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Construction des représentations p-adiques semi-stables

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(1)

SEMI-STABLES par

Pierre Colmez & Jean-Marc Fontaine

Résumé. Nous prouvons que tout(ϕ, N)-module ltré faiblement admissible est admissible, ce qui fournit une description de la catégorie des représentations semi-stables d'un corps local.

Abstract. We prove that every weakly admissible ltered(ϕ, N)-module is admissible, which gives a concrete description of the category of semi-stable representations of a local eld.

Table des matières

Introduction . . . 2

1. Rappels et compléments sur BdR (cf. [18]) . . . 5

1.1. Notations générales . . . 5

1.2. Banachp-adiques et C-algèbres de Banach . . . 6

1.3. Les anneauxR(A), B+dR(A), Acris(A) etBcris+ (A) . . . 6

1.4. Les groupesU1(A) etU(A) . . . 8

1.5. Le corpsBdR et l'anneauBst . . . 10

1.6. L'anneauBϕ=1cris . . . 11

2. Le lemme fondamental . . . 12

3. Rappels et compléments sur les modules ltrés (cf. [19]) . . . 17

3.1. Espaces vectoriels ltrés . . . 17

3.2. ϕ-modules . . . 20

3.3.(ϕ, N)-modules . . . 21

3.4.(ϕ, N)-modules ltrés . . . 21

4. Rappels et compléments sur les représentationsp-adiques semi-stables (cf. [19]) . . . 23

4.1. Les foncteursDst etVst . . . 23

4.2. Le cas de la dimension1 . . . 24

4.3. Un critère d'admissibilité . . . 24

5. Le complexe fondamental d'un(ϕ, N)-module ltré ni . . . 26

5.1. Le foncteurVst0 . . . 26

5.2. Le foncteurVst1 . . . 26

5.3. Le complexeV. st(D). . . 27

5.4. Un critère d'admissibilité faible . . . 28

5.5. Un second critère d'admissibilité . . . 29

6. Démonstration du théorème A . . . 31

(2)

6.1. Première preuve . . . 31 6.2. Variante . . . 34 Références . . . 35

Introduction

Dans tout cet article,K est un corps de caractéristique0, complet pour une valuation discrète, à corps résiduel parfaitkde caractéristiquep >0,K0 est le corps des fractions de l'anneauW(k) des vecteurs de Witt à coecients dans k, ce qui fait que K est une extension nie totalement ramiée de K0, K est une clôture algébrique de K, GK est le groupe de Galois de l'extension K/K. On appelle représentationp-adique deGKla donnée d'unQp-espace vectoriel de dimension nie muni d'une action linéaire et continue de GK.

Parmi ces représentations, il y a les représentations cristallines et, plus généralement, les représentations semi-stables. Les représentations provenant de la géométrie algébrique (par exemple les représentations fournies par la cohomologie étale des variétés algébriques, propres et lisses sur K) sont potentiellement semi-stables, i.e. deviennent semi-stables après avoir remplacé K par une extension nie convenable (voir l'exposé d'Illusie [25] pour l'état du problème au début de 1990 et, parmi les travaux plus récents, ceux de Breuil [3], de Faltings [14], de Niziol [28] et de Tsuji [32]).

A une représentationp-adique semi-stable deGK, on sait associer un objet de nature purement algébrique qui est son (ϕ, N)-module ltré. L'intérêt de cette construction est que le (ϕ, N)- module ltré Dassocié à une représentationV est beaucoup plus explicite et donc beaucoup plus facile à décrire que la représentation V (parce qu'il n'y a pas de description explicite de GK) et que, pourtant, V est déterminée parD. De façon précise, la correspondance V 7→ D dénit en fait un ⊗-foncteur induisant une ⊗-équivalence entre la catégorie des représentations p-adiques semi-stables et une sous-catégorie pleine de la catégorie des (ϕ, N)-modules ltrés, celle des (ϕ, N)-modules ltrés admissibles (cf. [16] et [17] pour les représentations cristallines, [19] pour le cas général).

Jusqu'à présent cette théorie était incomplète car on ne savait pas décrire explicitement la catégorie des(ϕ, N)-modules ltrés admissibles ; toutefois on savait le faire conjecturalement : on avait déni la catégorie des (ϕ, N)-modules ltrés faiblement admissibles, montré que admissible implique faiblement admissible et conjecturé que la réciproque était vraie. Pour achever la théorie, il restait à prouver cette conjecture. C'est l'objet de cet article dans lequel on prouve le théorème suivant (voir le théorème 4.3 pour un énoncé un peu plus fort) :

Théorème A. Tout (ϕ, N)-module ltré sur K qui est faiblement admissible est admissible.

Remarque. Il y avait déjà beaucoup d'exemples de(ϕ, N)-modules ltrés faiblement admis- sibles dont on savait prouver qu'ils sont admissibles. Citons notamment (pour des généralités sur les (ϕ, N)-modules ltrés, voir le paragraphe 3 ci-dessous ; si D est un (ϕ, N)-module ltré, on note`(D)la longueur de la ltration) :

i) le cas K = K0, N = 0 et `(D) 6 1. On se ramène facilement au cas où F il0DK = DK etF il2DK = 0. Un (ϕ, N)-module ltré ayant ces propriétés est le module de Dieudonné d'un groupe p-divisible Γ sur l'anneau des entiers de K (cf. les travaux de Honda [24]) et la

(3)

représentation p-adique qui lui est associée est alors le dual de Vp(Γ) =QpZpTp(Γ), où Tp(Γ) est le module de Tate de Γ(cf. [15] et [16]). La théorie des groupesp-divisibles (ou de Barsotti- Tate, cf. [1], [30]) et les questions de Grothendieck sur le foncteur mystérieux [23] sont d'ailleurs à l'origine de toute la théorie des représentations p-adiques semi-stables.

ii) K = K0, N = 0 et l(D) 6 p−1 : c'est le résultat principal de [21], voir [33] pour une démonstration plus simple.

iii) [K :K0].`(D)< p−1,ketN quelconques [4].

iv) l(D) < p−1, N arbitraire, k ni mais [K :K0] arbitraire [5]. Breuil démontre en outre que, si N = 0,F il0DK =DK etF il2DK= 0, alors la représentationp-adique associée provient d'un groupe p-divisible comme dans (i).

Indiquons maintenant quelques applications de ce théorème.

