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" LES COURS DE SORBONNE"

LICENCE ES LETTRES Certificats d'Etudes Supérieures

de Littérature Française, d'Etudes Littéraires Classiques et de Grammaire et Philologie

RONSARD

BOCAGE

PAR

GUSTAVE COHEN

Professeur de Littérature Française du Moyen Age à la Faculté des Lettres de Paris

CENTRE DE DOCUMENTATION UNIVERSITAIRE

TOURNIER & CONSTANS

5, Place de la Sorbonne

P A R I S — V

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Signature confirmant le privilège de l'A uteur

(6)

C O U R S d e

M. GUSTAVE COHEN

R O N S A R D : L E B O C A G E D E 1 5 5 4 .

P R E M I E R E & D E U X I E M E L E C O N

LA VIE & L'OEUVRE DE RONSARD.

Dans s on beau livre intitulé Ronsard et l' Humanisme P. de Nolhac a dit : "Qui se contente aujourd'hui pour notre Ron- sard de la timide réhabilitation de Sainte-Beuve? Une époque de recherches critiques le met en place bien plus haute que celle où les Romantiques se croyaient hardis de l' élever. Nous sourions de leurs hésitations et de leurs réserves, et notre admiration ne se réduit plus à choisir dans cette oeuvre immense quelques odelettes et quelques sonnets. Nous voulons mesurer l'ensemble du monument et en examiner les détails. Les parfaites réussites n'y font pas dédaigner l'effort moins heureux; la Pléiade entière bénéficie de la curiosité qui s'attache au maître et rien ne nous laisse indif- férents de cette tentative d'ou est sortie tcute la poésie moderne de la France."

"Mesurer l'ensemble du monument", nous ne saurions avoir la prétention de le faire en une heure ou deux, mais au moins vou- drions-nous essayer de nous rendre compte de l'architecture de ce palais merveilleux. Autrement dit, je voudrais dérouler devant vous une sé r i e de dix tableaux, j'allais dire de films, où apparai traient les différents moments de la vie et de l'œuvre de Ronsard; leur évolution nous mènera aux plus hautains sommets ou dans les plus molles plaines, mais toujours avec une continuité dans le renouvel- lement, laquelle est la marque la plus certaine du génie.

La biographie de Ronsard commence comme un conte des Mille et Une Nuits en plein mirage oriental : (p.15) (1)

Or, quand à mon ancestre, il a tiré sa race D'où le glacé Danube est voisin de la Thrace : 1) Les citations sont extraites de mon: Ronsard, sa Vie et son

Oeuvre Paris, Boivin, 1924, nouvelle é d i t i o n revue et corrigée, 1932, in-12. On trouvera plus loin un commentaire détaillé de ce passage. Qu'il me soit permis de remercier ici mon collègue et

a m i H e n r i C h a m a r d , q u i a b i e n v o u l u , s e s o u v e n a n t q u e j ' a v a i s f a i t m e s d é b u t s à l a S o r b o n n e , l e s u p p l é a n t e n 1 9 2 2 , d a n s u n c o u r s s u r R o n s a r d , d e m ' a v o i r r a m e n é à m e s p r e m i è r e s a m o u r s .

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Plus bas que la Hongrie, en une froide part, Est un seigneur, nommé le Marquis de Ronsard, Riche en villes et gens, riche d' or et de terre.

Un de ses f i l s puinés ardent de voir la guerre, Un camp d' autres puinés assembla ha z a r deus, Et quittant son païs, f a i t capitaine d' eus, Traversa la Hongrie et la bas se Allemaigne, Traversa la Bourgongne et toute la Champaigne Et soudart vint servir Philippes de Valois, Qui pour lors avoit guerre encontre les Anglois.

Il s'emploia si bien au service de France, Que le Roi lui donna des biens à suffisance,

Situés près du Loir, puis du tout oubliant Frères, père et païs, François se mariant Engendra des aïeus dont est sorti le pere Par qui premier je vi cette belle lumière.

Nous pénétrons donc d' emblée dans la Forêt de Gastine en ce joli château Renaissance que vous allez voir en projections tout à l ' heure et en réalité j' espère à la Pentecôte. (1) Il fut bâti en 1515, pour Jeanne Chaudrier sa femme, par Loys de Ronsard, père du poète et parfait type de gentilhomme guerrier de la Renais- sance française. Etant en 1530 rentré d'Espagne où i l avait accom- pagné les enfants de France qui y avaient été retenus comme otages, i l mît son f i l s a u collège do Navarre à Paris, où i l ne resta que six mois, puis au service du prince Charles, troisième f i l s de François Ier. Le roi, voulant faire un cadeau à sa soeur devenue reine d'Ecosse, lui céda le plus beau de ses pages qu' elle emmena.

