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Rituximab dans le traitement des maladies rénales glomérulaires : indications et évidences cliniques

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Texte intégral

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L.-Y. Mani B. Vogt M. Burnier D. Golshayan

introduction

Les glomérulonéphrites (GN) primaires ou secondaires à une maladie de système constituent une étiologie importante d’in­

suffisance rénale (IR) chronique et sont à l’origine de 10 à 20%

des cas d’IR terminale. L’atteinte rénale de type glomérulaire représente la manifestation sévère la plus fréquente des ma­

ladies systémiques inflammatoires comme le lupus érythéma­

teux systémique (LES) ou les vasculites des petits vaisseaux.

Les traitements actuels à base de stéroïdes, antiprolifératifs et cytotoxiques sont efficaces, mais au prix d’une toxicité géné­

rale élevée chez des patients souvent traités au long cours.

Dans ce contexte, des alternatives thérapeutiques moins toxiques sont recher­

chées. Depuis la fin des années 1990, différents agents biologiques (anticorps monoclonaux, protéines de fusion) ont été utilisés avec succès dans le traitement des maladies auto­immunes, ciblant les principaux effecteurs de la réponse im­

mune comme les cellules T (prolifération, infiltration des tissus cibles, production de cytokines pro­inflammatoires) ou B (production d’autoanticorps).

Malgré l’utilisation croissante de ces agents dans le traitement des maladies systémiques, peu d’études cliniques ont spécifiquement examiné des endpoints rénaux ; les patients étant souvent inclus en raison du diagnostic principal, sans sous­analyse précise en fonction de la présence ou du type de néphropathie.

Dans cette revue, nous discutons de l’indication néphrologique du rituximab (RTX), un anticorps monoclonal ciblant les cellules B, en fonction de la pathogenèse (fi­

gure 1) et en nous référant aux données disponibles dans la littérature (tableau 1).

Nous nous sommes limités aux GN immunes les plus fréquemment rencontrées en clinique, telles que GN extramembraneuse, lupique et sur vasculite des petits vaisseaux.

rituximab

Il s’agit d’un anticorps monoclonal chimérique murin/humain dirigé contre l’an­

tigène de surface CD20 exprimé par les lymphocytes B. La liaison à cet antigène Rationale and clinical evidence for the use

of Rituximab in glomerular diseases Autoimmune glomerulopathies are an impor­

tant cause of chronic kidney disease. Conven­

tional treatments based on steroids, antipro­

liferative and cytotoxic agents are efficacious, but highly toxic. Because of their central role in the pathogenesis of autoimmunity, B cells have become an attractive therapeutic target.

Rituximab is a monoclonal antibody directed against CD20 expressed on the surface of B cells, inducing profound depletion of B cells in the peripheral blood. In spite of encoura­

ging results regarding the off­label use of Ri­

tuximab in membranous nephropathy, syste­

mic lupus erythematosus and small vessel vasculitis, controlled, long term data, and data with specific renal endpoints are currently lacking.

Rev Med Suisse 2011 ; 7 : 819-24

Les glomérulonéphrites auto-immunes représentent une étio- logie importante d’insuffisance rénale chronique. Les traite- ments conventionnels à base de stéroïdes, antiprolifératifs et cytotoxiques sont efficaces mais au prix d’une toxicité élevée.

Etant donné le rôle central de la cellule B dans la pathoge- nèse de l’auto-immunité, le rituximab, un anticorps monoclo- nal dirigé contre l’antigène de surface CD20 des cellules B et entraînant leur déplétion, est une alternative thérapeutique inté ressante. Malgré des résultats encourageants de l’utilisa- tion du rituximab dans des cas réfractaires de gloméruloné- phrite extramembraneuse, ainsi que dans des maladies systé- miques sévères comme le lupus érythémateux ou les vasculites des petits vaisseaux, on ne dispose que de peu de données contrôlées, à long terme, et examinant des endpoints rénaux.

