quantité suffisante pour mener une vie saine et active. Les quatre piliers qui concourent à l’atteinte de la sécurité alimentaire sont

3- Société d’exploitation et de développement aéroportuaire, aéronautique et météorologique

4- Direction de la Météorologie Nationale

5- Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat

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la disponibilité, la stabilité, l’accessibilité et l’utilisation (nutrition). Selon la FAO, la sécurité alimentaire est le résultat du fonctionnement du système alimentaire aux niveaux mondial, national et local. Elle dépend souvent directement ou indirectement des services, des écosystèmes agricoles et forestiers, à savoir la conservation du sol et des eaux, la gestion des bassins versants, la lutte contre la dégradation des terres, la protection des zones côtières et des man- groves et la conservation de la biodiversité.

Les différents concepts définis, il est question de faire une présentation des caractéristiques clima- tiques de la Côte d’Ivoire dans les grandes lignes.

En d’autres termes, qu’en est-il de l’état du climat ? Comment la pluviométrie et les températures évo- luent-elles ?

3.2- UNE ÉVOLUTION CLIMATIQUE À GRANDE VARIABILITÉ

Le climat en Côte d’Ivoire a connu beaucoup de fluctuations depuis les années 1950. Les décennies 1950 et 1960 ont été relativement humides tandis que les décennies 1970 à 1990 ont été sèches.

3.2.1. Une pluviométrie en chute libre L’analyse de la normale6 1971-2000 par rapport à celle de 1961-1990 montre une réduction moyenne des hauteurs de pluie de 6% sur toute l’étendue du territoire ivoirien, avec des baisses remarquables de 13% à Sassandra et 11% à Adiaké, deux localités sur le littoral ivoirien situées respectivement au sud- ouest et au sud-est.

La pluviométrie a été particulièrement déficitaire depuis les années 1980 (fig.1) par rapport à la moyenne 1951-1980. Suivant la figure 1, la pluviométrie est effectivement en baisse sur l’ensemble du territoire ivoirien. Dans la majorité des stations, l’indice de la moyenne mobile pondérée des pluies annuelles est inférieur à 2, globalement après 1970/1980. Les valeurs de l’indice évoluent plus dans le sens négatif sur toutes les stations après 1970/1980.

La comparaison de la normale 1971-2000 par

6- Moyennes cumulées pour une période uniforme et relativement longue comprenant au moins trois périodes consécutives de dix années. Extrait du guide des pratiques climatologiques OMM, édition 1990, ss 1B6-1B7

rapport à celle de 1951-1980 révèle une baisse nationale plus importante (12%) avec des baisses remarquables de 19% à Abidjan et à Adiaké, 11% à Gagnoa, 14% à Odienné et 24% à Sassandra.

Les observations montrent une baisse moyenne des quantités de pluie annuelles de 15% au niveau national avec 23% à Abidjan, 24% à Adiaké et 30%

à Sassandra.

En outre pendant les épisodes El Nino, la grande saison des pluies connaît des baisses de 10 à 50%

de quantité d’eau, ce qui arrive en moyenne une année sur trois.

3.2.2. Une évolution progressive des températures

Au niveau de la thermométrie, les études d’obser- vation montrent que la Côte d’Ivoire s’est réchauffée en moyenne de 0,3°C depuis la décennie 1990. Sur les dix dernières années (2001-2010), l’année 2010 a été la plus chaude avec un écart de +1,2°C, com- parée à la moyenne de la période 1961-1990 devant l’année 2008 et 2005 dont l’écart est de 0,9°C.

Selon l’Organisation Météorologique Mondiale, l’année 2010 est l’une des années les plus chaudes jamais observées, avec 2005 et 1998. La tempéra- ture moyenne à l’échelle du globe cette même année s’est révélée supérieure à 0,53°C à la moyenne pour la période 1961-1990. Cette valeur est supérieure de 0,01°C et de 0,03°C à la température nominale respectivement en 2005 et 1998.

