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LES CELTES LES LANGEES CELTIQUES, PARIS. LIBRAIRIE ACADÉMIQUE DIDIER ET C ie DU COURS DE LANGUE ET LITTÉRATURE CELTIQUE LEÇON D OUVERTURE

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Texte intégral

(1)

;

Hommaqe

da

VtAutcur

\

LES CELTES

LES LANGEES CELTIQUES

,

LEÇON D’OUVERTURE

DU COURS DE LANGUE ET LITTÉRATURE CELTIQUE

FAIT

AU COLLÈGE DE FRANCE

PAR

H. D’ARBOIS DE JUBAINVILLE

I

PARIS

BUREAUX

DE LA

BEVUE ARCHÉOLOGIQUE

LIBRAIRIE ACADÉMIQUE DIDIER ET C

ie

35, QUAI DES GRANDS-AUGUSTINS, 35. 1882

(2)
(3)

LES CELTES

LES LANGUES CELTIQUES

LEÇON D’OUVERTURE

DU COURS DE LANGUE ET LITTÉRATURE CELTIQUE

FAIT

AU COLLÈGE DE FRANCE

PAR

H. DÀRBOIS DE JUBÀINVILLE

PARIS

BUREAUX

DE

LA REVUE ARCHÉOLOGIQUE

LIBRAIRIE ACADÉMIQUE DIDIER ET C

ie

35, QUAI DES GRANDS-AUGUSTINSj 35.

1882

(4)

I

I

y

i

i

(5)

LES CELTES

ET

LES LANGUES CELTIQUES

i

Pour

arriverù seformer des Celtes, nos ancêtres, une idée scien- tifique, le

moyen

le plus sûr est de

commencer

par étudier leur langue.

Leur

langue,le celtique, est le

rameau

le plus occidental de la famille indo-européenne.

Ce rameau

se distingue des autres

rameaux

dela

même

famille linguistique par divers caractères,dont

un

des plusremarquablesest la chute

du

P primitif; ainsi l’adjectif qui s’écrit en français plein, en latin plênus, en sanscrit prânas, devient en vieil irlandais lân, en vieux gallois laun, en breton leun;père, ensanscritpitâ au nominatif, pitaram à l’accusatif, en grecTrocTTip, enlatinpater,se ditathir en vieil irlandais *.

Le

celtique ancien était divisé en dialectes

comme

le nouveau.

Des dialectesduceltiqueancien,celuique nousconnaissonsle

moins mal

est le gaulois, qui chez nous a précédé le latin, et dont la

langue celtique, parlée en Grande-Bretagne au

temps

de l’Empire romain, était

une

variété.

1. Citons encorelesanscritupari)engrec Circép, en latins-uper avecp médial, maissansp danslegauloislier-,ver-,quiestdevenu envieilirlandais for,envieux galloisgucr (/*enirlandais, gu en vieux gallois, tiennent lieu de v initial). Pour plusdedétails,voir un mémoire de M. Windisch dans les Beitraege de Kuhn,

t.VIII, p.I etsuivantes.

,

28977

(6)

LES CELTES ET LES LANGUES CELTIQUES.

Un

dialecte différentétait usité enIrlande à la

môme

époque: il

avait conservé lequ primitif, tandis que legaulois changeait le qu primitifen p. Ainsi, en irlandais

comme

en latin, on avait gardé la gutturale sourde initiale

du nom

de

nombre

«quatre», en latin

quatuor; mais engaulois cettegutturaleétait

devenue

labiale; qua-

tre se dit : petor dansle

composé

gauloispetor-ritum, «char à qua- treroues » iy petuar dansle dérivé Petuaria,

nom

d’une ville de Grande-Bretagne 2.

Dans

les sièclesvoisins de la chute de l’Empire romain, ilse fit

dans les dialectes celtiques

une

révolution analogue à celle que subit alors la langue latine; de les dialectes ou les langues néo-celtiques.

Des langues néo-celtiques, les unes sont issues de la variété

du

gaulois qui se parlait en Grande-Bretagne;cesont : le galloiset le breton, qui viventencoreaujourd’hui; le

comique

ou langue de la Cornouaille anglaise, éteintau siècle dernier.

De

l’irlandaisprimitif sontissus : l’irlandais,

l’ondistingueordinairement troisâges :

vieil irlandais,

moyen

irlandais, irlandais

moderne;

2° le gaélique d’Écosse; le

manx

ou langue de l’île de

Man.

Les langues néo-celtiques forment donc

deux

groupes qui vien- nent, l’un delavariétédugaulois parléeen Grande-Bretagne, l’autre de l’irlandais primitif. Cesgroupes conservent les caractères dis- tinctifs des dialectes anciens dont ils descendent.

En

gallois, en

comique,

en breton,

comme

en gaulois, le quprimitifest remplacé par

un p

: quatre se ditpetguar,

pedwar

en gallois,

peswar

en comique, pévar, péouar,pouar enbreton. Celte substitution de con-

sonne

n’a pas lieu dans les langues nées de l'irlandais primitif;

quatre se diten vieilirlandais cethir, enirlandais

moderne

ceathair, en gaélique d’Écosseceithir

,en

manx

kiare. Les dialectes

modernes

nous offrentdonc la

môme

bifurcation quelesdialectes anciens.

On

désigne souvent par le

mot

« celtique » l’ensemble de ces dialectes

ou

languesd’âge différent,lesunes mères,les autresfilles;

mais

quand on

veut s’exprimer avecplus de rigueur,

on

distingue

deux

époques : l’épcque

du

celtiqueancien, dont l’origine se perd dans la nuit des temps, et l’époque néo-celtique, qui succède à

1.Varron,liv.XIV Rerumdivinarum,citépar Aulu-Gelle,liv.XV,cli.xxx. Varro cumde peiorntodixisset esseidverbumgallicum.Cf. Quintilien,liv.J,cli.v: gal- licavalueruntut...petorritum;etFestus,quiaumotPetoritums’exprimeainsi : et gallicum vehiculumesse etnomenejus existimantanuméroquatuor rotarum.

