M. BONNEAU INRA
Saint-GiIles
Station
de Recherches
Porcines 35590L’Hermitage
Intérêt et limites de la production
de viandes de porc mâle entier
Le gain de productivité résultant de l’abandon de la castration des porcs mâles n’est pas exploité
enraison des odeurs sexuelles qui affectent les viandes de certains verrats. Des solutions partielles existent, qui pourraient
dès à présent autoriser un premier développement de la production de mâles
entiers. Les résultats récents de la recherche montent que l’on peut être optimiste quant aux possibilités futures d’avoir une maîtrise complète de l’apparition des odeurs sexuelles.
La
production
de viande de porc mâle entierprésente
un intérêt
zootechnique
bien établi. Outre la réduction de travail liée à l’absence decastration,
lesprincipaux avantages
se situent au niveau du coût alimentaire et de laqualité
des carcasses. Laprésence
d’odeurs désa-gréables, qualifiées
d’odeurssexuelles, qui
se manifes-tent lors de la cuisson des viandes de certains verrats,
justifie
que l’on continue leplus
souvent à castrersysté- matiquement
lesjeunes mâles,
seprivant
ainsi dupoten-
tiel élevé du porc mâle entier pour laproduction
deviande.
Dans cet article nous exposerons les effets de la cas- tration du porc mâle sur les
performances
zootechni-ques et la
composition corporelle,
ainsi que sur les carac-téristiques qualitatives
des viandes. Nous traiterons ensuite duproblème posé
par l’existence d’odeurs sexuel- les dans les viandes de verrat, avant deprésenter
les différentes voies de recherchequi
sont actuellementexplorées
pour tenterd’y
remédier.1 / Performances de production
La castration
précoce
des porcs mâles entraîne des modificationsprofondes
de l’utilisation des nutrimentsénergétiques
etazotés,
ainsi que du métabolisme desprotéines
et deslipides.
Il s’ensuit des différencesimpor-
tantes dans les
performances
de croissance et de com-position corporelle
entre animaux entiers et castrés.1.
1 / Utilisation des nutriments énergétiques
et azotés
La
part
del’énergie
alimentaireperdue
dans les fècesou les urines n’est pas affectée par la castration du porc mâle
(Holmes et al 1980).
Selon Wiesemuffer(1983),
le besoin d’entretien du verrat serait
supérieur
de 10 %à celui du castrat, mais ce résultat n’est pas confirmé par Noblet
(1987).
Pour une mêmequantité d’énergie
métabolisable
ingérée, l’énergie
retenue est sensiblementidentique
mais serépartit
différemment pour les 2types sexuels,
l’animal entier fixant moinsd’énergie
sousforme de
lipides
etdavantage
sous forme deprotéines
que son
homologue
castré(tableau 1).
L’utilisationdiges-
tive de l’azote alimentaire n’étant pas modifiée par la
castration,
l’animal entier retientdavantage
d’azote que le castrat, avec un meilleur rendement(tableau 2).
Pour les 2types
denutriments, énergétique
etazoté,
les écartsentre les deux
types
sexuels sont très faibles en début depériode
de croissance(25-30 kg)
alorsqu’ils s’expri-
ment
pleinement
enpériode
de finition.1.
2 / Métabolisme des protéines
etdes lipides
Le turn-over des
protéines
musculaires estplus
élevéchez le verrat que chez le castrat
puisque,
chez le pre-mier,
on observe à la fois unesynthèse
et unedégrada-
tion
plus
actives desprotéines.
Le bilan net reste toute-Résumé
_La castration
précoce
du porc mâle entraîne des modificationsimportantes
du métabolisme del’animal,
favorisant ledépôt
deslipides
au détriment de la fixation deprotéines.
