M. Cassat G. Wuerzner M. Pruijm V. Forni M. Burnier
introduction
L’hypertension artérielle (HTA) est un problème de santé publi
que concernant entre 2050% de la population générale dans les pays industrialisés.1 Avec le vieillissement de la population et l’augmentation de l’incidence de l’obésité et du diabète, la prévalence de l’HTA devrait encore augmenter. Cette pathologie reste la cause la plus importante de mortalité dans le monde, représentant sept millions de morts chaque année avec une mortalité cardiovas
culaire doublée à chaque augmentation de la pression artérielle de 20/10 mmHg.2 Malgré une pharmacopée en constante évolution, le contrôle de la pression ar
térielle demeure, aujourd’hui encore, un défi dans la pratique quotidienne avec une incapacité à atteindre des valeurs cibles de tension artérielle (TA) dans en
viron 3050% des cas.3 Finalement, après l’exclusion d’un manque d’adhérence thérapeutique, d’un effet «blouse blanche», de mesures de pression inadéqua
tes ou de prise de médicaments à action hypertensive, on estime que 1530% des patients hypertendus présentent une HTA résistant au traitement. C’estàdire que leur TA s’avère non contrôlée, ce malgré la prise d’au moins trois traitements antihypertenseurs à des doses optimales, dont un diurétique. Une fois les causes d’HTA secondaire exclues, les stratégies diététiques et pharmacologiques à dis
position, comme la limitation de l’apport en sel et de la consommation d’alcool, ou l’adjonction de spironolactone, ne suffisent parfois pas à normaliser la pres
sion artérielle, justifiant le développement d’approches interventionnelles plus agressives.
rôledusystèmenerveuxsympathiquedans l
’
hyperten-
sionartérielle
La contribution du système nerveux sympathique (SNS) dans le développe
ment, le maintien et la progression de l’hypertension artérielle n’est plus à prou
ver.4 En effet, la présence d’une activité sympathique de base plus importante Renal sympathetic denervation :
perspective of a promising treatment for hypertension
The crucial role of the sympathetic nervous system activity in the initiation and mainte
nance of hypertension was already in mind in the 1920s when surgical options were propo
sed to severely hypertensive patients. Des
pite cons tant evolution of pharmacological treatments, one estimates that 1530% of hy
per tensive patients are still not well control
led and present resistant hypertension. The development of a new endovascular catheter used for selective sympathetic renal dener
vation by radiofrequency offers new pers pec
tives of treatment. Encouraged by the recent results of the first clinical trials in a targeted population, this procedure could be used in some more indications in the future. However, long term morbidity and mortality of this tech
nique are still not known.
Rev Med Suisse 2011 ; 7 : 1743-7
Dans les années 1920, le rôle majeur du système nerveux sym- pathique dans l’initiation et l’entretien de l’hypertension arté- rielle était à l’origine des premiers traitements chirurgicaux proposés aux patients atteints d’hypertension artérielle sévère.
Malgré l’évolution constante de la pharmacopée en matière de médications antihypertensives, on estime, à ce jour, que 15-30%
des patients hypertendus sont mal contrôlés et présentent une hypertension artérielle résistante. Le développement d’un nouveau cathéter endovasculaire permettant une dénervation sympathique par radiofréquence, ciblée aux reins, amène de nouvelles perspectives thérapeutiques prometteuses. Portée par les récents résultats des premières études menées sur une population très ciblée, cette technique pourrait voir une extension de son indication à l’avenir. Les conséquences en termes de morbi/mortalité au long cours ne sont cependant pas encore connues.
Dénervation rénale endovascu- laire par radiofréquence : perspective d’un traitement prometteur de l’hyper- tension artérielle
nouveau traitement
Drs Meryll Cassat, Grégoire Wuerzner, Menno Pruijm et Valentina Forni Pr Michel Burnier
Service de néphrologie et d’hypertension CHUV, 1011 Lausanne meryll.cassat@chuv.ch
ainsi qu’une augmentation du relargage de la noradrénaline du rein dans la circulation ont été démontrées dans de nombreux modèles animaux d’hypertension ainsi que chez les patients avec une HTA essentielle en comparaison avec des sujets non hypertendus.5 Ces phénomènes seraient mo
dulés par les nerfs afférents et efférents du système sym
pathique au niveau rénal.