I l revint de là-bas au début de 1546 pour suivre Lazare de Baïf à Haguenau d' où i l rentra en Vendômois.

C'est là qu' i l fut pris d'une sorte de fièvre qui le ren- dit demi-sourd. Etrange cruauté du destin, Ronsard et Beethoven;

prodigieux musiciens tous deux, ont été sourds. Mais est-ce vrai- ment une cruauté? Joachim du Bellay, s'adressant à Ronsard, le niera : (p.32)

Dois-tu donques, Ronsard, te plaindre d'estre sourd?

O que tu es heureux, quand le long d'une rive Ou bien loing dans un bois à la perruque vive, Tu vas, un livre au poing, méditant les doulx sons Dont tu sçais animer tes divines chansons,

Sans que l'aboy d' un chien ou le cry d'une beste Ou le bruit d'un torrent t'étourdisse la teste.

Je croy qu'alors Ronsard tu ne souhaites point Ny le chant d'un oyseau, ny l'eau d'une montagne, Ayant avecques toy la Surdité compagne,

Qui faict faire silence et garde que le bruict Ne te vienne empescher de ton aise le fruict.

Mais e s t - i l harmonie en ce monde pareille A c elle qui se fa i t du tin tin de l ' oreille ?

1) A l'occasion des fêtes commémoratives du 10e anniversaire du Quatrième Centenaire de la naissance de Ronsard, dont on trou-

vera la bibliographie dans mon livre p.294-295.

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Lorsqu'il nous semble ouïr, non l'horreur d'un torrent, Ains(°) le son argentin d'un ruisseau murmurant (°)mais Où celuy d'un bassin, quand celuy qui l'escoute

S'endort au bruit de l'eau qui tumbe goutte à goutte.

Du Bellay a raison : par le "tintin de l ' o r e i l l e " , les sources confient au poète leur murmure, les oiseaux leurs chan- sons , les forêts leurs bruissements, éveillant peu à peu en son cerveau solitaire les harmonies intérieures qui vont se changer en une des plus prodigieuses symphonies rythmiques dont se s oit honorée notre poésie :

Antres, et vous, fontaines, De ces roches hautaines Devallans centre bas,

D'un glissant pas Et vous, fores t s et ondes, Par ces prez vagabondes, Et vous rives et bois,

Oyez ma vois.

Quand le ciel et mo n heure Jugeront que je meure, Ravi du dous séjour

Du co mmun j our,

Je veil, j'enten, j'ordonne Qu' un sepulcre on me do nne

Non pres des Rois levé Ne d'or gravé,

Mais en cette isle verte, Où la course entr'ouverte Du Loir, autour coulant, Est accolant,

Là où Braie s'amie, D'une eau non endormie, Murmure à l' envi ron

De son giron.

Je deffen qu'on ne rompe Le marbre pour la pompe De vouloir mon tumbeau

Bâtir plus beau ,

Mais bien je veil qu'un arbre M'ombrage au lieu d'un marbre Arbre qui s o i t couvert

Tousjours de vert. (p. 39)

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La pièce que je viens do vous lire de l' Election de son Sepulcre n'est que l'une de celles qu'il a composées sous la dictée de la Nature, à son contact direct , pendant la période des premiers essais, et vous n'avez pas été sans vous étonner de la rare perfec- tion de la facture; cependant elles ne le satisfont pas entièrement;

il aspire à une poésie à la fois plus savante et plus haute dont ses premiers entretiens avec Lazare de Baif lui ont peut-être révé- lé l ' existence. Plus modeste que beauc oup de nos jeunes écrivains d'aujourd'hui, il ne croit pas qu'on y puisse atteindre sans beau- coup de science, beaucoup de travail, beaucoup de métier, un con- tact intime et prolongé avec la poésie antique.

Horace ne lui suffit plus. Il sait qu'il y a quelque par t, près du sanctuaire d' Apollon, à l'entrée des gorges du Par- nasse, au double sommet de neige , une fontaine Castalie, dont les eaux de Jouvence pourraient rendre la poésie française, si elle s'y allait baigner, toute pareille en éclat et en fraîche maturité, à son aînée la poésie hellénique. Il faut pour cela savoir la lan- gue grecque "sans laquelle, dit Gargantua, c 'est honte qu'une per- sonne se die sçavant". Peut-être a-t-il entendu parler déjà du

maître qui, à ce moment, chez Lazare de Baïf, en ouvre les secrets au jeune Jean-Antoine.

