R EVUE DE STATISTIQUE APPLIQUÉE
E. M ALINVAUD
Introduction à l’étude des programmes linéaires
Revue de statistique appliquée, tome 3, n
o2 (1955), p. 109-117
<
http://www.numdam.org/item?id=RSA_1955__3_2_109_0>
© Société française de statistique, 1955, tous droits réservés.
L’accès aux archives de la revue « Revue de statistique appliquée » (
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) implique l’accord avec les conditions générales d’uti- lisation (
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109
INTRODUCTION A L’ÉTUDE DES PROGRAMMES
LINÉAIRES
par
E. MALINVAUD
Ancien élève del’École Polytechnique
Administrateur Général à l’Institut National de la
Statistique
et desÉtudes Économiques
De
développement
très récent, la technin_ue des programmes linéaires suscite chaque 10ur davantage l’attention des organisateurs et des chercheurs. Conçue d’al;.ord par les économistes pour leurs besoins prcgres, elle~ trouveau ’iourd’hui
der applications dans les domaines les plus divers et devra bientôt prendre place dans la formation générale des I ngénievrs. Il a paru intéressant d’en présenter ici som- mairement la méthode et les caractères généraux. L’article suivant !! faitl’objet
d’un exposé au Séminaire de Recherche
Opérationnelle
de l’Institut de Statistique de l’Université de Paris, le 8 décembre 1954.Toute une
partie
des rechercheséconomiques
etéconométriques
actuelles estorientée vers les
problèmes
degestion
oud’organisation
etprésente
ainsi desrapports
très étroits avec la rechercheopérationnelle.
Etude des schémas d’in- formation dans lesentreprises,
détermination desprocédés
lesplus avantageux
pour la
gestion
des stocks, examen des méthodes rentables pour l’utilisation d’ un matériel detransport,
autant desujets qui
intéressent à la fois les bureaux de rechercheopérationnelle
et les économistes soucieux de mieux connaître les mé- canismes de laproduction
et de la distribution des richesses.L’analogie
de spré - occupations
se manifeste toutparticulièrement
dans les travaux sur les"program-
mes linéaires". Cette
expression,
traduction del’anglais
"LinearProgramming"
serait
plus
exactementtransposée
par"programmation
linéaire"qu: évoque plus précisément
l’idéed’organisation.
Dans satechnique
même, un programme linéaire outil de raisonnement ou intermédiaire decalcul,
résulte leplus
souvent d’uneanalyse
des différentesopérations
élémentairesqui
interviennent dans unsystème
de
production,
dedistribution
ou de circulation. Cetteanalyse
semble être un desprocédés
lesplus
habituels de la rechercheopérationnelle.
Formellement, et dans son
expression
laplus simple,
tout programme linéairepeut
être défini par unsystème d’inégalités
linéaires :!
a,, x, + a 12 x2 + ... + a~n x,>
c, 1S a 21 XI l + a 22 X2 + ... + a 2n Xn
~
C 2~
amI X, dm~ X~ + +am2X2+ dm2X2+
... + ... +amnXn ~
dmnXn Cmcou encore
Aux
cet par une forme linéaire
R =
p~ x~+ pz x2
+... +pn
xnou encore
R --
p’x
où les aU les ci et
le s pi
sont desparamètres
donnés et les xi des variables. Dans lareprésentation
matricielle, A est la matrice desa;~ ,
tandis que x, c et p sontles vecteurs des xi , des ci et des pi .
Déterminer la solution du programme linéaire consiste à trouver n nombres
non
négatifs
x1’ x2 .... xn defaçon
à rendre minimum R, tout enrespectant
lesystème
S.Plutôt que d’aborder directement l’étude
mathématique
dessystèmes
ainsiintroduits,
et de leur solution, il convient d’examiner le contexte danslequel
ilsse
présentent. Ceci permettra de
mieuxcomprendre
la nature desquestions
et d’in-terpréter
utilement lesréponses qui
leur sont données.ANALYSE DES
OPÉRATIONS ÉLÉMENTAIRES - QUELQUES
EXEMPLESLe but de
l’organisation
consiste souvent à combiner un ensemble"d’opérations
élémentaires" de la meilleure
façon possible.
Voiciquelques exemples qui
intro-duiront assez naturellement notre étude et montreront la
portée
réelle des méthodes que nousenvisageons.