La pro- duction de viandes de porc mâle entierpermet
ainsi une amélioration sensible de l’effica- cité alimentaire et de laqualité
des carcasses. Les viandes de porc mâle entier se caractéri- sent par des différences mineures decomposition chimique
destissus,
desgraisses plus
insaturées et par la
présence
des odeurs sexuelles. Le scatol et l’androsténone sont les deux déterminantsmajeurs
de la manifestation de ces odeursdésagréables,
mais lesimpor-
tances
respectives
de chacun de ces 2composés
ne sont pas encore clairement établies.La transformation en
produits
de charcuterie offre de nombreusespossibilités
d’utilisation des viandes défectueuses. Le tri sur la chaîned’abattage
des viandesprésentant
des odeurssexuelles n’est
possible
que defaçon grossière
etimparfaite.
il n’existe pour l’instant aucun moyen deproduire
des verrats que l’onpuisse garantir
indemnes de défaut d’odeurs sexuelles.Les voies
génétique
etimmunologique
of’rent despossibilités
intéressantesqu’il
fautexplorer
plus
avant pour en démontrer la faisabilité sur lesplans zootechnique
etéconomique.
Le verrat
produit
à moindre coût
une carcasseplus maigre.
fois en faveur d’un
dépôt plus important
chez le verrat.L implantation
de testostérone ou dedihydrotestostérone
aux castrats ne
permet
de restaurer quepartiellement
l’intensité du turn-over observée chez les mâles entiers
(Mulvaney
et al1983a) .
Dans le tissuadipeux
de ver-rat, la
lipogenèse
est moins active alors que lalipolyse
est
plus
active que chez le castrat.L implantation
de tes-tostérone chez le porc castré
permet
de retrouver les acti- vités mesurées chez l’animalentier,
alors que ladihy-
drotestotérone reste sans effet
(Mulvaney
etal1983b),
ce
qui suggère
un rôleimportant
desoestrogènes
dans le métabolisme du tissuadipeux.
On sait en effet que, contrairement à latestostérone,
ladihydrotestostérone
n’est pas métabolisable en
oestrogènes.
Lesexpérien-
ces de
supplémentation
en stéroïdes desynthèse
ontd’ailleurs montré que, dans
l’espèce porcine,
il est néces-saire d’associer
androgènes
etoestrogènes
pour obte- nir une améliorationsignificative
desperformances
decroissance et de
composition corporelle (Fowler
et al1978).
1.
3 / Performances zootechniques
et
composition corporelle
De très nombreux travaux ont été consacrés à l’influence de la castration sur les
performances
zoo-techniques
et lacomposition corporelle.
Nous ne rap-porterons
ici quequelques exemples significatifs parmi
l’ensemble des résultats
disponibles
dans la littérature(tableaux
3 et4).
Lorsque
les animaux sont alimentés àvolonté,
lavitesse de croissance du castrat est
égale,
voiresupé- rieure,
à celle du verrat. L’animal castré compense en effet sa moindre efficacité alimentaire par uneplus grande
consommation alimentaire. Par contre, dès lors que lesquantités
d’aliment allouées sontégales
pour les 2types d’animaux,
la moindre efficacité alimentaire du castratcorrespond
à un ralentissement de la crois-sance par
rapport
à l’animal entier.En raison de la
présence
d’unappareil génital pleine-
ment
développé,
le rendement àl’abattage
du verrat estplus
faible de 1 à 3 %. Le tissu gras est moins déve-loppé
alors que les tissusmaigres
sontplus importants
chez l’animal entier que chez le castrat. On note en outre
une
répartition
différente des massesmusculaires,
l’avant-train étantplus développé
chez le verrat que chez le castrat(Walstra 1980).
Selon Desmoulin et Bonneau
(1979),
lesavantages
à attendre d’uneproduction
de porc mâle non castré peu- vent se résumer à ungain
de l’ordre de 30lcg
d’alimentpar porc
produit
et à une amélioration de 5 à 7points
dupourcentage
de muscles de la carcasse.Compte
tenu desprofondes
modifications de la structuregénétique
du
troupeau porcin français
intervenues au cours des dix dernières années, ces chiffres mériteraient d’êtrereprécisés.