Tout d'abord, comme le produit tensoriel de deux(ϕ, N)-modules ltrés admissibles est encore admissible, on retrouve ainsi, de façon indirecte, le résultat suivant, déjà prouvé par Laaille [26]

lorsqueK =K0dans le cas cristallin , puis par Faltings [13] (toujours dans le cas cristallin maisK quelconque) et enn par Totaro [31] :

Corollaire 1. Si D1 et D2 sont deux (ϕ, N)-modules ltrés faiblement admissibles, alors D1⊗D2 est faiblement admissible.

Ceci permet de considérer la catégorie abélienne des(ϕ, N)-modules ltrés faiblement admis- sibles comme une catégorie tannakienne surQp. Le foncteur qui à un objetD de cette catégorie associe la représentation p-adique semi-stable Vst(D) qui lui correspond (cf. Ÿ 4 ci-dessous) est alors un foncteur bre sur cette catégorie à valeurs dans lesQp-espaces vectoriels de dimension nie. On retrouve ainsi le résultat de Wintenberger ([34] dans le cas cristallin avecK=K0, [36, cor. 1.6.3] dans le cas général) :

Corollaire 2. La catégorie tannakienne sur Qp des (ϕ, N)-modules ltrés faiblement admis- sibles est neutre.

La ⊗-équivalence entre la catégorie des (ϕ, N)-modules ltrés faiblement admissibles et celle des représentations p-adiques semi-stables permet de traduire toute propriété de la première catégorie en propriété de la seconde. C'est ainsi que Wintenberger avait montré que les résultats suivants sont des conséquences du théorème A :

1 SoitH un groupe algébrique surQp. Le groupeH(Qp)a une structure naturelle de groupe de Liep-adique. Soitρ:GK →H(Qp) un homomorphisme continu. On dit que ρ est de Hodge- Tate (resp. semi-stable) si toute représentation Qp-linéaire de dimension nie de H, munie de l'action de GK induite par ρl'est (il sut qu'une représentation dèle le soit).

On peut déduire de [35, th. 1.1.3] dans le cas cristallin avec K=K0 et de [36, th. 2.2.2] dans le cas général, le résultat suivant :

Proposition. [37]. Soit f : H0 → H une isogénie de groupes algébriques dénis sur Qp, soient ρ0 :GK → H0(Qp) un homomorphisme continu et ρ =fQp ◦ρ0 :GK → H(Qp). Si ρ est semi-stable et ρ0 de Hodge-Tate, alors il existe un caractèreη deGK à valeurs dans le noyau de f tel que ρ0η est semi-stable.

(4)

2 Notons G le groupe pro-algébrique qui est la limite projective de la clôture zariskienne de l'image de GK dans toutes les représentations semi-stables (c'est aussi le groupe des ⊗- automorphismes du foncteur bre sur la catégorie des représentationsp-adiques semi-stables de GK qui associe à une représentation leQp-espace vectoriel sous-jacent).

Proposition. ([36, th. 3.1.1]). Supposons k-algébriquement clos et soit SU le noyau de la projection de G sur son plus grand quotient abélien. Alors le quotient S de SU par son radical unipotent est simplement connexe.

3 Supposons k-algébriquement clos et soit H un groupe algébrique réductif connexe sur Qp. Soient b ∈ H(K0) et µ : Gm → H un sous-groupe à un paramètre déni sur K. Avec Rapoport et Zink [29], pour toute représentation linéaire de dimension nie U de H sur Qp, on munit K0QpU d'une structure de (ϕ, N)-module ltré en posant ϕ(λ⊗u) =σ(λ)b(u) (si λ ∈ K0, u ∈ U), N = 0 sur K0 ⊗U et en munissant K⊗K0 (K0Qp U) = K ⊗Qp U de la ltration dénie par

F ili(K⊗U) =X

j>i

(K⊗U)j , pour tout i∈Z, où (K⊗U)j est la partie de poidsj relativement àµ.

Rapoport et Zink disent que le couple(µ, b)est admissible si, pour toute représentationU deH, le(ϕ, N)-module ltréK0⊗U est admissible (il sut que ce soit vérié pour une représentation dèle deH).

Lorsqu'il en est ainsi, on dispose de deux foncteurs bres, à valeurs dans Qp, sur la catégorie des représentations linéaires de dimension nie deG: le premier est celui qui àU associe le Qp- espace vectoriel sous-jacent et le second est celui qui associe le Qp-espace vectoriel sous-jacent à la représentation p-adique deGK associée au (ϕ, N)-module ltré K0⊗U. Rapoport et Zink ont donné une description conjecturale du torseur qui fait passer de l'un à l'autre à l'aide de l'invariant de Kottwitz et ont prouvé cette conjecture lorsque le sous-groupe dérivé de H est simplement connexe. Alors

Proposition. ([36, cor. à la prop. 4.5.3]). La conjecture de Rapoport-Zink est vraie en général.

En fait, Wintenberger généralise la construction de Rapoport et Zink (en rajoutant un opéra- teurN, ce qui lui permet de considérer aussi des représentations semi-stables pas nécessairement cristallines), énonce la généralisation correspondante de la conjecture et montre que c'est une conséquence de notre théorème A.

Les deux ingrédients principaux de la preuve du théorème A sont ce que nous appelons le lemme fondamental et le complexe fondamental d'un (ϕ, N)-module ltré.

Si D est un (ϕ, N)-module ltré, son complexe fondamental V.

st(D) est un complexe de Qp- espaces vectoriels de longueur2dont le terme de degré0ne dépend que de la structure de(ϕ, N)- module et le terme de degré 1 que de la ltration. Le H0 de ce complexe est la représentation de GK associée à D. On montre, entre autres, que le foncteur D7→ V.

st(D) est exact et, point important, que, si Dest faiblement admissible, alors

(∗) H1(V.

st(D)) = 0 si et seulement siDest admissible.

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L'idée essentielle de la démonstration du théorème A est la suivante : soit (D, F il)un (ϕ, N)- module ltré faiblement admissible (ici D est le (ϕ, N)-module etF il la ltration). Il est facile de voir que sur D on peut toujours trouver une autre ltration F il0 telle que (D, F il0) est admissible. On introduit alors la notion de distance entre deux ltrations et on démontre que, si la distance entre deux ltrations faiblement admissibles sur Dest égale à1 et si l'une des deux est admissible, l'autre l'est aussi. Ceci se ramène, grâce à (∗), à démontrer la surjectivité d'une application ρ:Y →C, où Y est unQp-espace vectoriel déni viaBdR et qui est une extension de C par un Qp-espace vectoriel Y0 de dimension nie. La démonstration de cette surjectivité fait l'objet du lemme fondamental et la diculté réside dans le fait que ρ est simplement Qp- linéaire et pas du tout C-linéaire. On s'en tire en rajoutant une variable à C et en refaisant les constructions de BdR,Bcris, etc. . .dans ce cadre, ce qui permet d'exprimerρ comme une limite uniforme de fonctions algébriques. Pour conclure la démonstration du théorème A, on essaie alors de passer de F il à F il0 par une suite nie de ltrations, la distance entre deux ltrations consécutives étant égales à1.

