• Aucun résultat trouvé

Regards sur la Postface de Jacques BERQUE à sa traduction du Coran

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Regards sur la Postface de Jacques BERQUE à sa traduction du Coran"

Copied!
9
0
0

Texte intégral

(1)

Regards sur la Postface de Jacques Berque à

sa

traduction du Coran

A min

Abdulkorim

BAP,B

CT

UAI I V E Kg

IT

E D E S TRA S B O LI RG FR4AJCE

. Je n'ai pas i'intention ici de

dresser

un

panégi"rique

de

Jacques Berciue. Sa rnémoire n'en a pas bcsoin. Car, de

làit.

le vingtième siècle allra vu

s,illustrer deux

islamoiogues fi'ançais

de génie: Louis

Massignon dan-q le

doma:ine des scietrces de l'esprit, et

Jacques

Berque dans celui

de l'anthropologie sociale et culturelle.

Aussi bien il n'est

pas question, portanl nos regards sur sa traduction

du

Coran,

de faire l'inventaire pointilleux de ce qui aurait

I'heur de nous

plaire... ou le

malheur <Je nous déplaire.

Ii a

évité de lui-même, dans sot.t Avant-Propos,

qu'on lui

adressât l'adage qui martèle iniassablerrent que toute tradLrction

est

une trahison

-

tr"odullore

traditttre:

"...tout nouveau traductcur

cloit s'excuser de

l'aventure,

mieux de i'attentat? Cet

attentat. poufiant'

alléguons à ma ciécharge

que beaucoup C'autres

i'auront

peryétré avant inoi"I i 41.

Ceite

"entreprise d'orientalisme" selon ses proprcs termes [17], i1 iui a

consacré seize années,

en f, incluant la mise

en æLrvre à conTpter de ianvier

i982 et

plusieurs révisions

ciont

i1 voulaii crtiire que chacune lnarqr-iait sur la précédente

un

progrès. Dans

sa lucidité.

néannloins.

il reconnaissait ''

Ce recommencelltent

auraii dû

se poursuivre incjÉflninl-ni comlllc i'eùt exi-lé ]e scrupule. si cles raisons de bon sens n'avaient lait clol'e. en 1 987. une ettrreprisc encore

f,ofi

éloignée cie ses flns idéales

"[13].

Et ajoutet' :

"

On ne peut q-n eflèt

aitendre d'un seul

homine l'ensemble

de

qualités qu'l1ne

telle

entreprise requerrait

de son

responsable" [13-14

]. Pariant

d'Lin '-effia-vatlt

cunul"

Ces

quaiités requises

pour ia

traciuction

riu

Coran.

ii

récusait

"ia

préterrtion

d'y aspirer

soi-même.

ou

i'insolence cie

l'eriger d'autruii?]. Iraut-ii donc

s'en

!'emettrÊ à la constitution d'équipes encore

à';enir

?

"

[lbideml.

AIiMUIAR&EM

N.I

'AN-

'UIN

2§OI

I

(2)

Amin Abdulharim BARBOT

ie

dois souligner ii présent, plus que

l'utiiité,

la nécessité de traduire le Message

divin, formulé

dans

une

langue arabe dont la connaissance ne peut être exigée

de tout

homme dans les siècles des siècles, alors que ce Message s'adresse

par

essence.

non

pas

à un

peuple

particulier,

à des communautés choisies

en vertu d'un

décret

d'en

haut, mais

à

chacun

en ce

bas monde.

L'immensité

de l'entreprise

et les limites individuelies dont l'aureur s'avouait

pleinement conscient. ne pouvaient que laisser

transpal'aître.

çà et

là,

l'impossibilité de

faire passer d'une langue à l'autre plus

qu'ii

apoelle "un peu

de la vibration de l'original ". A cette

infirmité congénitale qui fi'appe toute traduction. s'a-joute la naturç même du texie;caractérisé pour le Musulman par

son 'ieja: - à savoir quc

personne ne

peut

I'égaier-. à plus lorte raison un abîme se creuse, infianchissabie! entre lui et ses traditions. Et pourlant. _ie l,ai

dit, c'est

chose nécessaire si

l'on

veut s'acquitter du devoir de transnrission du Message.