2 / Qualités des viandes
2.
1
/ Caractéristiques du tissu musculaire
Le tissu musculaire des viandes de verrat est
plus
richeen eau et contient moins de
protéines (tableau 5)
et dematière sèche
délipidée (Wood
et Enser1982).
Le pour-centage
delipides
intramusculaires estlégèrement,
maissignificativement plus
faible chez les verrats que chez les castrats(Desmoulin et
al 1983 et tableau5),
cette différence n’étantobservée,
selon Wood et Enser(1982),
que dans le cas d’un niveau d’alimentation bas.
Selon Barton-Gade
(1987),
la castration n’a que peu d’effet sur lafréquence
des viandes exsudatives(PSE)
ou sombres
(DFD). Cependant,
dans les cas où letemps
d’attente avantabattage
estlong,
laproportion
de vian-des DFD
peut
êtreplus
élevée chez les verrats que chez les castrats, cet effet résultant d’uneplus grande
acti-vité des mâles entiers
(Moss
et Robb 1978, Ellis et al1983).
Selon Barton-Gade(1987)
la force de cisaille- ment des tissus musculaires estplus
élevée chez les ani-maux
entiers,
cequi
est conforme aux observations de Martin et al(1968)
et de Bonneau et al(1979)
selonlesquelles
les viandes de verrat sont moins tendres que celles de castrat.Ainsi,
les 2types
sexuels différent pour les caracté-ristiques
du tissu musculaire.Cependant,
hormis le casde la teneur en
lipides,
ces différences sont de faibleamplitude
etgénéralement
considérées comme nonsignificatives (Malmfors
et Nilsson 1978, Desmoulin etal 1983).
2.z / Caractéristiques du tissu gras
Le tissu gras des verrats est
plus
riche en eau et enprotéines
que celui des mâlescastrés,
alorsqu’il
con-tient moins de
lipides (tableau 6).
La teneurplus
éle-vée en matière sèche
délipidée
dans le tissu gras dorsalest indicative d’une
plus grande
richesse enconjonctif (Wood
et Enser1982).
Chez le verratâgé,
unepartie
du tissu gras dorsal de larégion scapulaire
s’est enri-chie en
conjonctif
et considérablementappauvrie
enlipi- des, jusqu’à présenter
lescaractéristiques
du derme. Auxstades usuels
d’abattage,
les animaux à croissance nor-male ne sont
cependant
pas concernés par ceproblème (Wood et
al 1983 et1985b).
Ainsi,
les différences entre lescaractéristiques
desviandes de verrat et de castrat touchent essentiellement la
composition chimique
des tissus et ledegré
d’insa-turation des
graisses.
Les différences de teneurs en eau,protéines
etlipides
sont assez faibles maispeuvent
affec-ter le rendement de certaines fabrications comme le bacon
(Ellis
etal 1983) .
Laplus grande
insaturation desgraisses
résulte du fait que les verrats sontplus
mai-gres ; il ne
s’agit
donc pas àproprement parler
d’uncaractère
intrinsèque
des viandes de mâle entier.Les
viandes de certains
verratsdégagent à la cuisson des odeurs
désagréables :
elles
sontimpropres
à la consommation
en
&ais.
Lensemble des
caractéristiques évoquées
ci-dessus cons-tituent des défauts
qualitatifs
relativement mineurs encomparaison
desproblèmes posés
par laprésence
desodeurs sexuelles.
2.
3 / Les odeurs sexuelles des viandes de
verratDes odeurs
désagréables, qualifiées
d’odeurs sexuel-les,
se manifestentfréquemment
lors de la cuisson des viandes de verratsâgés.