Remarque. Signalons qu'une version plus forte du lemme fondamental arme que le noyau de l'application ρ ci-dessus est de dimension nie sur Qp et même, que celle-ci est égale à la dimension de Y0. C'est un des ingrédients permettant de faire fonctionner, lorsque k est ni, la théorie des presque-C-représentations deGK qui n'existait jusqu'ici que conjecturalement [20] et sur laquelle nous reviendrons ultérieurerement : une presque-C-représentations deGK est un espace de Banach p-adiqueW muni d'une action linéaire et continue deGK tel que l'on peut trouver unC-espace vectoriel de dimension nieW0 muni d'une action semi-linéaire et continue de GK, des sous-Qp-espaces vectoriels de dimension nie V de W etV0 de W0, stables parGK, et un isomorphismeGK-équivariantW/V 'W0/V0. Contrairement à ce que l'on pourrait penser la catégorie de ces presque C-représentations a de bonnes propriétés. En particulier, elle est abélienne et la cohomologie galoisienne leur associe desQp-espaces vectoriels de dimension nie.

Nous reviendrons aussi ailleurs sur l'utilisation de cette version renforcée de la proposition 2.1 pour obtenir des résultats signicatifs dans la direction de la conjecture de monodromie p- adique qui dit que, lorsque le corps résiduel k deK est ni, toute représentation p-adique qui est de de Rham est potentiellement semi-stable (on prouve entre autres que ceci est vrai pour les représentations de dimension2).

1. Rappels et compléments sur BdR (cf. [18]) 1.1. Notations générales

Pour toute k-algèbre A (i.e. tout anneau commutatif contenant k), on note W(A) l'anneau des vecteurs de Witt à coecients dans A. C'est une W(k)-algèbre. Si a ∈ A, on note [a] = (a,0, . . . ,0, . . .)∈W(A) son représentant de Teichmüller.

On note OK l'anneau des entiers de K, OC le séparé complété de OK pour la topologie p- adique et C = OC[1/p] son corps des fractions. On note vp la valuation de C normalisée par vp(p) = 1et | |la valeur absolue normalisée par |p|=p−1. Pour tout sous-corps ferméL de C, on note OL={c∈L| |c|61}l'anneau de ses entiers et mL={c∈L| |c|<1} l'idéal maximal de OL.

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1.2. Banach p-adiques et C-algèbres de Banach

Dans cet article un Banachp-adique est unQp-espace vectoriel topologiqueV dont la topologie est celle d'un espace de Banach p-adique, i.e. il existe une norme sur V qui en fait un espace vectoriel normé complet. Pour nous, la norme d'un Banach p-adique n'est donc dénie qu'à équivalence près.

Un Banach p-adique est donc un Qp-espace vectoriel topologique tel qu'il existe un sous-Zp- moduleV deV qui est séparé et complet pour la topologiep-adique, et tel queV =∪n∈N p−nV, chaquep−nV étant ouvert dansV, la topologie induite par celle deV sur chaquep−nV étant la topologiep-adique.

On appelle un telV un réseau deV. Tout réseauV deV dénit une norme|| ||V surV : pour tout v∈V,||v||V =pr sir∈Zest le plus grand entier tel queprv ∈V.

SiV est un réseau de V, un sous-Zp-moduleV0 deV est un réseau de V, si et seulement s'il existe m, n∈Ztels que pmV ⊂V0 ⊂pnV.

On appelle C-algèbre de Banach la donnée d'un anneau commutatif A contenant C, muni d'une norme || || vériant ||ca|| = |c| ||a|| et ||aa0|| 6 ||a|| · ||a0|| si c ∈ C, a, a0 ∈ A, complète pour cette norme. On pose alorsOA ={a∈A| ||a||61}. C'est un réseau du Banachp-adique A. C'est aussi une OC-algèbre sans p-torsion et A =OA[1/p].

Soit aussi OA∗∗={x∈OA | ||x−1||<1}; c'est un sous-groupe du groupe des unités deOA

et si x∈OA∗∗ la suite de terme général xpr tend vers 1 quandr tend vers +∞.

On dit qu'une C-algèbre de Banach est p-bonne si elle satisfait les trois propriétés suivantes : (B1) pour tout a∈A, on a||ap||= (||a||)p,

(B2) l'application x7→xp induit une surjection deOA/pOA surOA/pOA,

(B3) tout élément de OA∗∗ a exactement pr racines pr-ièmes dansOA∗∗ ou, de manière équiva- lente, l'application x7→xpr induit un morphisme (de groupes) deOA∗∗dansOA∗∗ qui est surjectif et dont le noyau n'a pas d'autre élément que les racines pr-ièmes de l'unité de C.

C'est en particulier le cas deC.

1.3. Les anneaux R(A), BdR+ (A), Acris(A) et Bcris+ (A)

Dans ce numéro et dans le suivant, A est uneC-algèbre de Banachp-bonne.

Remarquons queks'identie à un sous-corps de l'anneauOA/pOA : il sut d'identierλ∈k à l'image de [λ]∈W(k)⊂OC ⊂OA dansOA/pOA.

On pose

R(A) =←−lim

n∈N

OA/pOA ,

les applications de transition étant données par le Frobenius. Un élément x∈R(A) peut donc être considéré comme une suite (xn)n∈N d'éléments deOA/pOA vériant xpn+1 =xn pour tout n.

L'anneau R(A) est un anneau parfait de caractéristiquep. Il a une structure dek-algèbre : si λ∈ketx= (xn)n∈N, on aλx= (λp−nxn)n∈N.

Soit x = (xn)n∈N ∈ R(A). Pour tout n ∈ N choisissons un relèvement xˆn de xn dans OA. On voit que, pour tout m ∈ N xé, la suite des (ˆxm+n)pn converge dans OA vers un élément x(m) indépendant du choix des relèvements. L'application x 7→ (x(m))m∈N est une bijection de

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R(A) sur l'ensemble des suites d'éléments deOA vériant(x(m+1))p =x(m) pour tout m. Nous utilisons cette bijection pour identier R(A) à l'ensemble de ces suites.