Rituximab dans le traitement

des maladies rénales glomérulaires : indications et évidences cliniques

revue

Drs Laila-Yasmin Mani et Bruno Vogt Pr Michel Burnier

Service de néphrologie et consultation d’hypertension Dr Déla Golshayan

Service de néphrologie et centre de transplantation Département de médecine CHUV, 1011 Lausanne laila-yasmin.mani@chuv.ch bruno.vogt@chuv.ch michel.burnier@chuv.ch dela.golshayan@chuv.ch

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induit une lyse des cellules B par différents mécanismes (cytotoxicité dépendante des anticorps et du complément, apoptose) aboutissant à une déplétion exclusive et quasi totale des cellules B dans le sang périphérique. Cette dé­

plétion persiste généralement pendant six à neuf mois chez L 80% des patients.1 Depuis son introduction en 1997 pour le traitement des lymphomes B non hodgkiniens, l’utilisa­

tion de cet anticorps a été étendue aux maladies autoim­

munes 2 et dans les protocoles thérapeutiques en trans­

plantation (rejets humoraux, désensibilisation prégreffe des patients hyperimmunisés ou ABO­incompatibles, lympho­

mes post­transplantation).1 L’utilisation extensive du RTX dans ces indications a permis d’établir le profil de tolé­

rance et de sécurité de ce médicament. Dans l’ensemble, peu d’effets secondaires sérieux ont été rapportés. Les prin­

cipaux effets décrits sont des réactions lors de la perfusion (pour la plupart bénignes mais pouvant aller jusqu’à des réactions anaphylactiques ou une maladie sérique), une neutropénie, une hypogammaglobulinémie, des infections bactériennes, virales (surtout CMV, VZV, HSV) ou fongi ques.

De plus, un total de 76 cas de leucoencéphalopathie multi­

focale progressive a été rapporté, la majorité chez des pa­

tients traités pour des maladies lymphoprolifératives (52 cas), avec seulement quatre cas décrits lors de l’utilisation du RTX dans des maladies auto­immunes.3,4 Il faut toute­

fois relever que les complications hématologiques et infec­

tieuses semblent en partie liées à l’utilisation concomitante d’autres immunosuppresseurs.

rôledes lymphocytesbdans

lesglomérulonéphrites auto

-

immunes Les cellules B ont un rôle central dans la pathogenèse des maladies auto­immunes, essentiellement en raison de leur capacité à produire des autoanticorps spécifiques. En

effet, il existe des arguments parlant en faveur de la patho­

génicité de ces autoanticorps : profils caractéristiques as­

sociés à certaines manifestations cliniques (par exemple : anti­dsDNA et atteinte rénale, antiribosomes P et atteinte neuropsychiatrique dans le LES), corrélation dans une cer­

taine mesure du titre à l’activité clinique, transfert reprodui­

sant la maladie dans des modèles animaux et aussi décrit en clinique avec l’exemple du syndrome lupique néonatal.

Plus récemment, des modèles expérimentaux ont réévalué d’autres fonctions anticorps­indépendantes de la cellule B dans l’auto­immunité. La cellule B, en tant que cellule pré­

sentatrice d’antigènes, participe à l’initiation et à l’amplifi­

cation d’une réponse T autoréactive. Elle peut aussi, via la production de cytokines pro­ ou anti­inflammatoires, mo­

duler l’immunogénicité des cellules dendritiques qui sont d’importants effecteurs de la réponse innée et adaptative.

Sur le plan rénal, la lésion glomérulaire résulte de diffé­

rents mécanismes (figure 1) bien révélés par l’analyse his­

tologique, notamment par le type de prolifération cellulaire ainsi qu’un pattern pathognomonique de dépôts d’immuno­

globulines et de facteurs du complément.

1. La maladie de base induit le développement d’autoanti­

corps dirigés contre des antigènes exprimés par les diffé­

rents constituants de la membrane basale (MB) gloméru­

laire (par exemple : GN extramembraneuse idiopathique ou syndrome de Goodpasture) ou contre un antigène cir­

culant extrinsèque secondairement fixé dans le glomérule (par exemple : GN extramembraneuse associée à l’hépatite B chronique). L’interaction antigène­anticorps in situ ré sulte en une activation du complément et l’influx de cellu les in­

flammatoires, occasionnant des lésions dans la super struc­

ture de la MB altérant sa perméabilité.

2. La maladie de base (par exemple : LES) se traduit par la présence d’autoanticorps et de complexes anticorps­anti­

gènes circulants qui peuvent déclencher une réaction d’hy­

Figure 1. Mécanismes pathogéniques de l’atteinte glomérulaire dans les maladies auto-immunes AC : anticorps ; Ag : antigène ; MB : membrane basale glomérulaire ; ANCA : anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles.