Le SNS rénal comprend des voies efférentes, qui provien
nent des centres végétatifs, passent par les ganglions du tronc sympathique (D10 à L1), puis se dirigent vers les reins, et des voies afférentes qui partent des reins pour se diriger au ni
veau du noyau paraventriculaire dans la zone postérieure de l’hypothalamus, via les ganglions de la racine dorsale (D6L4).
Toutes ces fibres nerveuses vont cheminer depuis le hile rénal au niveau de l’adventice de la paroi de l’artère rénale.6
L’innervation sympathique efférente se fait au niveau de trois structures différentes du rein : l’appareil juxtaglomé
rulaire, les tubules et les cellules musculaires lisses des ar
térioles. La stimulation progressive des voies efférentes sympathiques rénales provoque une activation séquentielle de ces trois systèmes avec, dans l’ordre, au niveau : a. de l’appareil juxtaglomérulaire, une augmentation de la libé
ration de rénine par les cellules granuleuses ; rénine qui va alors contribuer à activer le système rénineangiotensine
aldostérone ;
b. des tubules rénaux, provoquant une réabsorption accrue de sodium au niveau tubulaire, associée à une diminution de la natriurèse. Des études in vitro ont démontré que la libé
ration de noradrénaline au niveau des terminaisons nerveu
ses sympathiques rénales augmente l’activité de la pompe Na+K+ATPase dans les cellules épithéliales tubulaires cul
tivées ;7
c. des cellules musculaires lisses des artérioles, participant à la ré
gulation du débit plasmatique rénal (figure 1).
Ainsi, une stimulation minime du SNS peut induire une augmentation de la libération de rénine, sans modification au niveau des tubules ou de l’hémodynamique rénale.
Les fibres sympathiques dites afférentes répondent, quant à elles, aux stimuli chimiques et mécaniques tels que l’ischémie ou l’hypoxie rénale. L’activation de ces fibres a pour conséquence l’augmentation de l’activité sympathique globale de l’organisme via des signaux envoyés à l’hypotha
lamus, avec des répercutions organiques non seulement au niveau des reins mais aussi du cœur et des vaisseaux. Cet effet renforce l’action délétère de la stimulation du SNS et crée un cercle vicieux (figure 1).810
sympathectomierénale
:
d’
unancienconceptàunenouvelleprocédure
Le rôle majeur du SNS dans l’instauration et l’entretien de l’HTA a été évoqué il y a presque un siècle déjà. A partir des années 1920, des méthodes chirurgicales étaient pro
posées aux patients atteints d’HTA sévère, tenant compte de l’absence de traitements médicamenteux et du mauvais pronostic de cette maladie. Des interventions chirurgicales complexes avaient démontré une certaine efficacité quant à la réduction de la TA et l’amélioration du pronostic car
diovasculaire à long terme.11 Néanmoins, ces stratégies hautement invasives donnaient lieu à une réponse théra
peutique très hétérogène (environ 50% de répondeurs seu
lement), nécessitaient une longue hospitalisation et étaient associées à une morbidité et une mortalité peropératoires conséquentes. On relevait la survenue d’effets secondaires nombreux, comme des hypotensions orthostatiques ma
jeures, des syncopes, des tachycardies orthostatiques, une hypersudation paradoxale, des troubles sphinctériens ou encore des dysfonctions érectiles. Dans les années 1960, l’arrivée d’alternatives médicamenteuses, de plus en plus efficaces et bien tolérées par les patients, a petit à petit re
légué les approches chirurgicales aux seuls cas intolérants ou non répondeurs à la pharmacopée. Les développements technologiques récents utilisant les principes du cathété
risme endoluminal et de la radiofréquence ont permis de réévaluer les possibilités d’intervention sur le système sympathique rénal de manière moins invasive et donc, a priori, plus sûre pour les patients. Ainsi est née la dénerva
tion rénale endovasculaire percutanée par radiofréquence.
