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Le secret comme outil de la médecine

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Le secret comme outil de la médecine

HURST, Samia

HURST, Samia. Le secret comme outil de la médecine. Revue médicale suisse , 2016, vol.

510, p. 571

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:84882

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ActuAlité

www.revmed.ch

16 mars 2016

571

nale française de médecine. Les domaines de mise en œuvre de cette prévention sont l’organisation du travail, le manage- ment des personnes et le fonctionnement psychique des individus eux-mêmes. Ainsi, la lutte contre le “workaholisme” et le surinvestissement de l’activité profession- nelle doivent faire partie intégrante de la démarche de prévention. »

La prise en charge d’une personne en état de dépression d’épuisement associe selon eux l’éloignement du travail (et ce malgré le risque de difficultés au retour), une thérapeutique médicamenteuse anti- dépressive et une psychothérapie de re- construction émotionnelle et de l’estime de soi. Une mise en garde : « le recours aux antidépresseurs (notamment les ISRS) et aux anxiolytiques est souvent la solution choisie par le prescripteur alors que le burnout ne semble être ni une dépression ni un SSPT stricto sensu ». A côté de la prise en charge psychothérapique, d’autres traitements, mieux adaptés à une « forme subclinique de dépression / SSPT », devraient être développés.

Reste, pour l’heure, que le terme de burnout ne peut, selon l’Académie natio- nale française de médecine, être actuelle- ment porté comme un diagnostic médical.

Ce qui ne signifie nullement ne rien faire.

« Son usage extensif conduit à confondre détresse (ou fatigue) et pathologie émo- tionnelle : seule celle-ci justifie un traite- ment notamment médicamenteux ayant apporté la preuve de son efficacité dans le cadre nosographique défini, concluent les auteurs. Des actions doivent être mises en œuvre par les organismes en charge de la recherche médicale pour l’établissement de critères cliniques, l’identification des mécanismes physio et psychopathologi ques et, en conséquence, de modalités préven- tives et thérapeutiques de l’épuisement pro- fessionnel. Une priorité doit être donnée aux maladies dites de société (complica- tions somatiques et psychiques du stress) dans les programmes de formation des étudiants en médecine et de développement professionnel continu des professionnels de santé. »

(Fin)

1 technologia. « Le syndrome d’épuisement, une maladie professionnelle ». paris, 2014. www.technologia.fr/blog/

wp-content/uploads/2014/04/burnoutversiondef.pdf 2 gollac m. mesurer les facteurs psychosociaux de risque au travail pour les maîtriser. rapport du collège d’expertise sur le suivi des rps au travail réuni à la demande du ministre du travail et des affaires sociales, paris, 2011.

3 nasse p, Légeron p. rapport sur la détermination, la mesure et le suivi des risques psychosociaux au travail.

paris : La documentation française, 2008.

Le secret comme outiL de La médecine

La loi sur le secret médical vis-à-vis des détenus, adoptée de justesse par le parlement genevois le 4 février dernier, est une lecture poignante.

On y lit entre les lignes la difficulté, la vraie difficulté, à laquelle se sont heurtés nos législateurs. Pour éviter le risque de tragédies futures, ils ont voulu mettre la thérapie des détenus sur écoute, la rendre entièrement accessible à la sécurité. En même temps,

ils ont compris que cette démarche était vouée à l’échec, que transformer les médecins en informateurs allait les empêcher de soigner les malades en prison. Que, paradoxe ultime, les mesures thérapeutiques ordonnées par les tribunaux pour les per son- nes jugées dangereuses per- draient ainsi leur efficacité.

Ils ont tenté de mettre des protections, d’éviter la tension, de naviguer entre deux.

A première vue, le compromis

peut même avoir l’air assez réussi. Il reflète certainement les pratiques de nos collègues qui travaillent en prison. Il y est prévu qu’en cas d’état de nécessité, les professionnels

« informent sans délai » les autorités « de tout fait dont ils ont connaissance et qui serait de nature à faire craindre pour la sécurité de la personne détenue, celle de l’établissement, du per­

sonnel, des intervenants et des codétenus ou celle de la collectivité, pour autant que le danger soit imminent et impossible à détourner autrement d’une part, et que les intérêts sauvegardés par une telle information l’emportent sur l’intérêt au maintien du secret profes­

sionnel d’autre part ». Qui, devant de tels faits, n’avertirait pas les autorités ? Bien sûr que nos collègues le font. Mais pour voir le problème, il faut comme toujours s’imaginer une loi appliquée dans la réalité. En cas de litige, qui va juger si, effectivement, un

fait était « de nature à faire craindre » ? Cela peut après tout recouvrir toutes sortes de choses. Une menace crédible en sera certainement une. Une menace moins crédible ? Pas si clair. Un geste esquissé ? Peut-être. Un regard ? Parfois. Après coup, il sera pourtant trop facile de reprocher à un médecin d’avoir considéré qu’un fait n’était pas pertinent. L’obligation d’informer, avec le risque de sanctions qu’elle comporte,

transforme les médecins en fusible. Si nos confrères veulent se protéger contre des reproches futurs, ils n’auront pas d’autre choix que de raconter… plus ou moins tout.

C’est précisément ce que l’on voulait éviter. On avait dans le temps décrit le secret comme un obstacle à leur protection, mais en fait il lui est indispensable. Lorsqu’ils ordonnent des mesures thé- rapeutiques, les tribunaux savent qu’elles sont néces- saires pour limiter la dange- rosité future. En soumettant les médecins à une obligation d’informer, on aura sacrifié l’efficacité de la thérapie sans finalement apprendre davantage sur les détenus puisqu’ils cacheront désor- mais aux médecins ce qu’ils auraient auparavant caché aux autorités.

L’initiative de l’AMG met ici le doigt exactement là où ça fait mal. Prescrire des mesures thérapeutiques sans confiden- tialité revient à envoyer un chirurgien au bloc en lui interdisant le bistouri.

L’initia tive transforme donc l’obligation d’informer en droit d’informer, rendant ainsi ses outils à la médecine carcérale. Demander à tout médecin de répondre aux requêtes des autorités, c’est exiger une tâche hautement spécialisée sans formation préalable. L’initiative remplace cette requête par une demande d’expertise en bonne et due forme. Je vous le disais, la loi est une lecture poignante.

« Vous avez la solution » semble nous dire le législateur

« faites votre travail et pro­

tégez­nous contre tout risque futur ». Les médecins répon dent ici calmement que bien faire notre travail, assurer notre part de protection, exigera une loi légèrement différente. Un bel exemple de professionnalisme. Espérons que la population suivra.

carte blanche

Pr Samia Hurst

Médecin et bioéthicienne Institut Ethique, Histoire, Humanités

Faculté de médecine CMU, 1211 Genève 4 Samia.hurst@unige.ch

D.R.

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