A Abidjan, le réchauffement est fort remarquable avec 0,5°C en moyenne (fig.2). Sur les 10 années les plus chaudes enregistrées depuis 1949, neuf sont après 1990. L’année 2000 a été la plus chaude avec une hausse de 1,1°C. De 2004 à 2007, la hausse s’est maintenue de 0,7 à 0,8°C.

Depuis 1998, on observe une persistance du ré- chauffement avec le maintien d’une hausse de plus 0,5°C dans la plupart des régions.

Le régime d’harmattan, vent sec d’origine nord-est apparaissait très peu sur le littoral ivoirien de 1961 à 1970. Depuis les années 1970, on observe une forte occurrence de ce phénomène sur le Littoral. Cela est le signe de sa généralisation sur l’ensemble du pays. La conséquence immédiate est l’accroissement

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des risques de feux de brousse sur l’ensemble du pays.

On peut donc dire que les changements sont de plus en plus ressentis en Côte d’Ivoire entre autres par :

- la baisse effective de la pluviométrie depuis les trois dernières décennies ;

- l’irrégularité des pluies (mauvaise répartition) ; - le raccourcissement de la longueur des saisons pluvieuses ;

- la hausse des températures ;

- la persistance et rigueur des saisons sèches ;

- les inondations ;

- les feux de brousse fréquents;

L’aperçu climatique mis en évidence dans le paragraphe précédent est une première étape pour comprendre les interrelations entre les conditions climatiques et l’agriculture. En effet, les premières « imposent » au second leur influence à telle enseigne qu’elle évolue étroitement en fonction de celles-ci.

Cela se justifie à partir de l’observation des pratiques agricoles des populations sur le terrain. Quelles sont ces interrelations et leurs implications ?

Source : SODEXAM Figure 1 : baisse des quantités de pluie depuis 1970

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-1,5 -1,0 -0,5 0,0 0,5 1,0 1,5

1951 1953 1955 1957 1959 1961 1963 1965 1967 1969 1971 1973 1975 1977 1979 1981 1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007

Années

Variation de température (°C)

Abidjan

Source : SODEXAM Figure 2 : Variations de la température à Abidjan (C°)

3.3. LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES ET L’AGRICULTURE

L’agriculture est un secteur d’activité intimement lié aux interactions entre trois types de ressources indispensables:

- les ressources génétiques (espèces et varié- tés) ;

- les ressources pédologiques (matériau géologi- que, nutriments etc.) ;

- les ressources climatiques (lumière, chaleur, eau, etc.)

Il va s’en dire que le(s) dysfonctionnement(s) observé(s) au niveau de l’une de ces ressources aura des incidences sur les autres qui se trouveront en difficulté. Ce qui va influer sur l’élément principal qui est l’agriculture. Cette logique met en lumière les difficultés pour le secteur agricole qui supporte mal les variations des ressources climatiques. Un parallèle entre plusieurs éléments met en lumière cet état de fait.

3.3.1. L’inadéquation entre les calendriers météorologiques et culturaux Les pratiques agricoles obéissent à un planning bien connu des agriculteurs. Les observations em- piriques des saisons faites sur plusieurs années ont permis d’établir des calendriers culturaux. Ainsi, en Côte d’Ivoire forestière par exemple, les défrichages

des portions pour les nouvelles cultures surviennent entre les mois de janvier et février, qui correspondent à la période de sécheresse. Les semences (maïs par exemple) sont mises en terre généralement entre les mois de mars et avril, en début de saison des pluies. Cette logique continue de guider les activités agricoles du monde paysan.

La modification des paramètres climatiques ces trois dernières décennies a occasionné une inadé- quation entre les calendriers de la météorologie et des saisons culturales. Des études de la DMN7 montrent que la saison des pluies s’est raccourcie en moyenne de 10 à 27 jours sur le littoral avec un retard de démar- rage de deux semaines en moyenne. A l’intérieur du pays, on observe une réduction de la longueur de la saison de 10 à 20 jours dans le Nord, de 20 à 30 jours dans le Sud intérieur et de 10 à 28 jours au Centre.

