• Aucun résultat trouvé

FOLIO SCIENCE-FICTION

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "FOLIO SCIENCE-FICTION"

Copied!
36
0
0

Texte intégral

(1)
(2)

F O L I O S C I E N C E - F I C T I O N

(3)

Ray Bradbury

Les pommes d’or du soleil

Traduit de l’américain par Richard Negrou Traduction révisée et complétée

par Philippe Gindre

Denoël

(4)

Cet ouvrage a été précédemment publié dans la collection Lunes d’encre aux Éditions Denoël.

Titre original:

T H E G O L D E N A P P L E S O F T H E S U N

© Ray Bradbury, 1952, 1953.

© Éditions Denoël, 2007, pour la traduction française.

(5)

Né en 1920 dans l’Illinois, Ray Bradbury se destine très rapi- dement à une carrière littéraire, fondant dès l’âge de quatorze ans un magazine amateur pour publier ses textes. Malgré quelques nouvelles fantastiques parues dans des supports spécia- lisés, son style poétique ne rencontre le succès qu’à la fin des années 1940, avec la parution d’une série de nouvelles oniriques et mélancoliques, plus tard réunies sous le titre de Chroniques martiennes. Publié en 1953, Fahrenheit 451 assoit la réputation mondiale de l’auteur, et sera adapté au cinéma par François Truffaut.

Développant des thèmes volontiers antiscientifiques, Bradbury s’est attiré les éloges d’une critique et d’un public non spécia- lisés, sensibles à ses visions nostalgiques et à sa prose acces- sible.

Il s’est éteint en 2012 à l’âge de 91 ans.

(6)
(7)

Ce livre-ci, je le dédie de tout mon cœur à Neva, fille de Glinda la Gentille Sorcière du Sud.

(8)
(9)

… Et cueille avant que l’heure et la saison ne soient révolues Les pommes d’argent de la Lune, Les pommes d’or du Soleil.

W . B . Y E A T S

(10)
(11)

13

La Corne de brume

Tout là-bas, loin de la terre ferme, au beau milieu des eaux glacées, nous attendions chaque soir la venue du brouillard. Et chaque soir, lorsque le brouil- lard finissait par arriver, nous montions tout là-haut, au sommet de la tour de pierre, et nous nous mettions à graisser le mécanisme de cuivre du phare, puis nous l’allumions. Dans ces moments-là, McDunn et moi nous nous sentions comme deux oiseaux perdus dans un ciel de plomb. Nous lancions alors notre faisceau de lumière comme une main tendue à l’intention des navires isolés: une lumière rouge, blanche, puis rouge à nouveau. Et si les navires ne voyaient pas notre lumière, du moins pouvaient-ils entendre notre Voix, ce mugissement puissant et pro fond que poussait sans relâche notre Corne de brume, qui faisait frissonner les bancs de brouil- lard, effrayait les colonies de mouettes qui s’épar- pillaient alors comme autant de jeux de cartes lancés aux quatre vents, et faisait se dresser, écumantes, les vagues.

«Faut aimer être seul, quand on vit ici. Mais tu t’y

(12)

14

es fait maintenant, ça va? m’a demandé McDunn ce soir-là.

— Oui, ai-je répondu. Et grâce à Dieu on peut dire que vous savez faire la conversation.

— Bon, eh bien demain c’est ton tour d’aller à terre, petit, m’a-t-il dit alors en souriant, tu vas pouvoir aller faire danser les filles et boire du gin.

— McDunn, à quoi est-ce que vous pensez quand je m’en vais comme ça, que je vous laisse ici tout seul?

— Je pense à la mer. Aux mystères de la mer.»

McDunn a allumé sa pipe. Il était sept heures et quart en cette froide soirée de novembre et nous avions déjà allumé du feu. Le phare balayait l’horizon dans toutes les directions tandis que le long gosier de la tour résonnait de l’éternelle et monotone rengaine de notre Corne de brume. Il n’y avait pas une bourgade sur la côte à cent milles à la ronde. Juste une route, une seule et unique route sans jamais beaucoup de circulation et qui se contentait de traverser la lande déserte pour rejoindre la côte. Puis c’était l’étendue d’eau glacée large de deux milles qui séparait notre rocher de la terre ferme avec, parfois, quelques rares bateaux.

«Les mystères de la mer…, a répété McDunn, l’air songeur. Tu sais quoi? L’océan, c’est le plus gros flocon de neige qui a jamais existé sur cette terre. Non, c’est vrai, regarde comme il brasse et rebrasse dans ses vagues les formes et les couleurs.

Il y en a comme ça des mille et des cents, jamais deux fois les mêmes. C’est bizarre, moi je dis. Tiens, une nuit, il y a des années de ça, j’étais ici, tout seul,

(13)

15 et voilà que tous les poissons de la mer sont montés tout à coup à la surface, là, juste devant nous. Ils avaient l’air attirés par quelque chose et ils restaient là, comme ça, au beau milieu de la baie. On aurait dit qu’ils tremblotaient, tu sais, et ils regardaient fixe- ment la lumière du phare qui les éclairait tous, rouge, blanche, rouge, blanche, ce qui fait que je voyais bien les drôles de z’yeux qu’ils avaient. Ça m’a fichu les jetons. Tous ces poissons, on aurait dit comme la queue d’un paon énorme qui flottait sur la mer et ils sont restés comme ça jusqu’à minuit. Puis, comme qui dirait sans faire de bruit, ils ont filé. Un million de poissons, comme ça, disparus. J’ai comme dans l’idée que peut-être, à leur façon, s’ils avaient fait tout ce chemin, c’était pour venir rendre un culte à la lumière. Quand même, c’est bizarre, moi je dis.