Aux stades usuelsd’abattage,
les mâles entiers ne
présentent
pas tous cesodeurs,
laproportion
d’animaux concernés variant de 10 à 75 % selon les auteurs(Williams
etal 1963,
Desmoulin etal 1971,
Rhodes et Patterson 1971, Malmfors et Hans-son
1974). Compte
tenu d’une telle variabilité dans lafréquence
des odeurssexuelles,
et aussi de la diversité des habitudes culinaires selon les pays, lesenquêtes d’acceptabilité
des viandes dejeunes
verratsauprès
dugrand public
donnent des résultatsparfois divergents (Malmfors
et Lundstrom1983),
certains allantjusqu’à
conclure à l’absence de différence entre
types
sexuels.Selon Desmoulin et al
(1982),
lescritiques portées
par des consommateursfrançais
sur l’odeur de cuisson desviandes concernent 38 % des verrats contre 6 % des
témoins,
mâles castrés etfemelles ;
pour legoût
desviandes,
les écarts sont moinsprononcés :
23 % de cri-tiques
pour les mâles entiers contre 12 % pour les témoins.Après
avoir fait lepoint
des connaissances sur les com-posés responsables
des odeurssexuelles,
nousévoque-
rons les
principales
voies de recherches actuellementexplorées
pour tenter de remédier à ceproblème.
3 / Situation du problème posé par les odeurs sexuelles des viandes de porc mâle entier
3.
1 / Les composés responsables des odeurs
sexuelles
Deux
composés,
l’androsténone et lescatol,
localisés dans la fractioninsaponifiable
desgraisses,
sont con-sidérés comme les
principaux
déterminants des odeurs sexuelles desjeunes
verrats.Landrosténone est un stéroïde
d’origine testiculaire,
à odeur urinaireprononcée, qui
se stocke dans lesgrais-
ses à des concentrations à l’ordre du ppm
(partie
parmillion) .
Les coefficients de corrélation entre la concen-tration en androsténone du tissu
adipeux
et l’intensité des odeurs sexuelles sontcompris
entre 0,4 et 0,7(tableau 7). Compte
tenu del’imprécision
inhérente àl’appréciation subjective
desodeurs,
une telle liaisonindique
que l’androsténone est un déterminant essen-tiel des odeurs sexuelles.
Le scatol est un
produit
de ladégradation
dutrypto- phane
par la flore intestinale. La mise en évidence deson rôle dans la manifestation des odeurs sexuelles est
difficile car les méthodes de
dosage
de cecomposé
dans lesgraisses
sont peuprécises (Hansson
etal 1980)
oupeu
spécifiques (Mortensen
et Sorensen1984),
alorsque les concentrations observées sont assez faibles
(tableau 6).
Il semble biencependant
que cecomposé
soit un déterminant
important
des odeurs sexuelles(Lundstrom
etal 1987) . 3.
2 / Facteurs de variation des concentrations
en
scatol des graisses du
verratCompte
tenu du caractère récent de la mise en évidence du rôle duscatol,
et desproblèmes méthodologiques évoqués plus
haut(manque
despécificité
dudosage)
onsait peu de choses sur la
régulation
de lasynthèse
etdu
stockage
de cecomposé
chez le porc. On constate que les verratsprésentent
des teneurs en scatol du tissugras
significativement supérieures
à celles observées chez les castrats et les femelles(Hansson et al 1980,
Lundstrom et al 1987, Barton-Gade
1987).
Commel’indiquent
Lundstrom et al(1987),
lestockage
de sca-tol dans les
graisses
est vraisemblablementdépendant
de la
production
des stéroïdestesticulaires,
sans que l’onpuisse
fournir à l’heure actuelled’explication
satisfai-sante à ce
phénomène.
Les teneurs en scatol des
graisses
de verrat diffèrentsignificativement
entreélevages (Pedersen
etal 1986)
ou entre
loges
d’un même bâtiment(Hansson et
al1980),
cequi indique
uneimportante
influence de l’envi-ronnement et/ou de l’état sanitaire des animaux. La pro- duction de scatol
pourrait
être favorisée dans le cas derégimes
riches en fibresqui
stimulent les fermentations intestinales(Lundstrom et al 1987).