Alors, si λ ∈ k, x = (x(m))m∈N, y = (y(m))m∈N ∈ R(A), on a λx = ([λp−m]x(m))m∈N, x+y=z, avec z(m)= limn7→∞(x(m+n)+y(m+n))pn,xy= (x(m)y(m))m∈N).

CommeR(A)est parfait,W(R(A))est sansp-torsion etpW(R(A))est l'idéal deW(R(A)) formé des vecteurs de Witt dont la composante d'indice0 est nulle.

L'application

θ:W(R(A))→OA , qui à(a1, a2, . . . , an, . . .) associeP+∞

n=0pna(n)n , est un homomorphisme deW(k)-algèbres.

Proposition 1.1. Soitπ ∈R(OC)⊂R(A)tel queπ(0)=pet soitξ = [π]−p∈W(R(C))⊂ W(R(A)). Alors

i) L'applicationx7→x0 deR(A)dansOA/pOA est surjective et son noyau est l'idéal principal de R(A) engendré par π.

ii) L'application θ est surjective et son noyau est l'idéal principal de W(R(A))engendré par ξ.

Démonstration. La première application est surjective grâce à (B2) et il est clair que son noyau contient π. Réciproquement, si x = (x(m))m∈N est dans ce noyau, x(0) ∈ pOA. Donc

||x(0)|| 6 |p|. La propriété (B1) implique que, pour tout m ∈ N, ||x(m)|| 6 |π(m)|, ou encore que y(m) = x(m)(m) ∈ OA. Comme (y(m+1))p = (x(m+1)(m+1))p =x(m)(m) =y(m), on a y= (y(m))m∈N∈R(A)etx=πy, d'où i).

Comme W(R(A)) et OA sont séparés et complets pour la topologie p-adique, pour vérier la surjectivité de θ, il sut de le faire modulo p et il sut d'utiliser la surjectivité dans le le i) pour ce faire. Finalement, comme OA est sans p-torsion et W(R(A)) est séparé et complet pour la topologie p-adique, il sut, terminer la démonstration de ii), de montrer que, si a = (a0, a1, . . . , an, . . .) ∈ Ker θ, alors il existe b ∈ W(R(A)) tel que a−ξb ∈ pW(R(A)). Mais, d'après le i), il existe y∈R(A) tel quea0 =πy et il sut de prendre b= [y] puisquea−ξb≡ [a0]−[π][y]≡0 (modpW(R(A))).

L'application θ s'étend de manière évidente en une application K0-linéaire surjective, encore notéeθ, deW(R(A))[1/p]surA dont le noyau est l'idéal principal deW(R(A))[1/p]engendré parξ. Pour tout entierm>0, on poseBm(A) =W(R(A))[1/p]/(Kerθ)m. On noteBdR+ (A) =

←−limm∈NBm(A) le séparé complété deW(R(A))[1/p]pour la topologie (Kerθ)-adique.

Pour toutm∈N,Bm(A)est un Banachp-adique dont un réseau est l'image deW(R(A))(qui s'identie au quotient de W(R(A))par ξmW(R(A))). On en déduit que toutBdR+ (A)-module de longueur nie est, avec sa topologie naturelle, un Banachp-adique. On pourra remarquer que, en revanche, BdR+ (A), muni de la topologie de la limite projective, avec la topologie de Banach p-adique sur chaqueBm(A), n'est pas un Banach p-adique.

De même, on note Acris(A) le séparé complété pour la topologie p-adique de l'enveloppe à puissances divisées deW(R(A))relativement à l'idéalKer θ. C'est aussi le séparé complété pour la topologie p-adique de la sous-W(R(A))-algèbre (ou du sous-W(R(A))-module, cela revient ici au même) de W(R(A))[1/p] engendrée par les ξm/m! pour m ∈ N. L'anneau Acris(A) peut aussi être considéré comme le séparé complété pour la topologiep-adique de l'enveloppe à

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puissances divisées de l'anneau W(R(A)) relativement à l'idéal J(A) = Ker θ+pW(R(A)), image inverse par θ depA, compatibles avec les puissances divisées canoniques qui existent sur l'idéal engendré par p. Comme ϕ(J(A)) ⊂ J(A), le Frobenius s'étend en un endomorphisme, encore noté ϕ, de l'anneau Acris(A).

On pose aussiBcris+ (A) =Acris(A)[1/p]. C'est uneK0-algèbre munie d'un Frobeniusϕ(pro- longeant ϕ sur Acris(A)), semi-linéaire relativement au Frobenius absolu σ agissant sur K0. L'anneau Bcris+ (A) est un Banachp-adique et Acris(A)en est un réseau.

Les Bm(A) et BdR+ (A) sont, de manière naturelle, des W(R(A))[1/p]-algèbre. Tout élé- ment de Bcris+ (A) peut s'écrire, de manière non unique, sous la forme P+∞

n=0αnξn

n!, avec les αn∈W(R(A))[1/p]tendantp-adiquement vers 0. On en déduit un homomorphisme naturel de Bcris+ (A) dans les Bm(A)et dansBdR+ (A).

1.4. Les groupes U1(A) et U(A) On pose

U1×(A) ={(x(m))m∈N∈R(A)|x(0)∈1 + 2pOA}, U×(A) ={(x(m))m∈N∈R(A)|x(0)∈OA∗∗}.

La propriété (B1) et l'inégalité ||(xp−1)−(x−1)p|| < 1 valable pour tout élément x de OA permettent de montrer que, si xp ∈ OA∗∗, alors x ∈ OA∗∗. Ceci implique que l'on a x(m) ∈ OA∗∗

si (x(m))m∈N ∈ U×(A). Les ensembles U1×(A) et U×(A) sont des sous-groupes du groupe multiplicatif de R(A). Le premier est séparé et complet pour la topologie p-adique et est donc un Zp-module ; comme il existe r ∈N tel que xpr ∈1 + 2pOA si x ∈OA∗∗, le second s'identie au Qp-espace vectoriel QpZp U1×(A). Comme U1×(A) est sans p-torsion, U×(A) peut être considéré comme un Banach p-adique dont U1×(A)est un réseau.

Six∈U1×(A),[x]−1∈J(A) et la série log[x] =

+∞

X

n=1

(−1)n+1([x]−1)n/n

converge dans Acris(A). On obtient ainsi une applicationZp-linéaire deU1×(A) dansAcris(A) que l'on prolonge en une application Qp-linéaire deU×(A) dansB+cris(A) que l'on note encore x7→log[x]. On aϕ([x]) = [xp]et donc ϕ(log[x]) =plog[x]six∈U×(A).