En même temps, imagine à quoi la tour de pierre doit ressembler pour eux, comme ça, dressée à soixante- dix pieds au-dessus de la surface de l’eau, avec ce Dieu-de-lumière qui brille tant qu’il peut et cette tour à la voix monstrueuse qui fait savoir à tout l’océan qu’elle est là. Ils ne sont jamais revenus ces poissons-là, mais tu ne crois pas que sur le moment ils ont bien dû penser que ça y était, qu’ils L’avaient rencontré?»

J’ai frissonné. Je regardais l’étendue grise de la mer se perdre au loin dans le néant, le nulle part.

«Oh oui, il y en a des choses dans la mer.»

McDunn a tiré sur sa pipe en clignant des paupières, visiblement préoccupé. Il avait été comme cela toute la journée, sans dire pourquoi. «Malgré toutes nos machines, nos soi-disant sous-marins, il se passera

(14)

16

des dizaines de milliers de siècles avant que nous mettions vraiment le pied dans les contrées du fond de l’abîme, les royaumes enchantés, avant que nous connaissions la peur, la vraie. Si tu regardes bien, là-bas en bas c’est encore l’an 300000 avant Jésus- Christ. Pendant qu’ici nous défilons au son des trom- pettes, que nous nous disputons nos pays, nous nous arrachons la tête, eux, là-bas, à douze milles sous les eaux glacées de l’océan, ils continuent à vivre dans l’ancien temps, leur époque elle est aussi ancienne que la queue d’une comète.

— Oui, c’est vraiment encore l’ancien monde, là en bas.

— Bon allez, c’est pas tout ça, arrive un peu, il y a un truc qu’il faut que je te dise depuis un petit moment.»

Nous avons continué à discuter tout en montant sans nous presser les quatre-vingts marches menant au sommet. Là, McDunn a éteint l’éclairage de la pièce pour qu’il n’y ait pas de reflets dans l’optique du phare. Le grand œil lumineux bourdonnait, tour- nant sans effort sur sa base bien huilée. La Corne de brume mugissait régulièrement toutes les quinze secondes.

«On dirait une bête, tu trouves pas?» McDunn a opiné pour lui-même. «Une grosse bête qui hurle toute seule dans la nuit, au bord d’un gouffre d’éter- nité, et qui lance son cri en direction des Profondeurs de la mer: je suis là, je suis là, je suis là. Et là en bas, on lui répond, tu peux me croire. Ça fait trois mois que t’es là, Johnny, alors j’aime autant te prévenir.

Vers cette époque de l’année, a-t-il ajouté en scrutant

(15)

17 les ténèbres et le brouillard, il y a quelque chose qui vient rendre visite au phare.

— Les bancs de poissons que vous disiez, là?

— Non, c’est pas ça, c’est autre chose. Je repous- sais le moment de te le dire, tu sais, je me disais que tu me prendrais pour un cinglé. Mais cette nuit je peux plus attendre: si mon calendrier me trompe pas depuis l’année dernière, c’est cette nuit-ci qu’il doit venir. Mais je veux pas t’en dire plus, tu verras bien par toi-même. Assieds-toi là et attends. Demain, si tu veux, tu pourras faire ton paquetage, tu pourras retourner à terre avec le canot à moteur, tu l’amar- reras au quai, puis tu monteras dans ta voiture que tu as garée sur le promontoire et tu t’en iras vers un des petits villages qui sont dans l’intérieur des terres et puis là, la nuit, tu pourras même laisser la lumière allumée. Je te poserai pas de questions, je te ferai pas de reproches. Ça fait trois ans que ça se reproduit comme ça, tous les ans, mais là c’est vraiment la première fois qu’il y a quelqu’un avec moi pour être sûr, tu comprends. Alors, attends et ouvre bien les yeux.»

Une demi-heure a passé durant laquelle nous nous sommes contentés de chuchoter de temps à autre. Comme nous commencions à être las d’at- tendre, McDunn s’est mis à m’exposer quelques- unes des idées qui lui trottaient depuis longtemps dans la tête. Ainsi, il avait une théorie bien à lui sur notre fameuse Corne de brume.