Cette méthode consiste en l’introduction d’un cathéter (Symplicity ; Ardian, Inc., CA) par voie percutanée au niveau de l’artère fémorale jusqu’à l’artère rénale ; ce dernier est couplé à un générateur de radiofréquences pouvant être délivrées en son extrémité grâce à une électrode. La faisa
bilité anatomique du geste est, dans un premier temps, confirmée par un examen de type angiographie, angioCT
scan ou angioIRM, réalisé avant la procédure et excluant la présence de plusieurs artères rénales de chaque côté, d’une dissection, d’un anévrisme, d’une sténose ou de plaques athéromateuses instables. Le cathéter est alors positionné au contact de la paroi vasculaire de l’artère rénale, dans une zone proche du hile, guidé par scopie. Une fois au contact de la paroi, de la distalité vers la proximalité, des séquences d’impulsions par radiofréquence sont alors dé
livrées, durant environ deux minutes chacune, suivant une
Fibres nerveuses efférentes Fibres
nerveuses afférentes
Fibres nerveuses afférentes
• Vasoconstriction
• Athérosclérose
• Remodeling, fibrose
• Ischémie
• Hypoxie
• Stress oxydatif
• Hypertrophie ventriculaire
• Remodeling, fibrose
• Arythmie
• Consommation excessive d’O2
• Insuffisance cardiaque
• Appareil juxtaglomérulaire (via récepteurs b1 adrénergiques) – Libération de rénine R activation du système RAA
– Angiotensine II R vasoconstriction R production d’aldostérone R remodeling cardiaque – Aldostérone R rétention hydrosodée
• Tubules (via récepteurs a1 adrénergiques) – Rétention sodée, Qnatriurèse, hypervolémie
• Cellules musculaires lisses (via récepteurs a1 adrénergiques) – Vasoconstriction des artérioles rénales –Qdébit rénal plasmatique
Figure 1. Innervation rénale sympathique et ses interactions complexes dans l’homéostasie de la tension artérielle et de la volémie
RAA : rénine-angiotensine-aldostérone.
Voie nerveuse sympathique afférente.
Voie nerveuse sympathique efférente.
Renforcement de l’activité du système nerveux sympathique.
rotation circonférentielle de 6090°, un espacement régu
lier de cinq millimètres le long de l’artère rénale et comp
tabilisant jusqu’à six points d’impact différents (figure 2).
Pendant ce processus, un algorithme prédéterminé permet de réguler en continu la quantité d’énergie délivrée, en fonction de la température et de l’impédance mesurées au niveau de l’extrémité du cathéter. Une fois ces étapes termi
nées, la même procédure est alors réalisée de l’autre côté.
Des études précliniques animales ont pu mettre en évi
dence une diminution du taux de relargage de la noradré
naline du rein dans la circulation de plus de 85%, après l’utilisation d’un tel cathéter, résultat comparable à celui obtenu après une dénervation chirurgicale par section de l’artère rénale et réanastomose.12 Chez l’homme, la disposi
tion particulière des fibres nerveuses sympathiques, che
minant dans l’adventice de l’artère rénale, les rend facile
ment accessibles depuis la lumière vasculaire. Par contre, les impulsions de radiofréquence sont ressenties comme douloureuses, raison pour laquelle la présence d’un anes
thésiste est requise pendant l’intervention, ce pour l’admi
nistration d’une sédation et d’une analgésie.
