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Article pp.141-142 du Vol.111 n°2 (2018)

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Texte intégral

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NOTE DE LECTURE /LECTURE NOTE

Diagnostic transdermique du paludisme par cytométrie de flux

photoacoustique : avancée majeure en paludologie ou gadget de luxe ?*

Transdermal Diagnosis of Malaria Using Photoacoustic Flow Cytometry: Major Breakthrough in Paludology or Deluxe Gadget?

J.-F. Pays

Reçu le 1 mai 2018 ; accepté le 15 mai 2018

© Société de pathologie exotique et Lavoisier SAS 2018

Le dispositif permettant le diagnostic transdermique du palu- disme (DTP) dont il est question dans l’article « Transdermal diagnosis of malaria using vapor nanobubbles » fait appel à l’utilisation transdermique d’un laser à impulsions couplé à un détecteur phonique ultrasensible (Fig. 1), le tout géré par un microprocesseur, et repose sur le principe suivant : lors- qu’ils sont excités à travers la peau et la paroi des vaisseaux par un laser d’une longueur d’onde de 532 nm délivrant en toute innocuité une fluence (dose d’énergie) de 36 mJ/cm2, les nanocristaux d’hémozoïne produits par les plasmodiums donnent naissance à des nanobulles de vapeur qui se gon- flent, puis collapsent. Ce phénomène s’accompagne de l’émission d’un microsignal acoustique que l’on peut capter grâce à une sonde ultrasensible. Après amplification, conver- sion et traitement par un microprocesseur, ces réponses acoustiques sont traduites en données utilisables par le per- sonnel médical sans aucune formation préalable.

Un tel dispositif détecte toute parasitémie à plasmodium, quelle que soit l’espèce en cause, aussi bien chez l’homme que chez l’animal. Il permet également de détecter la pré- sence d’oocystes chez les vecteurs infectés en mettant en évidence de l’hémozoïne résiduelle résultant probablement de la transformation des gamétocytes en oocystes. Le DTR est en effet positif dès qu’il y a, et tant qu’il y a, présence d’hémozoïne, même en l’absence de parasites vivants,

comme cela peut être le cas dans le sérum ou dans les leu- cocytes mélanifères. Le problème posé par une telle éventua- lité et ses conséquences sur les résultats du test ne sont ni signalés ni traités par les auteurs dans leur publication, tout comme ceux posés par l’existence de porteurs de gamétocy- tes en dehors de toute infection active, et par le fait que cer- tains antipaludiques interfèrent avec la formation des cris- taux d’hémozoïne.

La capacité du dispositif permettant au DTP de détecter de très faibles parasitémies (0,0034 % in vivo et 0,0001 % in vitro) place largement cette technique, en dehors de la PCR, en tête de toutes les techniques de diagnostic du paludisme en termes de sensibilité et permet théoriquement de poser un diagnostic dès les 24e- 48eheures de l’infection. Quant à sa

Fig. 1 Prototype expérimental de laboratoire de léquipement de diagnostic du paludisme utilisant les impulsions laser et une sonde intégrée, posée sur le poignet dun patient /Experimental laboratory prototype of a malaria diagnostic device with the pulsed laser and the integrated probe shown being scanned across a human wrist (source : article objet de cette note, doi:

10.3201/eid2107.150089) J.-F. Pays (*)

CENPETROP, faculté de médecine de Corrientes, université du Nordeste, Argentine

e-mail : jeanfrancoispays@gmail.com

Société de pathologie exotique, hôpital Pitié-Salpêtrière, 4783, bld de lHôpital, 75651 Paris cedex 13, France

* Note de lecture à propos de : Lukianova-Hleb E, Bezek S, Szigeti R, et al (2015) Transdermal diagnosis of malaria using vapor nano- bubbles. Emerg Infect Dis 21:11227. doi: 10.3201/

eid2107.150089

Bull. Soc. Pathol. Exot. (2018) 111:141-142 DOI 10.3166/bspe-2018-0025

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur bspe.revuesonline.com

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spécificité, elle est présentée comme étant absolue une fois éliminé le bruit de fond dû à l’absorption du faisceau laser par l’hémoglobine et, à un moindre degré, par la mélanine contenue dans la peau. La face interne du poignet ou le lobe de l’oreille sont les sites recommandés pour appliquer laser et sonde plutôt que les doigts dont la peau est souvent épais- sie et donne des résultats moins fiables.

Sur un plan purement pratique, le DTP présente de nom- breux avantages. Il n’est pas invasif, fonctionne, comme nous l’avons dit, quelle que soit l’espèce de plasmodium en cause et est parfaitement reproductible. Sa mise enœuvre est plus fiable et plus rapide (20 secondes) que le plus rapide des tests de diagnostic rapide (TDR) disponibles. Elle ne nécessite ni réactif ni personnel particulièrement qualifié.

