Regards sur la Postface de Jacques Berque à
satraduction du Coran
A min
Abdulkorim
BAP,BCT
UAI I V E Kg
IT
E D E S TRA S B O LI RG FR4AJCE. Je n'ai pas i'intention ici de
dresserun
panégi"riquede
Jacques Berciue. Sa rnémoire n'en a pas bcsoin. Car, delàit.
le vingtième siècle allra vus,illustrer deux
islamoiogues fi'ançaisde génie: Louis
Massignon dan-q ledoma:ine des scietrces de l'esprit, et
JacquesBerque dans celui
de l'anthropologie sociale et culturelle.Aussi bien il n'est
pas question, portanl nos regards sur sa traductiondu
Coran,de faire l'inventaire pointilleux de ce qui aurait
I'heur de nousplaire... ou le
malheur <Je nous déplaire.Ii a
évité de lui-même, dans sot.t Avant-Propos,qu'on lui
adressât l'adage qui martèle iniassablerrent que toute tradLrctionest
une trahison-
tr"odulloretraditttre:
"...tout nouveau traductcurcloit s'excuser de
l'aventure,mieux de i'attentat? Cet
attentat. poufiant'alléguons à ma ciécharge
que beaucoup C'autresi'auront
peryétré avant inoi"I i 41.Ceite
"entreprise d'orientalisme" selon ses proprcs termes [17], i1 iui aconsacré seize années,
en f, incluant la mise
en æLrvre à conTpter de ianvieri982 et
plusieurs révisionsciont
i1 voulaii crtiire que chacune lnarqr-iait sur la précédenteun
progrès. Danssa lucidité.
néannloins.il reconnaissait ''
Ce recommencelltentauraii dû
se poursuivre incjÉflninl-ni comlllc i'eùt exi-lé ]e scrupule. si cles raisons de bon sens n'avaient lait clol'e. en 1 987. une ettrreprisc encoref,ofi
éloignée cie ses flns idéales"[13].
Et ajoutet' :"
On ne peut q-n eflètaitendre d'un seul
homine l'ensemblede
qualités qu'l1netelle
entreprise requerraitde son
responsable" [13-14]. Pariant
d'Lin '-effia-vatltcunul"
Cesquaiités requises
pour ia
traciuctionriu
Coran.ii
récusait"ia
préterrtiond'y aspirer
soi-même.ou
i'insolence ciel'eriger d'autruii?]. Iraut-ii donc
s'en!'emettrÊ à la constitution d'équipes encore
à';enir
?"
[lbideml.AIiMUIAR&EM
N.I
'AN-
'UIN
2§OI
I
Amin Abdulharim BARBOT
ie
dois souligner ii présent, plus quel'utiiité,
la nécessité de traduire le Messagedivin, formulé
dansune
langue arabe dont la connaissance ne peut être exigéede tout
homme dans les siècles des siècles, alors que ce Message s'adressepar
essence.non
pasà un
peupleparticulier,
à des communautés choisiesen vertu d'un
décretd'en
haut, maisà
chacunen ce
bas monde.L'immensité
de l'entreprise
et les limites individuelies dont l'aureur s'avouaitpleinement conscient. ne pouvaient que laisser
transpal'aître.çà et
là,l'impossibilité de
faire passer d'une langue à l'autre plusqu'ii
apoelle "un peude la vibration de l'original ". A cette
infirmité congénitale qui fi'appe toute traduction. s'a-joute la naturç même du texie;caractérisé pour le Musulman parson 'ieja: - à savoir quc
personne nepeut
I'égaier-. à plus lorte raison un abîme se creuse, infianchissabie! entre lui et ses traditions. Et pourlant. _ie l,aidit, c'est
chose nécessaire sil'on
veut s'acquitter du devoir de transnrission du Message.L'orientaiiste
Berquen'a
pas ressentiune
obligation de cet or«ire, maisen
arabisantconfirmé il
a eu le courage de s'atteler à une tâche plus que toute autre méritoire, et nous ne itouvons, de quelque horizon que nous venions,que lui en savcir gré. Ainsi à
mesyeux. serairii un peu
dérisoire de s,enpreEdre
audétail de la formulation
berquienne. Les érudits de la spécialité pellvent chercherà
mesurerles
écarts etitre cequ'ils
iiront de lui et ce qu,ils croient savoirei
comprendrede la
Parolede
Dieu. Je n'en aini
