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Dénervation rénale endovasculaire par radiofréquence : perspective d’un traitement prometteur de l’hypertension artérielle

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M. Cassat G. Wuerzner M. Pruijm V. Forni M. Burnier

introduction

L’hypertension artérielle (HTA) est un problème de santé publi­

que concernant entre 20­50% de la population générale dans les pays industrialisés.1 Avec le vieillissement de la population et l’augmentation de l’incidence de l’obésité et du diabète, la prévalence de l’HTA devrait encore augmenter. Cette pathologie reste la cause la plus importante de mortalité dans le monde, représentant sept millions de morts chaque année avec une mortalité cardiovas­

culaire doublée à chaque augmentation de la pression artérielle de 20/10 mmHg.2 Malgré une pharmacopée en constante évolution, le contrôle de la pression ar­

térielle demeure, aujourd’hui encore, un défi dans la pratique quotidienne avec une incapacité à atteindre des valeurs cibles de tension artérielle (TA) dans en­

viron 30­50% des cas.3 Finalement, après l’exclusion d’un manque d’adhérence thérapeutique, d’un effet «blouse blanche», de mesures de pression inadéqua­

tes ou de prise de médicaments à action hypertensive, on estime que 15­30% des patients hypertendus présentent une HTA résistant au traitement. C’est­à­dire que leur TA s’avère non contrôlée, ce malgré la prise d’au moins trois traitements antihypertenseurs à des doses optimales, dont un diurétique. Une fois les causes d’HTA secondaire exclues, les stratégies diététiques et pharmacologiques à dis­

position, comme la limitation de l’apport en sel et de la consommation d’alcool, ou l’adjonction de spironolactone, ne suffisent parfois pas à normaliser la pres­

sion artérielle, justifiant le développement d’approches interventionnelles plus agressives.

rôledusystèmenerveuxsympathiquedans l

hyperten

-

sionartérielle

La contribution du système nerveux sympathique (SNS) dans le développe­

ment, le maintien et la progression de l’hypertension artérielle n’est plus à prou­

ver.4 En effet, la présence d’une activité sympathique de base plus importante Renal sympathetic denervation :

perspective of a promising treatment for hypertension

The crucial role of the sympathetic nervous system activity in the initiation and mainte­

nance of hypertension was already in mind in the 1920s when surgical options were propo­

sed to severely hypertensive patients. Des­

pite cons tant evolution of pharmacological treatments, one estimates that 15­30% of hy­

per tensive patients are still not well control­

led and present resistant hypertension. The development of a new endovascular catheter used for selective sympathetic renal dener­

vation by radiofrequency offers new pers pec­

tives of treatment. Encouraged by the recent results of the first clinical trials in a targeted population, this procedure could be used in some more indications in the future. However, long term morbidity and mortality of this tech­

nique are still not known.

Rev Med Suisse 2011 ; 7 : 1743-7

Dans les années 1920, le rôle majeur du système nerveux sym- pathique dans l’initiation et l’entretien de l’hypertension arté- rielle était à l’origine des premiers traitements chirurgicaux proposés aux patients atteints d’hypertension artérielle sévère.

Malgré l’évolution constante de la pharmacopée en matière de médications antihypertensives, on estime, à ce jour, que 15-30%

des patients hypertendus sont mal contrôlés et présentent une hypertension artérielle résistante. Le développement d’un nouveau cathéter endovasculaire permettant une dénervation sympathique par radiofréquence, ciblée aux reins, amène de nouvelles perspectives thérapeutiques prometteuses. Portée par les récents résultats des premières études menées sur une population très ciblée, cette technique pourrait voir une extension de son indication à l’avenir. Les conséquences en termes de morbi/mortalité au long cours ne sont cependant pas encore connues.

Dénervation rénale endovascu- laire par radiofréquence : perspective d’un traitement prometteur de l’hyper- tension artérielle

nouveau traitement

Drs Meryll Cassat, Grégoire Wuerzner, Menno Pruijm et Valentina Forni Pr Michel Burnier

Service de néphrologie et d’hypertension CHUV, 1011 Lausanne meryll.cassat@chuv.ch

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ainsi qu’une augmentation du relargage de la noradrénaline du rein dans la circulation ont été démontrées dans de nombreux modèles animaux d’hypertension ainsi que chez les patients avec une HTA essentielle en comparaison avec des sujets non hypertendus.5 Ces phénomènes seraient mo­

dulés par les nerfs afférents et efférents du système sym­

pathique au niveau rénal.