Proposition 1.2. Soit

`:U×(A)→B2(A) ,

l'application qui à x associe l'image delog[x]via l'homomorphisme naturel Bcris+ (A)→B2(A). i) L'application θ◦`:U×(A)→A est surjective et son noyau est un Qp-espace vectoriel de dimension 1 formé des x∈U×(A) tels que x(0) est une racine de l'unité d'ordre une puissance de p dans C;

ii) l'application` est injective et dénit un homéomorphisme deU×(A)sur son image qui est un sous-Qp-espace vectoriel fermé du Banach p-adique B2(A).

Démonstration. Le logarithme dénit un isomorphisme du groupe multiplicatif 1 + 2pOA sur le groupe additif 2pOA. Pour tout a ∈ 1 + 2pOA, il existe, grâce à (B3), une suite d'éléments

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(x(m))m∈N de OA∗∗ vériant x(0) = a et (x(m+1))p = x(m), pour tout m et donc (x(m))m∈N ∈ U1×(A) et la restriction deθ◦`àU1×(A) a pour image2pOA. Le noyau de cette restriction est formé des (x(m))m∈N tels que x(0) = 1 et, grâce à (B3), tous les x(m) sont alors dans C. Soit ε= (ε(m))m∈N∈R(A), avec ε(0) = 1 etε(1) 6= 1. On a ε∈R(C)⊂R(A), la suite

0→εZp →U1×(A)→2pOA →0 est exacte et l'assertion (i) s'en déduit en rendant pinversible.

Soit ξ˜l'image de ξ dansB2(A). On sait ([18, Ÿ 1.5.4]) que, lorsqueA =C, il existe c0∈OC

non nul tel que `(ε) = c0ξ˜; la même formule reste vraie lorsque l'on envoie OC dans OA. On en déduit que`(ε)6= 0 et`est bien injective. On voit aussi que l'image par` du noyau deθ◦` s'identie au Qp-espace vectoriel engendré par t= log[ε].

L'image A2(A) de W(R(A))dansB2(A) qui est aussi celle deAcris(A) est un réseau de ce Banachp-adique et on a une suite exacte

0→OAξ˜→A2(A)→OA →0 . Mais on a un diagramme commutatif

0 → εZp → U1×(A) → 2pOA → 0

↓ ↓ ↓

0 → OAξ˜ → A2(A) → OA → 0 où les lignes sont exactes. On en déduit l'injectivité de l'application l.

On en déduit aussi que Qpt∩`(U1×(A)) = Zpp−mt si m ∈ N désigne le plus grand entier tel que c0/pm ∈ OC. Soit u ∈ U×(A) tel que `(u) ∈ A2(A); on a θ(`(u)) ∈ A et il existe v ∈ U1×(A) tel que θ(`(v)) = θ(`(u2p)). Alors `(u2p/v) ∈ Qpt∩A2(A) = Zpp−mt et il existe r ∈Zp tel que u2p/v=εr/pm, donc u2pm+1rvpm ∈U1×(A). On en déduit que

U1×(A)⊂`−1(A2(A))⊂(U1×(A))

1 2pm+1

donc que l'image inverse par ` du réseau A2(A) de B2(A) est un réseau de U×(A) et la proposition en résulte.

Remarque. On peut montrer (cela résulte de la description de B2(OC) faite dans [18] et de ce que, pour tout n ∈ N l'annulateur de dε(n)(n) ∈ Ω1O

K/W(k) est l'idéal des c ∈ OK vériant |c|6pn−p−11 , voir aussi [17, prop. 2.17]) que l'élémentc0 introduit dans la preuve de la proposition précédente vérie|c0|=pp−11 . L'entiermci-dessus vaut donc0sip6= 2et1sip= 2. Nous n'en n'aurons pas besoin.

On noteU(A) (resp.U1(A)) l'image deU×(A)(resp.U1×(A)) dansBcris+ (A)aussi bien que dansB2(A).

Dans toute la suite, on xeε∈U1×(OC)⊂U1×(A)comme ci-dessus (on a doncε= (ε(m))m∈N, avecε(0)= 1 etε(1) 6= 1) ; on poset=`(ε)∈U1(OC)⊂U1(A). On peut donc considérerε(resp.

t) comme un générateur du module de Tate Zp(1) =←−limµpm(K) noté multiplicativement (resp.

additivement).

Pour tout Zp-module M, on poseM(1) =M⊗ZpZp(1).

(10)

On voit que l'on a des diagrammes commutatifs

0 → Zp(1) → U1(A) → 2pOA → 0

↓ ↓ ↓

0 → OAξ˜ → A2(A) → OA → 0 et

0 → Qp(1) → U(A) → A → 0

↓ ↓ ||

0 → A(1) → B2(A) → A → 0

dont les lignes sont exactes. En particulier, B2(A) s'identie à la somme amalgamée de U(A) et de A(1) au-dessus de Qp(1) (mais, dans cette identication, on ne voit plus la structure d'anneau).

Toutes ces constructions sont fonctorielles : Remarquons d'abord que, grâce à (B1), OA ={a∈A |(ca)pn 7→0 sin7→ ∞, pour tout c∈mC} .

Si A1 et A2 sont deux C-algèbres de Banach p-adiques p-bonnes et si s : A1 → A2 est un homomorphisme continu deC-algèbres, il envoie doncOA1 dansOA2 et il induit des morphismes, que nous notons encoresdeR(A1)dansR(A2), deW(R(A1))dansW(R(A2)), deBm(A1)dans Bm(A2)pour toutm∈N, deB+dR(A1)dansBdR+ (A2), deAcris(A1)dansAcris(A2), deBcris+ (A1) dansBcris+ (A2), deU1(A1)dansU1(A2), et deU(A1)dansU(A2). Tous les diagrammes auxquels on peut raisonnablement penser sont commutatifs.

1.5. Le corps BdR et l'anneau Bst

Comme d'habitude, pour tout entier i> 0, on pose Zp(i) = SymiZpZp(1) et on note Zp(−i) son dual. Pour touti∈Z,Zp(i)est leZp-module libre de rang1de baseti. Pour toutZp-module M et tout i∈Z, on poseM(i) =M⊗ZpZp(i); pour tout x∈M, on posexti=x⊗ti∈M(i). Dans le cas particulier où A = C, on pose R = R(C), Bm = Bm(C), B+dR = B+dR(C), Acris=Acris(C),Bcris+ =Bcris+ (C),U1=U1(C) etU =U(C).