L'orientaiiste

Berque

n'a

pas ressenti

une

obligation de cet or«ire, mais

en

arabisant

confirmé il

a eu le courage de s'atteler à une tâche plus que toute autre méritoire, et nous ne itouvons, de quelque horizon que nous venions,

que lui en savcir gré. Ainsi à

mes

yeux. serairii un peu

dérisoire de s,en

preEdre

au

détail de la formulation

berquienne. Les érudits de la spécialité pellvent chercher

à

mesurer

les

écarts etitre ce

qu'ils

iiront de lui et ce qu,ils croient savoir

ei

comprendre

de la

Parole

de

Dieu. Je n'en ai

ni

ie ternps ni I'outrecuidance.

En

rer,anche.

il faut dire

que Jacques Berque.

en

connaisseur du

"formidable

apport

de

l'exégèse islamique". r,a beaucoup

pius

loin que son

'dialogue'

personnel at,ec

le te\ie,

que

"sa

confi.ontation ciirecte avec Çette

parole

antiquc et toujo,.rrs nout,elle" libidem]. Ce

qu'il

affirme en l,occurrence est

plus qn'une

réponse

à ceux

qui lui reprocheraient d'avoir ici ou là, d,une manière

ou d'autre, porlé

afteinte

à son

inté_e,rité.

Alors

qu'en général. une traductjon fbrcément

imparlàite du

message coranique

n'en

déforme que la iettre.

son

at.ialy-.e en proclame l'éternelle modernité que trop d'interpr.étations passéistes nrutiient

et

irahisscnt. elles, d;rns son esr:rit. Et ce rappel berquicn nous imporie bien d'avantage, de nos jor"rrs cornme dans le futi_rr.

i-'auteur a

efTèctué

un choir partrii

les ouvrages

qui

pouvaient le guider dans son

iravail. Qu'ii

s'agisse des comrnentaires anciens el modernes

(pal

exeir.iple i-abarî, Râzî, Zanrakirsirari. lvi. Tâhir b. Achoûr. M. Jamâl al-dîn al-Qâsîmî, Say,;rid

Qoutb. .),

oir des traductions françaises de Régis Blachère,

Si

FIar-nza Ilcubakeur.

ou celle

nhrs poétique

de

Jean Grosjean

qu,il

avait prélacée. selon iui. sa

''

traduciion diffôre cles pr'écédentes moins par des ciétails

t0

AI.-MUTABéIM

N"l

'AIT-

IUIN

2§OT

(3)

Regards sur la Postfâcc de tacques Bcrque à §a traduction du €oran

dals le

rendu que

par

l'accent général

qu'elie

essaie de faire ressortir en se

réclamant.

il estvrai.d'uneprisetlepositionexégétique"[16] Ii

ador.rcpr-risé

pour ce f;rire

<ians des donnttcs extérjeures au texie. qu'elles liissent ou noil inspirées

de lui.

Et ce faisanr.

il

se présente (conime

il

dit)

"

au calrcTbur de

linguistique. cle

l'histr:ire

orientale et des anal\ ses conceptuelies, pour ne rien

dire d,un

recours

;\

I'anthropologie cies religions" [17]. En ceia

ii

esttldè1e à

une rnélhûdc

scienli{lqueoùil aexcelléenlietous.celiequi

amarquéàjarnais

ses oeuvres et son enseignement ; la pluridisciplinarité

' Ses

"arguments"

iie

rnultipies niveaux sont réLlnis

et

classés dans Pcsface

dontj'ai

fait mon propos en cette circonstance. Si la traduction §'étend

sur

près

de

sept

cent

pages.

la

Postlace intitulée

«

En leiisant le Coran >> en comporte Lirès

de

quatre I'ingt, soit plus de dix pour cent. On peut saisir par'-ià

I'imponance que i'auteur

attachait

à

cette

réflexion.

Certes. les notes qrri accompagnent

sa

refbrmulation française du texte arabe originai en eclnsiituellt

dejà un

premier comlllentaire marginai.

ce qui ne veut

pas

dire

d'intérêt secondaire.