Loys de Ronsard étant mort le 6 Juin 1544, comme Pierre se précipite quand Lazare de Baïf lui offre de devenir, dans la grande maison des Fossez-Saint-Victor (aujourd'hui rue du Cardinal Lemoine) le jeune Mentor d'un plus jeune Télémaque; mais le Mentor va se faire élève et, avec le bel appétit de savoir que symbolise si bien le "A boire, à boire!" de Gargantua naissant , il se met à faire des thèmes et des versions. Mais à tel élève, quel maître!:

un Limousin docte et enthousiaste qui s' appelait Disnamandy dit Dorat, surnom plus poétique et de meilleur augure, permettant ces jeux de mots érudits auxquels se complait la Renaissance : "doré, bouche d'or, d'où sortent des vers dorés". "Il luy lut de plain vol, raconte Claude Binet, l'ancien Liographe de Ronsard, le Pro- méthée d'Eschyle, pour le mettre en plus haut goust d'une Poésie

q u i n ' a v o i t e n c o r p a s s é l a m e r d e d e ç a e t , e n s a f a v e u r , t r a d u i s i t c e t t e t r a g é d i e e n F r a n ç a i s , l a q u e l l e s i t o s t q u e R o n s a r d e u t g o u s t é e :

" E t q u o y , d i t - i l à D o r a t , m o n m a i s t r e m ' a v e z - v o u s c a c h é s i l o n g - t e m p s c e s r i c h e s s e s ? "

A u s s i , q u a n d L a z a r e d e B a ï f m o u r u t , e n 1 5 4 7 , e t q u e D o r a t e u t p r i s l a d i r e c t i o n d u C o l l è g e d e C o q u e r e t , R o n s a r d , é c o l i e r d e v i n g t t r o i s a n s , y s u i v i t J e a n - A n t o i n e q u i e n a v a i t q u i n z e , b i e n t ô t r e j o i n t p a r d u B e l l a y q u i e n a v a i t v i n g t c i n q .

M e s d e m o i s e l l e s e t M e s s i e u r s , e n t r e t o u s l e s l i e u x d o n t s ' h o n o r e l a m o n t a g n e s a i n t e d u s a v o i r , l i e u x o ù s o u f f l e l ' e s p r i t ,

" b i e n f a i s a n c e d e l a F r a n c e e n v e r s l ' U n i v e r s " s e l o n l a b e l l e f o r m u - l e d e n o t r e c h e r M a u r i c e B a r r è s , l ' e m p l a c e m e n t d u c o l l è g e d e C o q u e r - r e t e s t s a c r é , c a r c ' e s t l e s a n c t u a i r e o ù D o r a t , p o n t i f e d ' A p o l l o n e t d e s M u s e s , r é v è l a à l a P l é i a d e , u n e a n t i q u i t é é t i n c e l a n t e , a v e c

ses dieux et ses déesses, l' ordre souverain de ses temples, le dé-

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sordre inspiré de sa poésie lyrique, la grandeur angoissante mais toujours majestueuse de ses tragédies. Ce lieu qui est aujourd'hui un terrain vague, au 11 de la rue Chartière, derrière le lycée Louis le Grand, et où i l ne reste plus qu'un vieux puits à la mar- gelle usée par des générations d'écoliers qui contemplaient le re- flet des étoilos où y crachaient pour faire des ronds, nous nous devons avec votre concours, de l'arracher ce terrain aux bâtisseurs et de le dédier à tout jamais aux poètes passés et futurs. Ceux-ci y apprendront que le secret du grand art éternel est dans le dur travail de l'artisan, se souvenant de ces veillées studieuses des doux maîtres de la Pléiade à la chandelle parmi les gros in-folio des Aldes ou de Robert Es tienne.

"Nous ne pouvons aussi oublier, écrit encore Binet, do quel désir et envie ces deux futurs ornemens de la France s'adon- noient à l'estude car Ronsard, qui avoit demeuré en court, accous- tumé à veiller tard, estudioit jusques à deux et trois heures après

m i n u i t e t , s e c o u c h a n t , r e s v e i l l o i t B a ï f , q u i s e l e v o i t o t p r e n o i t

la chandelle et ne laissoit refroidir la place."