AC circulants

Dépôts glomérulaires Activation locale du complément

Recrutement de cellules inflammatoires Prolifération de cellules structurales glomérulaires

Inflammation locale, lésions de la MB glomérulaire, fibrose

Lésions endothéliales nécrosantes Cytokines

Neutrophile

ANCA

MB Ag

Cellules endothéliales

Complexes immuns

Cellules épithéliales (podocytes)

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persensibilité de type III, notamment au niveau rénal. En se déposant dans le glomérule, ces complexes immuns ac­

tivent le complément, avec infiltration et prolifération de cellules inflammatoires et autochtones.

3. La pathogenèse des vasculites à anticorps anticytoplas me des polynucléaires neutrophiles (ANCA) est encore contro­

versée, mais les modèles expérimentaux suggèrent forte­

ment l’implication directe des autoanticorps. Un état infec­

tieux ou des lésions inflammatoires de la MB glomérulaire activeraient localement les neutrophiles, induisant l’expres­

sion à la surface d’antigè nes pouvant lier les ANCA circu­

lants, voire même d’autres anti corps avec réactivité croisée (produits par exemple en réponse à un pathogène). Les neutrophiles activés peuvent ensuite adhérer à la surface de l’endothélium et initier une réponse destructrice de la paroi des vaisseaux.

indicationsdurituximab

Glomérulonéphrite extramembraneuse

La GN extramembraneuse représente la cause la plus fréquente de syndrome néphrotique chez l’adulte sous nos contrées et peut être primaire (idiopathique) ou, dans un tiers des cas, secondaire à des pathologies immunes (LES), infectieuses, néoplasiques ou d’origine médicamenteuse.

Bien que la pathogenèse ne soit pas clairement établie dans les formes primaires, une origine immune est forte­

ment suggérée par la présence, sur les biopsies rénales, de

dépôts sous­épithéliaux d’IgG le long de la MB gloméru­

laire et d’infiltrats cellulaires CD20+.5,6 Par ailleurs, des tra­

vaux récents suggèrent le rôle de l’autoanticorps circulant dirigé contre le M­type phospholipase A2 récepteur (PLA2R), une protéine transmembranaire des podocytes.7

Pour la forme idiopathique, l’évolution naturelle de la néphropathie peut aller d’une rémission complète ou par­

tielle spontanée jusqu’à un syndrome néphrotique persis­

tant avec progression vers une IR terminale (30­40% des cas). La décision de l’introduction d’un traitement immuno­

suppresseur en plus d’un traitement antiprotéinurique re­

pose sur la sévérité de la protéinurie au moment du diag­

nostic. Les schémas thérapeutiques basés sur l’utilisation combinée de stéroïdes et d’agents cytostatiques (chloram­

bucil ou cyclophosphamide, CYP) permettent des taux de rémission globale de l’ordre de 80%. Les inhibiteurs de la calcineurine (ciclosporine ou tacrolimus, ICN) représentent une alternative thérapeutique moins agressive mais avec un risque de récidive à l’arrêt du traitement.

Depuis quelques années, l’utilisation du RTX est dé­

crite dans le traitement des GN extramembraneuses idio­

pathiques, majoritairement dans les formes résistant aux schémas immunosuppresseurs validés. Les résultats basés sur des séries de cas suggèrent une certaine efficacité avec des taux de rémissions complètes et partielles de 15­20 et 40­45% respectivement.8­12 Toutefois, l’hétérogénéité des données concernant les traitements préalables et conco­

mitants, la variabilité des schémas/doses d’administration Tableau 1. Principales études récentes décrivant l’utilisation du rituximab dans le traitement des glomérulo- néphrites (GN) extramembraneuses, lupiques et sur vasculites à anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA)

Etudes Nombre Suivi Résultats LES (suite)

de patients

GN extramembraneuse ° Pepper et coll., 2009 18 L 12 m 6/18 RC, 6/18 RP

idiopathique 8-12 Lu et coll., 2009 34 (45) 6 m 19/45 RG

°* Furie R, et coll., 2009 144 52 sem 57% RG (RTX)

Ruggenenti et coll., 2006 23 12 m 6/23 RC, 6/23 RP (LUNAR) vs. 46% (MMF)

Cravedi et coll., 2007 12 12 m 2/12 RC, 6/12 RP Garcia-Carrasco et coll., 13 (52) 6 m 5/13 RC, 5/13 RP Fervenza et coll., 2008 15 12 m 2/15 RC, 6/15 RP 2010