ie ternps ni I'outrecuidance.En
rer,anche.il faut dire
que Jacques Berque.en
connaisseur du"formidable
apportde
l'exégèse islamique". r,a beaucouppius
loin que son'dialogue'
personnel at,ecle te\ie,
que"sa
confi.ontation ciirecte avec Çetteparole
antiquc et toujo,.rrs nout,elle" libidem]. Cequ'il
affirme en l,occurrence estplus qn'une
réponseà ceux
qui lui reprocheraient d'avoir ici ou là, d,une manièreou d'autre, porlé
afteinteà son
inté_e,rité.Alors
qu'en général. une traductjon fbrcémentimparlàite du
message coraniquen'en
déforme que la iettre.son
at.ialy-.e en proclame l'éternelle modernité que trop d'interpr.étations passéistes nrutiientet
irahisscnt. elles, d;rns son esr:rit. Et ce rappel berquicn nous imporie bien d'avantage, de nos jor"rrs cornme dans le futi_rr.i-'auteur a
efTèctuéun choir partrii
les ouvragesqui
pouvaient le guider dans soniravail. Qu'ii
s'agisse des comrnentaires anciens el modernes(pal
exeir.iple i-abarî, Râzî, Zanrakirsirari. lvi. Tâhir b. Achoûr. M. Jamâl al-dîn al-Qâsîmî, Say,;ridQoutb. .),
oir des traductions françaises de Régis Blachère,Si
FIar-nza Ilcubakeur.ou celle
nhrs poétiquede
Jean Grosjeanqu,il
avait prélacée. selon iui. sa''
traduciion diffôre cles pr'écédentes moins par des ciétailst0
AI.-MUTABéIMN"l
'AIT-
IUIN
2§OTRegards sur la Postfâcc de tacques Bcrque à §a traduction du €oran
dals le
rendu quepar
l'accent généralqu'elie
essaie de faire ressortir en seréclamant.
il estvrai.d'uneprisetlepositionexégétique"[16] Ii
ador.rcpr-risépour ce f;rire
<ians des donnttcs extérjeures au texie. qu'elles liissent ou noil inspiréesde lui.
Et ce faisanr.il
se présente (conimeil
dit)"
au calrcTbur de 1âlinguistique. cle
l'histr:ire
orientale et des anal\ ses conceptuelies, pour ne riendire d,un
recours;\
I'anthropologie cies religions" [17]. En ceiaii
esttldè1e àune rnélhûdc
scienli{lqueoùil aexcelléenlietous.celiequi
amarquéàjarnaisses oeuvres et son enseignement ; la pluridisciplinarité
' Ses
"arguments"iie
rnultipies niveaux sont réLlniset
classés dans Pcsfacedontj'ai
fait mon propos en cette circonstance. Si la traduction §'étendsur
prèsde
septcent
pages.la
Postlace intitulée«
En leiisant le Coran >> en comporte Lirèsde
quatre I'ingt, soit plus de dix pour cent. On peut saisir par'-iàI'imponance que i'auteur
attachaità
cetteréflexion.
Certes. les notes qrri accompagnentsa
refbrmulation française du texte arabe originai en eclnsiituelltdejà un
premier comlllentaire marginai.ce qui ne veut
pasdire
d'intérêt secondaire.Mais les
notesne
sontiamais qu'un
complément morcelé. un éclairageplus ou
rnoins focalisé, et parfois une justification ponctuelle. Aussil'auteur
a-t-il voiilu élaborer un discouls de synthèse. à tous égards personnels.sur la
fornreet le ibnd du coran. c'est
cela queje
retiens de sûn ou\ilage ar"riourd'liuiil divise
saréllerion en cinq
parliesdont
lesiitres disent
bien lacontenrl: l.Un
assetnblaee.f.
Un langage.-f ijn
sens.4. Projecticns.i.
Vued'ensembic.
Il part
de la Vulgatecfficielle
que nous connaissons, établie sous Ie 3'Caiiie
'Outhrnàn,le llouçhaJ. li
s'interrogesur l'ordre
de classement des Sout:ates,sur leui
arfengenlent interne.sur
des 'discordances' entre I'ordre chronologiquede ia
RÉvélation et l'ord:'e insiauré pal la recension.Il
signaie des régularités(ct. i'impoltance du ri'thme
décimai: 7i8 et 726
bas). des symén'ies.dss
«epicentres aiiiitreéticluesl
itejs
qiie ic rrcml-rre ,je 1et1-ies aur./erset
55
cjela
scrlraleX\rlli r;i
itiL:h,f1ii
15-4,].Et
r1 conclutà 'rtl
ordrecoranique delibére.