Supposons
d’abord que certains centresexpéditeurs
ou consommateurs A, B, C, D, E et F parexemple,
aient àexpédier
ou à recevoir desquantités
donnéesd’une même
marchandise,
le total desexpé-
ditions étant
égal
au total des livraisons. Ces centres sont reliés entre eux par un certain réseau detransport,
muni d’un matériel con- venable. Commentorganiser
la circulation du matériel defaçon
à réduire leplus
pos-sible les
charges d’exploitation?
Pour êtreplus précis, figurons
sur ungraphique
lesliaisons de
transport. Supposons
que A, Eet F sont
respectivement
consommateurs de 120, 80 et 150unités,
tandis que B, C et D sontexpéditeurs
de100,
200 et 50. Quellesquantités
faudra-t-il faire circuler surchaque ligne
connaissant lacapacité
maximumde la
ligne
et les f rai sd’exploitation
à latonne
transportée?
Dans ce cas, une
opération
élémentaire consistera parexemple
dans le trans-port
d’une tonne de B à D par laligne
BD. Leprogramme’doit préciser
letonnage
àtransporter
surchaque ligne
danschaque
sens, c’est-à-dire la mesure dans la-quelle
on feraappel
àchaque opération
élémentaire. L’intensité d’utilisation d’uneligne
dans un sens déterminé seraappelée
"niveau d’activité" del’opération
élé-mentaire
correspondante.
Comme autre
exemple,
demandons-nous comment déterminer unrégime
ali-mentaire
qui
soit le moins cherpossible
etqui
satisfasse à un certain nombre de conditions ’apport
minimum en calories,répartition
convenable entreprotides, lipides
etglucides, quantités
minima de sels minéraux et devitamines,
etc...Cette
question peut
être traitée en définissant commeopération
élémentaire l’in- clusion dans lerégime
d’unequantité
unitaire d’untype
donné de nourriture. Il yaura autant
d’opérations
que d’aliments. Lerégime
sera déterminé dès lors quesera fixée la
quantité
retenue dechaque
aliment, c’est-à-dire le "niveau d’acti- vité" dechaque opération
élémentaire,Reprenons
finalement ici unexemple
examiné par M. MASSE(1).
Commentl’électricité de France doit-elle
employer
les crédits d’investissement dont elledispose
pour créer deséquipements qui
luipermettent
deremplir
le Plan et deréduire au minimum les
charges d’exploitation
futures ?Supposons
que l’E . D. F .puisse
créerquatre types
d’usines : Usinethermique,
usine au fil del’eau,
usine de lac et usine d’éclusée. Elle fournit desproduits
d’une nature trèscomplexe.
Mais, pour les besoins de
l’investissement,
onpeut
raisonner comme si tous cesproduits
se ramenaient à trois seulement :Energie
annuelle(nombre de kWh), puissance
d’heurespleines d’hiver, puissance
depointe
de Décembre. Le Plan fixeles fournitures des différentes
espèces
à assurer.(1) -
L ’équipement électrique sous l’aspect de la fabrication des produits liés. Conférence présentée le 25 Octobre 1954 au Séminaire de Recherche Economique de M. ALLAIS.111
Une
opération
élémentaire consiste ici dans l’installation d’une tranched’équi- pement d’ un type donné.
Lasolutiondoitindique r le s
tranches à réalise r sur chacun de squatre types
d’usines et fixer ainsi les "niveaux d’activité" propres aux qua- treopérations.
ANALYSE DES
OPÉRATIONS ÉLÉMENTAIRES - ÉTUDE THÉORIQUE
Comme il
apparait
dans lesexemples précédents, quelques
constantes carac-téristiques
sont associées à touteopération
élémentaire.Ainsi,
pour laligne
detransport
BD, dans le sens de B vers D,l’opération
élémentairecorrespond
àl’expédition
d’une tonne de B, à la livraison d’une tonne en D et à des frais d’ex-ploitation d8D.
De même, l’achat d’un kilo depain correspond
à une certaine dé-pense en francs et à des
apports
bienspécifiés
de chacun des éléments nutritifs.Une tranche
d’équipement thermique
entraine desdépenses
d’investissement connues descharges d’exploitation
futureségalement
connues ; elle fournira un certain nom-bre de
kWh,
assurera une certainepuissance
depointe
en Décembre et une certainepuissance
moyenne d’heurespleines
d’hiver.Pour
compléter
laterminologie imagée
que nous avonsadoptée,
J disons quetoute
opération
élémentaire se traduit par laproduction
ou l’utilisation de certains"biens". Ainsi, dans le
premier exemple,
les biens seront lesquantités
nettesexpédiées
de chacun des centres et les fraisd’exploitation.