«Par un jour glacial et sans soleil, il y a de ça des années, un homme qui passait sur le rivage s’est arrêté pour écouter le bruit des vagues et il a dit comme ça:

(16)

18

“Ce qu’il nous faut, c’est une voix qui porte par-delà l’océan pour prévenir les navires, et je m’en vais en fabriquer une. Je ferai une voix où il y aura tous les brouillards de la Terre depuis que le monde est monde. Une voix qui sera comme un lit vide à côté duquel on a passé toute la nuit à attendre, comme une maison sans personne quand on ouvre la porte, et comme les arbres d’automne quand ils ont perdu leurs feuilles. Une voix comme le cri des oiseaux qui s’enfuient en direction du sud, comme le vent de novembre et les vagues qui viennent se fracasser sur les brisants glacés. Je mettrai dans cette voix-là telle- ment de solitude que personne ne pourra s’y tromper, personne ne pourra s’empêcher de pleurer au plus profond de son âme. Quand on l’entendra, la chaleur du foyer paraîtra plus douce, et ceux qui vivent dans les petites villes de l’intérieur des terres seront bien contents d’être à l’abri quand eux aussi ils l’enten- dront. Je vais me fabriquer une voix, une machine à voix. Ils appelleront ça une Corne de brume et tous ceux qui l’entendront sauront que l’éternité est la plus triste des choses et que la vie est courte sur cette terre.”»

La Corne de brume a retenti.

«C’est une histoire que j’ai inventée pour essayer d’expliquer pourquoi cette chose-là revient au phare, comme ça, tous les ans, a conclu tranquillement McDunn. C’est la Corne de brume qui l’appelle, je crois bien. Et elle, elle vient…

— Mais…

— Chut! s’est exclamé McDunn. Regarde, là!»

J’ai suivi son regard: il fixait l’abîme des eaux.

(17)

19 Quelque chose approchait du phare.

Comme je l’ai déjà dit, il faisait froid, cette nuit-là.

La tour du phare était glaciale, la lumière allait et venait et la Corne de brume appelait, appelait à travers l’épaisseur du brouillard. On n’y voyait pas bien loin.

On n’y voyait pas vraiment, en fait. Mais la mer était bien là, immense dans les ténèbres qui s’étaient abattues sur la terre. Une mer calme et sans relief, couleur de boue sale, que nous sentions bouger autour de nous comme elle le faisait depuis toujours.

Et nous, nous étions là, tous les deux seuls au sommet de la tour du phare et voilà que devant nous, assez loin encore, il y a eu un remous suivi d’une vague et quelque chose s’est élevé dans un bouillonnement d’écume. Tout à coup, crevant les eaux glacées, une tête est apparue, une grosse tête sombre avec des yeux immenses, puis un cou. Puis… non pas un corps, mais le cou, encore et toujours, interminable! La tête se dressait à présent à quarante pieds au-dessus des eaux, surmontant un cou gracile de couleur sombre, magnifique. C’est alors seulement que le corps lui- même, pareil à une petite île de corail noir couverte de coquil lages et de crustacés, a fini par émerger tout ruisselant des profondeurs. Il y a eu un battement de queue. En tout, de la tête à l’extrémité de la queue, le monstre me paraissait mesurer entre quatre-vingt- dix et cent pieds de long.

J’ai dit quelque chose. Je ne sais plus quoi.

«T’inquiète pas, mon gars, ça va aller, m’a répondu McDunn en chuchotant.

— C’est pas possible, il devrait pas être là!

— Non, Johnny, c’est nous qui ne devrions pas

(18)

20

être là. Ça fait dix millions d’années qu’il est comme ça. Lui, il a pas changé. C’est nous qui avons changé, nous et la Terre, et c’est nous qui ne sommes pas possibles, comme tu dis. C’est nous!»

Avec une sombre majesté, il nageait dans l’eau glacée, loin, très loin de nous encore. Autour de lui le brouillard se déplaçait, estompant parfois sa sil - houette. L’un de ses yeux immenses a soudain réfléchi la puissante lumière du phare, nous l’a renvoyée, blanche, rouge, blanche, comme un disque tenu à bout de bras émettant un message dans un code pri - mitif. Et tout cela sans faire plus de bruit que le brouillard dans lequel il nageait.

«C’est un dinosaure, quelque chose comme ça!»

Je me suis accroupi en me retenant à la rampe de l’escalier.

«Oui, un genre.

— Mais ils sont tous morts!

— Non, en fait ils sont partis se cacher là-bas, tout en bas… dans les Profondeurs de la mer. Au plus profond des abîmes. Les Profondeurs de la mer! Voilà un mot pas comme les autres, hein Johnny, qu’est-ce que t’en dis? Il y a tout dans un mot comme ça, le froid, l’obscurité, la profondeur, tout.

— Qu’est-ce qu’on va faire?

— Qu’est-ce qu’on va faire? On a un boulot à faire, ici, on peut pas s’en aller comme ça. D’ail- leurs on est plus en sécurité ici que si on essayait de rejoindre la terre, peu importe le canot qu’on pren- drait. Cette chose-là est aussi grande qu’un destroyer et presque aussi rapide.

(19)

21

— Mais pourquoi vient-il ici? Pourquoi justement ici?»

L’instant d’après, j’ai eu la réponse.

La Corne de brume a retenti.

Et le monstre a répondu.

Ce cri-là avait traversé un million d’années d’eau et de brouillard pour venir jusqu’à nous. Il y avait tant d’angoisse et de solitude dans ce cri que ma tête et mon corps tout entier en frissonnaient à l’unisson.

Le monstre a mugi en direction de la tour du phare.