Segarra et coll., 2009 13 30 m 4/13 RC, 13/13 RP Catapano et coll., 2010 11 (31) 6-68 m 4/11 RC, 6/11 RP à 30 m Terrier et coll., 2010 42 (136) 18,6 m 71% RG, 74%

Fervenza et coll.,2010 18 24 m 4/18 RC, 12/18 RP réponse rénale

LES 13-29 avec GN Vasculites à ANCA 31-38 avec GN

(total inclus) (total inclus)

Looney et coll., 2004 7 (17) 12 m 11/17 RG Keogh et coll., 2005 5 (11) 10-42 m 10/11 RC à 6 m Leandro et coll., 2005 17 (24) 3-51 m 23/24 RG Keogh et coll., 2006 7 (10) 12 m 100% RC à 3 m

° Sfikakis et coll., 2005 10 12 m 5/10 RC, 3/10 RP Smith et coll., 2006 6 (11) 23 m 9/11 RC, 1/11 RP,

° Vigna-Perez et coll., 2006 22 3 m 5/22 RC, 7/22 RP 6 récidives

Ng et coll., 2007 21 (32) 39 m 12/32 RG sans Stasi et coll., 2006 6 (10) 33.5 m 9/10 RC, 1/10 RP récidive Lovric et coll., 2009 5 (15) 15 m 6/15 RC, 8/15 RP Albert et coll., 2008 11 (24) 55 sem 70% RG Jones et coll., 2009 3 (65) 20 m 49/65 RC,

Lindholm et coll., 2008 17 (31) 1-61 m 2/17 RC, 9/17 RP; 15/65 RP,

4 récidives 28 récidives

Jonsdottir et coll., 2008 9 (16) 6-59 m 9/16 RG, 7 récidives * Stone et coll., 2010 130 (197) 6 m 64% RG (RTX)

° Boletis et coll., 2009 10 38 m 7/10 RC (RAVE) vs 53% (CYP)

° Melander et coll., 2009 20 22 m 7/20 RC, 5/20 RP °* Jones et coll., 2010 44 (44) 12 m 76% RG (RTX)

° Li et coll., 2009 19 48 sem 4/19 RC, 11/19 RP (RITUXVAS) vs 82% (CYP)

* Etudes randomisées contrôlées (RCT). ° Etudes avec endpoint rénal.

CYP : cyclophosphamide ; m : mois ; MMF : acide mycophénolique ; RC : rémission rénale complète ; RP : rémission rénale partielle ; RG : réponse globale (amélioration clinique rénale et systémique) ; RTX : rituximab ; sem : semaines ; LES : lupus érythémateux systémique.

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du RTX, le petit nombre et la sélection des patients, ren­

dent l’interprétation de ces résultats difficile. Une étude, non contrôlée récente, a inclus treize patients avec une fonc­

tion rénale préservée mais un syndrome néphrotique réci­

divant à l’arrêt des ICN. Les résultats ont confirmé un effet bénéfique du RTX dans l’induction d’une rémission rénale partielle ou complète (définie en fonction du degré rési­

duel de protéinurie) chez tous les patients à 30 mois. Six mois après le RTX, les immunosuppresseurs, y compris les ICN, ont pu être sevrés chez tous les patients, avec seule­

ment trois rechutes (protéinurie néphrotique) qui ont pu être retraitées avec succès par un deuxième cycle de RTX.11 Ces résultats encourageants attendent toutefois une confir­

mation par des études randomisées contrôlées (RCT), no­

tamment au vu de la possibilité de rémissions spontanées dans cette pathologie.

Glomérulonéphrite lupique

L’atteinte glomérulaire est une complication fréquente et potentiellement sévère du LES. La classification histolo­

gique obtenue par ponction­biopsie rénale est essentielle dans la prise en charge thérapeutique et le pronostic des GN lupiques. Lors de manifestations cliniques et néphro­

logiques sévères et aiguës (IR aiguë, syndrome gloméru­

laire), un traitement immunosuppresseur doit être instauré rapidement pour induire une rémission. Les schémas thé­

rapeutiques actuels reconnus sont à base d’antiproliféra­

tifs comme le CYP ou l’acide mycophénolique (Cellcept/

Myfortic, MMF) pendant trois à six mois associés à des sté­

roïdes à hautes doses (traitement d’induction), suivis d’un traitement de maintien de stéroïdes à doses dégressives avec ciclosporine, MMF, azathioprine (AZA) ou hydroxy­

chloroquine. Ces traitements peuvent toutefois être asso­

ciés à des effets secondaires, surtout si l’on considère les doses cumulatives chez des patients souvent jeunes. Par ailleurs, la réponse peut être insuffisante et la maladie risque de récidiver au cours des années.