On dira alors que lfo-pération
élémentaire BDproduit
une unité du bien B,.- 1 unité du bien D etd8D
unités du bien "fraisd’exploitation".
Danschaque exemple,
la liste des biens serafacile à établir. L.’un d’eux
jouera toujours
un rôleparticulier,
celui parrapport auquel
doit être effectuée la maximation ou la minimisation.Appelons
doncpj
laquantité
de ce bienprivilégié produite
parl’opération
élé-mentai re j (j =
1, 2, ...,n).
Numé rotons le s autre sbiens,
de 1 à m. SoitaU
la. 1quantité
de biens iproduite
parl’opération j.
Autotal,
un ni veau d’activité unitairepour j
se traduira parl’apparition
desquantités
suivantes des différents biens :a;~ , a2j
... °aij
... °âr"j r pj
JUn niveau d’activité
xj
pourl’opération j signifie
parexemple
que l’on trans-porte Xj
tonnes de B en D, que l’on inclut dans lerégime Xj kilogs
depain,
ou quel’on installe
xj
tranchesd’équipements thermiques. On admet généralement la pro- portionnalité
entre les niveauxd’activité et lesquantités
obtenues. Ainsi, corres-pondant à Xj ,
on aura ’ °alj Xj’ a2j Xj
... °ai,
j .... °amj xj pi Xi
Cette
hypothèse, supposée
vraie pour toute valeurpositive
dexj,
seraparfois
assez mal vérifiée. Par
exemple,
lescharges d’exploitation
sur uneligne
ferro-viaire ne
sontgénéralement pa~ proportionnelles
auxtonnages transportés.
Néan-moins,
dans laplupart
des cas, cettehomogénéité supposée
pourra être retenue.Si maintenant toutes les
opérations
sont effectuéessimultanément"chacune
avec son niveau d’activité propre, on
peut
s’attendre à obtenir lesdisponibilités
suivantes de
chaque
bien :Cela exclut les
phénomènes
decomplémentarité.
Nouvellehypothèse qui
neserait par
exemple
pas admissible dans un modèle detransport
ou on utiliserait simultanément les deux activités :transport
de B en D ettransport
de D en B. En effet lescharges d’exploitation
résultant d’untransport régulier
de 1000 tonnes deB en D et de 1000 tonnes de D en B ne sont pas
égales
à la somme des frais occa-sionnés par un
transport régulier
de 1000 tonnes de B en D avec retour à vide etde ceux occasionnés par un
transport régulier
de 1000 tonnes de D en B avec retourà vide.
Néanmoins,
comme les deuxhypothèses d’homogénéité
et d’additivité peu- vent souvent être retenue s enpratique,
au moins à titre depremiè
reapproximation ,
Jle résultat d’ensemble des
opérations
se calcule facilement à l’aide des expres- sionsprécédentes.
Les conditions du
problème imposent
aussi certaineségalités
ou certainesinégalités
sur les résultats obtenus. Dans lepremier exemple,
laquantité
de bienB obtenue doit être
égale
à a + 100. Dans le second, lerégime
alimentaire doitapporter
un nombre de caloriesqui
ne soit pas inférieur à un certain minimum, etc...Si,
parexemple,
iln’y
a que desinégalités
et que les biens ont été définis defaçon à
donner le même sens à toutes cesinégalités,
il faudra satisfaire unsystème
tel que *Trouver la solution du
problème impose
finalement que l’on réduise au mi- nimum, ou que l’ongonfle
au maximum, laquantité produite
du bienprivilégié :
frais
d’exploitation
ou coût durégime.
Il faudra donc rechercher le minimum oule maximum de .
en choisissant pour celales niveaux d’activité les
plus
favorables. On voit ainsi comment nous avons été conduits à introduire un programme linéaire dans la for-me
qui
a été annoncée au début de cet article.ÉTABLISSEMENT
DE LA MATRICE A ET DU VECTEURp
DANS UN CAS PARTICULIERA titre
d’exemple,
reprenons leproblème
detransport légèrement simplifié,
conformément au schéma ci-contre.