Le SNS rénal comprend des voies efférentes, qui provien­

nent des centres végétatifs, passent par les ganglions du tronc sympathique (D10 à L1), puis se dirigent vers les reins, et des voies afférentes qui partent des reins pour se diriger au ni­

veau du noyau paraventriculaire dans la zone postérieure de l’hypothalamus, via les ganglions de la racine dorsale (D6­L4).

Toutes ces fibres nerveuses vont cheminer depuis le hile rénal au niveau de l’adventice de la paroi de l’artère rénale.6

L’innervation sympathique efférente se fait au niveau de trois structures différentes du rein : l’appareil juxtaglomé­

rulaire, les tubules et les cellules musculaires lisses des ar­

térioles. La stimulation progressive des voies efférentes sympathiques rénales provoque une activation séquentielle de ces trois systèmes avec, dans l’ordre, au niveau : a. de l’appareil juxtaglomérulaire, une augmentation de la libé­

ration de rénine par les cellules granuleuses ; rénine qui va alors contribuer à activer le système rénine­angiotensine­

aldostérone ;

b. des tubules rénaux, provoquant une réabsorption accrue de sodium au niveau tubulaire, associée à une diminution de la natriurèse. Des études in vitro ont démontré que la libé­

ration de noradrénaline au niveau des terminaisons nerveu­

ses sympathiques rénales augmente l’activité de la pompe Na+­K+­ATPase dans les cellules épithéliales tubulaires cul­

tivées ;7

c. des cellules musculaires lisses des artérioles, participant à la ré­

gulation du débit plasmatique rénal (figure 1).

Ainsi, une stimulation minime du SNS peut induire une augmentation de la libération de rénine, sans modification au niveau des tubules ou de l’hémodynamique rénale.

Les fibres sympathiques dites afférentes répondent, quant à elles, aux stimuli chimiques et mécaniques tels que l’ischémie ou l’hypoxie rénale. L’activation de ces fibres a pour conséquence l’augmentation de l’activité sympathique globale de l’organisme via des signaux envoyés à l’hypotha­

lamus, avec des répercutions organiques non seulement au niveau des reins mais aussi du cœur et des vaisseaux. Cet effet renforce l’action délétère de la stimulation du SNS et crée un cercle vicieux (figure 1).8­10

sympathectomierénale

:

d

unancien

conceptàunenouvelleprocédure

Le rôle majeur du SNS dans l’instauration et l’entretien de l’HTA a été évoqué il y a presque un siècle déjà. A partir des années 1920, des méthodes chirurgicales étaient pro­

posées aux patients atteints d’HTA sévère, tenant compte de l’absence de traitements médicamenteux et du mauvais pronostic de cette maladie. Des interventions chirurgicales complexes avaient démontré une certaine efficacité quant à la réduction de la TA et l’amélioration du pronostic car­

diovasculaire à long terme.11 Néanmoins, ces stratégies hautement invasives donnaient lieu à une réponse théra­

peutique très hétérogène (environ 50% de répondeurs seu­

lement), nécessitaient une longue hospitalisation et étaient associées à une morbidité et une mortalité peropératoires conséquentes. On relevait la survenue d’effets secondaires nombreux, comme des hypotensions orthostatiques ma­

jeures, des syncopes, des tachycardies orthostatiques, une hypersudation paradoxale, des troubles sphinctériens ou encore des dysfonctions érectiles. Dans les années 1960, l’arrivée d’alternatives médicamenteuses, de plus en plus efficaces et bien tolérées par les patients, a petit à petit re­

légué les approches chirurgicales aux seuls cas intolérants ou non répondeurs à la pharmacopée. Les développements technologiques récents utilisant les principes du cathété­

risme endoluminal et de la radiofréquence ont permis de réévaluer les possibilités d’intervention sur le système sympathique rénal de manière moins invasive et donc, a priori, plus sûre pour les patients. Ainsi est née la dénerva­

tion rénale endovasculaire percutanée par radiofréquence.