premièresétudes cliniqueschezl
’
hommeUne première étude pilote, multicentrique (cinq centres en Europe et Australie), ayant pour but de démontrer la faisabilité, la sécurité et l’efficacité d’une telle procédure sur la diminution de la TA chez l’homme, a été effectuée chez des patients avec une HTA résistante.12 Les critères d’inclusion comprenaient un âge L 18 ans, la présence d’une TA systolique L 160 mmHg (respectivement L 150 mmHg chez les patients diabétiques), sous trois médications an
tihypertensives au moins. Ainsi, un total de 45 patients ont été inclus, d’âge moyen de 58 w 9 ans, dont 44% de femmes, avec une TA moyenne de 177/101 w 20/15 mmHg et la prise moyenne de 4,7 médicaments antihypertenseurs. Les ré
sultats en termes de diminution de la TA étaient de 14*/
10* mmHg à un mois, 22*/11* mmHg à six mois et de
27*/17** mmHg à un an de l’intervention (* p l 0,001 et
** p = 0,02). Concernant la réponse thérapeutique, 85% des sujets ont été considérés comme répondeurs, avec une ré
duction de la TA systolique au cabinet de L 10 mmHg, alors que 13% (six patients) n’ont pas retiré de bénéfice sur le plan tensionnel. Le monitoring ambulatoire de la pression
artérielle (MAPA), effectué chez neuf patients, a montré, quant à lui, une baisse de la TA systolique à un mois de
11 mmHg, correspondant à une diminution de 27 mmHg au cabinet. Sur le plan de l’activité du SNS, la mesure du taux de relargage de la noradrénaline des reins dans la cir
culation, réalisée chez dix patients, a montré une baisse de 47% à un mois. D’autres effets ont été décrits, tels qu’une baisse du taux plasmatique de rénine de 50% ou encore une réduction de la masse ventriculaire gauche, confirmée par IRM cardiaque à douze mois.13 Sur les 45 patients, seuls deux ont présenté des complications dont un pseudoané
vrisme de l’artère fémorale, traité conservativement et une dissection rénale, traitée par la mise en place d’un stent sans séquelles ultérieures. Des irrégularités de la paroi de l’artère rénale ont été notées immédiatement après la pro
cédure mais le contrôle angiographique à 1430 jours chez dixhuit patients et l’angioIRM à six mois chez quatorze patients n’ont pas révélé de lésions vasculaires résiduelles.
A la suite de ces résultats encourageants, une étude ran
domisée contrôlée fut mise en place, comprenant au total 106 patients issus de 24 centres en Europe, Australie et NouvelleZélande.14 Les critères d’inclusion et d’exclusion étaient les mêmes que pour l’étude pilote. Chaque partici
pant étant attribué soit au groupe avec dénervation rénale endovasculaire (n = 52), soit au groupe contrôle (n = 54). Les résultats à six mois ont démontré une baisse de la TA dans le groupe avec dénervation par rapport au groupe contrôle, avec, au cabinet 33/11 mmHg (p l 0,0001), à domicile 22/
12 mmHg (p l 0,0001) et 11/7 mmHg (p = 0,006/p = 0,014) en mesure ambulatoire. Finalement, 39% des patients avec dénervation rénale ont pu atteindre une TA systolique cible (l 140 mmHg) en comparaison de seulement 3% des patients dans le groupe contrôle. Dans les complications, 13% des patients ayant subi une dénervation ont présenté une bra
dycardie transitoire pendant la procédure, répondant à l’atropine. Concernant les autres événements, ont été dé
nombrés : un pseudoanévrisme de l’artère fémorale ayant nécessité une compression manuelle, une hypotension tran
sitoire postprocédurale, une infection urinaire, des lombal
gies traitées par analgésiques pendant un mois et un séjour hospitalier prolongé pour investigations de paresthésies.
A relever que deux décès ont été constatés au cours du suivi (un infarctus du myocarde et une mort subite), jugés non liés à la procédure.
Actuellement, un total de 153 patients ont été traités par dénervation rénale endovasculaire par les mêmes investi
gateurs (45 patients de l’étude pilote, 52 de l’étude rando
misée et 56 autres patients traités ouvertement), avec un suivi maximal de 24 mois pour certains d’entre eux. 92% ont été jugés comme répondeurs au traitement, avec une di
minution de la TA systolique L 10 mmHg.15 Chez les dix
huit patients suivis à 24 mois, une baisse tensionnelle per
sistante de 32/14 mmHg a été retrouvée et seulement 3%
des sujets ont présenté des complications (cf. plus haut).
qu
’
en est-
ildeslimitationsdeces études?