Voyons
alorsplus précisément
comment ilpeut
être mis enéquations,
suivant lesprincipes envisagés
ci-dessus. Lesopé-
rations élémentaires sont au nombre de huit, caractérisée chacune par le trans-
port
d’une tonne d’un centre à un centre voisin, parexemple
de A à B ou de A à C.La liste de ces
opérations figure
àgauche
du tableau I. Afin de lesrepérer plus simplement,
un numéro leur a étéaffecté,
entre 1 et 8. Enplus
du "bien"privi- légié représenté
par les fraisd’exploitation
du montantdi
pourl’opération
i, ilexiste
quatre
"biens"qui correspondent
auxexpéditions
nettes de chacun des cen-tres. Définissons l’unité de
chaque
bien parl’expédition
d’une tonne du centrecorrespondant.
Pour établir la matrice desa ;j
les biens ont étéportés
en colonnes enhaut du tableauI,
les coefficientsaij peuvent
alors être inscrits direc- tement dans le carré central. Parexemple, l’opé-
ration 1
implique
letransportd’une
tonne de A versB et conduit donc à 1 pour le bien A, à -1 pour le bien B et à 0 pour les deux autres biens. Pour sim-
plifier
la lecture, les coefficients nuls n’ont pas étéreproduits. Enfin,
en bas dutableau,
le programme demandé a été inscrit. On voit donc nettement lesquantités
désirées dechaque
bienPour écrire le
système d’équations,
il suffit de supposer quel’équation
i estemployée
avec le niveau xi etimplique
laproduction
de x;aij
unités debien j.
Parexemple, l’opération
1 sera utilisée à concurrence de x~, cequi
se manifestera parl’expédition
de x tonnes de A. Enmultipliant
ainsichaque ligne
de la matricea;~
par le niveau xicorrespondant
et en faisant les totaux dans les colonnes, on ob- tient donc directement lesystème
S, telqu’il figure
en-dessous du tableau. Cette mise enéquation
est très directe; elleexige
moins detemps qu’il
n’en faut pour la décrire.VARIANTES DANS LA FORMULATION DES PROGRAMMES
LINÉAIRES
La formulation des programmes linéaires est
sujette
à certaines variations.Le
système
Speut
être écrit avec deségalités
ou desinégalités. Cecin’estcepen- dant qu’une modificationapparente, puisque
leségalités pourraient
êtresupprimées
par élimination d’un nombre suffisant de variables
xj.
Il y a, si l’on veut, deux formes extrêmes.TABLEAU 1
MISE EN
ÉQUATION
D’UNPROBLÈME
DE TRANSPORT.
Système
S :(a) -
Lesystème
Scomprend
minégalités
entre n variablesxj assujetties
à être
non-négatives ;
(b) -
Lesystème
Scomprend m égalités
entre n + m variablesxj assujet-
ties à être
non-négatives;
On passe de la forme
(a),
tellequ’elle
a été écrite au début à la formule(b)
par les relations ’
Inversement, si lé
système
est écrit sous la forme(b)
onpeut toujours
ex-primer
les n variables xn+t,xn+2 ... · xn+m par une fonction linéaire des n variables x1x2 ... xn et éliminercomplètement
lepremier
ensemble devariables,
en con-servantm
inégalités qui expriment le
caractèrenon négatif
de.-. variables éliminées.Plutôt que par leur
présentation formelle,
les programmes linéaires doivent être classésd’après
les valeurs de n : nombre de variablesindépendantes (ou
di-mension du
problème)
en n + m : nombred’inégalités
linéaires.Une autre distinction
plus
fondamentale doit être établie.Plutôt que
de consis- ter dans la recherche du minimum d’une seule formelinéaire,
leproblème peut impliquer
la minimisation simultanée de deux ouplusieurs
formes linéaires :Evidemment,
lesobjectifs représentés
parR1
etR.
sont engénéral quelque
peu contradictoires. Tout au moins peut-on rechercher les solutions "admissibles"
du problème,
dans le sensqui
va être défini. Considérons un ensemble de valeurs desxj,
soit :x
* = { X 1 *
,xi , ... xi* x
Il sera dit admissible s’il satisfait le
système
S et s’il n’existe aucun autre ensemble x satisfaisant S et tel que ’Rt (x) -- R1 ( x *)
etR2 (x) R2 (x *)
ou
RI(x) R1(x~)
etR2(x) R2(x*) .
Autrement
dit,
une solution sera admissible s’il n’est paspossible
de réali-ser une valeur
plus
faible de l’une des formes linéaires sans entraîner un accrois- sement de l’autre.La figure
ci-contre illustre le s différentes solu- tions d’un programme linéairecomprenant
deuxopé-
rations élémentaire s
(donc :
n= 2)
et quatreinégali-
tés
(donc
m -4).