La Corne de brume a retenti. Le monstre a mugi à nouveau. La Corne de brume a retenti. Le monstre a ouvert tout grand sa gueule aux dents impression- nantes et le son qui en est sorti était exactement pareil à celui de la Corne de brume. Solitaire, ample et loin- tain. La solitude, les horizons bouchés par la brume, les nuits glacées, l’exil. Exactement pareil.

«Et maintenant, tu comprends pourquoi il vient ici?» a chuchoté McDunn.

J’ai acquiescé en silence.

«Tu vois, Johnny, tout au long de l’année ce pauvre monstre il se cache là-bas au fond, à mille milles de la côte et à vingt mille de profondeur peut- être, et il attend le bon moment… Peut-être qu’elle a un million d’années, cette créature-là, va savoir.

Penses-y un peu: un million d’années… tu pourrais attendre aussi longtemps que ça, toi? Peut-être que c’est la dernière de son espèce, cette bête-là. J’ai comme dans l’idée que ça pourrait être ça. De toute façon, voilà comment ça se passe: les hommes arrivent sur ce rocher et ils construisent ce phare, il y a de cela cinq ans maintenant. Et puis ils installent cette

(20)

22

Corne de brume et ils la font sonner et sonner encore vers l’endroit où, justement, toi tu dors et tu rêves…

tu rêves de l’océan, tu te souviens d’un monde où il y en avait encore des milliers comme toi sur Terre.

Mais maintenant tu es seul, tout seul, dans un monde qui n’est pas fait pour toi et où tu dois te cacher.

«Mais le son de la Corne de brume arrive jusqu’à toi puis s’en va, revient, puis repart, et tu te réveilles, tu t’extirpes du fin fond boueux des profondeurs et les yeux grands ouverts comme des lentilles de caméra de cinéma tu te mets à avancer lentement, très lentement, parce que tu as tout le poids de l’Océan qui pèse sur tes épaules. Pourtant tu l’entends cette Corne de brume, malgré toute cette eau qui vous sépare, tu l’entends à peine mais tu reconnais son cri et ta poitrine s’embrase à nouveau comme une chau- dière de locomotive et tu commences à t’élever len - tement, très lentement. Tu te nourris au passage, tu engloutis des montagnes de morues et de petits pois- sons, des rivières de méduses, et tu montes comme ça tout au long des mois d’automne: septembre, le mois des brouillards qui se lèvent, octobre plus bru - meux encore, et la Corne de brume appelle toujours plus souvent, et vers la fin novembre, alors que tu t’es efforcé de monter comme ça, régulièrement, en gagnant quelques pieds à chaque heure qui passait, te voilà enfin à la surface, et tu es toujours en vie. Il faut que tu y ailles doucement de toute façon. Si tu faisais surface comme ça, tout d’un coup, tu écla- terais. Voilà pourquoi ça te prend trois bons mois pour monter, puis encore des jours et des jours de nage dans l’eau glacée pour atteindre le phare. Mais

(21)

23 ça y est, Johnny, tu es arrivé, te voilà là-bas, dans la nuit, et bon sang tu es bien le monstre le plus gigan- tesque de toute la création. Le phare est là, il t’ap- pelle, il est comme toi, il a un grand cou tout droit qui sort de l’eau, aussi long que le tien, il a le même corps que toi et, le plus important bien sûr, il a la même voix que toi. Tu comprends maintenant, Johnny? Hein, dis, tu comprends?»

La Corne de brume a mugi.

Le monstre a répondu.

J’ai tout vu, j’ai tout compris… des millions d’années à attendre, seul, le retour de quelqu’un qui n’est jamais revenu. Des millions d’années d’exil au fond des mers, le temps qui passe à vous rendre fou, tandis que les reptiles volants disparaissaient du ciel, que les marécages des zones continentales se dessé- chaient les uns après les autres, que les paresseux et les machairodontes, passée leur heure de gloire, finissaient à leur tour au fond des mares de goudron et que les hommes, pareils à des fourmis blanches, couraient sur les collines.

La Corne de brume a mugi.

«L’année dernière, a dit McDunn, cette créature- là s’est mise à tourner en rond, encore et encore, et comme ça toute la nuit. Sans trop s’approcher. Ça l’intriguait, on aurait dit. Peut-être qu’elle avait peur.

Peut-être aussi qu’elle était un peu en rogne d’avoir fait tout ce chemin. Mais le jour d’après, à l’impro- viste, le brouillard s’est levé, on s’est retrouvés avec un beau soleil tout neuf et un ciel bleu comme dans les peintures. Alors le monstre est parti, il a fui la chaleur, le silence, et il est jamais revenu depuis. À

(22)

24

mon avis, il a dû passer toute son année à remâcher tout ça, à se repasser tous les détails dans sa tête.»

Le monstre était à présent à une centaine de pieds à peine, mugissant en direction de la Corne de brume qui lui répondait aussitôt. Et chaque fois que les lumières du phare tombaient sur eux, les yeux du monstre devenaient tour à tour de feu, de glace, de feu, de glace.