Mais les

notes

ne

sont

iamais qu'un

complément morcelé. un éclairage

plus ou

rnoins focalisé, et parfois une justification ponctuelle. Aussi

l'auteur

a-t-il voiilu élaborer un discouls de synthèse. à tous égards personnels.

sur la

fornre

et le ibnd du coran. c'est

cela que

je

retiens de sûn ou\ilage ar"riourd'liui

il divise

sa

réllerion en cinq

parlies

dont

les

iitres disent

bien la

contenrl: l.Un

assetnblaee.

f.

Un langage.

-f ijn

sens.4. Projecticns.

i.

Vue

d'ensembic.

Il part

de la Vulgate

cfficielle

que nous connaissons, établie sous Ie 3'

Caiiie

'Outhrnàn,

le llouçhaJ. li

s'interroge

sur l'ordre

de classement des Sout:ates,

sur leui

arfengenlent interne.

sur

des 'discordances' entre I'ordre chronologique

de ia

RÉvélation et l'ord:'e insiauré pal la recension.

Il

signaie des régularités

(ct. i'impoltance du ri'thme

décimai

: 7i8 et 726

bas). des symén'ies.

dss

«epicentres aiiiitreéticlues

l

ite

js

qiie ic rrcml-rre ,je 1et1-ies au

r./erset

55

cje

la

scrlrale

X\rlli r;i

itiL:h,f1

ii

15-4,].

Et

r1 conclut

à 'rtl

ordre

coranique delibére.

Aii

passage.

tl

r-eilse "l'e:ragératioil de ceu:l quj

vtnt,

potli

en renilre compte. jusqu'à ia

spéculaiioti nuil.iérale

t:t

iittéi'ale.

Que

leur approche fasse tnaintenant appel

à i'ordinateur n'en

bannit pas

i'arbitraiie"

[7if:

bas].

AI-MUTARGIM

N"l IAil-

FTIIN COûI tt

(4)

Amin Abdulkafim BARBOT

Ses cbservalions

sur la pluraiité

des lerr.nes

traités ie

conduisent à

amorcer des axes

de

recherche.

Ainsi

[720- 1

],

en étudiant

la

sti'Licture des grûupes

(familiaux. tiibaux ou

comlnunautaires), puis l'histoire de MoTse "à épisodes

" (si l'on veut dire). il

propose de contparer ies occurrences successives

du

texte collecté et l'ordre de Ia Révélation. Sur ces poinis corrme d'autres.

il

me semble qu'au vu de sa bibliographie.

il

n'a pas exploité le fichier mécanographique Ces Pères Ailard et Hours, lv{ay Elzière et J.-Cl. Gardin, parui

chez

lVloutcn en i963 précisément sous 1'égide de I'EPI{E et qui effectuair une

bien

ütrle ,4naly5s Cctncepîuelie

du Coruti stî

ccrîes perfarées. Est-ce sa

longue

et

patiente reiecture du texte qui l'en a dispensé ? Est-ce sa méfiance à

l'égard des outjls

technologiques contemporains.

ou

autre chose que ses familiers voudront peut-être expliciter... ?

ll

s'interroge .justemenl

sur la

répétition cies concepts.

et jly

\,oir.

plLrtôt

qu'un

effet rhétoriclue, celui des regroupementsde fragcn.rents opéréspai

Ia recension et du

Çaractère "étoiié" (./vlounajlant) de ia Ré.rélarion.

llais

un peu

plus haut, il avait

évoqué

"une

progression apparemment didactique,,

[72i).

Ce sont tous là des facteurs concourauts. et nû]l contradictoires...

A ia

récurrence thématique

et

conceptuelle.

il

oppose les absences

ftéquente Ce transition d'un

thème

à

1'aun'e.

Et plutôr

que cl'en décluire

hâtivement un

manque de cohésion,

il

en cherche la règle sous ies apparences

de la

surface. Après

en avoir

relevé des antécédents dans

la

poésie anti- islarnique

et

parlé

de

"rnunit-lcence divine".

il

'r,oit

une progression du sens

sur

plusieurs legistres parailèles. âctivés tour'à tour.

Il

parlera plus loin. clans Ie

sttie iiui

iui estpropre.de''ciy,namiquesérasees"f729].Ceci

ilefaitpenseren rnusique vccale à

1a

poiy'phonie... Ii

cionne

trois

e.r.emples

de ce

t_vpe

"structures

en

entrelacs" 1724-5] où les idées avancenr en fait simultanément.