L’ensemble despoints (xI’ xz) qui
satisfont le
système
S est constitué par unpolyèdre
convexe, hachuré sur la
figure.
La solution du pro- grammelorsqu’il
faut minimiser la formeR1
estreprésentée
par lepoint
C. Les solutions du pro- gramme associé à la formeR2
sont lespoints
dusegment
AB tout entier. Les solutions admissibleslorsqu’on
cherche à minimiser simultanémentR1
etR2
sont lespoints
de l’un ou l’autre des deux seg- ments AB et BC.On
voit que
toutpoint
admissiblepourrait
aussiêtre obtenu comme solution d’un programme dans
lequel
on chercherait le minimum d’une forme : R =OtR1
+(1 -oc) R2 ,
1ou oc est un nombre convenable du
segment 10 il
Adopter
une solution admissible revient alors à éta- blir uneespèce
depondération, plus
ou moins im-plicite,
entre les deuxobjectifs
non concordantsreprésentés
parR,
etR2.
Onpourrait
voir quecette
propriété
est vraie en toutegénéralité quels
que soient n, m et le nombre des formesRk.
NATURE
MATHÉMATIQUE
DUPROBLÈME
Reprenons
leproblème
initial pouranalyser
sa naturemathématique.
Si A estla matrice des
a;~ ,
p le vecteur despj
et c le vecteur des c; , il s’énonce :Problème - Trouver un vecteur
x ~
0 à n dimensions tel quep’x
soit minimumavec la condition
Ax ~
c.Il
s’agit
donc de déterminer un minimum lié. Si lesinégalités
étaient rem-placées
par deségalités,
nousprocéderions
sans difficultégrâce
à l’introduction de facteurs deLagrange
convenables. Laprésence
desinégalités
ne fait pas dis-paraître
totalement les facteurs deLagrange.
Mais elle les rendbeaucoup
moins intéressants. Avant d’enindiquer la raison,
définissons unproblème
dual de notreproblème
initial.Problème dual : - Trouver un vecteur
u ~
0 à m dimensions tel que u’c soit mini-mum avec la condition
A’u ~
p, où A 1 est la matrice obtenue àpartir
de A par interversion deslignes
et des colonnes.On prouve alors le théorème suivant : Théorème de dualité.
(1) -
Pour quex~ >
0 soitsolution,
il faut et il suffitqu’il
existe un vec-teur
u~ ~0
tel que :~ (x , a*) ~ $ (x*, LL~) ~ $ (x* , u)
pour toutx >
0 etu >
0avec
4> (x, u)
=p’x
+u(c - Ax)
(2) -
Si u* est solution duproblème dual,
une solution x* sera obtenue enrecherchant le minimum de
p’x -
u~’Ax avec la seule conditionx~
0.Le
première partie
du théorème montre queu. joue
le rôle d’un facteur deLagrange,
comme ceciapparait
surl’expression de 9P (x, u). Cependant,
dans larecherche
du couple (x, u) qui correspond
au col de$,
il reste desinégalités x >
0 etu ~
0qui empêchent de
résoudre leproblème
par le seul recours auxprocédés analytiques.
La deuxième
partie
montre que la résolution duproblème
direct sera relati-vement facile si l’on a
déjà répondu
auproblème
dual.Ainsi dans certains cas, il y aura intérêt à déterminer la solution par une
voie
indirecte,
enremplaçant
dans unepremière étape
leproblème posé
par son dual. Alors que lepremier implique
la détermination dès n composantes de x etse situe donc dans un espace à n
dimensions,
le second estposé
dans un espace àm dimensions. Il sera
généralement plus simple
si m n. Dans le choix entreces deux
problèmes,
il faut d’ailleurstenir compte également
de la structure par- ticulière de Aqui peut
seprêter plus
facilement au traitement dans un sens que dans un autre.Il n’est sans doute pas inutile de montrer
l’interprétation économique
duprin- cipe
de dualitéqui
vientd’apparaitre. Reprenons l’interprétation
despremiers paragraphes
de cetexposé.
Lesdépenses d’exploitation
afférentes àchaque opé-
ration élémentaire sont
représentées
par le vecteur c. Assimilons lescomposantes
de u auxprix des
différents biens. Les deuxproblèmes peuvent
alors être énoncésen des termes nouveaux
Problème direct : Trouver des niveaux d’activité
x ~
0qui
rendent lesdépenses d’exploitation
minimum et permettant néanmoins la réalisation du programme :Ax ~
c.Problème dual : Trouver des
prix u >
0 pourchaque type
debiens, qui
donnent lavaleur la
plus
faiblepossible
au programme, tout enrespectant
la rentabilité des différentesopérations p
A’u.Une fois déterminés les
prix
u, leproblème
direct se ramène à la recherchedes niveaux d’activité
qui
maximisent leprofit d’exploitation u*
Ax -p’x.