2. riETouapia, Ptolémée, éd.Nobbe, liv.II,ch. ni, § 17. Cf.Wilberg, p. 108

(7)

LES CELTES ET LES LANGUES CELTIQUES. 5

la première vers

une

date contemporaine de celle où naissent les langues néo-latines.

Nous

avons

emprunté

le

mot

«celtique » au grec. C’est

un

dérivé dusubstantifKsXtoç1par lequellesGrecsdésignaientlesCeltesconti- nentaux.

Ce

dérivéapparaîtpourla première fois,

mais

avec

un

sens géographique, chez HécatéedeMilet.Hécatée,versla fin

du

vi0siècle avantnotre ère, a publié

une

sorte de géographie universelle qu’il a intituléer^çrapfoSoçou «voyage autour

du monde

».

Malheureu-

sement iln’en resteque des débris. Maisdans

un

fragmentqui nous

a été conservé on lit: « Marseille, ville de Ligystique près de la

Celtique»; dans

un

autre fragment: « Nyrax, ville celtique 2 ».

Tels sont les premiers témoignages que nous ayons de l’existence

du

dérivé KeXnxo;.

L’auteur le plus ancien chez lequel on trouve le

mot

KsXto'ç est Hérodote, qui

mentionne

les Celtes

deux

fois : la première, dans son livre II,écrit de 445 à 443 avant notre ère; la seconde, dans son livre 1Y, qui est

un

peu postérieur. Suivant lui, les Celtes, KeXtoC, habitent à la source

du

Danube, et en

Espagne

sur les côtes de l’OcéanAtlantique3.

Ilestsouventquestion d’eux chezlesauteurs grecs

du

ive siècle.

Dès l’année 370 desmercenaires celtes au service

du

tyran Denys, viennent semêler auxluttes intestines des Grecs4. Bientôt

Théo- pompe

nous

montre

les Celtes guerroyant avec les Illyriens 5.

1. GUickaproposéde considérer KeXxo; commedérivé d’une racine kel, élever, quisetrouvedans plusieurslanguesindo-européennes,notammentenlatindans le dérivé celsus

=

cel-to-s(Beitraege de Kuhn,t.Y, p. 97). Cette étymologie peut êtrebonne. Elle n’estpascertaine. La racine kel, «élever», n’a pas encoreété retrouvée dansleslangues néo-celtiques.

2. MaooaXtatioXiç xŸjçAiyuaxtxriç, xaxàt9)V KeXxixr)V... 'Exaxaïoç EOpwrofl. Nupa£

716X1;xeXxtxrj. 'ExaxaïoçEupum^.Didot-Mueller,Fragmentahistoricorumgraecorum

,

t. I, p. 2.Le fragment 19, lignepremière, dans lequel Hécatée aurait misdes Celtes à Narbonne, estimaginaire,bien qu’onletrouve à lamômepage desFrag- mentahistoricorumgraecorumde Didot.

3. xicrxpoçxe yàp 7voxap.oç, àptjàp.evoçex KeXxwv xai IIup^VYiç 7roXioç, peet, piariv

<7)dÇu)V Eùpü>7r/]v.01SeKeXxoielaxe£w'HpaxXewv cxr)Xewv, ôpioupeouai Se

Kuvv

oxoïci, ëo^axotixpoç Suo-piwv oîxeouoi xtov evxfl EOpwTUfl xaxoixY]pivwv.Hérodote, liv. II,ch. xxxm, édition Didot, p. 82-83.

Péei yàp ôyjSià rajcaY];xŸjçEùpwTtYiç à v

Ioxpoçàpijàpievoçex KeXxwv, eo^axoi upoç rpiou Suojxewv piexà Kuvy]xaç oixéouot xwvèvtî] Eùpw7iï). Hérodote,liv. IV, ch. xlix,éditionDidot, p.198.

4.Xénophon,Helléniques, liv.Vit, ch.i,§20,31, édition Didot, p.467, 4G9.

5. Théopompe, fragment41, chez Didot-Mueller, Fragmentahistoricum graeco-

rum, t.I, p. 284-285. Ce fragmentappartientau livredeuxièmedesPhilippiques

,

qui étaitune histoire de Philippe, père d’Alexandre le Grand, et des événements contemporains,359-336. Théopompe vécutde 380 à 300environavantJ.-C.

(8)

6 LES CELTES ET LES LANGUES CELTIQUES.

Ephore-

met

l’Espagne dans la Celtique et attribue aux Celtes toute la partie

du monde

qui estentre le couchant d’étéet le cou- chantd’hiver2.Pythéas fut le premier Grec qui alla de Celtiqueen Bretagne,et,

du

port de la Celtique

il s’embarqua, il lui fallut plusieurs jours de navigation

pour

gagner le pays de Kent en Grande-Bretagne 3. Aristote a

connu

les Celtes. Je laissede côté les ouvrages apocryphes,tropsouvent cités, decegrandpolygraphe, je

me

borne

aux

ouvrages dont l’authenticité estadmise : suivant

lui, les Celtes se vantent de ne craindre ni les tremblements de terre, niles flots4; ils ne font porter à leurs enfants que des vête-

ments

légers 5; cependantle pays où habitent les Celtes qui sont au delà de l’ibérie est si froid

que

l’ûne n’y peut naître 6. Si nous en croyonsPlutarque, Aristote a su

que

les Celtes avaient pris Borne7.