«C’est ça ta vie, dit McDunn. Quelqu’un qui attend quelqu’un qui ne revient jamais. Aimer quelque chose toujours plus que cette chose ne t’aimera jamais. Et au bout d’un certain temps tu en arrives à vouloir tuer cette chose, même si tu ne sais pas vraiment ce que c’est, pour qu’elle ne puisse plus te faire souffrir.»

Le monstre se précipitait vers le phare.

La Corne de brume a mugi.

«On va voir ce qui va se passer», a dit McDunn.

Il a arrêté la Corne de brume.

Dans la minute qui a suivi, le silence a été si total que nous arrivions à entendre nos propres battements de cœur résonner dans la cage de verre du phare, et même la lente giration du projecteur dans son loge- ment bien huilée.

Le monstre s’est arrêté net, il n’a plus bougé. Ses yeux, grands comme des lanternes, ont clignoté. Il avait la gueule béante. Puis il a émis une sorte de grognement sourd, pareil à celui d’un volcan. Il a penché la tête à droite, puis à gauche, comme pour essayer de retrouver la voix qui s’était perdue dans le brouillard. Il a scruté le phare, grondé à nouveau.

Puis ses yeux se sont embrasés. Il s’est cabré, a

(23)

25 frappé l’eau du plat de la queue et s’est précipité sur le phare, le regard plein de douleur et de rage.

J’ai hurlé: «McDunn, rallumez la Corne de brume!»

McDunn a essayé, il ne trouvait pas le bouton.

Mais au moment même où il rétablissait le courant, le monstre s’est cabré. J’ai aperçu ses pattes gigan- tesques, j’ai vu briller l’espace d’un instant la peau squameuse tendue entre ses griffes, semblables à des doigts, dont il s’est mis à lacérer la tour du phare.

J’avais devant moi le côté droit de sa tête et son œil énorme à l’expression tourmentée luisait comme un chaudron dans lequel il me semblait que j’aurais pu tomber en hurlant. La tour a tremblé sur sa base. La Corne de brume a mugi. Le monstre a mugi. Il a saisi la tour entre ses pattes et ses mâchoires se sont refermées sur la structure de verre qui s’est brisée et s’est effondrée sur nous.

McDunn m’a saisi par le bras: «Faut descendre, vite!»

La tour du phare s’est mise à osciller, à trembler, elle a commencé à céder. La Corne de brume et le monstre rugissaient. Nous nous sommes rués dans l’escalier au risque de tomber jusqu’au bas des marches. «Vite!»

Au moment où nous avons atteint le niveau du sol, la tour s’est brisée en deux et a commencé à s’effon- drer dans notre direction. Nous nous sommes accroupis sous l’escalier, dans la petite cave en pierre. Les blocs pleuvaient, les chocs se suivaient sans discon- tinuer. Puis la Corne de brume s’est arrêtée brus- quement. Le monstre s’est laissé retomber de tout

(24)

26

son poids sur la tour du phare qui a achevé de s’ef- fondrer. Nous avons tenu bon, McDunn et moi, nous sommes restés là, agenouillés, pendant qu’au-dessus de nous notre univers familier disparaissait dans une gigantesque explosion.

Puis tout a été fini. L’obscurité, rien que le bruit des vagues sur les brisants. Rien d’autre.

Puis, finalement, un autre bruit, différent.

«Écoute, m’a dit McDunn à voix basse. Écoute.»

Nous avons attendu un moment. Puis j’ai com - mencé à l’entendre. Au début, une sorte de grande aspiration d’air, puis la plainte disant l’égarement, la solitude du grand monstre penché sur nous, au-dessus de nous, par-dessus nous, nous enveloppant de telle sorte que la puanteur écœurante de son corps saturait l’air à une épaisseur de rocher de notre abri dans la cave. Le monstre s’est mis à haleter, à gémir. La tour du phare n’existait plus. La lumière s’était éteinte. La chose qui l’avait appelé par-delà un million d’années n’était plus là. Et le monstre ouvrait sa large gueule et lançait de grands cris. C’était le bruit d’une Corne de brume, encore et toujours. Au large, les bateaux qui passaient et ne voyaient plus la lumière du phare, ne voyaient plus rien du tout, mais entendaient tout de même ce cri dans la nuit, devaient se dire: «C’est bien ça, c’est la voix de la solitude, c’est la Corne de brume de la Baie Solitaire. Tout va bien, nous avons doublé le cap.»

Et cela a duré toute la nuit.

Il faisait soleil, il faisait chaud l’après-midi suivant lorsque l’équipe de secours est venue nous sortir de notre cave, sous l’amas de pierres.

(25)

27

«Elle s’est effondrée comme une vieille ruine, et puis voilà, leur a dit McDunn d’un air grave. Les vagues nous ont méchamment secoués deux ou trois fois puis elle s’est écroulée, comme ça.» Il m’a pincé le bras.

Il n’y avait rien à voir. L’océan était calme, le ciel bleu. La seule chose qu’on remarquait, c’était une très forte odeur d’algue, répugnante, qui émanait du dépôt verdâtre qui recouvrait les pierres de la tour écroulée et les rochers du rivage. Des mouches bour- donnaient à proximité. L’océan léchait le rivage, il ne charriait rien.