Lasupplémenta-
tion de l’aliment en
tryptophane
n’entraîne aucune élé- vation des teneurs en scatol(Pedersen
etal 1986)
oude la
fréquence
des odeurs sexuelles(Bonneau
et Des-moulin
1981),
car letryptophane
desynthèse,
entière-ment
disponible,
estcomplètement
absorbé au niveaude l’intestin
grêle.
Onpeut
penserqu’il
n’en irait pas de même dans le cas derégimes
riches entryptophane
à
disponibilité plus
réduite(ex.
farines deluzerne),
maiscela reste à démontrer.
3.
3
/
Facteursde variation des concentrations
en
androsténone des graisses du
verratUn
exposé
détaillé des voies debiosynthèse
et dumétabolisme de l’androsténone et des facteurs de varia- tion de la teneur en androsténone des
graisses peut
êtretrouvé dans les revues
bibliographiques
lesplus
récen-tes
(Bonneau
1982, Brooks et Pearson1986).
Nous ne ferons querappeler
brièvement lespoints
lesplus importants.
L’intensité de la
synthèse
d’androsténone est d’abord faible chez lejeune animal, puis augmente
brutalementau moment de l’établissement de la
puberté,
en mêmetemps
que s’élève laproduction
des autres stéroïdes d’ori-gine
testiculaire(androgènes
etoestrogènes) qui
sontresponsables
des bonnesperformances zootechniques
de l’animal entier.
Ainsi,
le testicule de verratproduit
à la fois des
composés
&dquo;utiles&dquo;(androgènes
et oestro-gènes)
et uncomposé &dquo;gênant&dquo; (androsténone).
Or cesont les mêmes
systèmes
derégulation qui
gouvernent l’intensité de lasynthèse
de ces deux familles de sté- roïdes. U est donc difficile de se débarrasser des uns tout enpréservant
les autres.Aux stades usuels
d’abattage,
la teneur en androsté-none des
graisses
est très variable selon les animaux(figure 1).
Pourcomprendre l’origine
de cephénomène
il faut considérer les
profils
individuels d’évolution avecfâge (ou
lepoids)
de la teneur en androsténone du tissuadipeux (figure 2).
Les différences deprécocité
sexuelleentre animaux fournissent une
première explication
àla variabilité des teneurs : les animaux sexuellement
pré-
coces
(SP)
ont puexprimer pleinement
leurpotentiel
deproduction
d’androsténone avantl’abattage
alors que les porcs sexuellement tardifs(ST) présentent
des teneursen androsténone encore faibles. Une deuxième
explica-
tion
importante
tient aux différences entre individus pour lepotentiel
deproduction
d’androsténone. Il existe eneffet des individus
(A
sur lafigure 2) qui présentent
des teneurs en androsténone constamment
faibles,
même
après
lapuberté.
Chez cesanimaux,
l’élévationpéripubertaire
de la teneur en androsténone a bien lieu mais reste limitée à des niveaux de concentration fai-bles,
inférieurs à 0,5 ppm(Bonneau et al 1987).
Dans l’état actuel des
connaissances,
on ne sait paslequel
des 2composés,
androsténone ouscatol,
est le déterminant essentiel des odeurs sexuelles. Les étudesayant
tenté de faire lapart
des rôlesrespectifs
del’androsténone et du scatol
(Walstra
etal 1986,
Lunds-La
sélection
contreles odeurs sexuelles
est
efficace mais
ne
doit pas
sefaire au détriment des performances
de croissance.
trom et
al 1987)
souffrent de faiblessesméthodologi-
ques
importantes. L’hypothèse
laplus
vraisemblable est que, selon letype
deproduction considéré,
l’un ou l’autre descomposés
a un rôleprédominant.