Aii
passage.tl
r-eilse "l'e:ragératioil de ceu:l qujvtnt,
potlien renilre compte. jusqu'à ia
spéculaiioti nuil.iéralet:t
iittéi'ale.Que
leur approche fasse tnaintenant appelà i'ordinateur n'en
bannit pasi'arbitraiie"
[7if:
bas].AI-MUTARGIM
N"l IAil-
FTIIN COûI ttAmin Abdulkafim BARBOT
Ses cbservalions
sur la pluraiité
des lerr.nestraités ie
conduisent àamorcer des axes
de
recherche.Ainsi
[720- 1],
en étudiantla
sti'Licture des grûupes(familiaux. tiibaux ou
comlnunautaires), puis l'histoire de MoTse "à épisodes" (si l'on veut dire). il
propose de contparer ies occurrences successivesdu
texte collecté et l'ordre de Ia Révélation. Sur ces poinis corrme d'autres.il
me semble qu'au vu de sa bibliographie.il
n'a pas exploité le fichier mécanographique Ces Pères Ailard et Hours, lv{ay Elzière et J.-Cl. Gardin, paruichez
lVloutcn en i963 précisément sous 1'égide de I'EPI{E et qui effectuair unebien
ütrle ,4naly5s Cctncepîueliedu Coruti stî
ccrîes perfarées. Est-ce salongue
et
patiente reiecture du texte qui l'en a dispensé ? Est-ce sa méfiance àl'égard des outjls
technologiques contemporains.ou
autre chose que ses familiers voudront peut-être expliciter... ?ll
s'interroge .justemenlsur la
répétition cies concepts.et jly
\,oir.plLrtôt
qu'un
effet rhétoriclue, celui des regroupementsde fragcn.rents opéréspaiIa recension et du
Çaractère "étoiié" (./vlounajlant) de ia Ré.rélarion.llais
un peuplus haut, il avait
évoqué"une
progression apparemment didactique,,[72i).
Ce sont tous là des facteurs concourauts. et nû]l contradictoires...A ia
récurrence thématiqueet
conceptuelle.il
oppose les absencesftéquente Ce transition d'un
thèmeà
1'aun'e.Et plutôr
que cl'en décluirehâtivement un
manque de cohésion,il
en cherche la règle sous ies apparencesde la
surface. Aprèsen avoir
relevé des antécédents dansla
poésie anti- islarniqueet
parléde
"rnunit-lcence divine".il
'r,oit
une progression du senssur
plusieurs legistres parailèles. âctivés tour'à tour.Il
parlera plus loin. clans Iesttie iiui
iui estpropre.de''ciy,namiquesérasees"f729].Ceciilefaitpenseren rnusique vccale à
1apoiy'phonie... Ii
cionnetrois
e.r.emplesde ce
t_vpe"structures
en
entrelacs" 1724-5] où les idées avancenr en fait simultanément.F-n somme.
oir-ii
''tout ce passe comrne si la sisnihcation du rout était attenduede la
moindre des parcelies. et réciproquerrreni,[...]
C'es1 que. pour un texre,parler
de tout, ou peu s'en faut, en tcut lieu, c'est ne par.ler que c.i'une chose...,'[726]. Et en ce
cas.ia
ma-thématique pai'lerait.plutôt
que de récurrence. derécursiviié.
c'est-à-dire d'un processus. non pas de redondance. mais cie retoLrr régulier'. ljc répétitiori i:onirôiée .Noii:e auterti appoiie
à uii
reirouveiienrenide
l'erégèse iie.s foi.rnes d'erpression.d'erposiiicn
(ie ia1;ân') er i'arlicr-rlatir: n (."etafcît\.Ii
e n découvrei'anicrcr.
chezies
cûirmentaleurs rdcentsteis
qrre iJen Ar_:hoûr"ou
Savl,idt2
AI,.hTIITÂ*üIfrtN"t
TAN.IUIN
2OOIRe{ards sur la postface de lacques Be:que à sa tradustion du Coran
Qoutb.
Mais il la juge
encore trop subjeÇtive. I1 derrande donc "unc enal)se Iogique moderue". bien que sa t:laire vovance prévoie déjà "que I'aoport d'unetelie
méthode consisterait sans doute,moins
en ce qu'elle apprélienderait du texte que dansce
qLr'elle en lerait ressortir comme échappant à ses prises : le cceur insaisissable dughq,b"l723l.