Le

périple attribuéà Scylax de Caryanda,

monument

nous

trouvons la géographie politique desannées 338 à 335 avant J.-C., nous

montre

les Celtes établis au fond de l’Adriatique8.

1.

wE9opoç6sÙTCEpéàXXouoàvtsxiÔp-EyéÔEiXsyeittjvKeXtixyjv, okxte,rjairepvüv TSr\- piaçxaXoüpEV,èxeivotçTa EsteraxcpoavspsivpixpiTaSetpcov (Strabon,liv. IV, ch.iv, g 6). Epliore,fragment43,chez Didot-Mueller,Fragmentahistoricorumgraecorum,

î.I,p.245. Ephore écrivaitdanslaseconde moitiédu ive siècle.C’est un contem- porain deThéopompe.

2. Ot psv yàp [TvSoi] sîot p.£xa|ùÔEpivwv xaî yweip.spivwvàvaxoXwv. KeXxo'i xr,v

(mo ôepivtov psyp1 xeipîpivwv ouapôjv ytopav xaTsyooai, etc. Ephore, fragment 38, chez Didot-Mueller, Fragmentahistoricorumgraecorum, p.243-244.

3. ïïuôsaç, àvyjp^Euôiaxaxoç... xo Kàvxiovy][xspwvxtvwvtcXoûv àus'yeivty); KeXTtxîj;

çrjai.Strabona étéle naïfécho desrancunes dePolybe, qui ne pouvait pardonner àPythéasd’avoir recueilli,au ive siècleavantnotreère,toutessortesde renseigne- mentscurieux surle nord-ouestde l’Europe, tandis que Polybe, ausecond siècle, nepouvait obteniraucune indication précise. Mais Pythéas avait eulahardiesse d’allerlui-mêmejusqu’auxIlesBritanniqueset à lamerdu Nord,tandis que Polybe n’osajamaiss’éloignerdes côtesde la Méditerranée. Voir K. Muellenhof, Deutsche Alterthumskunde, t.I,p.353,354, 359. Strabon,liv. Ier,ch. iv,§3, éditionDidot- MuelleretDuebner,p. 52. Le voyage de Pythéas paraît contemporain du règne d’AlexandreleGrand, 336-323.

4. El priQsv 90601x0, [xïite cEtopov prjxE xùpaxa, xa0à7t£p (paa'c xoù; KsXxoOç.

Ethica Nicomachea,liv. III, ch.vu,édition Didot, t.II,p. 32.

5. Ilapà7ioXXotçsarixwv(3ap6àpü>v £0o;, toi; psveî;Ttoxapov à7ro6à7Txsiv xà yiyvo- p.£va^uypov,xoïç 6s oxÉTtaapa pu pèv apulaysiv, olov KeXxoÏ;. Politique, liv. VII, ch.xv, édition Didot,t. I,p.622.

6.

vExi6e i^uypôv xo Çaiov ô ovoçècrxlv 6toTC£p èv xoîçyEipsptvoiç 0sXei ylvscOa xotcoiç... olov... TceptKeXxoùç xoùç ùuèp x^ç T6y)piaçi];vxpàÏ“P <xüty]h X^pa<Deani-

mahum

generatione,liv.II, ch. vin,édition Didot,t.III,p. 3C9.

7. ’ApiaxoxÉXY); 6s ô91X60090;xo pèvà)ü>v aixyjvtcôXiv Otto KsXrwv àxpiêw; 6rjX6;

éoxtv àxYixoux;. Plutarque,Camille,ch. xxn,éditionDidot, p. 167.

8. Mexà6eToppYivoù;EtotKeXxo'i eOvo; àTioXei çôévxe;x9j;oxpaxeta;, èrci(rrevaivpéypi

(9)

LES CELTES ET LES

LANGUES

CELTIQUES. 7 Les Celtes de l’Adriatique envoyèrent

une

ambassade à Alexandre lors de son expédition contre les Thraceset lesGèles, versl'an 335, et Ptolémée, fils de Lagus,a parlé de cette

ambassade

dans

un

livre écritvers

Tannée

300 1.

Jusqu’au

m

e siècle avant J.-C. les Grecs n’ont eu qu’un

nom

pourdésignerles Celtes continentaux; ce

nom

est KeXto'ç. Quelleest l’origine de ce

nom

? Suivant Pausanias, écrivain

du

second siècle de notre ère, KsXxo;est le

nom

que les Celtes se donnaientà eux- inêmes 2. Vraisemblablement cette assertion n’est qu’en partie exacte. KsXroç est l’orthographe grecque

du nom

gaulois Celta, et César nous apprend qu’en gaulois Celta désigne,

non

pas l’en- semble desCelles continentaux,maisle

rameau

de la race celtique établientrelaGaronne,la Seineet la

Marne

à l’époqueoù

commence

la conquête de la Gaule transalpine, l’an 58 avant notre ère 3.

Ce rameau

de la race celtiquedut être le premieravec lequel la ville grecque de Marseille, fondéel’an 600 avantJ.-C.,

noua

desrelations commerciales;

quand

ce

nom

eutpénétré dans la langue grecque, on l’étendit aux autres

rameaux

de la famille dite depuis celtique, quoique dans leur langue nationale les

membres

divers de celte famille portassent d’autres

noms

4. Les Grecs se servirent

même

du nom

de Celtespour désigner les Germains. Dion Cassius, dans

\A8piou. ’EvxaüOa èaxiv ô [u>x°S xoû ASpi'ou xoXtcou. Didot-Mueller, Geographi graeciminores

,p. 25.