Ces études prometteuses en termes de résultats ont néanmoins suscité nombre de remarques quant à leurs limi
Figure 2. Dénervation rénale endovasculaire par radiofréquence
Introduction du cathéter avec guide proche du hile au niveau de l’artère rénale via l’artère fémorale
Traitement de la distalité à la proximalité de l’artère rénale
Dénervation en pastilles avec 4-6 zones de traite- ment disposées à 5 mm l’une de l’autre, selon un motif hélicoïdal pour couvrir toute la circon- férence
Rein Aorte
tations. Notamment, concernant les patients sélectionnés qui représentent un groupe hétérogène malgré la notion d’HTA résistante, puisque les formes d’HTA pseudorésistantes ou secondaires n’ont été exclues que par l’anamnèse. Par ail
leurs, la plupart des patients n’ont été évalués qu’à partir de valeurs tensionnelles prises au cabinet. On peut également déplorer la méthodologie de ces études visàvis du man que de standardisation de la prise en charge médicamenteuse entre les groupes, associé à un design inappro prié quant à l’évaluation de l’effet de la dénervation rénale sur la réduction possible du nombre de médicaments. Il semble également judicieux de relever que les patients jugés comme répon
deurs au traitement l’ont été uniquement sur la base de la pression systolique au cabinet médical. Les valeurs mesu
rées en pression ambulatoire sur 24 heures montraient des résultats positifs mais nettement moins impressionnants.
interrogations àélucider
Les fibres nerveuses sympathiques afférentes contribuent de manière importante à l’activité globale du SNS, ayant ainsi un fort impact sur les dommages causés aux organes cibles. Elles ne repousseraient pas après lésion, si l’on en croit l’absence de douleur perçue après une transplantation rénale. Leur destruction lors de la dénervation rénale repré
senterait alors un gain thérapeutique majeur. Malheureuse
ment, il n’existe aucun test permettant de mesurer l’activi
té de ces fibres. Toutefois, la réduction de l’activité du SNS mesurée au niveau central,14 et la restauration du phénomè
ne de dipping nocturne chez 50% des patients nondippers ou reverse-dippers après la procédure, portent à croire que ces fibres seraient détruites pendant l’intervention.
Le traitement par radiofréquence dénature les fibres nerveuses mais conserve les rapports anatomiques. Si l’on prend exemple sur les greffons cardiaques et rénaux, les fibres nerveuses efférentes ont démontré leur capacité à se reformer, faisant craindre un effet limité dans le temps de cette procédure. Les seules données acquises à ce jour témoignent d’une efficacité de la dénervation rénale endo
vasculaire maintenue à 24 mois, suggérant une absence de réinnervation rapide ou de mécanisme contrerégulateur.
L’utilisation de radiofréquences soulève la crainte de dommages tissulaires, tels qu’une fibrose, une sténose ou un anévrisme de la paroi vasculaire. Cependant, la quantité d’énergie délivrée lors de cette intervention est relativement faible (huit watts) et les données des premières études cli
niques sont globalement rassurantes, sans événement en lien avec la procédure. Il n’empêche que le petit collectif de participants ne permet pas d’exclure totalement, pour l’heure, la survenue d’événements indésirables graves mais peu fréquents à long terme.
Concernant la réponse à la dénervation rénale endovas
culaire, force est de constater une grande variabilité inte
rindividuelle, avec un écarttype pour la baisse de la TA systolique à six mois de 23 mmHg. Dans ce contexte, la dé
termination de facteurs prédictifs d’une bonne réponse est au cœur des préoccupations. Selon les premières analyses multivariées, trois facteurs ressortent : la TA systolique de base élevée, une fréquence cardiaque plus basse et la prise de sympatholytiques centraux.
indicationsactuellesàla dénervation rénaleendovasculaireparradiofré
-
quence
Pour l’heure, la dénervation rénale endovasculaire par radiofréquence est à considérer uniquement chez les pa
tients avec une HTA résistante vraie avec échec des alter
natives médicamenteuses. Seules de prochaines études, incluant un plus grand nombre de sujets sur une plus longue durée, pourront déterminer si ces résultats sont extrapola
bles à tous les cas d’HTA résistante, voire à d’autres for mes ou stades d’hypertension artérielle. Ainsi, aucune déduction n’est possible actuellement pour les formes moins sévères d’HTA.
De plus amples travaux sont également nécessaires pour obtenir une analyse coûtefficacité de cette procédure fai
sant appel à un plateau technique avec du personnel ex
périmenté. Enfin, il faudra encore évaluer l’effet de cette intervention sur les organes cibles, tels que le cœur et les reins.