L’année suivante ils ont bâti un nouveau phare, mais à ce moment-là j’avais déjà trouvé un travail dans le petit village, une femme, et une petite chau- mière bien chauffée dont on voyait de loin briller les lumières rassurantes dans la nuit, l’automne venu, toutes portes fermées, la cheminée fumante. Quant à McDunn il est devenu le gardien du nouveau phare, construit d’après ses plans en béton armé bien solide.

«Au cas où», comme il disait.

Le nouveau phare a été terminé en novembre. Un soir tard, j’y suis allé seul en voiture, je me suis garé, j’ai scruté l’étendue des eaux grises et j’ai écouté la nouvelle Corne de brume résonner au loin, une fois, deux fois, trois fois, quatre fois par minute, sans écho, jamais.

Le monstre?

Il n’est jamais revenu.

«Il est parti, m’a dit McDunn. Il est retourné dans les Profondeurs de la mer. Il a compris que trop aimer, ce n’est pas possible dans ce monde. Il est

(26)

reparti là-bas, tout en bas, dans les Profondeurs de la mer, et pendant un million d’années encore il va attendre. Pauvre vieux! Attendre et attendre encore, pendant que les hommes vont et viennent sur cette petite planète pitoyable. Attendre, toujours at tendre.»

Assis dans ma voiture, j’écoutais. Les lumières du phare devaient briller là-bas, dans la Baie Solitaire, mais je ne les voyais pas. Par contre, j’entendais la Corne de brume, la Corne de brume, la Corne de brume. On aurait dit le monstre qui appelait.

Je suis resté assis là, comme ça, en silence. Qu’est- ce que j’aurais pu dire?

(27)

29

Le promeneur

Sortir et investir le silence absolu de la ville à huit heures du soir dans la brume de novembre, fouler les allées en ciment craquelées, déformées, veinées de touffes d’herbe qu’il fallait enjamber; se frayer un chemin, mains dans les poches, à travers les silences, voilà ce que M. Mead, Leonard de son prénom, aimait faire par-dessus tout. Il s’arrêtait à un croi- sement, scrutait dans les quatre directions les longues avenues piétonnes éclairées par le clair de lune, décidait du chemin à prendre, ce qui à vrai dire n’avait aucune importance car en ce monde de l’an 2053 M. Leonard Mead était seul ou peu s’en fallait; puis, la direction choisie, il se mettait en marche à grands pas en lançant devant lui de grandes formes blanches, des bouffées d’air glacé semblables à la fumée d’un cigare.

Il marchait parfois pendant des heures, pendant des kilomètres, et ne revenait chez lui qu’à minuit.

Au cours de ses promenades, les villas et les maisons aux fenêtres obscures qu’il voyait lui donnaient un peu l’impression de traverser un cimetière, avec çà

(28)

30

et là par instants quelques feux follets à peine visibles dansant derrière les fenêtres. Parfois, il lui semblait que des fantômes grisâtres se manifestaient brusque- ment contre les murs intérieurs des pièces dont on avait oublié de tirer les rideaux; d’autres fois, des chuchotements et des murmures s’échappaient par la fenêtre restée ouverte d’un de ces édifices aux allures de mausolée.

Dans ces moments-là, M. Leonard Mead s’ar- rêtait, penchait la tête de côté, écoutait, regardait, puis reprenait sa marche sur la route défoncée sans faire le moindre bruit. Depuis longtemps déjà, en effet, il troquait ses chaussures de ville contre des baskets au cours de ses promenades nocturnes: le bruit des semelles dures n’aurait pas manqué d’éveiller à intervalles réguliers des régiments entiers de chiens qui auraient alors accompagné sa marche de leurs aboiements, et des lumières auraient pu s’allumer, des visages apparaître et toute une rue se mettre fina- lement en émoi sur son passage, silhouette solitaire déambulant en cette soirée de début novembre.

Ce soir-là, il débuta sa promenade en direction de l’ouest, de la mer invisible. L’air était glacé, cristallin, à vous transpercer les narines et vous faire flamboyer la poitrine de l’intérieur comme un arbre de Noël qui s’allumait, s’éteignait, on le sentait bien, à chaque respiration, les branches recouvertes d’une neige invi- sible. M. Leonard Mead prenait plaisir à entendre le léger crissement de ses semelles souples foulant les feuilles d’automne et il sifflotait entre ses dents un refrain tranquille, froid comme l’air. De temps à autre, il ramassait une feuille morte au passage et examinait

(29)

31 le squelette de ses nervures à la lumière des rares réverbères tout en poursuivant sa route, humant son parfum de rouille.

«Salut, là-dedans», murmurait-il en passant devant chaque maison, des deux côtés de la rue. «Quoi de neuf ce soir sur la 4, sur la 7, sur la 9? Mais où est-ce qu’ils se précipitent donc comme ça, tous ces cow- boys? Et la cavalerie des États-Unis d’Amérique, qu’est-ce qu’elle attend? Ce ne serait pas ça, ces cavaliers que j’aperçois au sommet de la colline, prêts à venir à la rescousse?»