Les retards de démarrage de la saison varient d’une à deux semaines selon la localité.

La situation dans trois localités du pays, Odienné (nord), Bouaké (centre) et Abidjan (sud) est une illustration à propos pour comprendre ce décalage calendaire. L’observation du tableau 1 ci-dessous indique une réduction des saisons culturales respecti- vement de 5 jours à Odienné et 28 jours à Bouaké et Abidjan, suivant la comparaison des deux normales 1951-1980 et 1971-2000.

7- Direction Météorologique Nationale

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Ce constat sous-entend que la logique des sai- sons culturales est modifiée. Au lieu de s’étendre sur le nombre de jours habituel, la saison des cultures diminue. Ce qui suppose que les agriculteurs doivent s’y prendre un peu plus tôt et finir avant une période bien précise. Si ce n’est pas le cas, soit ils ne pourront pas pratiquer certaines cultures qui ont des exigen-

ces en termes de quantité d’eau par exemple, soit les plants mis en terre ne donneront pas une bonne récolte (réduction des rendements), compte tenu du temps favorable réduit pour leur développement. Ces situations mettent les agriculteurs dans un dilemme, d’autant plus que ceux-ci ne disposent pas des infor- mations scientifiques appropriées. Il va s’en dire qu’ils auront du mal à s’adapter à de telles variations.

Tableau 1 : Réduction des saisons culturales dans trois localités de Côte d’Ivoire

Source : Direction Météorologique Nationale, 2010

NB : les valeurs 1-2-3 dans le tableau correspondent respectivement à une décade (période de 10 jours).

3.3.2. Impact de la variabilité climatique sur l’agriculture vivrière et la sécurité alimentaire des populations

Il est établi en règle générale que l’agriculture dans les pays en voie de développement est for- tement tributaire des conditions climatiques. Cette réalité est d’autant plus manifeste que les populations locales ne disposent pas des techniques appropriées (maîtrise de la gestion des ressources en eau ; techniques agricoles pour produire en contre-sai- son…) leur permettant de produire en quantité et en qualité. Les déficits constatés amplifiés par les modifications survenant au plan climatique mettent

en mal la sécurité alimentaire des populations qui dépendent directement de ce qui est produit dans les exploitations agricoles pour couvrir leurs besoins en alimentation.

3.3.2.1 Les réelles difficultés du monde agricole devant les changements climatiques L’inadéquation entre les calendriers météorologi- ques et les saisons culturales pose un réel problème au niveau des productions agricoles. En réalité, le dé- calage des saisons perturbe les actions à mener sur le terrain par les agriculteurs. On assiste par exemple à la reprise de semis ayant pour conséquences la

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baisse des productions et indirectement des revenus, donc du pouvoir d’achat des populations. A cela il convient d’ajouter les menaces de famine qui se tra- duisent par la prolongation des périodes de soudure, les déplacements saisonniers des paysans en quête d’espaces plus accueillants et la modification des habitudes culturales. Les déplacements saisonniers en particulier ne se font pas sans incident. C’est le cas des conflits fonciers qui sont monnaie courante dans plusieurs régions du pays.

Les impacts des changements se traduisent aussi par la perte des récoltes liée aux calamités telles que les inondations, la sécheresse, les feux de brousse qui sont d’origine climatique.

Au total, la modification des paramètres clima- tiques se traduit par la réduction des rendements, les difficultés d’approvisionnement des marchés, la diminution des moyens de subsistance des paysans et la transformation du paysage agricole et l’utilisation des terres.

Ces faits mettent en évidence les risques ali- mentaires auxquels sont exposées les populations, vu que celles-ci dépendent de l’approvisionnement régulier et soutenu des marchés pour se ravitailler en produits de qualité.