Et là Jacques Berque manifeste à quei pcintsoll
parcours moderne- et
même moclerniste- ne perC jamais de l'ue l'espritqui
animcl'lslatn
depuisl'ultime
Rer'Éiation: Ccnnailre estun devoirque Dieu nous aicieà
accomplir, Inais dansla
reconnaissancedu
Créateur cie toutes choses; la
transcendancepâr
définition échappe à toute connaissance de type scientifique.Eii
conclusionde ce premier
faisceau de réflexions, Jacques Berque ouvreà
sa manière-
et à sou habitude*
une problénratique novatrice. Mettantau jour dans le
Corar.run r,a-et-vient constant entre Ces
"positions ibndamentalesquant
à Dieu, quant à la naTure ei quant à l'homme"
et. d'autrepar1. ''ies
incidencesqtii les
inscrivent dansle
vécu des sociétéset
despersonnes",
il voit le texte
coranique"unir
dans ses Çontenus stiucture et conioncture,et
coinpL)ser Ies éiémentsqui.
respectivelnent,ell
relèvent à la faç,on.iont un tissu
cornpose ia chaîne et la traine",Il
met en application cetle métaphore opératoire,et sa
démonstration détailiée rnériterait d'être lue ici in extenso,en ce que
ie temps ne nous permet pas [730-1]. Cet enchaînement dedeux
séries(iignes
conjoncturelles et contiiruités structurelles) cor,siitue pouriui iies
"coordonnées coraniques","l'une
ressctlissanià
l'expression ciel'absoiu, l'autre à celle ile ia circonstance". La
racine?QR'dont
le ternreQur'ân est le plus noble dérivé,
i1en
signaieI'acception
''ra-ssetnbler.coilecter" qui fut
défenduepar l'éniir Abdei-Kader.
Cettenotation
pius qu'inréressaniene
saurait cependant erciur'eles
raleursacimjses: "proférer.folmuier, ei lire".
N4aiselle
ei-rtraînede
rna pan plusieut's ol.rservations. Letelrps
nous lnanquepour
traiter notammeni de 1a po11'sérnie inhérente au lviot sémitique, et plus techniquen'rent ùncore. à 1a struciuration en réseau du lexique.Je
me
contenteraide relier la
poir sérnieaur
"dy,nan.riques étagées" du texte cora.nique dc;rrt .1'ai parle en sùn i1om. A la poi.'phonie du discoui"s du discourscr:respcnd. au
nil.eau des niots de la lansr,re. 1a plLrralité organisée des valeurs.Ce
réseaitrie
siglificaric)n.jtantôl alileure en
surface. et tantôt se dérobe . ii parcourtle terir'
ci'ha|nroriiqr.ics lnf'lnie-. +ri échtr ui!'i quesliuns cLja sc ilosenlies hcnrires d'âge en àge..
i-or-rlcrirs dlsn.;nible. tolijours neirve en sûnlme.celie
Parolc''olfre
cies enseigneiireits iairiblcs pnLll tù,.:s i.'s icnrn., t'1 ir()rir tou:iles lieux.
C-est, ccroilairerrrent.s'aitranchir ijes
iisières mÉ<iir:r:r'es.lr.re tr,-')pAI.-MUTÀ§EIM
N"I
IAI!'-IUIN
2§OI IJÀrnin Abdulharim BAREOT
d'exégètcs imposent
à
ieurs expiicatiollset
qui fait soLlvent recuicr devant ia hardiesse de tel ou tei novateur" [786].I-es
deux noms de cette Parole ne sont-ils pas à la fois Kitab"le
Livre,I'Fcriture" et
Qur'rin "
Récitation, Psalmodie, Lecture" ? L'oralité domine ici pourtant.Aussi loin
que nous rernontions dans les temps anciens où le Verbes'est fait écrit, dans les temples, les
synagogues,les
couvents mêiues d'Occident,la
lecturen'a jamais
étéun
simple erercice dcs yeux. mais une mise en jeu de la voix ct clu soufre. une rythm ioue sonore qu i allait que lquefoisjusqu'à rnobiliser
le corps... Mais le Coran justement dépasse tout autant cette g1'n.rnastiqLre ciel'orajson que les
L;rutales fiénésies de l'inspiration poétique.Jacques
Berque
ctuia traduit
aussiies
odes classiques de.iâhili-v. ya. met encontraste "la sirnplicité. I'humiiite,
oserons-nousdire. du
vocabulaire coraniqucet
l'orgueilleuse recherche cies mots rares par les poètes.[...] A
ialimite.
r-rn orgireilieux jargon s'empare de l'oreille sans solliciter I'inteliigence.Chez
tout
lecteurdu
Coran,au
contraire1...]