La rue était silencieuse, vide à perte de vue, avec pour seul mouvement perceptible l’ombre de M. Mead glissant comme l’ombre d’un épervier en rase cam - pagne. S’il fermait les yeux, s’arrêtait et demeurait parfaitement immobile, il s’imaginait aisément au beau milieu d’une plaine hivernale, un désert d’Ari- zona sans un souffle de vent, sans une habitation à mille lieues à la ronde, avec pour seule compagnie le lit desséché des rivières — les rues.

«Et maintenant, qu’est-ce qu’il y a au pro - gramme?» demanda-t-il aux maisons, jetant un œil à sa montre-bracelet. «Vingt heures trente… Qu’est- ce qu’on peut bien regarder à cette heure-là? Quelques petits meurtres bien assortis? Un quiz? Des variétés?

Un comédien qui tombe de la scène?»

Était-ce l’écho d’un éclat de rire qui fusait à présent d’une de ces maisons, blanches dans le clair de lune? Il hésita un moment, puis comme rien ne se passait il continua son chemin. Il trébucha sur une portion de trottoir particulièrement disjointe. Le ciment disparaissait sous les fleurs et l’herbe. En dix années

(30)

32

de promenades, de jour comme de nuit, après des milliers de kilomètres parcourus, jamais il n’avait croisé quelqu’un d’autre, pas une seule personne durant tout ce temps.

Il arriva à un croisement en forme de trèfle où deux grandes autoroutes traversant la ville opéraient leur jonction dans le plus grand silence. La journée, ici, c’était le vacarme incessant des voitures, les stations-service ouvertes, un bourdonnement d’in- secte affairé et, en permanence, la lutte sans merci entre les scarabées pétaradant qui cherchaient à se dépasser les uns les autres, une légère fumée d’encens s’élevant de leur tuyau d’échappement, et filaient à toute allure vers leurs destinations lointaines. Mais en cette heure tardive ces deux autoroutes ressem- blaient à deux ruisseaux surpris par la saison sèche;

lits de pierre et clarté lunaire.

Il prit une rue latérale pour boucler son parcours et revenir chez lui. C’est à un pâté de maisons de sa destination qu’il vit la voiture sans escorte faire irruption au coin de la rue et braquer aussitôt sur lui un cône de lumière blanche, aveuglante. Il resta là, fasciné, un peu comme un papillon de nuit, sonné par le flot de lumière qui bientôt l’attira.

Une voix métallique se fit entendre:

«Halte! Restez où vous êtes! Plus un geste!»

Il s’arrêta.

«Les mains en l’air!

— Mais…, dit-il.

— Mains en l’air! Ou nous tirons!»

La police, naturellement. Mais quel incroyable hasard dans une ville de trois millions d’habitants où

(31)

33 il n’y avait plus, en tout et pour tout, qu’une seule voiture de police. L’année précédente, en 2052, l’année des élections, la police s’était vu enlever deux de ses trois voitures. Criminalité en baisse constante, plus besoin de police: on n’en gardait plus qu’une, celle-là justement, et on la laissait errer sans fin, toute seule, dans les rues désertes.

«Votre nom?» murmura la voiture de sa voix métal lique. Impossible de voir qui parlait à cause de la lumière aveuglante braquée sur son visage.

«Leonard Mead, répondit-il.

— Plus fort!

— Leonard Mead!

— Emploi ou profession?

— Disons écrivain.

— Sans profession», dit la voiture de police comme s’il n’était pas là. La lumière le clouait sur place comme un spécimen dans une vitrine de musée, l’ab- domen transpercé d’une épingle.

«C’est un peu ça», reconnut M. Mead. Il n’avait plus écrit une ligne depuis des années. Les revues, les livres ne se vendaient plus. Tout se passait main- tenant à la nuit tombée dans ces maisons pareilles à des mausolées, se dit-il, suivant le fil de sa pensée.

Des mausolées vaguement éclairés par la télévision où les gens gisaient comme autant de cadavres. Les lumières grises, multicolores parfois, atteignaient leurs visages sans jamais les atteindre eux-mêmes réellement.

«Sans profession, siffla la voix de phonographe.

Et qu’est-ce que vous faites dehors?

— Je me promène, répondit Leonard Mead.

(32)

34

— Vous vous promenez!

— Je me promène, c’est tout», dit-il simplement, mais il sentait son visage se glacer.

«Vous vous promenez, c’est tout? Vous vous pro - menez?…

— Oui, monsieur l’agent.

— Et vous vous promenez où, comme ça? Pour quoi faire?

— Pour prendre l’air. Comme ça, pour voir.

— Votre adresse!

— South Saint James Street, numéro 11.

— Mais de l’air, dans votre maison… à l’inté- rieur… il y en a, non? Vous avez bien l’air condi- tionné, monsieur Mead?

— Oui.

— Et vous avez bien un écran, chez vous, quand vous voulez voir quelque chose?

— Non.

— Non?» Le silence ponctué de quelques para- sites qui suivit alors était déjà en soi une accusation.

«Vous êtes marié, monsieur Mead?

— Non.

— Pas marié», dit la voix policière derrière le flamboiement de lumière. La lune immaculée brillait au firmament et les maisons grises demeuraient silen- cieuses.

«Personne n’a voulu de moi, ajouta Leonard Mead en souriant.