F-n somme.

oir-ii

''tout ce passe comrne si la sisnihcation du rout était attendue

de la

moindre des parcelies. et réciproquerrreni,

[...]

C'es1 que. pour un texre,

parler

de tout, ou peu s'en faut, en tcut lieu, c'est ne par.ler que c.i'une chose...,'

[726]. Et en ce

cas.

ia

ma-thématique pai'lerait.

plutôt

que de récurrence. de

récursiviié.

c'est-à-dire d'un processus. non pas de redondance. mais cie retoLrr régulier'. ljc répétitiori i:onirôiée .

Noii:e auterti appoiie

à uii

reirouveiienreni

de

l'erégèse iie.s foi.rnes d'erpression.

d'erposiiicn

(ie ia1;ân') er i'arlicr-rlatir: n (."e

tafcît\.Ii

e n découvre

i'anicrcr.

chez

ies

cûirmentaleurs rdcents

teis

qrre iJen Ar_:hoûr"

ou

Savl,id

t2

AI,.hTIITÂ*üIfrt

N"t

TAN.

IUIN

2OOI

(5)

Re{ards sur la postface de lacques Be:que à sa tradustion du Coran

Qoutb.

Mais il la juge

encore trop subjeÇtive. I1 derrande donc "unc enal)se Iogique moderue". bien que sa t:laire vovance prévoie déjà "que I'aoport d'une

telie

méthode consisterait sans doute,

moins

en ce qu'elle apprélienderait du texte que dans

ce

qLr'elle en lerait ressortir comme échappant à ses prises : le cceur insaisissable du

ghq,b"l723l.

Et là Jacques Berque manifeste à quei pcint

soll

parcours moderne

- et

même moclerniste- ne perC jamais de l'ue l'esprit

qui

animc

l'lslatn

depuis

l'ultime

Rer'Éiation: Ccnnailre estun devoirque Dieu nous aicie

à

accomplir, Inais dans

la

reconnaissance

du

Créateur cie toutes choses

; la

transcendance

pâr

définition échappe à toute connaissance de type scientifique.

Eii

conclusion

de ce premier

faisceau de réflexions, Jacques Berque ouvre

à

sa manière

-

et à sou habitude

*

une problénratique novatrice. Mettant

au jour dans le

Corar.r

un r,a-et-vient constant entre Ces

"positions ibndamentales

quant

à Dieu, quant à la naTure ei quant à l'homme

"

et. d'autre

par1. ''ies

incidences

qtii les

inscrivent dans

le

vécu des sociétés

et

des

personnes",

il voit le texte

coranique

"unir

dans ses Çontenus stiucture et conioncture,

et

coinpL)ser Ies éiéments

qui.

respectivelnent,

ell

relèvent à la faç,on

.iont un tissu

cornpose ia chaîne et la traine",

Il

met en application cetle métaphore opératoire,

et sa

démonstration détailiée rnériterait d'être lue ici in extenso,

en ce que

ie temps ne nous permet pas [730-1]. Cet enchaînement de

deux

séries

(iignes

conjoncturelles et contiiruités structurelles) cor,siitue pour

iui iies

"coordonnées coraniques",

"l'une

ressctlissani

à

l'expression cie

l'absoiu, l'autre à celle ile ia circonstance". La

racine

?QR'dont

le ternre

Qur'ân est le plus noble dérivé,

i1

en

signaie

I'acception

''ra-ssetnbler.

coilecter" qui fut

défendue

par l'éniir Abdei-Kader.

Cette

notation

pius qu'inréressanie

ne

saurait cependant erciur'e

les

raleursacimjses: "proférer.

folmuier, ei lire".

N4ais

elle

ei-rtraîne

de

rna pan plusieut's ol.rservations. Le

telrps

nous lnanque

pour

traiter notammeni de 1a po11'sérnie inhérente au lviot sémitique, et plus techniquen'rent ùncore. à 1a struciuration en réseau du lexique.

Je

me

contenterai

de relier la

poir sérnie

aur

"dy,nan.riques étagées" du texte cora.nique dc;rrt .1'ai parle en sùn i1om. A la poi.'phonie du discoui"s du discours

cr:respcnd. au

nil.eau des niots de la lansr,re. 1a plLrralité organisée des valeurs.