I'effetmajeur
mais non pasunique -
appartient scuvent, même indépendammetit des sonorités.à
dessuggestions obliques, connotations et nuances. De là un cumul spécifique entre
I'impression
de clarté, presque de familiar.ité, qu'on éprouve cl,entrée de jeu, et ceile d'altitudes à :nultiples niveaur" [73_5 j.Je
passeraisur les
remarques techniquesde syntaxe, sur
les"singularités grammaticales"
que
notre auteur relève après beaucoup ci'autres.Il se
montre là-dessusplus
ouvertqu'un
Nôldeke, commeie
rnontre son traitementde
l'iltt1'at"qui iàit
varier. dans le même énoncé, la désignatioir clesaclants". 1714].
I-cin de parler
d'incohérence ou de "dramatisation retenue".souvent sous
ibrme de
dialogues cc;ntra-siésoir
tous prennent ia parole. avecleur
style ei
ieui' ps1,'chologie. niettantainsi
l'enseignerxentà
transrnettre d'autant pius en relrct-, et donc garantissant envers et contrç tout son efficacité.l-'exlre,ordinai.e
'italité
de la forrauiation coranique se trarluit par une dori-iinance rjes lorrnes'eri-.ales, Pour Jacques Berquee, c'est i'expression d'une
"éner-gie
lauagière [..] (quil
siedà un iextrcùioutressol'titdel'rtuvrecle Dieu.
suscitatricede cejie iie i'hornne"
f7.tr-51. Et en effet, si on Ia compere avec"une relative irrodéraiisr
Cansl'eniploi de i'adjectif,
[ibidem]. ce quin'étart
pasle
cas dairsi;:
Jâhili;;.r,a, on ne peiit que souliener la pr.éenance 11uvel'be. donc
de i':lcticn sur ia
çLiaiii'ication.Notre
auteur lait zi ce propos ciepertineutes analvses
du
pirssil cia-i.isie
Coran [7zi_i-6]. puis dLi donr verbai oumar;riar "ncrn d'aciion" rjcnt il
cébusquei:i
prrésence so'rrsiles
ioftres14 AL-mUTÂRtMt
H'r
'Àil- firIN
2§o1Re{ards ssr la postface de lacques Berque à sa traduction du C-oran
inattendues. cCïnme
ies
titres de cefiaines souralcs : dl-l{to'saiât, al-Dhôriytit,, : ,, .
ttl- .itl il Ol . . . .l l4 t -6 i.
Et il se
fàitintuitifpius qu'il n'y
paraÎt à lapremière lecture, quand ilavoue "la
sensation d'atteindre autuf
de la iangue.i...] l,'idés
se renibrced'un primat
ciu schème verbal,donc
de la racine trilitère ; autallt parler d'unrenvoi à I'originel [...] Un tel
langage cumule1...1
le radicalisme, au senspropre du tenne, c'est-à-dire le retour aux racines, avec
i'expansion sémantique" [?,18]. De fàit cette dominaiion écrasante du thoulâthî "le triiittère"svr le roubâ'i "le
quadrilittère" * II85racinesveibalescontre I5-posede
nombreuses queslions
au
linguiste.La
propoftiort û'e§tpas
ceile de i'alabe classiquede
i'époclue(plus de
400C quadrilittères reclassés dans ies grands dictionnaires). i,a réBonse traCitionnelle. en Orient comtre en CcciCent. est quele quedrilittere n'esï
qu'Lrnjer-i verbai.
une e.xpansion chactiqiie.à
fins seulerrient erpressives. du triiittère criginei par insertron de conscnr'es. Et cctte antiqueprofusion se
serait vu ccrtcjamnée sans retoui par le peu de cas qu'en afàit ie Coran.
fiette
idée- plus
Théologique qu'objectivement liiigLiistique-
étaitrécemment
encore
expcsée avec conviction par l'éioquent protèsseur égyptien Abdeççaboùr Châhîn,lors d'une
confërence de Ramadan, au Paiais R.o1ai deRabat.