Alors BdR+ est un anneau de valuation discrète, de corps résiduelC et test un générateur de l'idéal maximal deBdR+ .

On note BdR = BdR+ [1/t] le corps des fractions de B+dR et, pour tout i ∈ Z, F iliBdR l'idéal fractionnaire qui est la puissance i-ième de l'idéal maximal deBdR+ . Pour tout i∈Z, on a donc F iliBdR =B+dR.ti =BdR+ (i) et, si m∈N,F iliBdR/F ili+mBdR =Bm(i).

Le groupe GK =Gal(K/K) opère sur BdR+ etBdR. On peut montrer (nous n'en aurons pas besoin) qu'il n'existe pas de sectionGK-équivariante de la projection deBdR+ surC, mais il existe un unique homomorphisme GK-équivariant de K dans BdR+ qui, composé avec la projection de BdR+ surC, donne l'identité surK et ceci nous permet de considérer les anneauxB+dR,BdR et les Bm comme desK-algèbres. On a(BdR)GK = (BdR+ )GK =K. Sim>1, on a aussi(Bm)GK =K. Finalement, sis60, on a(BdR/F ilsBdR)GK = 0 et, si s>1, on a(BdR/F ilsBdR)GK =K.

On pose Bcris=Bcris+ [1/t]. Le Frobenius surBcris+ s'étend de manière unique en un endomor- phisme, encore noté ϕ, de l'anneauBcris (on a ϕ(1/t) = 1/pt). L'application naturelle de Bcris+ dans BdR+ s'étend de manière unique en un homomorphisme injectif de Bcris dans BdR ce qui

(11)

nous permet de considérerBcris+ (resp.Bcris) comme une sous-K0-algèbre, stable parGK deBdR+ (resp. BdR).

Rappelons que l'on a choisi π∈Rtel que π(0) =p, de sorte que [π]∈W(R). Si l'on prolonge le logarithme p-adique usuel en posant log(p) = 0, on peut voir log[π] comme un élément de F il1BdR, en posant

log[π] = log([π]/p) =

+∞

X

n=1

(−1)n+1([π]

p −1)n/n .

Alors log[π] est transcendant sur le corps des fractions de Bcris, ce qui fait que la sous-Bcris- algèbre Bst de BdR engendré par log[π] s'identie à l'anneau des polynômes en l'indéterminée log[π]à coecients dans Bcris. Elle est stable par GK (et ne dépend pas du choix de π tel que π(0) =p). On étend le Frobenius en un endomorphisme de l'anneau Bst en posant ϕ(log[π]) = plog[π]. On note N l'unique Bcris-dérivation de Bst telle que N(log[π]) = −1. Alors N qui ne dépend pas non plus du choix de π commute à l'action de GK et vérie N ϕ = pϕN. On a Bcris=BstN=0.

Remarque. Avec les conventions de [18], on voit que l'on a choisi le plongement canonique de Bst dans BdR et que l'on a choisit pour N le choix opposé au choix canonique. Comme on l'a remarqué dans [19], la validité du théorème A ne dépend pas de ces choix. Pour N nous avons adopté la convention opposée à celle de [18] pour tenir compte d'une remarque de Tsuji sur l'interprétation géométrique de cet opérateur ([32, remark 4.1.1]).

Rappelons enn que, l'application naturelle K⊗K0 Bst → BdR est injective et nous permet d'identier K⊗K0 Bst à un sous-anneau deBdR.

1.6. L'anneau Bϕ=1cris

NotonsBcrisϕ=1 la sous-Qp-algèbre deBcrisformée desbtels queϕb=b. C'est aussi la sous-Qp- algèbre de Bst formé des bqui vérient N b= 0 etϕb=b.

On muni Bϕ=1cris de la ltration induite par celle de BdR, i.e., pour tout i ∈ Z, on pose F iliBcrisϕ=1=Bcrisϕ=1∩F iliBdR.

On voit queQp ⊂F il0Bcrisϕ=1. On dispose d'une application canonique deBϕ=1cris dansBdR/BdR+ : c'est le composé de l'inclusion Bϕ=1cris ⊂ Bcris ⊂ BdR avec la projection de BdR sur BdR/BdR+ . Pour tout r>0, cette application envoieF il−rBcrisϕ=1 dansF il−rBdR/B+dR=Br(−r).

Rappelons que U s'identie à un sous-Qp-espace vectoriel de Bcris+ ⊂BdR+ contenantQp(1) = Qp.t. Pour tout u ∈ U, on a ϕu = pu. Par conséquent, u/t ∈ Bcris vérie ϕ(u/t) = u/t et u/t∈F il−1BdR. Autrement ditu/t∈F il−1Bcrisϕ=1, i.e.U(−1)⊂F il−1Bcrisϕ=1.

Proposition 1.3. i) On a F il0Bϕ=1cris =Qp et, pour tout i >0,F iliBcrisϕ=1= 0. ii) On a U(−1) =F il−1Bcrisϕ=1.

iii) Soit v un élément de U(−1) qui n'appartient pas à Qp. Pour tout entier r > 1 et pour tout b ∈ F il−rBcrisϕ=1, il existe b0, b1, . . . , br−1 ∈ U(−1), (non uniquement déterminés) tels que b=b0+b1v+. . .+br−1vr−1.

iv) Pour tout entier r>1, la suite

0→Qp→F il−rBcrisϕ=1 →Br(−r)→0

(12)

est exacte.

v) La suite

0→Qp →Bcrisϕ=1→BdR/BdR+ →0 est exacte.

Démonstration. Le fait que F il0Bϕ=1cris =Qp est un peu délicat à établir mais est bien connu (cf. [18], c'est d'ailleurs grâce à cela qu'une représentation p-adique semi-stable est déterminée par son(ϕ, N)-module ltré, cf. [19]). On en déduit queF iliBcrisϕ=1 = 0 sii>1, d'où (i).

On en déduit aussi que, pour tout entier r>1, la suite 0→Qp→F il−rBcrisϕ=1 →Br(−r) est exacte.

Par ailleurs (prop. 1.2), la suite

0→Qp(1)→U →C→0 est exacte. On a donc un diagramme commutatif

0 → Qp → U(−1) → C(−1) → 0

|| ↓ ||

0 → Qp → F il−1Bcrisϕ=1 → B1(−1) dont les colonnes sont exactes. On en déduit (ii) et (iv) pour r= 1.