Cette méthode consiste en l’introduction d’un cathéter (Symplicity ; Ardian, Inc., CA) par voie percutanée au niveau de l’artère fémorale jusqu’à l’artère rénale ; ce dernier est couplé à un générateur de radiofréquences pouvant être délivrées en son extrémité grâce à une électrode. La faisa­

bilité anatomique du geste est, dans un premier temps, confirmée par un examen de type angiographie, angio­CT­

scan ou angio­IRM, réalisé avant la procédure et excluant la présence de plusieurs artères rénales de chaque côté, d’une dissection, d’un anévrisme, d’une sténose ou de plaques athéromateuses instables. Le cathéter est alors positionné au contact de la paroi vasculaire de l’artère rénale, dans une zone proche du hile, guidé par scopie. Une fois au contact de la paroi, de la distalité vers la proximalité, des séquences d’impulsions par radiofréquence sont alors dé­

livrées, durant environ deux minutes chacune, suivant une

Fibres nerveuses efférentes Fibres

nerveuses afférentes

Fibres nerveuses afférentes

• Vasoconstriction

• Athérosclérose

• Remodeling, fibrose

• Ischémie

• Hypoxie

• Stress oxydatif

• Hypertrophie ventriculaire

• Remodeling, fibrose

• Arythmie

• Consommation excessive d’O2

• Insuffisance cardiaque

• Appareil juxtaglomérulaire (via récepteurs b1 adrénergiques) – Libération de rénine R activation du système RAA

– Angiotensine II R vasoconstriction R production d’aldostérone R remodeling cardiaque – Aldostérone R rétention hydrosodée

• Tubules (via récepteurs a1 adrénergiques) – Rétention sodée, Qnatriurèse, hypervolémie

• Cellules musculaires lisses (via récepteurs a1 adrénergiques) – Vasoconstriction des artérioles rénales –Qdébit rénal plasmatique

Figure 1. Innervation rénale sympathique et ses interactions complexes dans l’homéostasie de la tension artérielle et de la volémie

RAA : rénine-angiotensine-aldostérone.

Voie nerveuse sympathique afférente.

Voie nerveuse sympathique efférente.

Renforcement de l’activité du système nerveux sympathique.

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rotation circonférentielle de 60­90°, un espacement régu­

lier de cinq millimètres le long de l’artère rénale et comp­

tabilisant jusqu’à six points d’impact différents (figure 2).

Pendant ce processus, un algorithme prédéterminé permet de réguler en continu la quantité d’énergie délivrée, en fonction de la température et de l’impédance mesurées au niveau de l’extrémité du cathéter. Une fois ces étapes termi­

nées, la même procédure est alors réalisée de l’autre côté.

Des études précliniques animales ont pu mettre en évi­

dence une diminution du taux de relargage de la noradré­

naline du rein dans la circulation de plus de 85%, après l’utilisation d’un tel cathéter, résultat comparable à celui obtenu après une dénervation chirurgicale par section de l’artère rénale et réanastomose.12 Chez l’homme, la disposi­

tion particulière des fibres nerveuses sympathiques, che­

minant dans l’adventice de l’artère rénale, les rend facile­

ment accessibles depuis la lumière vasculaire. Par contre, les impulsions de radiofréquence sont ressenties comme douloureuses, raison pour laquelle la présence d’un anes­

thésiste est requise pendant l’intervention, ce pour l’admi­

nistration d’une sédation et d’une analgésie.

premièresétudes cliniqueschezl

homme

Une première étude pilote, multicentrique (cinq centres en Europe et Australie), ayant pour but de démontrer la faisabilité, la sécurité et l’efficacité d’une telle procédure sur la diminution de la TA chez l’homme, a été effectuée chez des patients avec une HTA résistante.12 Les critères d’inclusion comprenaient un âge L 18 ans, la présence d’une TA systolique L 160 mmHg (respectivement L 150 mmHg chez les patients diabétiques), sous trois médications an­

tihypertensives au moins. Ainsi, un total de 45 patients ont été inclus, d’âge moyen de 58 w 9 ans, dont 44% de femmes, avec une TA moyenne de 177/101 w 20/15 mmHg et la prise moyenne de 4,7 médicaments antihypertenseurs. Les ré­

sultats en termes de diminution de la TA étaient de ­14*/

­10* mmHg à un mois, ­22*/­11* mmHg à six mois et de

­27*/­17** mmHg à un an de l’intervention (* p l 0,001 et

** p = 0,02). Concernant la réponse thérapeutique, 85% des sujets ont été considérés comme répondeurs, avec une ré­

duction de la TA systolique au cabinet de L 10 mmHg, alors que 13% (six patients) n’ont pas retiré de bénéfice sur le plan tensionnel. Le monitoring ambulatoire de la pression

artérielle (MAPA), effectué chez neuf patients, a montré, quant à lui, une baisse de la TA systolique à un mois de