1. 4>rj(7t8è IIxoXep.aïo; ô Aàyou xaxàxauxriv xr)V crxpaxetav avpiputjai x<5AXe&xvSpco KeXxowç xoùçTcspîxôv ’Aoptav çiXtaçxaiSjevi'aç X“Ptv*Strabon,liv.VII,ch.3, §8,édi- tionDidot-DuebneretMueller, p. 250,Arriani Anabasis de Didot, seconde partie, p.87,fragment2; cf. lrepartie, Anabasis,liv. I,ch. iv, p. 5.

2. ’O^s 8s Tïoxsaùxoùc; xaXeïaQai TaXàxaç ètjevixYj<re. KsXxoî *yàp vtaxà xe açâc; àpxatov xat îrapà xotç àXXoïç (î)vop.àî;ovxo. Pausanias, liv. I, ch. in,§ 6,édition Didot-Dindorf,p.5.

3. Qui ipsorumlingua Celtae, nostra Galli appellantur... Gallos abAquitanis

Garumnaflumen,a BelgisMatronaet Sequanadividit.(DebelloGallico,lib.I,c.i.)

ComparezStrabon,liv.IV, ch.i,édition Didot-DuebneretMueller,p.146-147. Stra- bon metpar erreurlesCeltae àl'est desCévennes. Sur lesCeltae de César, voir Desjardins, Géographie historique et administrative de la Gaule romaine, t.II, p. 411-427 et462-499.De Celta dériveCeltillus,nomd’un gaulois de race Arverne, pèredu célèbre Vercingétorix.Debello Gallico,1. VII, c. îv.

4. C’estcequeditStrabon, liv. IV, ch.i, §14, édition Didot-MuelleretDuebner, p. 157. Seulementle savant géographe setrompe quand il avance que legroupe celtique spécialement désigné en sa languepar le motKeXxoç habitait la Narbon- naise. Il doit cette erreur àunefausse interprétation d’unpassage de Polybe,liv. III, ch.xxmi,§9, 2eéditionDidot,p. 143. LesCeltes quePolybenous montreprès de Narbonne dansce passage sont des Volcae,etnondesCeltes, dansle sensétroitdn mot. Sur les Volcae,voirlapage suivante.

(10)

'8 LES CELTES RT LES LANGUES CELTIQUES.

son histoire, écrite pendant la première moitié

du m

esiècle denoire ère, traduit systématiquement par Kekxoi le latin

Gcrmani

, tandis qu’il rend le latin Galli par TaVi-ai,

synonyme

grec relativement

nouveau

de KeXto;4.

Un

autre

nom

d’une branche de la famille celtique a été

em-

ployé pourdésigner la famille entière, c’estcelui de Volca.Ce

nom

appartenait en propre à

une

tribu celtique établie au nord

du

haut

Danube

dans la région qui, à partir de César, porte dans la géo- graphie ancienne le

nom

de

Germanie

2. Cette tribu envoya, proba- blement au

commencement du

111e siècleavant notre ère, unecolonie danslebassin

du

bas Rhône, sur les

deux

rivesduquelnouslatrou- vons établie lors

du

passage d’Annibal, 218 ans avant noire ère3.

Plus tard, elle s’avança davantage à l’ouest, et, sous la domination romaine,cettetribu, établie toutentièresurla rive droitedu

Rhône,

étaitdiviséeenVolcaeTectosagesàl’ouest,enVolcaeArecomicihYest4

.

Mais les Volcae de

Germanie

ont joué

un

rôle beaucoup plus consi- dérable.

Leur nom,

dont la forme

germanique

est Valah, devient, chez les Germains, le

nom

générique de la race celtique ; et

quand

ladomination

romaine

se futsubstituée à celle des Celtes, dans les

pays qu’ilsavaientoccupés au sud

du Danube

et à l’ouest

du

Rhin, les

Germains

transportèrent

aux Romains

le

nom

par lequel ils désignaientles Celtes.

De

le

nom

de Yalaques,

un

de ceux que

1. LemotKEATo;estl’équivalentdulatinGo//wsdansunseuKjiassagcde Dion Cas- sius; c’estlefragment34 del’éd.d’immanuelBekker,p.27.ChezDenysd’Halicarnasse, liv. XIV, ch. i, éditionTeubner-Kiessling,t. IV, p.198,laCeltique s’étend de l’O- céan Atlantique àla Scythieetà la Thrace, le Rhin lacoupe par le milieu:d’un côtélaGalatie (Gaule), del’autre laGermanie, quiestpar conséquent unepartiede laCeltique.

2. QuaefertilissimaGermaniaesunt loca circa Hercyniamsilvam...Volcae Tec -

tosages occupaverunt, atque ibiconsederunt; quae gens ad hoc tempuslussedibus sese continet summamque habet justitiaeet bellicaelaudis opinionem. (De btllo Gallico, lib.VI,c. xxiv).Lepéripleditde Scylax, qui datede338 à 335,dit: ’Atîo Têrjpcov eyovTai Aiyueç xai"lêripeç puyàSeç piywpi Ttotapioü ‘PoSavoù. Geograplu graeciminores de Didot,1.

1, p. 17.Lesnumismatistesattribuent à larégionsituée entrelesPyrénéesetle Rhône, outre des monnaies gauloise3, des monnaies ibéri- ques, etony trouve des nomsdevilleprobablementibériques. VoirGeorge Phillips dans lesSitzungsberichtede l’Académie de Vienne, classe de philosophieet d’his- toire,t. LXV1I, p.386-400; cf. A. deBarthélemy, dans la Revueceltique, t. III, p. 296.

