Formes linéaires et hyperplans
Complément 2
Dans toute la suite,E désigne un espace vectoriel de dimensionn.
Formes linéaires
Définition.
On dit queϕest uneforme linéairesurE siϕest une application linéaire sur Eà valeurs dansK.
Exemples.
• E =R3. Soit (a, b, c)∈R3, (a, b, c)6= (0,0,0). L’application ϕ:R3→R,(x, y, z)7→ax+by+cz est une forme linéaire sur E.
• E=Rn−1[X]. Alorsϕ:E→R, P 7→P(0) est une forme linéaire surE.
• E=Mn(K). L’application traceMn(K)→K, M 7→Tr(M) est une forme linéaire surE.
Vocabulaire. L’espace vectorielL(E,K) des formes linéaires surE est souvent notéE∗, appelé l’espace dual deE.
Donnons un autre exemple de formes linéaires : lesformes linéaires coordonnées dans une base deE.
SoitB= (e1,· · ·, en) une base deE. Pour tout 1≤i≤n, on définit lai-ième application coordonnée ϕi:E→Kpar :
ϕi(x) = i-ème coordonnée dexdans la baseB. L’applicationϕi est une forme linéaire pour tout 1≤i≤n.
Propriété 1(Formes linéaires coordonnées)
Preuve. Soitx, y∈E et λ, µ∈K. Il existe un uniquen-uplet (x1, . . . , xn)∈Kn tel que : x=x1e1+· · ·+xnen.
De même,y se décompose de manière unique dans la baseB:
∃!(y1, . . . , yn)∈Kn, y=y1e1+. . . ynen. On a alors :
λx+µy= (λx1+µy1)e1+· · ·+ (λnxn+µyn)en
et donc pour tout 1≤i≤n:
ϕi(λx+µy) =λxi+µyi=λϕ(x) +µϕ(y).
Ainsiϕiest linéaire. Comme de plusϕi:E→K, c’est bien une forme linéaire.
ECS2 Lycée Louis Pergaud
Exemple. Prenons le vecteuru= (3,2,1)∈R3.
• Dans la base canoniqueB= (e1, e2, e3), on au= 3e1+ 2e2+ 1e3. Ainsi si on noteϕiles formes linéaires coordonnées associées àB, on a :
ϕ(u) = 3, ϕ2(u) = 2, ϕ3(u) = 1.
• Dans la baseB0= (f1, f2, f3) oùf1= (1,0,0), f2= (1,1,0), f3= (1,1,1), on a : u=f1+f2+f3.
Si on note ψiles formes linéaires coordonnées associées àB, on a cette fois : ψ1(u) = 1, ψ2(u) = 1, ψ3(u) = 1.
• Pour toutx∈E, on a : x=
n
X
i=1
ϕi(x)ei.
• Pour tout 1≤i, j≤n, on a : ϕi(ej) =δi,j=
(1 sii=j 0 sinon . Propriété 2
Preuve.
• Par définition,ϕi(x) est lai-ème composante dexdans la baseB. Donc on a : x=ϕ1(x)e1+· · ·+ϕn(x)en.
• On a ej= 0·e1+· · ·+ 1·ej+· · ·+ 0·en. Donc lai-ème coordonnée deej dans la baseBest 0 sii6=j, et 1 sii=j. D’où le résultat.
Soit B = (e1, . . . , en) une base de E, et (ϕ1, . . . , ϕn) la famille des formes linéaires coordonnées associées àB.
Alors (ϕ1, . . . , ϕn) est une base deE∗=L(E,K), appeléebase dualedeE.
Propriété 3
Preuve. PosonsF = (ϕ1, . . . , ϕn). On souhaite montrer queFest une base deL(E,K). On a dim(L(E,K)) = dim(E)×dim(K) = n×1 =n, et Card(F) = n. Il suffit donc de montrer que la famille est libre. Soit pour celaα1, . . . , αn∈Ktels que :
α1ϕ1+· · ·+αnϕn= 0L(E,K) (∗) Montrons queα1=· · ·=αn = 0. On évalue pour cela (∗) enej. On obtient :
α1ϕ1(ej) +· · ·+αjϕj(ej) +· · ·+αnϕn(ej) = 0 Or puisqueϕi(ej) =δi,j, on en déduit queαj= 0, et ce pour tout 1≤j≤n.
La familleF est donc libre. C’est donc une base deL(E,K).
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Hyperplans
Définition.
Unhyperplan de Eest un sous-espace vectorielH deE de dimension dim(E)−1.
Exemples.
• Un hyperplan de R2 est un sous-espace vectoriel de R2 de dimension 1, en d’autres termes une droite vectorielle Vect(a) aveca6= 0E.