Ce

réseait

rie

siglificaric)n.j

tantôl alileure en

surface. et tantôt se dérobe . ii parcourt

le terir'

ci'ha|nroriiqr.ics lnf'lnie-. +ri échtr ui!'i quesliuns cLja sc ilosenl

ies hcnrires d'âge en àge..

i-or-rlcrirs dlsn.;nible. tolijours neirve en sûnlme.

celie

Parolc

''olfre

cies enseigneiireits iairiblcs pnLll tù,.:s i.'s icnrn., t'1 ir()rir tou:i

les lieux.

C-est, ccroilairerrrent.

s'aitranchir ijes

iisières mÉ<iir:r:r'es.lr.re tr,-')p

AI.-MUTˤEIM

N"I

IAI!'-

IUIN

2§OI IJ

(6)

Àrnin Abdulharim BAREOT

d'exégètcs imposent

à

ieurs expiicatiolls

et

qui fait soLlvent recuicr devant ia hardiesse de tel ou tei novateur" [786].

I-es

deux noms de cette Parole ne sont-ils pas à la fois Kitab

"le

Livre,

I'Fcriture" et

Qur

'rin "

Récitation, Psalmodie, Lecture" ? L'oralité domine ici pourtant.

Aussi loin

que nous rernontions dans les temps anciens où le Verbe

s'est fait écrit, dans les temples, les

synagogues,

les

couvents mêiues d'Occident,

la

lecture

n'a jamais

été

un

simple erercice dcs yeux. mais une mise en jeu de la voix ct clu soufre. une rythm ioue sonore qu i allait que lquefois

jusqu'à rnobiliser

le corps... Mais le Coran justement dépasse tout autant cette g1'n.rnastiqLre cie

l'orajson que les

L;rutales fiénésies de l'inspiration poétique.

Jacques

Berque

ctui

a traduit

aussi

ies

odes classiques de.iâhili-v. ya. met en

contraste "la sirnplicité. I'humiiite,

oserons-nous

dire. du

vocabulaire coraniquc

et

l'orgueilleuse recherche cies mots rares par les poètes.

[...] A

ia

limite.

r-rn orgireilieux jargon s'empare de l'oreille sans solliciter I'inteliigence.

Chez

tout

lecteur

du

Coran,

au

contraire

1...]

I'effet

majeur

mais non pas

unique -

appartient scuvent, même indépendammetit des sonorités.

à

des

suggestions obliques, connotations et nuances. De là un cumul spécifique entre

I'impression

de clarté, presque de familiar.ité, qu'on éprouve cl,entrée de jeu, et ceile d'altitudes à :nultiples niveaur" [73_5 j.

Je

passerai

sur les

remarques techniques

de syntaxe, sur

les

"singularités grammaticales"

que

notre auteur relève après beaucoup ci'autres.

Il se

montre là-dessus

plus

ouvert

qu'un

Nôldeke, comme

ie

rnontre son traitement

de

l'iltt1'at

"qui iàit

varier. dans le même énoncé, la désignatioir cles

aclants". 1714].

I-cin de parler

d'incohérence ou de "dramatisation retenue".

souvent sous

ibrme de

dialogues cc;ntra-siés

oir

tous prennent ia parole. avec

leur

sty

le ei

ieui' ps1,'chologie. niettant

ainsi

l'enseignerxent

à

transrnettre d'autant pius en relrct-, et donc garantissant envers et contrç tout son efficacité.

l-'exlre,ordinai.e

'italité

de la forrauiation coranique se trarluit par une dori-iinance rjes lorrnes

'eri-.ales, Pour Jacques Berquee, c'est i'expression d'une

"éner-gie

lauagière [..] (quil

sied

à un iextrcùioutressol'titdel'rtuvrecle Dieu.

suscitatrice

de cejie iie i'hornne"

f7.tr-51. Et en effet, si on Ia compere avec

"une relative irrodéraiisr

Cans

l'eniploi de i'adjectif,

[ibidem]. ce qui

n'étart

pas

le

cas dairs

i;:

Jâhili;;.r,a, on ne peiit que souliener la pr.éenance 11u

vel'be. donc

de i':lcticn sur ia

çLiaiii'ication.