Supposons r > 2 et soit Xr l'ensemble des éléments de Bcris qui peuvent s'écrire sous la forme Pr−1

n=0bnvn, avec les bndansU(−1). C'est un sous-Qp-espace vectoriel deF il−rBcrisϕ=1. On a v =v0/t, avcec v0 ∈ U etθ(v0) 6= 0. Tout élément br−1 de U(−1)s'écrit br−1 =b0r−1/t avec b0r−1 ∈ U. On a alors br−1vr−1 = b0r−1v0r−1/tr et θ(b0r−1vr−10 ) = θ(b0r−1)(θ(v0))r−1) parcourt C lorsque b0r−1 parcourt U. On en déduit que la projection de Xr sur F il−rBdR/F il−r+1BdR = C(−r) est surjective. Par induction sur r, il en résulte que la projection de Xr sur Br(−r) est surjective. Comme dans le cas r= 1, on a alors un diagramme commutatif

0 → Qp → Xr → Br(−r) → 0

|| ↓ ||

0 → Qp → F il−rBcrisϕ=1 → Br(−r) dont les colonnes sont exactes. On en déduit (iii) et (iv).

Enn (v) résulte de (iv) par passage à la limite.

Remarque. La suite exacte ci-dessus a déjà été considérée dans [7, Ch. III Ÿ 3]). C'est une variante de la suite exacte fondamentale de Bloch et Kato ([2, prop. 1.17]).

2. Le lemme fondamental Dans ce paragraphe, on se propose de prouver le résultat suivant :

Proposition 2.1. (lemme fondamental, version faible). Soienthun entier>2,v1, v2, . . . , vh∈ B2, α1, α2, . . . , αh∈C des éléments non tous nuls tels quePh

n=1αnθ(vn) = 0 et soit Y ={(u1, u2, . . . , uh)∈Uh| ∃c∈C tel que θ(un) =cαn pour tout n} .

(13)

Soitρ:Y →B2 la restriction à Y de l'application de Uh dans B2 qui envoie(u1, u2, . . . , uh)sur Ph

n=1unvn. Alors Im ρ⊂C(1) et ou bien Imρ=ρ(Qp(1)h) (et donc dimQpIm ρ6h) ou bien Im ρ=C(1).

Remarque. En travaillant nettement plus, on peut démontrer en outre ([8], lemme fonda- mental, version forte) que si l'image de ρ n'est pas de dimension nie sur Qp, alors le noyau de ρ est de dimension nie égale à h surQp. Nous n'en n'aurons pas besoin ici.

Début de la preuve de la proposition 2.1. Pour y = (u1, u2, . . . , uh) ∈ Y, c comme ci-dessus est unique et on noteν :Y →C l'application qui envoiey surc. On a une suite exacte

0→Qp(1)h →Y →C →0. Siy = (u1, u2, . . . , uh)∈Y, alorsρ(y) =Ph

n=1unvn, doncθ(ρ(y)) =P

θ(un)θ(vn) =ν(y).P

αnθ(vn) = 0 et on a bienImρ⊂C(1).

Pour démontrer le reste de la proposition, l'idée est de rajouter une variable àCet d'exprimer ρ comme une limite uniforme de fonctions algébriques , puis d'utiliser une version précise du fait qu'une telle fonction algébrique est ouverte (lemme 2.4), ce qui permet d'en déduire une version approchée du résultat ; nalement, la linéarité de ρpermet de conclure.

On note OK =OC{T} le séparé complété pour la topologie p-adique de l'anneauOC[T]des polynômes en l'indéterminée T à coecients dansOC et on pose K =OK[1/p] =C{T}. Tout élémenta∈OK (resp.∈K) s'écrit donc de manière unique sous la forme

a=

+∞

X

r=0

arTr ,

avec les ar ∈ OC (resp. ∈ C) tendant p-adiquement vers 0. Pour un tel a, on pose ||a|| = supr∈N|ar|.

On note E le corps des fractions deK et on choisit une clôture algébriqueE de E. On note K la fermeture intégrale de K dansE.

On prolonge l'application || || : K → R en une application dénie sur K en posant, pour tout µ∈K, si P(X) =Xn+Pn−1

i=0 aiXi∈K[X]est le polynôme minimal de µsurK,

||µ||= sup06i6n−1||ai||n−i1 .

Lemme 2.2. L'application || || : K → R est une norme. La C-algèbre C complétée de K pour cette norme, munie du prolongement de la norme par continuité, est une C-algèbre de Banach p-bonne.

Démonstration. D'abord, il est clair (et bien connu) que la restriction de || || à K est une norme (norme de Gauss) et que OK est l'ensemble des éléments de K de norme61.

NotonsOK la fermeture intégrale deOK dansE. On aK =OK[1/p]. On a aussi{||µ|| |µ∈ K} = {|c| | c ∈ C} et ||cµ|| = |c|.||µ|| pour c ∈ C et µ∈ K. Alors, si µ∈ K etc ∈ C avec c6= 0, on a||µ||6|c|si et seulement si µ/c∈OK. On en déduit que || ||est une norme sur K et que C, munie de la norme dénie par continuité, est une C-algèbre de Banach.

(14)

Remarque. En fait K est la réunion ltrante de ses sous-K-algèbres nies. Si L est l'une d'entre elles, c'est une algèbre anoïde sur C, intègre et de dimension 1 (cf. [22, chap. II] par exemple) ; la restriction de la norme à L est la norme spectrale et L est complète pour cette norme.

Il reste à vérier que C est p-bonne :

Montrons (B1) : si a∈ K, on a a ∈OK si et seulement si ap ∈OK et on en déduit que

||ap||= (||a||)p; la même formule poura∈C s'en déduit par continuité.

Montrons (B2) : L'applicationx→xp est une surjection deK surK et donc (grâce à (B1)) aussi de OK surOK et de OK/pOK =OC/pOC sur OK/pOK.

Montrons (B3) : Remarquons d'abord queOK∗∗=OK ∩OC∗∗ est un sous-groupe deOC∗∗car, si a∈OK∗∗, son inverse a−1 dansC est de la formeP+∞

n=0(1−a)n, série à termes dansK[a]qui converge dans C et donc aussi dans K[a]⊂K puisqueK[a]est complète.

Soit x ∈ OC∗∗. Choisissons a ∈ OK vériant a−x ∈ 2prOC. Alors a ∈ OK∗∗ et a−1x = 1 +a−1(x−a) ∈ 1 + 2prOC d'où l'on déduit que l'application naturelle de OK∗∗/(1 + 2prOK) dansOC∗∗/(1 + 2prOC) est un isomorphisme.