­11 mmHg, correspondant à une diminution de ­27 mmHg au cabinet. Sur le plan de l’activité du SNS, la mesure du taux de relargage de la noradrénaline des reins dans la cir­

culation, réalisée chez dix patients, a montré une baisse de 47% à un mois. D’autres effets ont été décrits, tels qu’une baisse du taux plasmatique de rénine de 50% ou encore une réduction de la masse ventriculaire gauche, confirmée par IRM cardiaque à douze mois.13 Sur les 45 patients, seuls deux ont présenté des complications dont un pseudo­ané­

vrisme de l’artère fémorale, traité conservativement et une dissection rénale, traitée par la mise en place d’un stent sans séquelles ultérieures. Des irrégularités de la paroi de l’artère rénale ont été notées immédiatement après la pro­

cédure mais le contrôle angiographique à 14­30 jours chez dix­huit patients et l’angio­IRM à six mois chez quatorze patients n’ont pas révélé de lésions vasculaires résiduelles.

A la suite de ces résultats encourageants, une étude ran­

domisée contrôlée fut mise en place, comprenant au total 106 patients issus de 24 centres en Europe, Australie et Nouvelle­Zélande.14 Les critères d’inclusion et d’exclusion étaient les mêmes que pour l’étude pilote. Chaque partici­

pant étant attribué soit au groupe avec dénervation rénale endovasculaire (n = 52), soit au groupe contrôle (n = 54). Les résultats à six mois ont démontré une baisse de la TA dans le groupe avec dénervation par rapport au groupe contrôle, avec, au cabinet ­33/­11 mmHg (p l 0,0001), à domicile ­22/

­12 mmHg (p l 0,0001) et ­11/­7 mmHg (p = 0,006/p = 0,014) en mesure ambulatoire. Finalement, 39% des patients avec dénervation rénale ont pu atteindre une TA systolique cible (l 140 mmHg) en comparaison de seulement 3% des patients dans le groupe contrôle. Dans les complications, 13% des patients ayant subi une dénervation ont présenté une bra­

dycardie transitoire pendant la procédure, répondant à l’atropine. Concernant les autres événements, ont été dé­

nombrés : un pseudo­anévrisme de l’artère fémorale ayant nécessité une compression manuelle, une hypotension tran­

sitoire postprocédurale, une infection urinaire, des lombal­

gies traitées par analgésiques pendant un mois et un séjour hospitalier prolongé pour investigations de paresthésies.

A relever que deux décès ont été constatés au cours du suivi (un infarctus du myocarde et une mort subite), jugés non liés à la procédure.

Actuellement, un total de 153 patients ont été traités par dénervation rénale endovasculaire par les mêmes investi­

gateurs (45 patients de l’étude pilote, 52 de l’étude rando­

misée et 56 autres patients traités ouvertement), avec un suivi maximal de 24 mois pour certains d’entre eux. 92% ont été jugés comme répondeurs au traitement, avec une di­

minution de la TA systolique L 10 mmHg.15 Chez les dix­

huit patients suivis à 24 mois, une baisse tensionnelle per­

sistante de ­32/­14 mmHg a été retrouvée et seulement 3%

des sujets ont présenté des complications (cf. plus haut).

qu

en est

-

ildeslimitationsdeces études

?