Mes tlavaux personnels tbrmalisés depuis dix ans sur l'orsanisation Culexique arabe
permeftentaujourd'hui de démontrçr. en eilet. ie
priniat génétiqueiiu trilittère en
sémitique, faceaux
tentatives d'erplication cie ceslangues par l'expansion cie deur consonnes originelles. \1ais
cette démonsiriltion de I'ancienneté nécessaire et fonnellement suffisante du trilinèrelait
appeià
des processustrès
différentsdes
traditions encours. Ccmnteje regrene à cei égard l'absence de Jacques Berque et de notre maître à tous LoLiis Massrgnorr. saclrarrtqrie
cenairrs passages. cetlaitiescxpressions
sou: leur:plurnes donnent
à penser qu'ils
ont eu, utr,i<;ur ou i'ar.rtre,f
irnage fugitiv:e dusoi originel..
Quantà la rareté
exceptionnelie, surprenante. du quadrilittèreCans ie Coran. elie rnérite réilexion et
s'encacire. r:;.re senble-t-il.st1 listiquement dans
la
i-upir,ri'eiiu
Message avec 1'erpi:cssivilé sar':s fr';in du iangage antérieurà Ia
Revélation. Sans dcrttte aussi parceirir'il
aurait oétonncaver l'esprit
modérateur et la finaiité éthique de la de:'niàre Prophetie.';lliLlhou a'ltnn .. "La
Paroie ccraniqueà
un sens, etil
est clair (lvloubîrr )sr:lon le Corarrli,ii-rrême. llai.is sa
-3èrrepartie,
Jacques tserque conlmellte des nctionsAI-*tUTARgItll i{"r
rAN- rUIAt 2§olt5
Amin Abdulftarim BAtrBOT
tbndarr.rentales telies que le glra-r,ô'"Le rnystère divin, l'inconnaissable" ; clîn"la
relision ", irais aussi ''ia
soumission.i'allégeance',; 'ikhlâç ',la
natureprernière dans
sa
pureté. ia religion foncière. i'observance,,.. 'ih.çân',le bien_laire
le bei-agir". erc..[751].A
partir de ces obser.,.aricns. notre auteur.initie une exégèserésolunrent
modernistell
désigneà lravers ies
enrpiois c)e haqil"vérité
nécessaire".
rnaissu(out à
rravers d'innombrables versets. l'appel coilstantde Dieu à
la raison humaine.llai ii
a la prr.iilencede
rappeler que lafoi
l'emporte strr la rationalité. en tant qu'"évideirce pr.enrière, qui conditionnetoute
logiqued'adhésicn" [7-s9]. Et cie
rappeler clue"la
normativité esi une aritre des suggestions au Haqq" libideml. Les obligations rituelles er sociales sevoient ainsi "éclairé(es) par la raison et rnobilisé(es) par la f.oi,' [762].
D'autres
plus
qr,raiifids qLre r.roi parleront de cette norniatiyité et rje laplace
du.juridique, des ahkàm dans le texte révélé. Je rap:pellerai seulement ces lignes;
"1,'originalité du coran paraît tranchée, clans la mesure oùil
s'écar.te leplus
souvenide I'inventaire de
prescriptions, pour ressoftir <lavantage à une édification propagatrice de modèles"
[765]. Et ceci I'oppc.se, bien entenciu. aur codifications byzantines depuis deux siècles,civiles ou
religieuses. que les Arabesde
l'dnoquene
pouvaient ignorer. Et "racques Berque met err exergue pour le bien cie tcus, ies "dvnarniques présentes del'idée
cl,e shut,î'a', [764-6].De
sa4" panie, et
iaute de temps,.je retiendrai quelques points. Une applicationdu "carre
sérniotique" de creimas aur trois sroLipes d,adversairesdu
Prophèteiàce à ia
communauté des vraiscro'ants
iles ntotL'nrinîn)1,7,-3].Des
pages éciairantes sur- i'ernbcitement duterre
'en abîme'' dans les purrog.,du
Coranoir Dieu
commande ar.i prophète rle parler deDieu...