— Ne parlez que si on vous interroge!»

Leonard Mead attendit dans la nuit froide.

«Vous vous promenez, monsieur Mead, c’est tout?

— Oui.

(33)

35

— Mais vous n’avez pas dit dans quel but.

— Si, je l’ai dit: pour prendre l’air, pour voir. Je me promène pour le plaisir de me promener, tout simplement.

— Et ça vous arrive souvent?

— Je fais ça tous les soirs, depuis des années.»

La voiture de police n’avait pas bougé du milieu de la rue. On entendait l’appareil de radio bourdonner légèrement dans ses entrailles.

«Très bien, monsieur Mead.

— C’est tout? demanda-t-il poliment.

— Oui, répondit la voix. Allez.» On entendit comme un soupir, un déclic. La porte arrière de la voiture s’ouvrit brusquement. «Montez.

— Attendez un peu, je n’ai rien fait!

— Montez.

— Je proteste!

— Monsieur Mead…»

Il avança, titubant comme un homme subitement ivre. En passant devant la portière du conducteur, il regarda à l’intérieur. Comme il s’y attendait, le siège était vide, la voiture était vide. Il n’y avait personne.

«Montez.»

Il posa la main sur la portière et scruta la banquette arrière. C’était une cellule en miniature, une petite prison toute noire avec des barreaux, qui sentait l’acier riveté, l’antiseptique industriel, le propre. L’odeur était trop forte, trop métallique. Pas la moindre trace de douceur.

«Bien sûr, si vous aviez une femme, elle pourrait vous fournir un alibi, reprit la voix aux inflexions d’acier. Mais…

(34)

— Où m’emmenez-vous?»

La voiture hésita, ou plutôt on entendit à l’inté- rieur un léger vrombissement mêlé de cliquètements répétés, comme si quelque part l’information tombait, régulière, sous forme de cartes perforées devant une batterie d’yeux électriques. «Au Centre de recherches psychiatriques sur les tendances régressives.»

Il monta. La porte se referma avec un son mat. La voiture de police se mit à rouler à travers la ville endormie, éclairant sa route à la lueur de ses feux de croisement.

Un instant plus tard, dans une rue, ils passèrent devant une maison, une maison parmi tant d’autres dans cette ville où toutes les maisons étaient plongées dans l’obscurité, mais cette maison-là n’était pas comme les autres: toutes les lumières électriques y étaient allumées et chacune de ses fenêtres dessinait dans l’obscurité et le froid un rectangle de lumière chaude, colorée, réconfortante.

«C’est celle-là, ma maison», dit alors Leonard Mead.

Personne ne lui répondit.

La voiture suivit le lit desséché des rues désertes aux trottoirs abandonnés et s’éloigna, puis disparut.

Pas un bruit, pas un mouvement ne troubla plus la fraîcheur de cette nuit de novembre.

(35)

A H M E D E T L E S P R I S O N S D U T E M P S L ' H E U R E H E T A U T R E S N O U V E L L E S C E L U I Q U I A T T E N D

L ' A R B R E D ' H A L L O W E E N T H E L A S T C I R C U S,en langue originale A S T O R Y O F L O V E,en langue originale

T H E M A R T I A N C H R O N I C L E S,en langue originale M O N S T R U E U S E M E N T V Ô T R E

L E S G A R Ç O N S D E L ' É T É

(36)

Les pommes d'or du soleil

Ray Bradbury

Cette édition électronique du livre Les pommes d'or du soleil de Ray Bradbury

a été réalisée le 22 octobre 2013 par les Éditions Gallimard.

Elle repose sur l’édition papier du même ouvrage (ISBN : 9782070441259 - Numéro d’édition : 261453).

Code Sodis : N50613 - ISBN : 9782072455278 Numéro d’édition : 236406.

Références

Documents relatifs

Ce spectacle, qui nous a permis d'aborder les interactions entre jeu d'acteur, es- pace vidéo et espace sonore, au cœur de cette création , a été repris dans le off avignon- nais

Pendant longtemps, Bruno crut que cette bergère était Marie.. A l'automne suivant, la bergère reparut sur la

À cet égard, le théoricien du complot se comporte mutatis mutandis comme le philosophe absolutiste décrit (et dénoncé) par Chaïm Perelman : c’est parce qu’il veut à tout prix

Limite Seuil annuel d’exposition artificielle fixé par la CPIR (Commission internationale de protection radiobiologique), en plus de l’exposition naturelle, 1 mSv pour le public et

De même que la multiplication matricielle classique est associative, de même la multiplication matricielle définie par la procédure E XTENSION -P LUS - C OURTS -C HEMINS est

ressentir des sentiments nouveaux, se sentir bien, épanoui et même si aimer veut dire aussi avoir mal, l’amour fait partie du quotidien pour certains, il faut donc vivre

Nous avons souvent besoin de comparer, d'opposer notre école moderne à quelque chose et, sans trop réfléchir, nous utilisons l' expres- sion « école traditionnelle

Et parce qu’on doit commencer par en rire, par se regarder franchement et se trouver aussi quand même tout à fait comique jusque dans nos paniques ; pour tenir et arriver à