3. Ilanmbal, caeteris metu aut pretio pacatis, jam in Volcarum pervennat agrum,gentis validae; colunt enim circa utramque ripam Rhodani. Tite-Lie, XXI, xxvi.

h. Mexpïtoü ‘Pooavoü TioTapioùOù6).xou ’Aptxopioi.Ptolémée,liv. II,ch.x,§10.

(11)

LES CELTES ET LES LANGUES CELTIQUES. 9 portent les populations de langue latine de l’Europe orientale; ce

nom

estidentiqueàValah. Waelsch,

nom

allemanddesItaliensetdes Français, Welsh,

nom

anglais des populations celtiques du midi de

la Grande-Bretagne, Wales,

nom du

payshabité par ces populations, sont des dérivésde Valah, et par conséquent de Volca.

On

doit ces rapprochements à

M.

Gaston Paris.

Nous

prononçons Galles l’an- glais Wales; el de Galles nous avons tiré « gallois »,

nom

d’une langue néo-celtique importantequi se parle encore en Grande- Bretagne. Il serait trop longd’exposer ici par quelles évolutions le gaulois Volcaa

donné

naissance au

mot

français « Gallois», qu’il faut se garder de confondre avec le

mot

français «Gaulois»

.

Les

Romains

ont pourdésigner les Celtescontinenlaux

un

terme spécialà leurlangue:c’est Gallus, dont nous avons tiré notre

nom

dérivé « Gaulois». Gallus, en latin, ne désigne pas seulement les populations celtiques de l’Italie

du

nord etcelles dela Gaule trans- alpineentreles Pyrénées et leRhin, il s’applique aussi

aux

Celtes d’Espagne 1, de

Germanie

2, de l’Europe orientale3 et

même

d’Asie

Mineure

4.

Le

terme géographique Gallia, dérivé de Gallus, a désigné en latin,

comme

tout le

monde

le sait, outre les terri- toires celtiques del’Italie

du

nord, la région située entre le

Rhin

et les Pyrénées : il existe

un exemple

del’applicationde ce

nom

à

une

autrecontrée celtique.

Sempronius

Asellio, qui écrivait entre les

années 90 et 80avant notreère,

met

en GauleNoreia

5

, capitale

du

Norique, aujourd’hui

Neumarkt

enStyrie. Il était naturel d’appeler Gallia toutle pays habité parles Galli, mais, à partirdes conquêtes de César, Gallia ut, dans la langue administrative de

Rome, un

sens précis et restreint que les historiens acceptèrent, et qui est encore reçu aujourd’hui. Notre

mot

Gaule a ce sens précis et restreint; ildésigne le pays situé entre leRhin, les Alpes, la Médi-

1. Tite-Live,XXIV, xlii.

2. Tite-Live,V, xxxiv;César,VI,xxiv; Tacite,Germanie

,

ch. xxvm, xliii.

3. Tite-Live,XXXVIII, xvi; XL1V,xxvi.

4. Tite-Live,XXXIlf, xxi; XXXVIII,xvi; XLÎ, xxm; XLIV,xxvii.

5. Norica caste/ladixitab urbeNorica quaeeü in Gallia, ut Asellio histona-

rumnoniqnarus docet. Scholiedu ms. BernesurVirgile,Géorgiques, III, 74,chez HermannusPeter,Historicorurnromanorumrelliquiae

, p. 183.

6. Césara employé une foisGallia pourdésignerlepayshabitépar ses Celtae,

entrelaSeine, la Marneet laGaronne : Remi, quiproximi GalliaeexBelgis sunt (DebelloGallicn,lib. II,c.m); ilse sert ausside Gallicommesynonymede Celtae:

Senonibusreliquisque Gallis qui finitimi Belgiserant (lib. II, c. h,cf. lib. I, c. î).

Maiscesensdu mot Gallus n’a pas prévalu dansl’usage; Gallus

,

dansl’usage, n un sens plus étendu quicomprendlesBelgaecommelesAquitanù

(12)

10 LES CELTES ET LES LANGUES CELTIQUES,

lerranée,lesPyrénéesetl’Océan.

On

appelleaussi cepaysGauletrans- alpinepourle distinguerdela Gaulecisalpine dansl’Italie

du

nord.

La

littérature antique a possédé, enfin, pour désigner l’ensemble des Celtes continentaux,

un

terme générique dont nous n'avons presqueriendit,c’est le

mot

grecra^arvjç1. Les plus anciensexemples

que

nous en ayonssont

deux

épitaphes. L’uneest celle d’un jeune Athénien mort en combattantlesGauloisà labataille

desThermopyles

en 279 2; l’autre est celle de trois jeunes filles de Milet qui se donnèrentla

mort

de crainte de

tomber

entreles

mains

de cesbar- baresen 2783. C’est probablement l’historien

Timée

qui a

donné

au

mot

TaXaTYi? la popularité dont il a joui plus tard4.

Timée

a

terminé son livre en 264avant J.-C. Sous la domination romaine,

lesauteurs grecsemployèrent ordinairementle

mot

raXàtï)?pour tra- duirelelatin Gallus, maisil leur arriva aussi de s’en servir

comme

de Ksato'ç pour rendre le latin

Germanus

: ainsi Diodorede Sicile

1. rocXàxriçestpresquele mêmemotquelevieilirlandaisgaldae

* gala-tio-s,

«brave »,queM. Whitley Stokes a trouvé dans la pièce intitulée Togail Troi,

« destructiondeTroie», dont il vientde donner uneédition d’après le livre de Leinster, ms.du xne siècle.Surlethème gala, dontgaldaedérive, voir les exem-

plesréunisdans laGrammatica celtica,2e édition, p.997, à la fin de lanote 14.

raXàxr); estunevariantedeTa),âxoç, motgauloisemployé comme nomproprechez Polybe, liv.II, ch. xxi, §5,danslerécitdes événementsde l’année238 avant notre ère;et quiestlenomd’unroi des Boïesd’Italie.