Notre

auteur lait zi ce propos cie

pertineutes analvses

du

pirssil cia-i.is

ie

Coran [7zi_i-6]. puis dLi donr verbai ou

mar;riar "ncrn d'aciion" rjcnt il

cébusque

i:i

prrésence so'rrs

iles

ioftres

14 AL-mUTÂRtMt

H'r

'Àil- firIN

2§o1

(7)

Re{ards ssr la postface de lacques Berque à sa traduction du C-oran

inattendues. cCïnme

ies

titres de cefiaines souralcs : dl-l{to'saiât, al-Dhôriytit,

, : ,,

.

ttl- .itl il Ol . . . .l l4 t -6 i.

Et il se

fàit

intuitifpius qu'il n'y

paraÎt à lapremière lecture, quand il

avoue "la

sensation d'atteindre au

tuf

de la iangue.

i...] l,'idés

se renibrce

d'un primat

ciu schème verbal,

donc

de la racine trilitère ; autallt parler d'un

renvoi à I'originel [...] Un tel

langage cumule

1...1

le radicalisme, au sens

propre du tenne, c'est-à-dire le retour aux racines, avec

i'expansion sémantique" [?,18]. De fàit cette dominaiion écrasante du thoulâthî "le triiittère"

svr le roubâ'i "le

quadrilittère

" * II85racinesveibalescontre I5-posede

nombreuses queslions

au

linguiste.

La

propoftiort û'e§t

pas

ceile de i'alabe classique

de

i'époclue

(plus de

400C quadrilittères reclassés dans ies grands dictionnaires). i,a réBonse traCitionnelle. en Orient comtre en CcciCent. est que

le quedrilittere n'esï

qu'Lrn

jer-i verbai.

une e.xpansion chactiqiie.

à

fins seulerrient erpressives. du triiittère criginei par insertron de conscnr'es. Et cctte antique

profusion se

serait vu ccrtcjamnée sans retoui par le peu de cas qu'en a

fàit ie Coran.

fiette

idée

- plus

Théologique qu'objectivement liiigLiistique

-

était

récemment

encore

expcsée avec conviction par l'éioquent protèsseur égyptien Abdeççaboùr Châhîn,

lors d'une

confërence de Ramadan, au Paiais R.o1ai de

Rabat.

Mes tlavaux personnels tbrmalisés depuis dix ans sur l'orsanisation Cu

lexique arabe

permeftent

aujourd'hui de démontrçr. en eilet. ie

priniat génétique

iiu trilittère en

sémitique, face

aux

tentatives d'erplication cie ces

langues par l'expansion cie deur consonnes originelles. \1ais

cette démonsiriltion de I'ancienneté nécessaire et fonnellement suffisante du trilinère

lait

appei

à

des processus

très

différents

des

traditions encours. Ccmnteje regrene à cei égard l'absence de Jacques Berque et de notre maître à tous LoLiis Massrgnorr. saclrarrt

qrie

cenairrs passages. cetlaities

cxpressions

sou: leur:

plurnes donnent

à penser qu'ils

ont eu, utr,i<;ur ou i'ar.rtre,

f

irnage fugitiv:e du

soi originel..

Quant

à la rareté

exceptionnelie, surprenante. du quadrilittère

Cans ie Coran. elie rnérite réilexion et

s'encacire. r:;.re senble-t-il.

st1 listiquement dans

la

i-upir,ri'e

iiu

Message avec 1'erpi:cssivilé sar':s fr';in du iangage antérieur

à Ia

Revélation. Sans dcrttte aussi parce

irir'il

aurait oétonnc

aver l'esprit

modérateur et la finaiité éthique de la de:'niàre Prophetie.';lliLlhou a'ltnn .. "

La

Paroie ccranique

à

un sens, et

il

est clair (lvloubîrr )sr:lon le Corarr

li,ii-rrême. llai.is sa

-3èrre

partie,

Jacques tserque conlmellte des nctions

AI-*tUTARgItll i{"r

rAN- rUIAt 2§ol

t5

(8)

Amin Abdulftarim BAtrBOT

tbndarr.rentales telies que le glra-r,ô'"Le rnystère divin, l'inconnaissable" ; clîn"la

relision ", irais aussi ''ia

soumission.

i'allégeance',; 'ikhlâç ',la

nature

prernière dans

sa

pureté. ia religion foncière. i'observance,,.. 'ih.çân',le bien_

laire

le bei-agir". erc..[751].