Dans le cas d’ani-maux abattus
jeunes,
avant leur maturitésexuelle,
lesteneurs en androsténone sont faibles et on
peut
raison- nablement penser que le scatoljouerait
alors un rôledéterminant. Par contre,
lorsque
les animaux sont abat-tus à des stades
plus tardifs,
l’androsténonepourrait
devenir le
responsable majeur
des odeurs sexuelles. Les teneurs moyennes en androsténone du tissuadipeux,
et donc
l’importance
de la contribution de cecomposé
à la manifestation des odeurs
sexuelles,
varient aussibeaucoup
en fonction dutype génétique
des animaux.Seule une étude
comparative
àgrande échelle, intégrant
la diversité des
systèmes
deproduction
et des habitu- des alimentaires des différents payseuropéens, permet-
tra
d’apporter
uneréponse
concluante à cettequestion.
Plusieurs
approches
sontpossibles
pour tenterd’apporter
une solution auproblème posé
par les odeurs sexuelles des viandes de verrat. Onpeut
d’abordexplorer
les
possibilités d’emploi
des viandesdéfectueuses,
ouencore s’efforcer de
prévenir l’apparition
des odeurssexuelles chez l’animal
pendant
laphase d’engraisse-
ment. Ces deux voies de recherches seront
évoquées
successivement.
4 / Peut-on utiliser les viandes
présentant des odeurs sexuelles ?
4.
1 / Transformation
enproduits
de charcuterie
Un certain nombre de travaux ont établi l’influence
bénéfique
de la transformation enproduits
de charcu-terie sur
l’acceptabilité
des viandesporteuses
d’odeurs sexuelles(Williams
et al 1963, Pearson et al 1971, Wals-tra 1974, Bonneau et
al 1979) .
Unepartie
de l’andros- ténone stockée dans le tissu grasdisparaît
au cours dela
transformation,
dans uneproportion qui dépend
duprocessus
technologique employé (Bonneau et al 1980) .
Par ailleurs le seuil de teneur en androsténone au-delà
duquel
leproduit
est considéré commeinacceptable
estplus
élevé(Desmoulin
etal1982).
A ces deux influen-ces favorables
s’ajoute,
dans le cas desproduits
demélange (saucisses, saucissons, pâtés, etc...)
lapossi-
bilité de diluer les viandes défectueuses par des vian- des indemnes. Ilapparaît
ainsi que la transformationen
produits
de charcuteriepermet
d’utiliser les viandesprésentant
des odeurssexuelles,
dans des conditionsqu’il
faudrait encorepréciser
par une étudeplus systé- matique
de l’influence des divers processustechnologi-
ques sur le devenir de l’androsténone stockée et
l’accep-
tabilité des
produits.
4.
2 / Détection des
carcassesdéfectueuses
sur
la chaîne d’abattage
En France, un tiers des viandes
porcines
sont consom-mées à l’état frais.
Aussi,
dansl’hypothèse
d’unegéné-
ralisation de
l’élevage
de porcs mâles non castrés, il ne serait paspossible
d’affecter l’ensemble des viandes mâles à la transformation enproduits
de charcuterie.Par
ailleurs,
on sait que, aux stades usuelsd’abattage,
une
partie
seulement des verratsprésente
des odeurssexuelles
marquées.
Il serait donc nécessaire de pou- voirreconnaître,
directement sur la chaîned’abattage,
les carcasses défectueuses des carcasses indemnes. Il n’existe pas, à l’heure
actuelle,
de méthode entièrement satisfaisantepermettant
derépondre
à cetobjectif.
Lesméthodes &dquo;olfactives&dquo; consistant à chauffer du tissu gras pour essayer de déceler l’odeur de verrat ne sont pas utilisables dans les conditions
pratiques
de l’abattoir(Bonneau
et Desmoulin1975).
Les méthodes de mesurede l’androsténone dans le tissu
adipeux
sontlongues
et onéreuses.
Après plus
de 10 ans d’efforts visant àautomatiser le
dosage
de l’androsténone dans lesgrais-
ses, les chercheurs hollandais ont arrêté leurs travaux.
