Enoncé A370 (Diophante) Les entiers d’ordre 3
On dit qu’un entier n ≥ 1 est d’ordre 3 s’il existe 3 rationnels positifs x, y, z tels quen=x+y+z=x.y.z.
Exemple 13 est d’ordre 3 puisque 13 = 3677 +12142 +63766 = 3677×12142 ×63766.
Q1. Démontrer qu’il n’existe pas d’entier d’ordre 3 inférieur à 6.
Q2. Démontrer que 6, 7, 9, 13, 14, 15, 19, 22, 25, 27 sont d’ordre 3.
Q3. Démontrer qu’il existe une infinité d’entiers d’ordre 3.
Q4. Y a-t-il des entiers d’ordre 3 multiples de 4 ? Solution de Jean Moreau de Saint-Martin
Question 1
La moyenne géométrique de réels positifs étant au plus égale à la moyenne arithmétique,
n=xyz≤
x+y+z 3
3
=
n
3 3
= n3 27. Il en résulte n≥√
27 = 5,196. . ., d’où n≥6.
Question 2
6 = 1 + 2 + 3 = 1×2×3.
7 = 7 6 +4
3 +9 2 = 7
6 ×4 3 ×9
2. 9 = 9
2 +4 1 +1
2 = 9 2 ×4
1 ×1 2. 13 = 36
77 +121 42 + 637
66 = 36 77 ×121
42 × 637 66 . 14 = 14
3 +9 1 +1
3 = 14 3 ×9
1×1 3. 15 = 12
1 +5 2 +1
2 = 12 1 ×5
2×1 2.
19 = 324 143+121
234+3211 198 = 324
143×121
234×3211 198 . 22 = 18
1 + 11 3 + 1
3 = 18 1 ×11
3 ×1 3. 25 = 10404
713 + 529
3162+24025
2346 = 10404
713 × 529
3162× 24025 2346. 27 = 27
14+ 49 2 + 4
7 = 27 14 ×49
2 ×4 7.
Pour 19 et 25, que je n’ai pu trouver par tâtonnements, j’ai eu recours à un programme explorant les triplets (u, v, w), avec v < u, w2 < uv et testantu3+v3=nw(uv−w2) (voir formule générale à la question 3 page suivante).
Les triplets sont (11,6,7) pour 13 ; (18,11,13) pour 19 ; (102,23,31) pour 25.
Listing du programme (Java) int n,s,u,v,w ; boolean go ;
u=6 ; go=true ; v=6 ; w=1 ; n=25 ; // (exemple de n) while(go)
{ u++ ; v=u ;
while(go && (v>1))
{ v-- ; s=u*u*u+v*v*v ; w=1 ; while(w*w<u*v) w++ ;
while(go && (w>1))
{ w-- ; go=(n*w*(u*v-w*w) != s) ; }
} }
System.out.println("u=" + u + ", v=" + v + ", w=" + w) ; Remarque : Ce programme suppose que l’on sait déjà que n est d’ordre 3 ; si ce n’est pas le cas, en l’absence de précaution supplémentaire, ce programme peut boucler indéfiniment, ou caler sur un dépassement de capacité.
Question 3
Un diviseur premier, ou puissance de nombre premier, du dénominateur de x (écrit comme fraction irréductible) doit diviser un autre dénominateur pour pouvoir disparaître dans la somme, supposée être un entier. Pour dis- paraître dans le produit, ce diviseur doit être au carré dans le numérateur du 3e rationnel.
La formule générale est ainsi, avec a, b, c entiers et u, v, w entiers deux à deux premiers entre eux
n=abc= au2 vw +bv2
wu+cw2 uv = au2
vw ×bv2 wu ×cw2
uv . Equivalemment au3+bv3+cw3=abcuvw.
Il s’agit de trouver une famille infinie de sextuplets d’entiers (a, b, c, u, v, w) vérifiant cette relation. Je vais supposer a = b = w = 1. La relation à vérifier se réduit à u3+v3 =c(uv−1).
On y satisfait avec c= 3(u+v) et u2−4uv+v2+ 3 = 0.
Dans un plan (u, v), cette dernière équation représente une hyperbole ; dans le premier quadrant, les coordonnées entières de points de cette courbe sont deux termes consécutifs de la suite 1, 2, 7, 26, 97, . . ., où la somme de 3 termes consécutifs est 5 fois le terme médian. En effet, si (u, v) appartient à la courbe,v2+ 3 =u(4v−u) =uu0 =u0(4v−u0) avec u+v+u0= 5v, et (v, u0) est sur la courbe.
Ces termes sont les valeurs en x= 2 des polynômes de TchebychevTk(x).
Pour tout k, les nombres 3Tk(2) + 3Tk+1(2) sont des entiers d’ordre 3.
Remarque. L’idée qui m’a conduit à cette suite est : siuv−1 diviseu3+v3, il divise u3v3+v6 et 1 +v6. Partant de v, je cherche, parmi les diviseurs de 1 +v6, un qui soit de la forme uv−1 ; s’il existe, cela détermineu, et il existe un autre diviseur u0v−1 de 1 +v6 et de u03+v3.
Question 4
Je noter(m) l’exposant de 2 dans la factorisation de l’entierm. De manière générale, r(f +g) = min(r(f), r(g)) si r(f) 6= r(g), et r(f) = r(g) <
r(f +g) sinon. Ainsi parmi r(f), r(g), r(f +g), les deux plus petits sont égaux et strictement inférieurs au troisième.
Supposons qu’il existe (a, b, c, u, v, w) avec au3+bv3+cw3 = abcuvw et abcmultiple de 4.
Parmi les exposants de 2r(au3),r(bv3),r(cw3), supposons d’abord qu’un est strictement inférieur aux autres, par exemple r(au3) < r(bv3) ≤ r(cw3). Alors r(bv3+cw3) > r(au3) = r(au3+bv3+cw3) = r(abcuvw), d’où 2r(u) ≥r(b) +r(c). Ce n’est possible qu’avec b etc impairs, car les fractions b/u et c/u sont irréductibles. Comme on suppose abc multiple de 4,aest multiple de 4,v etw sont impairs cara/(vw) est irréductible.
Mais 2≤r(au3)< r(bv3) = 0 est impossible.
Ainsi, parmir(au3),r(bv3),r(cw3), les deux plus petits sont égaux et par exempler(au3)≥r(bv3) =r(cw3). Plusieurs cas sont à examiner.
Si r(au3) > r(bv3+cw3) = r(au3+bv3+cw3) = r(abcuvw) ≥ 2, on a comme précédemmentb, c, v, w impairs. C’est encore le cas si
r(bv3+cw3)> r(au3) =r(au3+bv3+cw3) =r(abcuvw)≥2, et en outre uest impair. Même conclusion si
r(bv3+cw3) =r(au3)< r(au3+bv3+cw3) =r(abcuvw)≥2.
Formons alors le produit
(bcvw−u2)(acuw−v2) =u2v2+cw(abcuvw−au3−bv3) =u2v2+c2w4. Si les deux facteurs étaient négatifs, leurs opposés seraient inférieurs àu2 etv2 respectivement, avec un produit < u2v2. Ces facteurs sont positifs, et acuw−v2 est un multiple de 4 diminué de 1, si a est multiple de 4.
Mais un tel facteur ne peut diviser une sommeu2v2+c2w4 de deux carrés premiers entre eux, selon une proposition bien connue de Fermat. D’où l’impossibilité.