Agaldae (brave)

=

* galatios

,

dont les Grecs ont fait raXàxriç, comparez gaide (armé d’un javelot)

=

gaisa-

tio-s(dérivé de gai,javelot,

=

*gaisa-) dont lesGrecs ont fait raio-axT]? (Polybe, Strabon), à côté duquelse place le nompropre rouÇoxopioç (ibidem).

2. p.àXa 07*1'rcoôeouaavéav £xiKuSioo•/jêriv

àcmîçàpiÇïjXou çcoxoç,àyaXp.aAu, 8iàor)uptoTaç Xaiov Tioxe%r\yyv ëxeivev

eôx’E7Ù xov raXàxav^xpiaas Ooüpoç ’'Apy]ç.

Pausanias, liv.X, ch.xxi, §5,édition Didot-Dindorf,p. 520.

3. ’Q^opieO’, to MtXyyre,<piXr]raap xwvocôepucruov xavàvopLOvraXaxavxurepiv àvaiv6p.evai, uapÔEVtxoù xpiaaouTroXtYjxiSsç, ô (3iaxàç

KeXxujv sîç xauxYjv [xoïpavexps^ev ’Apvjç.

«Nous avons quittéla vie, ôMilet,chère patrie, pour échapperaux criminelles passionsdes Galates iniques.Nousétionstrois,viergesetcitoyennes,que la guerre et laviolence celtique ont réduites à ce triste sort.»Anthologie grecque, éditionDi- dot,liv. IV, 492;t. I,p. 368, 479.

4. TocXocxia,/topa*<hvop,àff9yi,w;97)01Ttp.aioç, àtuo FaXàxov KuxXa)7toç xatraXaxiaç (legeraXaxE’a;)vuoü.EtymologicumMagnum;Timée, fragment 37,Didot-Mueller, Fragmentahistoricorumgraecorum, t. I,p. 200. Callirraque, InDelum,vers 184, éd. Schneider, p. 41,se sertdumotraXàxY]ç. SurlesTaXàxat chez Eratosthène, voir Strabon, II,iv, 4. CallimaqueetEratosthène écrivaientauiuesiècle av. J.-C.

(13)

LES CELTES ET LES

LANGUES

CELTIQUES. 11 appelleTaXocxai les

Germains

de la rive droite

du Rhin

attaqués par César en

Tan

55 avant J.-C. 1. Aujourd’hui ce

nom

est

employé

pourdésigner le

rameau

de la race celtique qui s’établit en Asie Mineure au 111esiècle avant notreère.

DesquatremotsKeXtoç, Volca(prononcé Valahparles Germains), Gallus, ro^aTYiç,quenous trouvonsemployés chez lesanciens

comme noms

génériques représentant à l’esprit, sinon la totalité, au

moins

laplusgrande partiedela race, KeXtoç, Celte, est celui qu’avec son dérivéxeXnxoç, celtique, les savants

modernes

ont préféré.

On

s’en

sertpourdésigner l’ensemble despeuples delarace sans restreindre,

comme

les anciens, l’application de cesvocables

aux rameaux

conti- nentaux, eten l’étendant aux

rameaux

établis dansles Iles Britan- niques.

Lestroismots Volcaou Valah, Gallus et

TaXa^

sont réduits sous leurs formes

modernes

à

un

sens plus restreint. Volca ou Valah ne subsisteavecson sens primitif

que

dans le dérivé « Gallois »

nom

français d’une population néo-celtique de la Grande-Bretagne

; de

Gallus vient « Gaulois », terme consacré pour désigner l’ensemble des Celtescontinentauxd’Europe, l’Espagneexceptée, autempsdela

République et de l’Empire

romain

d’Occident.

On

appelle Galates les Celtes d’AsieMineure.

II

MaisdepuislongtempsilneseparleplusdelangueceltiqueenAsie Mineure. Aujourd’hui, le

domaine

géographique des langues cel- tiquesse trouve à l’extrême nord-ouest de lapartie

du monde

que nous habitons. L’ensemble des territoires où la population parle les

langues celtiques,

ou

plus exactement les langues néo-celtiques, constitue

une

sorte de groupesitué en

Europe

près des côtes sep- tentrionales del’Océan Atlantique.

Sur

la carte d’Europe, cegrour forme, pour ainsi dire, pendant au

domaine

géographique df a langue grecque,que nous rencontrons àl’extrême sud-est, etqu_ est séparé des régions celtiques par

un

intervalle considérable. Cet intervalleestoccupé principalement parlestroisprincipaux domaines linguistiquesde l’Europe

moderne

: le

domaine

néo-latin ou roman,

le

domaine germanique

et le

domaine

slave.

Il n’en a pasété toujoursainsi, et l’histoire nous conserveJesou- venir d’une époqueoù les Celtesétaientvoisins immédiatsdes Grecs.

1. Diodore,liv. V,ch. xxv, §4, éditionDidot-Müller,p.269.

(14)

12 LES CELTES ET LES LANGUES CELTIQUES.

Alors la langue ouleslanguesceltiques se parlaient dans

une

éten- due de pays

beaucoup

plus grande qu’aujourd’hui.

Aujourd’hui,le

domaine

géographique des langues celtiques est fort exigu.

En

France, c’est le département

du

Finistère,

moins

les villes; environla moitié desdépartementsdes Côtes-du-Nord et du

Morbihan;

et

un

coin sansimportance de la Loire Inférieure.