Ces études prometteuses en termes de résultats ont néanmoins suscité nombre de remarques quant à leurs limi­

Figure 2. Dénervation rénale endovasculaire par radiofréquence

Introduction du cathéter avec guide proche du hile au niveau de l’artère rénale via l’artère fémorale

Traitement de la distalité à la proximalité de l’artère rénale

Dénervation en pastilles avec 4-6 zones de traite- ment disposées à 5 mm l’une de l’autre, selon un motif hélicoïdal pour couvrir toute la circon- férence

Rein Aorte

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tations. Notamment, concernant les patients sélectionnés qui représentent un groupe hétérogène malgré la notion d’HTA résistante, puisque les formes d’HTA pseudo­résistantes ou secondaires n’ont été exclues que par l’anamnèse. Par ail­

leurs, la plupart des patients n’ont été évalués qu’à partir de valeurs tensionnelles prises au cabinet. On peut également déplorer la méthodologie de ces études vis­à­vis du man que de standardisation de la prise en charge médicamenteuse entre les groupes, associé à un design inappro prié quant à l’évaluation de l’effet de la dénervation rénale sur la réduction possible du nombre de médicaments. Il semble également judicieux de relever que les patients jugés comme répon­

deurs au traitement l’ont été uniquement sur la base de la pression systolique au cabinet médical. Les valeurs mesu­

rées en pression ambulatoire sur 24 heures montraient des résultats positifs mais nettement moins impressionnants.

interrogations àélucider

Les fibres nerveuses sympathiques afférentes contribuent de manière importante à l’activité globale du SNS, ayant ainsi un fort impact sur les dommages causés aux organes cibles. Elles ne repousseraient pas après lésion, si l’on en croit l’absence de douleur perçue après une transplantation rénale. Leur destruction lors de la dénervation rénale repré­

senterait alors un gain thérapeutique majeur. Malheureuse­

ment, il n’existe aucun test permettant de mesurer l’activi­

té de ces fibres. Toutefois, la réduction de l’activité du SNS mesurée au niveau central,14 et la restauration du phénomè­

ne de dipping nocturne chez 50% des patients non­dippers ou reverse-dippers après la procédure, portent à croire que ces fibres seraient détruites pendant l’intervention.

Le traitement par radiofréquence dénature les fibres nerveuses mais conserve les rapports anatomiques. Si l’on prend exemple sur les greffons cardiaques et rénaux, les fibres nerveuses efférentes ont démontré leur capacité à se reformer, faisant craindre un effet limité dans le temps de cette procédure. Les seules données acquises à ce jour témoignent d’une efficacité de la dénervation rénale endo­

vasculaire maintenue à 24 mois, suggérant une absence de réinnervation rapide ou de mécanisme contre­régulateur.

L’utilisation de radiofréquences soulève la crainte de dommages tissulaires, tels qu’une fibrose, une sténose ou un anévrisme de la paroi vasculaire. Cependant, la quantité d’énergie délivrée lors de cette intervention est relativement faible (huit watts) et les données des premières études cli­

niques sont globalement rassurantes, sans événement en lien avec la procédure. Il n’empêche que le petit collectif de participants ne permet pas d’exclure totalement, pour l’heure, la survenue d’événements indésirables graves mais peu fréquents à long terme.

Concernant la réponse à la dénervation rénale endovas­

culaire, force est de constater une grande variabilité inte­

rindividuelle, avec un écart­type pour la baisse de la TA systolique à six mois de 23 mmHg. Dans ce contexte, la dé­

termination de facteurs prédictifs d’une bonne réponse est au cœur des préoccupations. Selon les premières analyses multivariées, trois facteurs ressortent : la TA systolique de base élevée, une fréquence cardiaque plus basse et la prise de sympatholytiques centraux.

indicationsactuellesàla dénervation rénaleendovasculaireparradiofré

-

quence

Pour l’heure, la dénervation rénale endovasculaire par radiofréquence est à considérer uniquement chez les pa­

tients avec une HTA résistante vraie avec échec des alter­

natives médicamenteuses. Seules de prochaines études, incluant un plus grand nombre de sujets sur une plus longue durée, pourront déterminer si ces résultats sont extrapola­

bles à tous les cas d’HTA résistante, voire à d’autres for mes ou stades d’hypertension artérielle. Ainsi, aucune déduction n’est possible actuellement pour les formes moins sévères d’HTA.

De plus amples travaux sont également nécessaires pour obtenir une analyse coût­efficacité de cette procédure fai­

sant appel à un plateau technique avec du personnel ex­

périmenté. Enfin, il faudra encore évaluer l’effet de cette intervention sur les organes cibles, tels que le cœur et les reins.