3.3.2.2. La question de la sécurité alimentaire au cœur des préoccupations

- Les dangers de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur

Les changements climatiques affectent la sécurité alimentaire des populations, d’autant plus que les répercussions se font sentir au niveau des cultures, du bétail, de l’eau, de la pêche, des rendements de l’aquaculture et des «services écosystémiques»

comme la régulation hydrologique, la rétention des sols et la pollinisation.

Un fait réel est que dans ce contexte de variabilité climatique à l’échelle mondiale, la disponibilité des denrées alimentaires n’est plus assurée pour les pays importateurs. La réalité est qu’en raison de l’ac- croissement des besoins alimentaires domestiques et des catastrophes naturelles dans certains pays producteurs, ces derniers imposent des restrictions sur les exportations des denrées. Par conséquent, la menace directe sur les populations des pays tribu- taires des importations de denrées alimentaires est

manifeste, ceux-ci ayant recours aux importations pour combler leur déficit alimentaire.

En Côte d’Ivoire, la production agricole ne couvre pas les besoins, surtout pour les denrées de grande consommation (riz, viande, poisson etc.). C’est le lieu de rappeler par exemple que pour le riz, la production nationale est estimée à environ 600 000 tonnes de riz blanchi en moyenne par an depuis 2008. Elle ne couvre pas les 50% des besoins de la consommation intérieure estimée à 1 500 000 tonnes de riz blanchi en moyenne par an. Ce qui emmène à avoir recours aux importations massives de riz, principalement des pays d’Asie pour 919 000 tonnes à hauteur de 235 000 000 de FCFA8. Pour assurer un approvisionnement régulier du marché, des missions ont été menées à l’exté- rieur du pays. On peut citer en exemple la récente mission du ministre du commerce Dagobert BANZIO en Thaïlande le 29 mai 2012, en vue de négocier un approvisionnement en riz à des prix compétitifs du marché ivoirien. Cette mission a été suivie du séjour d’une mission thaïlandaise en Côte d’Ivoire du 27 au 29 juin 2012 sur le même sujet.

- Les risques sur la santé liés aux OGM Avec la révolution verte en marche dans plusieurs pays du monde, par ailleurs grands producteurs de denrées alimentaires tels que le Japon, la Chine, les États-Unis…les organismes génétiquement modifiés, à l’image du riz hybride, sont lentement introduits dans la chaîne alimentaire. Le riz hybride par exemple est produit par de grandes exploitations mécanisées avec de grandes doses d’engrais et de pesticides. Or l’on est conscient des effets à long terme de ces produits chimiques sur la santé des populations.

Il existe en effet de vrais risques pour les consom- mateurs et les agriculteurs. On pourrait citer à titre d’exemple les résidus de pesticides, fongicides ou herbicides répandus par les agriculteurs pour la lutte contre les insectes ou les moisissures. La non-utilisation de ces modes de lutte préconisée par l’industrie du Bio, avec une évaluation des risques de perte en rendement agricole, est un enjeu majeur que nous devons considérer. Un autre risque est la contamination des denrées agricoles et produits dérivés par des mycotoxines produites par certaines

8- Service de communication, ministère du commerce de Côte d’Ivoire, 2012

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moisissures. Ces toxines ayant des effets néfastes variés pour la santé humaine sont généralement trouvées à fortes concentrations sous les latitudes de la Côte d’Ivoire. Dans ce contexte, on assiste à une recrudescence des maladies et pathologies d’ori- gine alimentaire (notamment la fièvre typhoïde) et à l’augmentation de toxi-infections alimentaires dont l’une a occasionné la mort de dix-sept personnes dans la région des lacs.

Dans les pays cités plus haut qui sont de grands producteurs de denrées alimentaires, l’évolution au plan industriel et technologique n’est pas sans conséquences sur l’environnement. On assiste aux déversements de produits chimiques, de résidus industriels, le plus souvent sans traitement dans la nature. Ces produits se retrouvent malheureusement mêler aux eaux qui alimentent les exploitations agricoles. Une des conséquences immédiate est la contamination des plantes par ces produits.