Ainsi, de nombreuses séries de cas ont investigué le po­

tentiel du RTX chez des patients présentant un LES sévère (avec ou sans atteinte rénale), récidivant, réfractaire ou avec des contre­indications au traitement conventionnel. Dans l’ensemble, ces études ont rapporté une amélioration cli­

nique globale pour la majorité des patients et jusqu’à 70%

de rémissions partielle ou complète rénales selon la classi­

fication histologique initiale.13­28 Ces données observation­

nelles prometteuses sont à relativiser au vu des résultats préliminaires de l’étude LUNAR qui a inclus 144 patients avec GN lupique, comparant un traitement de RTX/MMF/

stéroïdes vs placebo/MMF/stéroïdes.29 Cette RCT multi­

centrique de phase III n’a pas montré de supériorité de l’association du RTX pour l’induction d’une rémission rénale partielle ou complète, ni de différence de survenue d’effets secondaires dans les deux groupes. La divergence des ré­

sultats obtenus par les études observationnelles et LUNAR s’explique peut­être par l’hétérogénéité des scores diag­

nostiques et de réponse/rémission du LES, la prise en charge thérapeutique préalable des patients à l’inclusion et le petit nombre de patients dans les sous­groupes avec atteinte rénale.30 De nouvelles études sont nécessaires pour pro­

gresser dans la prise en charge de la néphropathie lupique.

Vasculites des petits vaisseaux

La présence dans le sang circulant d’ANCA, dirigés contre les composants cytoplasmiques des granules des neutro­

philes et des lysosomes des monocytes antiprotéinase 3 (PR3) ou antimyéloperoxidase (MPO), caractérise la plu­

part des vasculites des petits vaisseaux, parmi lesquel les on distingue la granulomatose de Wegener, la poly angéite microscopique, la GN pauci­immune et le syndro me de Churg­Strauss. Il s’agit de maladies multisystémiques idio­

pathiques sévères, entraînant une réponse inflammatoire nécrosante des tissus atteints. La morbi­mortalité asso ciée à ces vasculites est considérable avec sur le plan rénal L 20% des patients évoluant vers une IR terminale à cinq ans. Une atteinte systémique, notamment rénale, justifie donc l’utilisation rapide d’un traitement d’induction qui con­

siste généralement en l’association de stéroïdes à hautes doses et CYP (voire méthotrexate si la fonction rénale n’est pas trop altérée), suivi d’un traitement d’entretien à base de stéroïdes à doses dégressives avec un antiprolifératif (AZA, MMF). Des échanges plasmatiques peuvent égale­

ment être bénéfiques en présence d’une GN rapidement progressive, permettant la déplétion rapide des ANCA et d’autres facteurs inflammatoires comme le complément.

Cette prise en charge thérapeutique permet des taux de rémission à un an de 70 à 80%, mais les récidives sont fré­

quentes lors du retrait des immunosuppresseurs, faisant rechercher des alternatives thérapeutiques moins toxiques.

Suite à plusieurs études observationnelles suggérant l’efficacité du RTX dans des cas réfractaires ou avec des contre­indications au traitement conventionnel,31­36 deux RCT multicentriques évaluant le profil bénéfice/risque du RTX, comme traitement d’induction, ont récemment été publiées. L’étude ouverte EUVAS­RITUXVAS a comparé un protocole de RTX/stéroïdes/CYP (deux doses) sans traite­

ment d’entretien vs induction par stéroïdes/CYP (dose stan dard) suivi d’AZA, chez 44 patients avec vasculite sé­

vère nouvellement diagnostiquée et atteinte rénale. L’effi­

cacité était similaire pour l’induction de rémission soute­

nue (L 6 mois) sur un suivi de douze mois.37 Dans l’étude RAVE conduite en double aveugle, 197 patients avec réci­

dive ou nouveau diagnostic de vasculite à ANCA sévère ont reçu un traitement de RTX/stéroïdes vs CYP/stéroïdes suivi d’AZA.38 A six mois, les taux de rémission étaient com­

parables avec peut­être une efficacité supérieure dans le bras RTX/stéroïdes pour le sous­groupe de patients avec maladie récidivante, mais ces résultats nécessitent une con­

firmation à plus long terme.