Parfois, le dimanche, ils arpentaient les ruelles de la

M o n t a g n e S a i n t e G e n e v i è v e , é p é e a u c o t é , p o i g n a r d à l a c e i n t u r e , c a r i l s é t a i e n t g e n t i l s h o m m e s , b é r e t d o v e l o u r s à l a H e n r i I I , b o r d c o u r t e t p l u m e b l a n c h e e n p a n a c h e a u - d e s s u s d e l ' o r e i l l e , c a p e p é l e r i n e à c o l l e t c a r r é e t m o n t a n t , p o u r p o i n t d e v e l o u r s n o i r , s u r l a c a m i s o l e d e s a t i n c r a m o i s i , ( g i l e t r o u g e d e c e s r o m a n t i q u e s d ' a v a n t l a l e t t r e ) , h a u t s - d e - c h a u s s e s c o u r t s d e v e l o u r s n o i r , b o u f - f a n t a u - d e s s u s d u g e n o u s u r l e b a s d e c h a u s s e d e v e l o u r s o u d e s a - t i n b l a n c , M a i s l a v r a i e d é t e n t e , a i n s i q u ' i l c o n v i e n t à d e j e u n e s h a b i t a n t s d u q u a r t i e r l a t i n , é t a i t p l u s d é b r a i l l é e . L ' é t é , D o r a t o r g a n i s a i t u n e p a r t i e d e c a m p a g n e à A r c u e i l , e t i l s é t a i e n t l à t o u s , c e u x d e l a B r i g a d e ( c a r a i n s i s ' a p p e l a l a p r e m i è r e P l é i a d e ) , R o n s a r d , d u B e l l a y , B a ï f , d ' O r a d o u r , d e l a H a y e , N i c o l a s D e n i s o t , p e i n t r e , m u s i c i e n e t p o è t e , q u i d e l ' a n a g r a m m e d e s o n n o m a v a i t f a i t l e c o m t e d ' A l c i n o i s , P e c c a t e , L a n c e l o t d e C a r l e s , f u t u r é v ê - q u e , D e n y s L a m b i n q u i n o m é r i t a i t p a s c e n o m , e t l e l o u s t i c d e l a b a n d e B e r t r a n d B e r g e r d e M o n t e m b o u f e n C h a r e n t e , j o y e u x c o m p è r e r a b e l a i s i e n , p o è t e p a s t o r a l e t d i t h y r a m b i q u e , " b e d o n i q u e - b o u f f o n i - q u e " , c o m m e l ' a p p e l l e d u B e l l a y . L e f o l a s t r i s s i m e v o y a g e d ' A r c u e i l , R o n s a r d n o u s l ' a l u i - m ê m e c o n t é d a n s l a p i è c e q u i p o r t e c e t i t r e e t q u i e s t u n e m e r v e i l l e d e s c i e n c e r y t h m i q u e , d e m o u v e m e n t e t d ' e s p r i t : ( p . 5 7 - 6 0 )

I o , j ' e n t e n s l a b r i g a d e J ' o y l ' a u b a d e D e n o s c o m p a i n g s o n j o u e z , Q u i p o u r n o u s é v e i l l e r s o n n e n t ,

E t e n t e n n e n t

L e u r s c h a l u m e a u x e n r o u e z .

S u s A b e l , o u v r e l a p o r t e E t q u ' o n p o r t e D e v a n t c e t r o u p p e a u d i v i n ,

(15)
(16)

M a i n t f l a c c o n , m a i n t e g a r g o u i l l e , M a i n t e e n d o u i l l e ,

E s p e r o n à p i q u e r v i n .

D i e u g a r d l a s c a v a n t e t r o p p e , C a l l i o p e

G r a v e a u C i e l v e s t r e r e n o m , B e l l a y , B a ï f e t e n c e r e s

T o i q u i d o r e s

L a F r a n c e e n l ' o r d e t o n n o m . ( ° ) ( ° ) D o r a t

L e l o n g d e s o n d e s s a c r é e s P a r l e s p r é e s ,

O m b r a g é z d e s s a u l e s v e r d z , A l ' e n v i e d e s e a u x j a z a r d e s

T r e p i l l a r d e s ,

V o u s c h a n t e r e z m i l l e v e r s .