D'autre part, si x∈1 + 2pr+1OC, la sérieg(x) =P+∞

n=0 p−r

n

(x−1)n converge dans1 + 2pOC et le même argument que précédemment montre que, si x∈K, alors g(x) aussi. On en déduit que l'élévation à la puissancepr induit un isomorphisme de1 + 2pOC sur1 + 2pr+1OC dontg est l'inverse et un isomorphisme de1+2pOK sur1+2pr+1OK dont la restriction degà1+2pr+1OK est l'inverse.

La conjonction des isomorphismes précédents montre que noyau et conoyau de l'application de OC∗∗ dans lui-même qui envoie x sur xpr s'identient aux noyau et conoyau de l'élévation à la puissance pr dans OK∗∗. Comme K est intègre, le noyau se réduit bien au groupe des racines pr-ièmes de 1dansC. Finalement, si x∈OK∗∗, il existey∈K vériantypr =x et on ay∈OK∗∗

[cf. les lignes suivant la dénition de U1×(A) et U×(A)] ; l'élévation à la puissance pr-ième est bien surjective sur OK∗∗.

Le résultat suivant est un avatar du lemme de Hensel : Lemme 2.3. Soit P(X) = Xn+Pn−1

i=0 aiXi ∈ K[X] un polynôme unitaire à coecients dans OK. Pour 0 6 i 6 n−1, posons ai = P+∞

r=0ai,rTr, avec les ai,r ∈ C. Supposons que

|a0,0|<1, |ai,r|<1 pour 16i6n−1 sir 6= 0 et qu'il existei tel que|ai,0|= 1. Alors P n'est pas irréductible sur OK[X].

Démonstration. Soitdle plus petit entier tel que|ad,0|= 1. Posons Q1(X) =XdetR1(X) = ad,0+ad+1,0X+. . .+an−1,0Xn−1−d. On voit qu'il existeV, W ∈OC[X]tels queV Q1+W R1 = 1. Si P = Q1R1, le lemme est prouvé. Sinon, on voit qu'il exsite a ∈ mC non nul tel que P−Q1R1 ∈aOK[X]. Soit I l'idéal deOK[X]engendré para. Comme pour la preuve du lemme de Hensel classique, on utilise les polynômes V etW pour construire, par induction sur m, des polynômes Qm, Rm ∈OK[X]vériant degQm=d,degRm =n−d,Qm≡Qm−1 (modIm−1), Rm≡Rm−1 (modIm−1),P ≡QmRm (modIm). La suite desQm (resp. desRm) converge vers un polynôme Qde degréd(resp. R de degrén−d) dans OK[X]etP =QR.

(15)

On note S l'ensemble des homomorphismes (automatiquement continus), de OC-algèbres de OK dans OC. La restriction de s ∈ S à OK est déterminée de manière unique par s(T) et l'applications7→s(T) de S dansOC est surjective.

Touts∈S se prolonge de manière unique en un élément deSpmK, ensemble des homomor- phismes continus de C-algèbres de K dansC et, inversement la restriction à OK d'un élément de SpmK appartient àS, ce qui permet d'identier S àSpmK.

De même, tout s∈ S se prolonge de manière unique en un homomorphisme continu deOC- algèbres, encore noté s, de OC dans OC (resp. de C dansC) et S s'identie ainsi à l'ensemble de ces homomorphismes.

On choisit un élément s0∈S tel que s0(T) = 0.

Lemme 2.4. Soit µ0 ∈OK vériant s00) = 0 et ||µ0||= 1. Soit n le degré de µ0 sur K. Il existe alors un entier m vériant06m < net des élémentsc1, c2, . . . , cm ∈OC tels que, pour tout c∈OC vériantc−cj 6∈mC pour 16j6m, il existe s∈S tel que s(µ0) =c.

Démonstration. Si

P(T, X) =a0+a1X+. . .+an−1Xn−1+Xn∈OK[X]

est le polynôme minimal deµ0 surOK, avec ai =P+∞

r=0ai,rTr, le fait que||µ0||= 1 signie que tous lesai,r sont dansOC mais que l'un au moins d'entre eux est une unité.

On a0 =s0(a0+a1µ0+. . .+an−1µn−10n0) =s0(a0) =a0,0, donca0,0= 0. Il résulte alors du lemme précédent qu'il existe un entierr>1tel que l'un au moins desai,r, pour06i6n−1est une unité. Choisisssons un telr. Soientc1, c2, . . . , cm les racines distinctes dansOC de l'équation Pn−1

i=0 ai,rXi = 0.

Si c ∈ OC vérie |c−cj| = 1 pour j = 1,2, . . . , m, on a |Pn−1

i=0 ai,rci| = 1. Alors P(T, c) ∈ OC{T} s'écrit P(T, c) = P+∞

`=0α`T`, avec α0 = a0,0 +a0,1c+. . .+a0,n−1cn−1 +cn et, pour

`>1,α` =Pn−1

i=0 ai,`ci. En particulier, le polygone de Newton de P(T, c) passe par le point de coordonnées (r,0)et a au moins une pente négative ou nulle. On en déduit qu'il existe x ∈OC

tel que P(x, c) = 0.

La sous-OK-algèbre OK0] de OK engendrée par µ0 s'identie au quotient de OK[X] par l'idéal engendré par P(T, X). Il existe donc un unique homomorphisme de OC-algèbres sµ0 : OK0]→OC tel que sµ0(T) =x etsµ00) =c. Soitp le noyau de sµ0. Comme OK est entier sur OK0], on peut trouver un idéal premier Pde OK au-dessus de p. Mais alors OK/P est entier surOK0]/p=OC, doncOK/P=OC et il sut de prendre pour sla projection deOK sur OK/P.

Lemme 2.5. Soit µ∈ OC tel que s0(µ) = 0 et ||µ|| = 1. Pour tout ε >0, il existe m ∈N, c1, c2, . . . , cm ∈ OC tels que, pour tout c ∈ OC vériant c−cj 6∈ mC pour 16 j 6 m, il existe s∈S tel que |s(µ)−c|6ε.

Démonstration. Soit ν∈K et soita0+a1X+. . .+an−1Xn−1+Xnle polynôme minimal de ν surK. Pour tout s∈S, on a |s(ai)|6||ai|| pour06i6n−1. Comme s(a0) +s(a1)s(ν) + . . .+s(an−1)s(ν)n−1+s(ν)n= 0, on en déduit que|s(ν)|6||ν||. Par continuité, la même formule reste vraie pour ν ∈C.

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