A

partir de ces obser.,.aricns. notre auteur.initie une exégèse

résolunrent

moderniste

ll

désigne

à lravers ies

enrpiois c)e haqil

"vérité

nécessaire

".

rnais

su(out à

rravers d'innombrables versets. l'appel coilstant

de Dieu à

la raison humaine.

llai ii

a la prr.iilence

de

rappeler que la

foi

l'emporte strr la rationalité. en tant qu'"évideirce pr.enrière, qui conditionne

toute

logique

d'adhésicn" [7-s9]. Et cie

rappeler clue

"la

normativité esi une aritre des suggestions au Haqq" libideml. Les obligations rituelles er sociales se

voient ainsi "éclairé(es) par la raison et rnobilisé(es) par la f.oi,' [762].

D'autres

plus

qr,raiifids qLre r.roi parleront de cette norniatiyité et rje la

place

du.juridique, des ahkàm dans le texte révélé. Je rap:pellerai seulement ces lignes

;

"1,'originalité du coran paraît tranchée, clans la mesure où

il

s'écar.te le

plus

souveni

de I'inventaire de

prescriptions, pour ressoftir <lavantage à une édification propagatrice de modèles

"

[765]. Et ceci I'oppc.se, bien entenciu. aur codifications byzantines depuis deux siècles,

civiles ou

religieuses. que les Arabes

de

l'dnoque

ne

pouvaient ignorer. Et "racques Berque met err exergue pour le bien cie tcus, ies "dvnarniques présentes de

l'idée

cl,e shut,î'a', [764-6].

De

sa

4" panie, et

iaute de temps,.je retiendrai quelques points. Une application

du "carre

sérniotique" de creimas aur trois sroLipes d,adversaires

du

Prophète

iàce à ia

communauté des vrais

cro'ants

iles ntotL'nrinîn)1,7,-3].

Des

pages éciairantes sur- i'ernbcitement du

terre

'en abîme'' dans les purrog.,

du

Coran

oir Dieu

commande ar.i prophète rle parler de

Dieu...

[775] ; Et sur

diverses circulai'ités du terre.

sans doure prLrpres

à

.,toute

eipreision

cie

l'absolLr". 11716l. .le pense

pollr rra pan aur

présentations

en miroir

cle la calligrapnie arabo-islamirlue...Jacques Berque

voit

dans

la

croyance ,,avant

tout un

rappei (clhikr),

donc

Lrn

retour.[...]. Méditer

sur les précédenis (de

l'histoire

des honrrr,es), ranirner en soi-mênre ces ieçr.rns, c,est aussi

.;iviiler

Ie

Rappel. i" I Le

rexte inaugural

de i'lsiairi

s'assigne

de

quelque fàçon à

l'étemel retoLir, Mais ce

mcuvement.

ii l'afiecte ri'un

seris

teiminal [.

.]

hislorique autant qu'eschatolo-uique"

û

,17j.

li

a.joutera err conclusion.,le i,rai

dhikr

est ceir,ri qui reto,.lrne le sr:r-i-"enir en a..enir

'79-rl

Èt cette rei,ir.iilcaticrn.

11]es propres analvses étabiissent sa !!efi;i.!-nc.. en stri-ictLire prolonile Cu ternie

rihikr

et ce la lilcine ? DhKR. sous la tbrme

c:s

cieLix séqutrrces constitutives : -

DliK-

"attisei' 1

ianinrer

le Ièu

i:t -Ki(-

rr--rcur à la charqe:répétitirrn réslriière

I6

AL-&tUïÂnGilE

N'l

,âN-

,UIN

rGol

(9)

ne*ards sur Ia postface dc l§cques Berque à s8 traduction du Coran

(en

quelque sorte prograülmée)". Sans oublier son rappoil à rappofi

à-DhR-

"répandre'"

(aux

sens

propre

et figuré, tel que "répa,ndre les ic.ruanges" qui me paraît

activé

dans des versets tels queyri a.y,1:ouhâ llodhîna ânanottit clhkctztrrtû

Itdha

clhikran kathîran,

à coté de l'instigation divine à la prière

qui en est

I'interprétation 1a plus

répandue).