I o , c o m m e c e s s a u l a y e s E t c e s h a y e s

S e n t e n t l ' h u m i d e f r a i s c h e u r E t c e s h e r b e s e t c e s p l a i n e s

T o u t e s p l e i n e s

D e r o u s o y a n t e ( ° ) b l a n c h e u r . ( ° ) c o u v e r t e s d e r o s é e

V o y e z U r v o y q u i s ' e s l a n c e S u r l a p a n c e

T o u t v e s t u d a n s l e r u i s s e a u , E t v o y e z c o m m e i l b a r b o u i l l e

E n g r e n o u i l l e

D e s s o u b z l e s v a g u e s d e l ' e a u !

A p r è s c e b a i n d o r i v i è r e o u d e m a r e , o n a r r i v e à A r c u e i l , o n y d î n e p o u r a p a i s e r " l ' a b o y a n t a p p é t i t " , e n s e r e c u e i l l e p o u r e n t e n d r e u n e o d e l a t i n e d e D o r a t , q u e P i e r r e d e N o l h a c a r e t r o u v é e , p u i s o n r e n t r e

D a n s l a v i l l e ,

Demy souléz de plaisir.

Ce sont là des amusements de la troupe gentille, mais en dehors des études, des lectures, des conversations philosophiques, elle a encore de bien plus graves préoccupations; c'est à Coqueret qu'a éclos dans la Brigade, et vraisemblablement en de longs entre- tiens entre ses chefs de file, Joachim du Bellay et Pierre de Ron- sard, le dessin patriotique de rénover la poésie française peur la rendre égale en profondeur, en largeur et en hauteur à la poésie grecque et la doter de tous les genres; odes, tragédies, épopées, élégies, bucoliques, satires, épi gramme s, qu'elle avait pratiqués .

On décida do lancer un manifeste retentissant; ce fut l' aîné, du Bellay, qui se chargea de le rédiger : la Deffence et

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Illustration do la Langue françoyse, On n'a pas besoin d'en parler longuement devant des de Henri Chamard, (1) qui en a fait sa chose. Au manifeste, le plus ancien en date de nos manifestes

littéraires, et dont l'existence s'explique par le fait que, comme l'a bien dit Paul Valéry, pour la première fois, des poètes appa- raissent groupés en une école, consciente de son unité. Du Bellay y avait ajouté des vers lyriques ou odes et des sonnets qui en apparence, mais en apparence seulement, devançaient ceux qu'al- lait donner Ronsard,

Si la date d'avril 1549, qui correspond à la publication de la Deffence est une date historique dans la littérature françai- se, celle de janvier ou février 1550 ne l'est pas moins, car elle correspond à la publication des Quatre premiers Livres des Odes de Pierre do Ronsard Vandômois. Celles-ci constituent proprement une révolution, car c'est, avec elles, la grande poésie lyrique qui fait son entrée dans les lettres françaises, poésie, non plus sou- pir d'amour sensuel ou quintessencié, non plus demande de subsides gentiment troussée, ou satire à fleur de peau, mais puissance et majesté, vol de l'aigle sur les sommets. Dans la pensée de Ronsard il ne s'agit de rien moins que d'égaler Pindare et c'est pourquoi il apporte d'un coup treize odes pindariques . Plus que les odes pindariques du recueil, on goûtera les chansons et odelettes qui s'inspirent d'Horace et des poètes née-latins du XVIe siècle, Second et Pentano; elles ont un charme et une grâce incomparables.

Je voudrais vous lire seulement la dernière pièce intitulée : A sa Muse, et où Ronsard demande à la fille d'Apollon de lui poser sur le front le laurier vert de l'immortalité : (p.100)

Plus dur que fer, j'ai fini mon ouvrage,

Que l'an dispost à demener les pas(°) (°)le temps rapide Ne l'eau rongearde ou des freres (°)la rage, (°)Castor &

L'injuriant, ne ruront point à bas. Pollux.

Quand ce viendra que mon dernier trespas M'asouspira d'un somme dur, à l'heure Sous le tumbeau tout Ronsard n'ira pas Restant de lui la part qui est meilleure.

Tous jours tous jour s, sans que jamais je meure, Je volerai tout vif par l'univers,

Eternizant les champs où je demeure, De mon renom engrossés et couvers,

Pour avoir joint les deux harpours divers (°) (°) Pindare Au dous babil de ma lyre d'ivoire, & Horace.

Se connoissans Vendomois par mes vers.

Sus donque, Muse, emporte au ciel la gloire Que j'ai gaignée annonçant la victoire Dont à bon droit je me voi jouissant Et de ton fils consacre la mémoire Serrant son front d'un laurier verdissant.

1) Voir son cours sur La Doctrine de la Pléiade, Paris, Centre do Documentation universitaire, 1932.

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— 1936 —

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