Dans

les IlesBritanniques, ce sont

deux

tronçonsde laGrande-Bretagne:

l’un, sur la côte occidentale en face de l’Irlande, l’autre, à l’extré- mité N.-O.; ce sontquelques îles secondaires, et

une

partie del’Ir- lande, à l’ouest etau sud. L’ensemble des populations qui parlent en

Europe

les langues néo-celtiques peut être évalué à trois mil- lionsd’âmes.

Cela paraît bien

peu

de chose

quand

on

met

en regardles trois familles linguistiques qui

dominent

en

Europe

aujourd’hui : la

famille néo-latine, la famille

germanique

et la familleslave. Il

n’entre pasdans

mon

sujetde

donner

de ces familles linguistiques

une

statistique précise, je

me

bornerai à dire que chacune d’elles

comprend

en

Europe

90 à 100 millions d’individus, et j’appellerai votreattention sur la situation géographique de ces populations si

considérables.

Le domaine

géographique des langues néo-latines ou

romanes comprend

la plusgrande partiede lapéninsuleibérique, de

la France, de l’Italie, de la Belgique;

une

portion de la Suisse;

divers territoiresdans l’empire autrichien et au-delàdecetempire, au nordet au sud

du

bas Danube.

Dans

le

domaine

géographique des languesgermaniques, nous trouvons : la plus grande partie des Iles Britanniques, de l’empireallemand, dela Suède, de laNorvège,

le

Danemark,

la Hollande;

une

portion considérable de l’empire d’Autriche, de la Suisse, delaBelgique.

Le domaine

slave,qui tient

une

place siimportante dans l’empire russe, déborde sur l’empire allemand, sur l’empire d’Autriche, et s’étend fort loinau sud

du

bas

Danube.

Telesten

Europe

l’étatactuel des domaines néo-latin, slaveetgermanique.

Bemontons

à près de vingt-deuxsièclesen arrière, aux environs de l’an 280 avant Jésus-Christ.

A

cette date l’état de l’Europe est biendifférent.Alorsilyaquarante-troisansqu’Alexandrele

Grand

est

mort,etqu’acessél’unité politique

du

vasteempiregrecfondéparcet illustreconquérant. Mais

une

langue unique y restemaîtresse; et le

domaine

géographique des langues celtiques, rejeté plus tard à l’extrême N.-O. de l’Europe, est en contact immédiat avec ce cé- lèbre empire. La langue latine, si puissante plustard, n’a encore acquis la suprématieque dans l’Italie

du

centre:

Rome,

longtemps

(15)

LES CELTES ET LES LANGUES CELTIQUES. 13 enlutte avec lesGaulois, vient de remporter sur

eux

sonpremier succès décisif à la bataille de

Vadimon,

etcolonise le territoire des Senons; maiscela

n’empêche

paslesCeltes de.

dominer

dans l’Italie

du

nord. La race

germanique

et la raceslave, qu’un si brillant ave- nir attend, existent certainement à cette

époque;

mais où précisé-

ment?

Sont-elles indépendantes ousujettes?

Leur

situation à cette date reculéeest plutôt

du

ressort de la conjecture que de celui de l’histoire

L La

langue dominante dans l’Europe

du

centre et de l’ouestestalors lalangue celtique.

La

race celtiqueest maîtresse de la plus grandepartie de la péninsule ibérique, des Iles Britanni- ques, etd’un vaste territoire qui forme aujourd’hui la France

du

nord et

du

centre 2, la Belgique, la Hollande, les provinces occi- dentales et lesÉiats méridionaux de l’empire allemand, l’empire d’Autriche presque tout entier.

En

281, Lysimaque, roi de Thrace, périt àla bataillede Corus; son

royaume, mal

défendu,

tombe

entre les mains des Celtes, qui, jusque-là, avaient respecté l’empire d’A- lexandre, et qui bientôt poussent leurs incursions jusqu’à Delphes

etvont s’établir

même

en Asie Mineure. Dèslors, en Europe, l’em- pire celtique s’étendde l’océan Atlantique à la

mer

Noire,

comme

de la

mer du Nord

àla

mer

Adriatique, etdesIlesBritanniques aux environs

du

détroit de Gibraltar,

Dans

celte

immense

étendue de pays, on parlaitcertainement bien deslangues : l’étrusque et l’om- brien dans l’Italie

du

nord; l’illyriensurle

Danube;

l’ibère en Es- pagne; et d’autres languesencore, parmi lesquelles probablement

f

plusieursdontnous ne savons pas

même

les

noms;

mais c’étaient des langues de races inférieures et asservies.

Sur

les bords du Da- nube, dans tout son parcours, sauf la partie orientale de larive gauche, surlesbords

du

Rhin,

du

haut Elbe, de la Tamise, de la Seine,

duTage

et de l’Ebre, la langue des maîtres, la langue

du commandement,

était unelangue celtique, c’était le gaulois.

Depuis cr te époque,

combien

l’aspectde l’Europea changé! Sui- vantla légenderomaine,

un

Gaulois, enivré par l’orgueil

du

triom- phe, laissa

un

jour échapperune exclamation cruelle:

Malheur

aux

1. On n’est p..s d’accord sur la lecture ni sur le sens du passage où Pline,

XXXVII,§35, rapporteque Pythéas,probablementau pointextrêmede son voyage, danslaseconde moitiéduive siècleavantJ.-C.,trouva un peuplequi paraît avoir étégermain. VoirMüllenhof,Deutsche Alterthwnskunde, p. 476, 479. Cf. Zeuss, Die Deutschenunddie Nachbarstaemme, p. 135, 269.

2. Il n’estpas certain qu’à cettedato la race celtiquefût établie déjà sur les côtesde

h

Méditerranée.