Il paraît judicieux de préciser que la dénervation rénale endovasculaire a démontré, pour l’instant, des effets béné
fiques en matière d’amélioration du profil tensionnel mais sans aucune indication en termes de morbidité et de mor
talité cardiovasculaires. D’autre part, l’effet décrit sur la TA est comparable au gain obtenu lors de l’adjonction de spi
ronolactone dans les cas d’HTA résistante, constatation non négligeable puisque seulement 22% des patients inclus dans ces études étaient au bénéfice d’un traitement par antagoniste de l’aldostérone.
perspectivesd
’
avenirAudelà de la nécessité d’acquérir plus d’éléments de réponse sur la dénervation rénale endovasculaire concer
nant ses indications dans les cas d’HTA, cette procédure ouvre également une porte sur des possibilités de traite
ment d’autres pathologies associées à une suractivation du SNS. Chez les patients hypertendus avec un syndrome d’apnées du som meil, l’hypoxie et l’hypercapnie peuvent stimuler la voie afférente sympathique et contribuer à l’aug
mentation de l’activité du SNS.16 Dans des états d’hyper
volémie, lors d’insuffisance cardiaque ou chez les patients cirrhoti ques, une rétention hydrosodée inappropriée est typiquement observée. De premiers résultats semblent également démontrer un effet bénéfique de la dénervation rénale dans des cas de syndrome métabolique et de résis
tance à l’insuline.17 Finalement, des études en cours aux EtatsUnis, en Australie et en Allemagne chez des patients en insuffisance rénale chronique avec une HTA résistante suggèrent un effet protecteur, voire freinateur de la dégra
dation de la fonction rénale après dénervation.
Sur le plan helvétique, la mise en place d’une cohorte de patients avec un diagnostic d’HTA résistante est en cours.
Cette démarche multicentrique vise à optimaliser la prise en charge de ces patients avec la perspective de pouvoir leur offrir un plateau technique, notamment en vue d’une éventuelle dénervation rénale si elle s’avère indiquée. Pour éviter une dérive de l’utilisation de cette méthode coûteuse, il est prévu d’évaluer chaque cas de manière multidiscipli
naire pour juger de la pertinence de l’indication et d’assurer ensuite un suivi thérapeutique adéquat puisque la majorité des patients traités par dénervation rénale nécessitera en
core un traitement médicamenteux.
conclusions
La dénervation rénale endovasculaire par radiofréquen
ce se base sur le concept de l’hyperactivité du système nerveux sympathique observé dans de nombreux cas d’HTA.
Cette approche interventionnelle, peu invasive, peut s’avé
rer utile et efficace dans la gestion de l’HTA résistante lors
que la pharmacopée a atteint ses limites. La dénervation rénale présenterait également un intérêt particulier dans des situations où l’activité de base du SNS est augmentée, comme dans le syndrome d’apnées du sommeil ou le syn
drome métabolique. Les premiers résultats cliniques encou
rageants nécessitent cependant confirmation avec l’inclusion d’un plus grand nombre de patients sur une pério de pro
longée. Une troisième grande étude randomisée contrôlée avec intervention «à blanc» est en cours aux EtatsUnis.
Cette nouvelle procédure aspire à repousser les limites thérapeutiques connues à ce jour dans la prise en charge de l’HTA. Néanmoins, la complexité de l’HTA rend bien compte qu’on ne peut pas espérer traiter tous les patients sur la base d’un seul axe physiopathologique.
Implications pratiques
Le système nerveux sympathique occupe une place centrale dans le développement et le maintien de l’hypertension arté- rielle et les reins sont au cœur de cette interaction
Au niveau du rein, les fibres nerveuses sympathiques dites efférentes innervent trois structures différentes : l’appareil juxtaglomérulaire, les tubules et les cellules musculaires lisses artériolaires. Leur stimulation a pour résultante une libération de la rénine, une rétention hydrosodée et une vasoconstric- tion
La dénervation rénale endovasculaire par radiofréquence est une procédure ciblée qui vise à dénaturer les fibres nerveu- ses sympathiques rénales
Les premières études chez l’homme démontrent un profil de sécurité rassurant et une efficacité de la dénervation rénale endovasculaire sur la diminution de la tension artérielle chez les patients avec une hypertension artérielle résistante Les études cliniques réalisées à ce jour ne représentent qu’un petit collectif de patients, bien sélectionnés et suivis sur une période maximale de deux ans ; on ne peut donc pas extra- poler ces résultats à l’ensemble des patients hypertendus
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Bibliographie