Pour citer l’exemple de la Chine qui produit 200 millions de tonnes de riz par an, des études scienti- fiques menées depuis 2007 et rapportées par l’heb- domadaire chinois «Nouveau siècle» indiquent que 10% du riz récolté dans ce pays est contaminé par des métaux lourds toxiques dispersés dans la nature.

Il s’agit particulièrement du cadmium qui se retrouve dans l’eau d’irrigation des rizières après avoir ruisselé des mines, notamment des mines de plomb, d’étain et de cuivre. Le cadmium est une substance recon- nue toxique et cancérigène, qui s’accumule dans le corps humain tout au long de la vie, avec des impacts sur les reins, les os et le foie. On comprend dès lors le risque potentiellement élevé de cette substance vis-à-vis de la santé des populations.

Un autre cas de contamination de riz a été signalé aux Etats-Unis. La compagnie semencière multina- tionale allemande, Bayer CropScience, a conduit des essais en plein champ avec le LL6019, mieux connu sous le nom de Liberty Link 601 de 1999 à 2001 en Louisiane. Elle a ensuite abandonné le projet sans chercher à obtenir le permis gouvernemental pour le commercialiser. Quelques années plus tard, en 2006, une contamination généralisée de riz à longs grains possédant les caractéristiques du LL601 a été signalée. En effet, la variété s’est dispersée depuis les parcelles d’essais dans les champs des agricul-

9- Riz transgénique développé par le groupe allemand Bayer Cropscience

teurs, où elle a eu le temps de se développer. Les grains et les plants de LL601 semblent pratiquement identiques à ceux de la variété classique populaire.

Ce dernier exemple met en évidence le danger de contamination des OGM10 face aux plantes naturelles exploitées par les agriculteurs.

Relativement à ce qui précède, il est vrai que les besoins en termes d’alimentation des popula- tions doivent être comblés. Toutefois dans le même temps, il faut tenir compte de ce que ces popula- tions ne soient pas confrontées à des problèmes de santé consécutifs aux denrées alimentaires qu’elles consomment. La question de la sécurité alimentaire concerne certes la disposition régulière de denrées pour couvrir les besoins, mais touche par extension la santé des populations qui doivent manger sain. D’où il importe de tenir compte de la qualité des produits alimentaires importés. Or, force est de constater que les OGM présentent de réels dangers pour la santé des populations.

Un exemple est donné par une étude menée par le CRIIGEN11 et les équipes du Professeur Gilles-Eric Séralini. Cette équipe française a étudié les effets à long terme d’un pesticide, le Roundup, et d’un maïs OGM NK603, deux produits de Monsanto12, une firme industrielle intervenant dans le domaine agricole.

L’étude a été effectuée sur deux cents rats pendant deux ans. Les résultats révèlent que les rats nourris au maïs OGM développement deux à trois fois plus de tumeurs que les autres. Or les firmes industrielles ne font que des études sur trois mois pour obtenir les autorisations pour l’exploitation de leurs produits.

Au vu de cet exemple, il n’est pas étonnant que des cas de denrées alimentaires contaminées, notamment le riz, soient signalés dans les ports ivoiriens, en provenance de l’extérieur. On comprend aisément que les populations ivoiriennes pour raison d’importation de ces denrées alimentaires soient exposées quant à leur sécurité au plan alimentaire.

Un autre danger à considérer est l’utilisation de produits (pesticides et autres) pour le traitement des plantations et autres vergers. La rétroaction des

10- Organisme Génétiquement Modifié

11- Comité de Recherche et d’Information Indépendante sur le Génie Génétique

12- Monsanto : entreprise spécialisée dans les biotechnologies végétales dont le siège est situé à Saint-Louis (Etats-Unis). Elle commercialise des semences génétiquement modifiées, des produits phytopharmaceutiques….

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produits utilisés n’est pas toujours connue à 100%, faute d’examens approfondis et effectués sur le long terme.

4. DISCUSSION

Les changements climatiques sont une réalité qu’on ne peut ignorer, quelles que soient les raisons.