Le
dosage
automatisé duscatol,
mis aupoint
par Mor- tensen et Sorensen(1984), permettrait,
selon cesauteurs, de suivre les cadences usuelles
d’abattage ;
ilreste
cependant
à démontrer que cette méthode est suf- fisamment fiable pour assurer uneprotection
efficace des consommateurs(cf. paragraphe 3.1).
L’observation du
développement
desglandes
annexesde
l’appareil génital
permet de différencier les animauximpubères (qui
sont à coup sûr indemnes d’odeurs liées à l’androsténone etprobablement
aussi de celles liéesau
scatol)
des animauxpubères (Bonneau
et Russeil1984).
Ces derniersprésentent
à desdegrés
variablesdes odeurs sexuelles mais une
proportion
nonnégligea-
ble d’entre eux est, en
fait, également
indemne. En pra-tique,
la seule mesure de lalongueur
desglandes
bulbo-uréthrales
(encore appelées glandes
deCowper),
per- met de trier unepopulation
de porcsd’abattage
en 2sous-populations
d’effectif sensiblementégal.
La moi-tié environ des
animaux, qui
ont lesplus petites glan- des, peuvent
être classés &dquo;indemnes&dquo; et utilisés pour la consommation en frais. Les 50 % restant sont dou- teux et, en l’absence d’autre méthode de détectionplus précise,
doivent êtredirigés
vers la transformation enproduits
de charcuterie.5 / Peut-on prévenir l’apparition
des odeurs sexuelles ?
La
plupart
des travaux de recherche conduitsjusqu’à présent
ont été consacrés aux moyens depré-
venir le
stockage d’androsténone
dans lesgraisses.
En ce
qui
concerne lescatol,
les connaissances sont encoretrop
limitées pour que l’onpuisse
proposer des solutions.5.
1 / La voie génétique
La teneur en androsténone des
graisses
est un carac-tère fortement héritable
(Jonsson
et Andresen 1979,Bonneau et Sellier 1986, Willeke et al
1987). Cepen- dant,
une sélectionaveugle
basée sur le seul critère&dquo;teneur en androsténone des
graisses&dquo; risque
d’entraî-ner une diminution de la
production
des hormones sté-roïdes
androgènes
etoestrogènes
et, enconséquence,
une détérioration des
performances
et une maturationsexuelle
plus
tardive. Willeke et al(1987)
ont effective-ment observé un retard à la
puberté
chez les femellesappartenant
à une&dquo;lignée
basse&dquo; pour la teneur en androsténone du tissu gras.Il existe des animaux
qui présentent
à la fois de fai- blespotentialités
deproduction
d’androsténone et unesynthèse
normale des hormones &dquo;utiles&dquo;androgènes
et
oestrogènes (Bonneau et al 1987) .
Dans uneexpé-
rience
préliminaire,
il a été établi que la sélection de tels animaux estpossible, permettant
de réduire très effi-cacement les niveaux de teneur en androsténone des
graisses
tout ensauvegardant
ledéveloppement
sexueldu verrat
(tableau 8).
Il reste à vérifier si une telle sélec- tionpermettrait
depréserver
lesperformances
de crois-sance et de
composition corporelle
etqu’elle
n’aurait pas, parailleurs,
deconséquence
défavorable sur lesperfor-
mances de
reproduction
des femellesappararentées.
5.
2 / La voie immunologique
Plusieurs
équipes
de recherche se sont efforcées de&dquo;vacciner&dquo; des verrats contre l’androsténone
(Daniel
etal 1984,
Williamson etal 1985)
ou contre desprécur-
seurs immédiats de ce stéroïde
(Brooks et al 1986) .
Cetteprocédure
est apriori
très séduisante car ellepermet-
trait d’éliminer l’androsténone tout enpréservant
lessécrétions des hormones
&dquo;utiles&dquo;, androgènes
et oes-trogènes.
Les résultats obtenus ont été trèsvariables,
certains constatant une réductionsignificative
desteneurs en androsténone alors que d’autres n’observent
aucune diminution. Même dans les cas les
plus
favora-bles,
la réduction des teneurs n’est pas suffisante pourgarantir
uneprotection
suffisante du consommateur vis- à-vis des odeurs sexuelles. Les recherches continuent pour essayer de trouver des méthodes de vaccinationplus
efficacespermettant
d’obtenir un résultatplus complet.
