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View of David Martens, L’Invention de Blaise Cendrars. Une poétique de la pseudonymie, Paris, Honoré Champion, «Cahiers Blaise Cendrars», no. 10, 295 p.

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David Martens, L’Invention de Blaise Cendrars. Une poétique de la pseudonymie, Paris, Honoré Champion, «Cahiers Blaise Cendrars», no. 10, 295 p.

ISBN 978-2-7453-2176-3 Jérôme Meizoz

Issu d’une thèse de doctorat soutenue à l’Université de Louvain-la-Neuve en 2007, cet ouvrage aborde de manière approfondie les effets du choix pseudonymique chez Blaise Cendrars. Reprenant à nouveaux frais la question de la signature et du «sceau de l’œuvre» (G. Leclerc), David Martens étudie l’économie de l’œuvre cendrarsienne rapportée à l’invention d’un nom. Plus généralement, il livre une réflexion de haut vol sur les effets poétiques et institutionnels de la création d’une figure auctoriale.

L’ouvrage se subdivise en trois grandes parties : la première est consacrée à établir une «poétique de la pseudonymie» par la discussion détaillée des travaux portant sur le sujet, de G. Genette à Ph. Lejeune et M. Laugaa. A l’aide de réflexions issues de la psychanalyse et de la philosophie (l’auteur examine les apports de Derrida sur cette question), Martens se dote d’une théorie renouvelée de la pseudonymie. Il distingue notamment deux types de noms de plume : une version faible en fait simplement «le second nom d’un véritable auteur» dans lequel cas le pseudonyme n’a aucun effet sur la poétique des textes alors que, dans une version forte, le pseudonyme constitue «le vrai nom d’un auteur fictif» (p. 32). Cas de figure que Martens associe à Cendrars et qui lui permet, décisivement, de lire toute l’œuvre comme une macro-énonciation portée par une figure auctoriale relevant elle-même de la fiction : «Le pseudonyme subvertit la dichotomie entre le réel et le fictif et fait vaciller la consistance ontologique de la figure auctoriale en l’inscrivant dans un entre-deux qui met du même coup en cause celle du lecteur réel.» (p. 43). En effet, signer d’un pseudonyme revient, pragmatiquement, à attribuer l’œuvre à un personnage fictif. Et l’on sait combien Cendrars saura jouer de cette «duplicité énonciative» (p. 69), notamment dans les entretiens qu’il accorde à la presse. La seconde partie aborde de front textes de Cendrars (les poèmes, les traductions, les entretiens avec Manoll, mais aussi Vol à voiles, L’Homme foudroyé) pour y lire le profond travail de la signature et ses multiples jeux. Enfin, la troisième partie explore le lien entre la pseudonymie et un intertexte hermético-alchimique tout en soulignant les abondantes «cryptographies» propres à cette œuvre, et placées sous le signe de la ruse (p. 191).

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S’il y a bien, et radicalement, une «invention» (p. 274) de Blaise Cendrars par Frédéric Sauser, c’est que les «scénographies du nom» mises en place engendrent une figure (dans l’œuvre) et une posture auctoriale (dans le champ littéraire, par le biais aussi d’iconographies de l’auteur, p. 82) qui n’aura de cesse de se complexifier de 1912 à 1961. Le pseudonyme est alors réinvention de soi, comparable à une nouvelle naissance (Starobinski) mais aussi mode de positionnement institutionnel dans l’actualité littéraire et, enfin, manifestation d’une poétique propre inspirée du très ancien motif du «phénix» renaissant de ses cendres. Alors que Louis-Ferdinand Céline n’efface jamais la personne civile de Louis Destouches, Cendrars opte pour la tabula rasa et se donne «un nom nouveau/Visible comme une affiche bleue» (Au

cœur du monde). Il fait ainsi, très littéralement, disparaître Frédéric Sauser et par delà la

lignée paternelle avec laquelle il a souhaité rompre.

Le livre de David Martens, d’une grande clarté et d’une érudition sans faille, ne se contente pas d’examiner les formes prises par le pseudonyme cendrarsien en faisant voir la richesse de l’imaginaire littéraire ainsi auto-institué, il s’interroge aussi sur les conséquences de la pseudonymie sur l’acte de lecture. Enfin, il permet de dépasser, par sa riche hypothèse macro-interprétative sur l’autofictionnalité constitutive de l’oeuvre, la vieille antienne critique autour de la «mythomanie» supposée de Cendrars. Assurément un jalon fort dans la bibliographie des études cendrarsiennes et, plus largement, dans le renouveau actuel des travaux sur la figure d’auteur.

Jérôme Meizoz enseigne la littérature française à l'Université de Lausanne (Suisse) où il dirige la Formation doctorale interdisciplinaire de la Faculté des Lettres. Dernier ouvrage paru: "La Fabrique des singularités. Postures littéraires II", Genève-Paris, Slatkine, coll. Jerome.Meizoz@unil.ch

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