Avec des moyens différents, chaque pays tente au mieux de défendre son cas. Le constat qui se dégage est que les écarts de développement entre les na- tions ont tendance à être indexés pour justifier des interventions différentes d’un pays à un autre. En Côte d’Ivoire, la question des changements climati- ques est une préoccupation partagée.

Aussi, depuis 2002, le pays est confronté à une situation de crise socio-politique qui affecte aussi bien son développement économique que la qualité de vie de sa population. Ainsi, en matière de sécurité sanitaire des aliments, les structures d’analyse et de contrôle sanitaire mises en place par les pouvoirs publics au cours des précédentes décennies ont fortement pâti de cette situation et leur efficacité est nettement amoindrie. Malgré la proposition de mise en œuvre du programme spécial régional pour la sécurité alimentaire des états membres de l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), on constate encore aujourd’hui en Côte d’Ivoire, l’absence de système national coordonné et fiable pour la sécurisation de l’alimentation produite et circulant sur le territoire ivoirien : mauvaise informa- tion et sensibilisation de la population aux risques liés à la mauvaise qualité des aliments ainsi qu’à l’hygiène alimentaire et nutritionnelle ; manque de décisions politiques sur la réglementation en sûreté des aliments ; manque de coordination entre les experts nationaux. Les différents faits exposés ci- dessus impliquent par conséquent des dispositions à plusieurs niveaux.

4.1. DES ACTIONS À POSER PAR LES AUTORITÉS

Les gouvernements dans le monde avec la situa- tion des changements climatiques ne peuvent que s’accommoder autant que faire se peut. En Côte d’Ivoire, la faiblesse des moyens à disposition dans la lutte contre les changements climatiques ne doit pas justifier la passivité face à ce phénomène. A ce jour, les dispositions prises sont essentiellement des

décrets adoptés lors de conseils des ministres sur la question. On note aussi la sensibilisation à tra- vers des colloques et conférences organisés par de structures diverses, les actions de reboisement en- treprises par la SODEFOR etc. Etant donné qu’il est de la responsabilité première des autorités étatiques de faire le mieux qu’elles peuvent, Il serait opportun d’entreprendre par le canal des médias une sensi- bilisation d’envergure à l’endroit des populations.

Ceci, dans le but d’entraîner une prise de conscience véritable et une solidarité nationale pour une synergie d’actions. Un appui en termes d’équipements de pointe et de moyens financiers conséquents est de mise à l’endroit des structures techniques en premiè- re ligne dans les questions liées aux changements climatiques. Promouvoir la recherche scientifique est tout aussi indiquée. Les fruits peuvent fortement contribuer au développement. Les autorités ont la responsabilité de rechercher et attirer les fonds par la signature d’accords avec des partenaires, en prenant part aux initiatives sur les changements climatiques au plan international. La création de fond de soutien aux paysans en cas de sinistre naturel imputable aux changements climatiques serait aussi une mesure bienvenue pour les populations du milieu rural les plus exposées aux risques.

4.2. DE LA VULGARISATION DES DONNÉES SCIENTIFIQUES

Au stade de la situation qui prévaut sur le terrain, il est indéniable que les informations scientifiques (in- formations climatologiques, biologiques etc.) soient vulgarisées et mises à la disposition des populations, surtout celles qui pratiquent l’agriculture. En Côte d’Ivoire, le secteur agricole occupe à lui seul 60% de la population active. Or la réalité est que les chan- gements climatiques ont entraîné le développement de maladies bactériennes qui attaquent les cultures, mettant en péril la production et pire encore la survie des populations. Cette alternative est fortement à encourager d’autant plus que l’économie du pays repose sur ce secteur stratégique pour son dévelop- pement. Dans cette optique, il serait souhaitable que dans chaque département et commune, on installe respectivement une station et un poste météorologi- ques. A partir de là, on pourra collecter des informa- tions climatologiques (pluie, température, humidité, vent, insolation etc.). On pourrait aussi entreprendre des études en biologie végétale qui mettront en

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exergue les virus et autres bactéries infectant les cultures... Ces informations permettront d’établir des prévisions climatiques suivant les saisons, des prévi- sions météorologiques générales etc. Le croisement de toutes ces informations permettra l’établissement des corrélations entre les données climatologiques, les maladies éventuelles et la production agricole.