Il paraît judicieux de préciser que la dénervation rénale endovasculaire a démontré, pour l’instant, des effets béné­

fiques en matière d’amélioration du profil tensionnel mais sans aucune indication en termes de morbidité et de mor­

talité cardiovasculaires. D’autre part, l’effet décrit sur la TA est comparable au gain obtenu lors de l’adjonction de spi­

ronolactone dans les cas d’HTA résistante, constatation non négligeable puisque seulement 22% des patients inclus dans ces études étaient au bénéfice d’un traitement par antagoniste de l’aldostérone.

perspectivesd

avenir

Au­delà de la nécessité d’acquérir plus d’éléments de réponse sur la dénervation rénale endovasculaire concer­

nant ses indications dans les cas d’HTA, cette procédure ouvre également une porte sur des possibilités de traite­

ment d’autres pathologies associées à une suractivation du SNS. Chez les patients hypertendus avec un syndrome d’apnées du som meil, l’hypoxie et l’hypercapnie peuvent stimuler la voie afférente sympathique et contribuer à l’aug­

mentation de l’activité du SNS.16 Dans des états d’hyper­

volémie, lors d’insuffisance cardiaque ou chez les patients cirrhoti ques, une rétention hydrosodée inappropriée est typiquement observée. De premiers résultats semblent également démontrer un effet bénéfique de la dénervation rénale dans des cas de syndrome métabolique et de résis­

tance à l’insuline.17 Finalement, des études en cours aux Etats­Unis, en Australie et en Allemagne chez des patients en insuffisance rénale chronique avec une HTA résistante suggèrent un effet protecteur, voire freinateur de la dégra­

dation de la fonction rénale après dénervation.

Sur le plan helvétique, la mise en place d’une cohorte de patients avec un diagnostic d’HTA résistante est en cours.

Cette démarche multicentrique vise à optimaliser la prise en charge de ces patients avec la perspective de pouvoir leur offrir un plateau technique, notamment en vue d’une éventuelle dénervation rénale si elle s’avère indiquée. Pour éviter une dérive de l’utilisation de cette méthode coûteuse, il est prévu d’évaluer chaque cas de manière multidiscipli­

(5)

naire pour juger de la pertinence de l’indication et d’assurer ensuite un suivi thérapeutique adéquat puisque la majorité des patients traités par dénervation rénale nécessitera en­

core un traitement médicamenteux.

conclusions

La dénervation rénale endovasculaire par radiofréquen­

ce se base sur le concept de l’hyperactivité du système nerveux sympathique observé dans de nombreux cas d’HTA.

Cette approche interventionnelle, peu invasive, peut s’avé­

rer utile et efficace dans la gestion de l’HTA résistante lors­

que la pharmacopée a atteint ses limites. La dénervation rénale présenterait également un intérêt particulier dans des situations où l’activité de base du SNS est augmentée, comme dans le syndrome d’apnées du sommeil ou le syn­

drome métabolique. Les premiers résultats cliniques encou­

rageants nécessitent cependant confirmation avec l’inclusion d’un plus grand nombre de patients sur une pério de pro­

longée. Une troisième grande étude randomisée contrôlée avec intervention «à blanc» est en cours aux Etats­Unis.

Cette nouvelle procédure aspire à repousser les limites thérapeutiques connues à ce jour dans la prise en charge de l’HTA. Néanmoins, la complexité de l’HTA rend bien compte qu’on ne peut pas espérer traiter tous les patients sur la base d’un seul axe physiopathologique.

Implications pratiques

Le système nerveux sympathique occupe une place centrale dans le développement et le maintien de l’hypertension arté- rielle et les reins sont au cœur de cette interaction

Au niveau du rein, les fibres nerveuses sympathiques dites efférentes innervent trois structures différentes : l’appareil juxtaglomérulaire, les tubules et les cellules musculaires lisses artériolaires. Leur stimulation a pour résultante une libération de la rénine, une rétention hydrosodée et une vasoconstric- tion

La dénervation rénale endovasculaire par radiofréquence est une procédure ciblée qui vise à dénaturer les fibres nerveu- ses sympathiques rénales

Les premières études chez l’homme démontrent un profil de sécurité rassurant et une efficacité de la dénervation rénale endovasculaire sur la diminution de la tension artérielle chez les patients avec une hypertension artérielle résistante Les études cliniques réalisées à ce jour ne représentent qu’un petit collectif de patients, bien sélectionnés et suivis sur une période maximale de deux ans ; on ne peut donc pas extra- poler ces résultats à l’ensemble des patients hypertendus

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* à lire

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Références

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