limitationsdurituximab

Le RTX ne déplète que les cellules B CD20+ et n’a aucun effet après la différenciation en plasmocytes (n’exprimant pas l’antigène de surface CD20) responsables de la pro­

duction d’autoanticorps. De plus, bien que la déplétion soit très efficace en périphérie, l’effet du RTX peut être moindre sur les cellules B résidentes tissulaires. Son effi­

cacité peut aussi se trouver limitée par des facteurs dépen­

dant de l’hôte, comme la présence d’un syndrome néphro­

tique, de polymorphismes du récepteur Fcg (médiant l’ef­

fet du RTX) et de taux élevés de facteurs stimulant les

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cellules B (BlyS) observés dans les LES et vasculites à ANCA actives.39,40 A noter encore que la repopulation des cellules B post­traitement de RTX n’est pas associée de manière consistante à l’activité clinique de la maladie auto­

immune, soulignant la probable participation d’autres mé­

canismes pathogéniques.

Pour terminer, le choix de la cellule B comme cible dans la prise en charge des maladies auto­immunes se compli­

que par le fait que cette population soit hétérogène sur le plan phénotypique et fonctionnel. Des données récen tes, obtenues aussi bien chez l’homme que dans des modèles murins, indiquent l’existence d’une sous­population de cel­

lules B avec une fonction immunorégulatrice, caractérisée par la production d’interleukine (IL)­10.41­43 Une déplétion globale des cellules B pourrait donc paradoxalement in­

duire une dysrégulation supplémentaire du système im­

munitaire. L’identification de marqueurs spécifiques de pathogénicité des cellules B est donc nécessaire pour le développement de nouvelles stratégies thérapeutiques.

Dans cette perspective, l’investigation de nouveaux agents biologiques est actuellement en cours, agissant sur la co­

stimulation, les récepteurs inhibiteurs ou les facteurs de croissance de la cellule B, ciblant directement les plasmo­

cytes, voire la voie terminale du complément.

conclusion

En résumé, le RTX est un traitement intéressant dans des cas sévères réfractaires ou récidivants de GN extra­

membraneuse, lupique ou sur vasculite à ANCA. Toutefois, en l’absence de données suffisantes à moyen terme, la pru­

dence doit être de mise concernant notamment le ris que cumulatif infectieux chez des patients souvent prétraités avec d’autres immunosuppresseurs. Par ailleurs, hormis l’ef­

ficacité et le profil de risque du RTX, le coût du traitement doit être pris en compte dans la prise en charge, en com­

paraison à un traitement plus classique. Les schémas thé­

rapeutiques optimaux des GN auto­immunes restent donc à définir, notamment la place du RTX dans l’induction ou le

traitement de maintien et les combinaisons possibles avec d’autres immunosuppresseurs.

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Bibliographie

Stratégies de recherche et critères de sélection Les données utilisées pour cette revue ont été obtenues par une recherche Medline des études publiées en anglais, incluant un minimum de dix patients, avec les mots-clés principaux

«rituximab, lupus nephritis», «lupus, rituximab, kidney»,

«rituximab, SLE, nephritis», «rituximab, ANCA, nephritis»,

«rituximab, ANCA, vasculitis, renal», «ANCA, rituximab, kidney», «rituximab, membranous».

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Implications pratiques

Les cellules B, par leur capacité de produire des anticorps, des cytokines et présenter les antigènes aux cellules T, jouent un rôle-clé dans les glomérulonéphrites auto-immunes Le rituximab, un anticorps monoclonal dirigé contre l’antigène de surface CD20, induit une déplétion exclusive et quasi to- tale des cellules B en périphérie

Dans l’ensemble, le rituximab est bien toléré et, malgré une déplétion profonde et prolongée des cellules B (6-9 mois post-traitement), l’incidence des complications sérieuses et notamment infectieuses liées au traitement est relativement faible

Concernant les indications néphrologiques, le rituximab a sur- tout été utilisé dans des séries de cas de glomérulonéphrites immunes sévères, récidivants ou réfractaires au traitement conventionnel, ou dans le but de limiter l’utilisation de cyto- toxiques

Des études randomisées contrôlées sont nécessaires pour mieux définir le profil bénéfice/risque du rituximab dans la prise en charge des glomérulonéphrites immunes et déter- miner le schéma de dosage optimal ainsi que d’éventuelles associations avec d’autres immunosuppresseurs

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* à lire

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