Ainsi,
parexemple,
la recherche durégime
alimentaireoptimum
est-elle enun certain sens
équivalente a
celle des valeurs dechaque
constituanténergétique .
De même, la détermination des programmes
d’équipement
E . D. F . estéquivalente
à celle des
prix respectifs
des différentes fournituresélectriques :
kWhannuels,
kW d’heures
pleines
d’hiver et kW depointe
de Décembre.Le théorème de dualité et
l’interprétation qui
vient d’e.n êtreprésentée
rat-tachent les
propriétés
des programmes linéaires à la théorieéconomique classique
du rendement social et de la
gestion
la meilleure des ressources à notredispo-
sition. A
partir d’hypothèses différentes,
ellepermet
de retrouver des résultatsd’une
grande portée.
Elle montre aussi que ces résultatspeuvent
rendre de sé- rieux services dans la solution deproblèmes pratiques.
MÉTHODES DE CALCUL
Pour terminer, il faudrait mentionner les méthodes de calcul à notre
dispo-
sition. Les programmes linéaires s’introduisent surtout
lorsque
la solution n’est pas évidente àpriori,
c’est-à-direquand
il faut faire intervenir un nombre assezgrand d’opérations
élémentaires ou de biens. Ladéterminationdespointe
extrêmesdu
polyèdre
et du meilleur d’entre euxprésente
alorsparfois
de sérieuses diffi-cultés.
(Certaines simplifications peuvent
d’ailleursapparaître
à la suite d’un peu de réflexion sur le tableauA).
Chercher les
points
d’unpolyèdre qui
rendent minimum une forme linéaire est, en soi-même, unproblème simple,
dont chacun d’entre nous saurait trouver facilement la solution si les nombres n et m étaientpetits,
de l’ordre de 3 ou 4 parexemple.
Mais si n et m sont assezgrands,
il faut utiliser une méthode ration- nelle pour conduire les calculs.Les
procédés employés aujourd’hui supposent
que l’on commence par déter- miner unpoint
dupolyèdre,
c’est-à-dire unpoint qui
satisfasse toutes lesinéga-
lités.
Puis,
l’on sedéplace
dans lepolyèdre
vers la solution cherchée. La méthode laplus habituelle,
dite "méthode dusimplexe"
consiste à suivre lesarrête,s.dupt,>- lyèdre
en s’assurant de ce que la forme linéaire à minimiserprend
des valeurstoujours
décroissantes.(Dans l’espace
à ndimensions,
une arrête est définie parl’égalité
à zéro de n - 1inégalités parmi
les n +m).
Une autre
méthode, proposée
parR. FRISCH,
consiste à sedéplacer
à l’inté-rieur du
polyèdre
en sedirigeant
vers les valeurs décroissantes de la forme liné- aire, mais enprenant
une directionqui
ne conduise pas à serapprocher trop
vitedes frontières du
polyèdre.
Pour cela, onpeut
utiliser unpotentiel :
V ( x~
1 ...xj == log
xi 1 + ... +log xn + log n+t
1 + ...log
xn+m ,(ou
xn+i est défini comme ci-dessus dans leparagraphe 5).
Legradient
de V indi-que en
chaque point
la direction de la frontière laplus voisine,
directionqui
doitêtre évitée.
Pour
compléter
cetexposé trop sommaire,
le lecteur pourra sereporter
aux référencesbibliographiques
suivantes :CHARNES,
COOPER et HENDERSON - An Introduction to LinearProgramming (John Wiley
andSons,
New-York -1953)
DORFMAN -
Application
of LinearProgramming
to theTheory
of the Firm(University
of CaliforniaPress, Berkeley - 1951)
R. FRISCH - Methods of
Solving
LinearProgramming
Problems(University
Institute ofEconomies,
Oslo -1954)
T. KOOPMANS ed. -
Activity Analysis
of Production and Allocation(John Wiley
andSons,
New-York -1951)
KUHN and TUCKER - Non Linear
Programming
(Proceedings
of the SecondBerkeley Symposium
on Mathe-matical Statistics and
Probability -
Août1950)
P. MAILLET - Une nouvelle