La castration tardive des verrats, en fin de
période d’engraissement, permettrait
deprofiter
de l’effet béné-fique
des hormonesandrogènes
etoestrogènes pendant
la
plus grande partie
de la vieproductive
de l’animaltout en évitant les odeurs sexuelles. Des
expériences
uti-lisant la castration
chirurgicale
des verrats ont montréqu’il
suffit d’intervenir deux à trois semaines avant la dateprévue
pourl’abattage (Bonneau et al 1982) ,
maiscette méthode n’est pas utilisable dans la
pratique
del’élevage.
L’auto-immunisation des animaux contre la LHRH(une
hormone del’hypothalamus qui
contrôle la secrétion de l’hormonehypophysaire
LH,qui
elle-mêmerégule
lasynthèse
des stéroïdestesticulaires) permet
de réduire les concentrations en androsténone desgrais-
ses à des niveaux très
faibles,
semblables à ceux mesu-rés chez les mâles castrés
précocément
ou chez les femelles(Caraty
et Bonneau 1986,figure 3). Cependant l’adjuvant
d’immunisation mis en oeuvre dans cetteexpérience
n’est pas utilisable dans lapratique
de l’éle- vage industriel. Il faut donc mettre aupoint
une méthodede vaccination anti-LHRH
plus simple.
Une fois cetobjectif atteint,
il restera à évaluer lesconséquences
de 1&dquo;’immuno-castration&dquo; ainsi réalisée sur lesperforman-
ces
zootechniques
des animaux.En
résumé,
la sélection et l’immunocastration sont des méthodes séduisantes. Leur efficacité étant maintenantdémontrée,
il reste à faire la preuve de leur faisabilité&dquo;zootechnique&dquo;
et&dquo;économique&dquo;.
Conclusion
L’élevage
des porcs mâles non castrés pour laproduc-
tion de viande
permettrait
ungain
deproductivité impor-
tant, mais cette
possibilité
n’est pasexploitée
à l’heureactuelle,
car unepartie
des viandes de verratprésen-
tent des odeurs sexuelles. Le scatol et l’androsténone
sont les deux déterminants
majeurs
de la manifestation de ces odeursdésagréables,
mais lesimportances
res-pectives
de chacun de cescomposés
ne sont pas encore clairement établies. Les facteurs de variation de la teneur en androsténone desgraisses
sont maintenant bien con- nus, les facteursgénétiques apparaissant
déterminants.La transformation en
produits
de charcuterie offre de nombreusespossibilités
d’utilisation des viandes défec-L’immunocastration des
verrats estpossible, il
resteà simplifier
la méthode
de vaccination.
tueuses. Le tri des viandes
présentant
des odeurs sexuel- les n’estpossible
que defaçon grossière
etimparfaite.
Cependant,
même si l’on considèrel’hypothèse
maxi-maliste où aucun porc mâle ne serait
castré,
ce n’estqu’un quart
de laproduction (la
moitié desmâles) qu’il
faudrait écarter des circuits de distribution en frais. Dans les situations où il est
supportable
dediriger
unepartie
deslonges
vers latransformation,
le tri des carcassesmâles en fonction de la
longueur
desglandes
de Cow-per
pourrait permettre
dedévelopper davantage qu’à
l’heure actuellel’élevage
de porcs mâles non castrés.Il n’existe pour l’instant aucun moyen de
produire
desverrats que l’on
puisse garantir
indemnes d’odeurs sexuelles. Les voiesgénétique
etimmunologique
offrentdes
possibilités
intéressantesqu’il
fautexplorer plus
avant pour en démontrer la faisabilité sur les
plans
zoo-technique
etéconomique.
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(La liste complète des références citées est disponible auprès de
l’auteur)
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