Le calcul d’un index hémozoïstique est possible, rendant compte de l’importance de la parasitémie. Cet index est obtenu en multipliant le nombre de réponses acoustiques spécifiques pour 400 impulsions laser par la valeur de l’am- plitude de chaque réponse amputée de la valeur seuil en des- sous de laquelle les signaux détectés sont considérés comme faisant partie du bruit de fond.

L’hémozoïne, ce fameux pigment malarique découvert par Meckel, puis Virchow qui en attribuait la production à l’organisme du malade avant que Laveran ne l’attribue au parasite qu’il venait de découvrir en grande partie grâce à lui, a une structure qui varie en fonction de l’âge, donc du stade du parasite. La cytométrie de flux photoacoustique couplée à d’autres techniques, comme l’utilisation conjointe de lasers de différentes longueurs d’onde et la mesure des temps de vol qui en résultent, permettent d’ores et déjà de déceler ces différences de structure et de s’en servir pour déterminer le ou les stade(s) du parasite présent dans le sang. Il en ira probablement rapidement de même pour le diagnostic de l’espèce en cause, mais ces deux possibilités restent encore pour le moment du domaine de la recherche et ne sont pas, bien entendu, incluses dans le dispositif de DTP dont nous parlons.

Le coût d’un appareillage permettant un DTP, dans une version miniaturisée facilement utilisable sur le terrain, est évalué par ses concepteurs aux environs de 15 000 dollars, soit l’équivalent de 15 à 30 000 TDR, ce qui esta prioriun handicap, sauf peut-être pour les grosses structures de santé.

L’augmentation progressive de l’absorption du rayon laser en fonction de la richesse de la peau en mélanine, donc de sa couleur, nécessite des ajustements graduels du seuil à par- tir duquel un signal est considéré comme positif, car plus il y a de mélanine, plus l’amplitude du bruit de fond augmente, affectant le couple sensibilité–spécificité. La résolution de ce

problème conditionne certainement en partie l’avenir d’un dispositif destiné en principe à être surtout utilisé dans des régions d’endémie malarique où, peut-être plus qu’ailleurs, les teintes de peau coexistent et se mêlent. L’utilisation d’un laser d’une longueur d’onde de 672 nm, dont le faisceau est moins absorbé par l’hémoglobine et la mélanine que celui du 532, semble pouvoir apporter une partie de la solution.

L’absence de données de terrain, et le très petit nombre de sujets testés, est la dernière réserve, mais non des moindres, que l’on peut adresser à cette publication. Les chiffres et les performances avancés que nous avons repris sont en effet essentiellement théoriques. Un seul individu infecté parPla- modium faciparum a été testé au côté de cinq volontaires sains et d’un lot d’Anopheles gambiaeartificiellement infec- tés comparé à un lot témoin. Des tests de terrain sur une large échelle sont donc absolument indispensables pour savoir si l’on peut considérer la technique comme une technique d’avenir. Ces tests sont prévus, assuraient les auteurs en 2015, mais aucun résultat n’a été publié à ce jour, du moins à notre connaissance, ce qui n’est pas de très bon augure.

La goutte épaisse dont Osler, converti de la dernière heure à la découverte de Laveran, énonça le principe et assura la promotion est restée pendant près de 100 ans l’examen de référence, avec toutes les difficultés de lecture que l’on connaît et le risque de résultats erronés qui en découle. La PCR et les TDR ont marqué dans les années 1970 et 1980 un progrès considérable dans le diagnostic biologique du palu- disme avec, pour chacune de ces deux techniques, ses avan- tages et ses inconvénients, notamment, pour certains TDR très largement utilisés aujourd’hui, l’apparition de faux négatifs liés à une mutation entraînant un arrêt de la produc- tion de la HRP2. En admettant que les performances du dis- positif permettant le DTP par cytométrie de flux photoacous- tique soient confirmées sur le terrain, les problèmes découlant des différences d’absorption du faisceau laser en fonction des couleurs de peau résolus, et que le dispositif puisse être mis à la disposition du personnel de santé des pays en développement malgré son prix, il n’est pas du tout certain que cette technique, qui fait pourtant appel au meil- leur de la biotechnologie, réussisse à s’imposer et surtout change les comportements qui consistent souvent aujour- d’hui, dans les pays d’endémie, à traiter par un antipaludique tout sujet fébrile, quel que soit le résultat d’un TDR…

Liens d’intérêt : L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt.

142 Bull. Soc. Pathol. Exot. (2018) 111:141-142

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