(16)

14 LES CELTES ET LES

LANGUES

CELTIQUES.

vaincus! Si cette dure parole a été dite alors, elle a été plus tard bien rigoureusement expiée. Après avoir eu longtemps la victoire pour

compagne

inséparable, leCelte,vaincuà son tour, Ta

vue

de- venir l’opiniâtreassociée desesennemis; le

malheur

s’est sans re- lâche acharnésur lui, et les désastres succédant

aux

désastres ont été presque sa seulehistoire.

Aujourd’hui la langue gauloiseadisparu de tousles pays

nous

venons

de la

montrer

dominante; leslangues néo-latines, germani- quesetslaves l’ontsupplantée partout,saufdans lespetitespartiesde

la France et des Iles Britanniques

les langues néo-celtiques vivent encore. Elles vivenl, mais dans

une

situation

subordonnée

:

en France,sous la domination d’une langue néo-latine, et dansles lies Britanniques, sous la domination d’une langue germanique.

Dans

nos départements bretons, le français, langue des châteaux

comme

des villes, arelégué le breton danslesgranges, les cuisines, les fermes et les chaumières.

En

Irlande la langue nationale fait

peu

à peu partout place à l’anglais; l’anglais, son rival heureux,

l’a supplantée

même

dans les harangues les plus fougueuses des plus ardents

ennemis

de l’Angleterre.

Cettedéchéancedeslanguesceltiquesa eu pourcause principalele

développement

considérablede la puissanceromaine. Les Romains, qui avaient

commencé

la conquête de la Gaulecisalpineenl’an283 avant notre ère, la terminèrent

moins

d’un siècle plus tard, vers l’année 191. La soumission de l’Espagne

demanda moins

de temps : l’hégémonie gauloise y avait été détruite par les Carthaginoisde 236à 219; les

Romains

y substituèrent leur suprématieà celle de Carthage pendantla seconde guerre punique, de 218à206. La con- quête de la Gaule transalpine

commença

dans le siècle suivant; les

Romains

yfirentleurpremière guerre en 125, et c'est en 51 quese termina la lutte

mémorable

de César contre les efforts réunis des populations indépendantes de celle contrée. L’asservissement des Celtesde la Gaule transalpine fut suivi de près par la conquête des pays celtiques situéssur la rive droite

du Danube

dans tout son cours. Cefut Augustequi compléla ainsi l’œuvre de son père adop-

tif. Les Celtes de Yindélicie, de Rhétie, de Norique, de

Pannonie

etde Mésie devinrentsujets de l’empire romain.

Dans

le siècle sui- vant, la domination

romaine

s’étenditsur laplus grande partie dela

Grande-Bretagne.

La

conquête de cette île, saufsa région la plus septentrionale,

commença fan

43 de notre ère et se termina en l’année 85.Depuis la bataille de

Vadimon

et laconquête

du

pays

(17)

LES CELTES ET LES LANGUES CELTIQUES. 15 des

Senons

d’Italie, il s’étaitécoulé troiscent soixante-huit ans. La résistance avait été souvent glorieuse, quelquefois héroïque, mais toujours impuissante.

Attaqués avectant de succès par les

Romains

au sud, lesCeltes avaientau nord d’autres

ennemis heureux

: c’étaientles Germains, qui leurenlevèrent peu à peu toutes leurs possessions au nord

du

Danube, sur la rive gauche de ce fleuve, dans la vallée

du

haut Elbe, etdans la partie orientale

du

bassin

du

Rhin. C’est en 113 avant Jésus-Christ, avec l’expédition célèbre des Cimbres et des Teutons, que, pour lapremière fois, les

Germains

apparaissent clai-

rement dans l’histoire. Dès l’année 58 avant notre ère, où César

commence

la guerredes Gaules, les

Germains dominent

dans toute larégion comprise entre la

mer du

Nord, le

Rhin

et le

Danube;

et cetterégion, danslagéographie romaine,porte le

nom

de Germanie.

Le

mot

«

Germanie

» a été

employé

en cesens parla plupart des géo- graphespostérieurs. Cependant César connaissait encore danscepays

une

population gauloise indépendante

\

dont Tacite, à la fin

du

premiersiècle de notre ère, ne signale qu’un débris, les Gothini, voisins à la fois des

Germains

et des Sarmales, et tributaires des

deux

peuples2.

A

cette époque, il n’y avait plus de Celtes indé- pendantsque dans lenord dela Grande-Bretagne et en Irlande. La conquête de ces pays par la race

germanique

était réservée au

moyen

âge et à lapériode anglo-normande de l’histoire des Iles Bri- tanniques.

Avant lachute de l’empire romain d’occident, les

Romains

sub- stituèrentla langue latine à la langue de la race celtique dans tous lespays conquissur elle, saufen Grande-Bretagne3.

Le

gallois, le

comique

éteintau siècle dernier, le breton apporté en France par

une

émigration de Grande-Bretagne à une époque contemporaine de

la chule de l’empireromain, sont des langues celtiques, malgré la mutilationdeleur

grammaire

et la présence dans leur vocabulaire d’une foule d’éléments latins,

monuments

de la conquête romaine.

La

langue celtique parléeau nord de la Grande-Bretagne par la

population indépendante, au

temps

de l’empire romain, adisparu

1. De bello gallico,lib.VI,xxiv.Il s’agitdes VolcaeTedosages.

2. Gothinos gallica... lingua coarguit non esse Germanos,et quodtributapa- tiuntur. Partent tributorumSarmatae,partent Quadi

, ut alienigenis, irnponunt.

Tacite,Germanie,ch. xliii.

3. Unbonlivresur cettematièreestcelui deM. Alexandre Budinszky, DieAus- breitung derlateinischen Spracheueber Italienund dieProvinzen desRoemischen Reiches, Berlin, 1881.

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