[775] ; Et surdiverses circulai'ités du terre.
sans doure prLrpresà
.,touteeipreision
ciel'absolLr". 11716l. .le pense
pollr rra pan aur
présentationsen miroir
cle la calligrapnie arabo-islamirlue...Jacques Berquevoit
dansla
croyance ,,avanttout un
rappei (clhikr),donc
Lrnretour.[...]. Méditer
sur les précédenis (del'histoire
des honrrr,es), ranirner en soi-mênre ces ieçr.rns, c,est aussi.;iviiler
IeRappel. i" I Le
rexte inauguralde i'lsiairi
s'assignede
quelque fàçon àl'étemel retoLir, Mais ce
mcuvement.ii l'afiecte ri'un
seristeiminal [.
.]hislorique autant qu'eschatolo-uique"
û
,17j.li
a.joutera err conclusion.,le i,raidhikr
est ceir,ri qui reto,.lrne le sr:r-i-"enir en a..enir'79-rl
Èt cette rei,ir.iilcaticrn.11]es propres analvses étabiissent sa !!efi;i.!-nc.. en stri-ictLire prolonile Cu ternie
rihikr
et ce la lilcine ? DhKR. sous la tbrmec:s
cieLix séqutrrces constitutives : -DliK-
"attisei' 1ianinrer
le Ièui:t -Ki(-
rr--rcur à la charqe:répétitirrn réslriièreI6
AL-&tUïÂnGilEN'l
,âN-,UIN
rGolne*ards sur Ia postface dc l§cques Berque à s8 traduction du Coran
(en
quelque sorte prograülmée)". Sans oublier son rappoil à rappofià-DhR-
"répandre'"
(aux
senspropre
et figuré, tel que "répa,ndre les ic.ruanges" qui me paraîtactivé
dans des versets tels queyri a.y,1:ouhâ llodhîna ânanottit clhkctztrrtûItdha
clhikran kathîran,à coté de l'instigation divine à la prière
qui en estI'interprétation 1a plus
répandue).Je
signale que certains islamolcgues -i"pensent
une vaieur de "fecondation" en
se basantsur le
terme dialectalpanarabe
totlhkîr ou "pollinisation artificielle des fleurs du palmier tèmelle''
I
terr.ire absent des grands dictionnaires classiques {Lis,in
al-'arub,
Qûmoûs al- mouhît. etc.).et
que l'arabisantDozy avait trouvé dans les récits de voyageurs ôcc ide ntau;t.Ui:re dernière hl,pothèse berquienne peut
êire
signalée. Se réÏèrant à Saussure.le père
firndateur de la linguistique moderne,il
applique sa lameuse dicholornie langue-parole: "Ne
peui-ondire
que dans le Coran, la parole est arabe[..] tandisque la
iangue.elle,
serait proprement Çoranique [..] pardes caracières éminents (puisque) la langue s'oppose atl mcuvant, au Çirconstanciel.au
contingentde la parole"[780].
Seiorr le docteur hanbalite ibn Taimiya, cedont la
Souna soutient la préétemité (face aux inou'tazilites qui argumentaienl sur la créatioli du Coran). c'esl "l'essence et le genre de langage coranique. nonla
particularité des sonsen
lesquelsii
seprcière" f78ii
Etnotreauteurelt déduit"qu'aux yeux
du crol'ant arabe, le Coran s'erprinle tout ensenble dans son idion:e hr-rmain. ei dansune
langue d'électiondii'lne"
fibidem]Poirr conciure
à
présent.je ne
cache pas que mes choix d'extraris et mes colnmentaires sont largenrent sulrjectil's et bearicoup trop rapides. Puissent-ils inciter
beailcoup C'enire vous à iire et relire cette Postfàce. Jacques Bercluenous a Iégué une peirsée
courageuseet
1éccnde.Elle
acconlpagne inCissoluble;uent sa lraCiictioude la
Parole coranique.Eile
l'éclaire. molns dansie l]iot à
mcq le détaii que dans ce qr-ri compte : i'esprit. Ei ses dernières iignes interpeile;:t quanclii
demrnde"L'effcrt
d'adapiation à 1'avenir qui ieur incoml--eri toutes. ies religions
abrahatniquessont-elies en
passe Liel'accornpiii'? De
<luelie iaçon ?A
queiies c,-rnditicns ?A
quelprir
?iln c.'qui
Çoilcernei'lsiam. les
pauesçui
préeèdsnt pi,lient â croire qu'i1 rest.e eilcore,devant ccs
1âches.en iieçà'jes
po-rsiLrilitesà
1ui oul,ertesllar
sol! textef'ondateur." [193]
AI.-HUTÀRÈIM H'T TAH- IUITq *6Û1 17