• Un hyperplan de R3 est un sous-espace vectoriel deR3de dimension 2. En d’autres termes, il s’agit d’un plan vectoriel Vect(a, b) aveca, bdes vecteurs non colinéaires.
SoitH un hyperplan deE, eta /∈H. Alors, on a :
E=H⊕Vect(a).
Propriété 4
Preuve. Tout d’abord, on a dim(H) = n − 1 et dim(Vect(a)) = 1 car a 6= 0E. Donc on a dim(H) + dim(Vect(a)) =n.
On étudie le sous-espace vectorielH∩Vect(a). On a :
H∩Vect(a)⊂Vect(a) et dim Vect(a) = 1.
Donc on a dim (H∩Vect(a)) = 0 ou 1. Si dim(H∩Vect(a)) = 1 = dim(Vect(a)), alorsH∩Vect(a) = Vect(a).
Mais alors on auraita∈Vect(a) =H∩Vect(a), et donca∈H, ce qui n’est pas le cas par hypothèse.
Ainsi dim(H∩Vect(a)) = 0, etH∩Vect(a) ={0E}. On peut donc conclure queE=H⊕Vect(a).
Formes linéaires et hyperplans
SoitH un sous-espace vectoriel d’un espace vectorielE de dimension finie.
(1) H est un hyperplan si et seulement si c’est le noyau d’une forme linéaire non nulle.
(2) SiH = Ker(ϕ) = Ker(ψ), alors il existeλ∈K∗ tel queϕ=λψ.
Théorème 5
Preuve.
(1) ⇐ Soitϕ∈L(E,K),ϕ6= 0, telle queH= Ker(ϕ). Par le théorème du rang, on a : dim(H) = dim(E)−rg(ϕ).
Or Im(ϕ) est un sous-espace vectoriel deK, c’est donc{0E}ouK. Ce n’est pas{0E}carϕ6= 0. Donc Im(ϕ) =K, et rg(ϕ) = 1. D’où le résultat.
⇒ Supposons que H est un hyperplan deE. On considère (e1, . . . , en−1) une base deH, qu’on complète en (e1, . . . , en) une base deE. Notonsϕn lan-ème forme linéaire coordonnée. Pour toutx∈E, on a :
x∈Ker(ϕn) ⇔ ϕn(x) = 0 ⇔ x=x1e1+· · ·+xn−1en−1 ⇔ x∈H.
Ainsi on a bien H = Ker(ϕn), noyau d’une forme linéaire non nulle (ϕn(en) = 1).
(2) Supposons queH = Ker(ϕ) = Ker(ψ), et soita /∈H. On sait qu’alors : E=H⊕Vect(a).
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On aψ(a), ϕ(a)6= 0, sinon ces formes linéaires seraient nulles (elles seraient nulles sur H, sur Vect(a), et donc surE). Posons :
λ=ϕ(a) ψ(a)
et montrons que ϕ= λψ. Ces deux formes linéaires coïncident sur H, elles coïncident en a et donc sur Vect(a). Elles sont donc égales, et on a bienϕ=λψ.
Remarque. Ainsi un hyperplanH est défini par une équation linéaireϕ(x) = 0 avecϕ∈L(E,K) telle que H = Ker(ϕ). Cette équation est de plus unique (à un scalaire multiplicatif non nul près).
Exemples.
• E = R3. Soit (a, b, c) ∈ R3, (a, b, c) 6= (0,0,0). Considérons la forme linéaire ϕ : R3 → R,(x, y, z) 7→
ax+by+cz. Son noyau est donc un hyperplanH, donné par
H ={(x, y, z)∈R3, ax+by+cz= 0}
Il s’agit du plan vectoriel (sous-espace de dimension 2) d’équation ax+by+cz= 0.
• E=Rn−1[X]. Considérons la forme linéaireϕ:E→R, P 7→P(0). Son noyau est un hyperplanH deE, qu’on peut décrire de la manière suivante :
P =an−1Xn−1+· · ·+a1X+a0∈Ker(ϕ) ⇔ P(0) = 0
⇔ a0= 0
⇔ P =an−1Xn−1+· · ·+a1X AinsiH = Vect(X, X2, . . . , Xn−1).
• E = Mn(K). Considérons la traceMn(K) → K, M 7→ Tr(M). Son noyau est l’hyperplan de Mn(K) constitué des matrices de traces nulles. De plus, on a Tr(In) =n6= 0, doncIn ∈/ Ker(T r). On en déduit par la Propriété 4 que
Mn(R) = Ker(Tr)⊕Vect(In).
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