Des séances pratiques de formation des paysans et agriculteurs à la collecte, l’interprétation et à l’uti- lisation des données pluviométriques sont à entre- prendre, avec l’appui des structures techniques telles que la SODEXAM13 etc. Apprendre à connaitre les maladies et les actions à mener pour y faire face doit être de mise. Pour ce faire, l’assistance des structu- res techniques de l’agriculture est la bienvenue. La mise à contribution des données scientifiques est une porte ouverte pour l’actualisation des calendriers culturaux et des potentialités agricoles des différentes régions de la Côte d’Ivoire. Ces atouts permettront des avancées significatives en termes de prévision et de planification des activités agricoles. Ce qui soutiendra durablement la productivité agricole.

4.3. LA MISE EN PRATIQUE DE TECHNIQUES AGRICOLES ET SYSTÈMES DE CULTURES INTELLIGENTS

La situation des changements climatiques en Côte d’Ivoire impose de relever le défi de la produc- tivité pour répondre aux besoins des populations sur le territoire national.

Il serait intéressant dans cette optique de recourir aux techniques agricoles» intelligentes» face au cli- mat. Ces techniques, telles que le labour minimum, permettraient aux sols d’absorber une certaine quantité de gaz à effet de serre, impliqués dans les changements climatiques. Ces techniques parti- ciperaient à l’augmentation de la productivité, des revenus des planteurs et permettraient à l’agriculture d’être plus résistante face à la variabilité climatique.

Ce qui présenterait un triple avantage au niveau de l’agriculture, de l’environnement et pour la sécurité alimentaire des populations.

Avec les changements climatiques, la planification agricole devient de plus en plus aléatoire. La pro- blématique de la disponibilité en produits agricoles de consommation locale se pose alors. Vis-à-vis de

13- Société d’exploitation et de développement aéroportuaire, aéronautique et Météorologique

la sécurité alimentaire des populations, une adap- tation s’impose au niveau des types de cultures à entreprendre. Cela répond au besoin de disposer de variétés plus adaptées au stress hydrique, aux variations de température et dont la productivité est garantie en quantité et en qualité.

Les recherches entreprises dans les structures telles que le CNRA ont permis de mettre sur pied des variétés agricoles adaptées aux changements et qui résistent mieux aux maladies. Ainsi, les recherches ont permis d’identifier cinq génotypes de riz irrigué résistant à la panachure jaune à Diégonéfla et à Ga- gnoa (Centre-ouest de la Côte d’Ivoire) ; l’introduction de trois variétés de maïs riches en protéines, la mise au point d’une méthode rapide de multiplication du manioc par recépage…Ces activités de recherche réalisées ont donné des résultats importants comme on peut le voir. Ceci dénote que les différents domai- nes de compétence en la matière doivent travailler en partenariat pour le bien-être des populations agricoles assurant la disponibilité en produits vivriers sur les marchés.

5. CONCLUSION

Les changements climatiques sont d’actualité et une réalité bien visible en Côte d’Ivoire. Les obser- vations des structures travaillant dans le domaine climatique le démontrent à plus d’un titre. Au niveau de l’agriculture, les décalages saisonniers en termes de pluie sont fréquents et la baisse de la productivité est régulièrement constatée. Les conclusions établies quant à l’évolution de la situation requièrent des actions soutenues à plusieurs niveaux. L’Etat, les partenaires au développement et les populations doivent davantage s’impliquer pour des actions plus prononcées.

Vu que les changements climatiques sont une menace, principalement pour l’agriculture et par ri- cochet pour l’économie nationale et les populations en termes de sécurité alimentaire, l’engagement de toutes les compétences est requis, et rien ne doit être occulté pour des résultats probants.

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