Je

signale que certains islamolcgues -i"

pensent

une vaieur de "fecondation" en

se basant

sur le

terme dialectal

panarabe

totlhkîr ou "pollinisation artificielle des fleurs du palmier tèmelle

''

I

terr.ire absent des grands dictionnaires classiques {Lis,in

al-'arub,

Qûmoûs al- mouhît. etc.).

et

que l'arabisantDozy avait trouvé dans les récits de voyageurs ôcc ide ntau;t.

Ui:re dernière hl,pothèse berquienne peut

êire

signalée. Se réÏèrant à Saussure.

le père

firndateur de la linguistique moderne,

il

applique sa lameuse dicholornie langue-parole

: "Ne

peui-on

dire

que dans le Coran, la parole est arabe[..] tandis

que la

iangue.

elle,

serait proprement Çoranique [..] pardes caracières éminents (puisque) la langue s'oppose atl mcuvant, au Çirconstanciel.

au

contingent

de la parole"[780].

Seiorr le docteur hanbalite ibn Taimiya, ce

dont la

Souna soutient la préétemité (face aux inou'tazilites qui argumentaienl sur la créatioli du Coran). c'esl "l'essence et le genre de langage coranique. non

la

particularité des sons

en

lesquels

ii

se

prcière" f78ii

Etnotreauteurelt déduit

"qu'aux yeux

du crol'ant arabe, le Coran s'erprinle tout ensenble dans son idion:e hr-rmain. ei dans

une

langue d'élection

dii'lne"

fibidem]

Poirr conciure

à

présent.

je ne

cache pas que mes choix d'extraris et mes colnmentaires sont largenrent sulrjectil's et bearicoup trop rapides. Puissent-

ils inciter

beailcoup C'enire vous à iire et relire cette Postfàce. Jacques Berclue

nous a Iégué une peirsée

courageuse

et

1éccnde.

Elle

acconlpagne inCissoluble;uent sa lraCiictiou

de la

Parole coranique.

Eile

l'éclaire. molns dans

ie l]iot à

mcq le détaii que dans ce qr-ri compte : i'esprit. Ei ses dernières iignes interpeile;:t quancl

ii

demrnde

"L'effcrt

d'adapiation à 1'avenir qui ieur incoml--e

ri toutes. ies religions

abrahatniques

sont-elies en

passe Lie

l'accornpiii'? De

<luelie iaçon ?

A

queiies c,-rnditicns ?

A

quel

prir

?

iln c.'qui

Çoilcerne

i'lsiam. les

paues

çui

préeèdsnt pi,lient â croire qu'i1 rest.e eilcore,

devant ccs

1âches.

en iieçà'jes

po-rsiLrilites

à

1ui oul,ertes

llar

sol! texte

f'ondateur." [193]

AI.-HUTÀRÈIM H'T TAH- IUITq *6Û1 17

Références

Documents relatifs

[r]

Le Centre Jacques-Berque pour les études en sciences humaines et sociales (USR 3136), situé à Rabat (Maroc) est sous cotutelle du Ministère de l’Europe et des

Je dois réfléchir, on ne m’a jamais posé cette question : peut-être l’article où j’ai démontré que les groupes algébriques sont de type I ; et également quelques articles

Jacques GATEAU et Jean----Pierre GESLIN Pierre GESLIN Pierre GESLIN : « Pierre GESLIN : « : « Quand un C.P. cherche la petite bête Quand un C.P. cherche la petite bête

En fait, ce qui est requis pour interagir avec les êtres surnaturels est beaucoup plus simple et apparaît du même ordre que ce qui est requis pour interagir avec d’autres

Directeur de la recherche militaire, il fut l’un des artisans de cette collaboration entre recherche militaire et université, imitée du modèle américain, qui donna un coup de fouet

- La pédagogie du Second degré (CEG, CES, Lycées) où il faudra noùs dégager de l'enseignement dog - rhatique et de l' encyclopédisme condam- nés par les

Le regard du curieux - Pour connaître un peuple, il faut aller un peu plus loin que la simple promenade et tenter d’apercevoir son “âme”, cette fameuse âme japonaise,