• Aucun résultat trouvé

Pour ne pas conclure : pistes ouvertes pour l'avenir de la discipline

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Pour ne pas conclure : pistes ouvertes pour l'avenir de la discipline"

Copied!
12
0
0

Texte intégral

(1)

Book Chapter

Reference

Pour ne pas conclure : pistes ouvertes pour l'avenir de la discipline

VÉDRINES, Bruno, BULEA BRONCKART, Ecaterina, RONVEAUX, Christophe

VÉDRINES, Bruno, BULEA BRONCKART, Ecaterina, RONVEAUX, Christophe. Pour ne pas conclure : pistes ouvertes pour l'avenir de la discipline. In: Aeby Daghé, S.; Buela Bronckart, E.;

Cordeiro, G.S.; Dolz, J.; Leopoldoff, I.; Monnier, A.; Ronveaux, C. & Védrines, B. (dir.).

Didactique du français et construction d'une discipline scientifique. Dialogues avec Bernard Schneuwly . Villeneuve-d'Ascq : Presses universitaires du Septentrion, 2019. p.

243-257

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:151882

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

1 / 1

(2)
(3)

: quelques C. Fischer &

du .français

e scolaire

Pour ne pas conclure : pistes ouvertes pour l'avenir de la discipline

Ecarerina Bulea Bronckart, Christophe Ronveaux, Bruno Védrines Université de Genève Bien qu'il s'agisse ici de pmpos de fin d'ouvrage, nous ne saurions ni proposer une véritable synthèse des quinze contributions qui le composent, ni rédiger une conclusion au sens propre du terme. D'abord, en raison de la richesse, de la densité et de l'envergure des contributions réunies, qui couvrent, comme il est signalé dans l'introduction, un large spectre de thématiques ayant trait à la didactique du français, et un tout aussi large spectre de points de vue sur celle-ci ou sur certaines de ses composantes. Ensuite, parce que la plupart des auteurs, entrant en dialogue avec les textes et les réflexions de Bernard Schneuwly, s'expriment eux-mêmes dans l'esprit d'une poursuite de ce dialogue, parce qu'il est engagé de longue date, parce qu'il a alimenté d'une stimulante controverse l'évolution de leurs propres idées ou parcours acadé- miques, ou parce qu'il participe de la dynamique, souhaitée et souhaitable, d'une discipline scientifique toujours en train de se faire. Enfin, précisément parce que la didactique du français, telle que pratiquée par Schneuwly et conceptualisée dans ses travaux, se présente davantage sous sa facette de processus de construction que sous celle d'une cartographie figée de connais- sances ; processus de construction permanent, conjuguant niveaux épisté- mologique, théorique, méthodologique, conceptuel, empirique, mais aussi institutionnel et politique, dans un mouvement de va-er-vient réflexif où le regard méta et le retour à l'histoire permettent (ou devraient permettre) de situer la structure présente de la discipline et d'en envisager avec responsa- bilité l'avenir.

243

(4)

,

244 Ecaterina Bulea Bronckart, Christophe Ronveaux, Bruno Védrines

Cet écart au genre textuel attendu nous rapprochera du compte rendu d'une pensée en débat et nous procurera l'occasion de relire les contribu- tions à cet ouvrage dans la perspective des pistes que celles-ci creusent, confirment, ouvrent, ou veillent à ne pas fermer-regard sans doute restrictif, mais que nous concevons comme une manière d'entrer en résonance avec la tonalité engagée des travaux de Schneuwly et de l'équipe genevoise de

· didactique des langues.

La didactique du français :

émergence et dynamique d'une discipline scientifique

Nous adopterons une entrée notionnelle pour discuter d'abord les fonde- ments de la discipline, thème fort de l'ouvrage et préoccupation permanente de Schneuwly, en prenant comme instruments pour notre propre réflexion quelques notions clés, en particulier : disciplinarisation, transposition, genre, outil, objet, savoir.

La notion de disciplinarisation (Schneuwly, 2007 ; Hofstetter &

Schneuwly, 2014) a été forgée et mise à l'épreuve surtout de la discipline scolaire « français », comme le rappellent les textes de Reuter et de Bishop ; mais depuis la postUre esquissée ci-dessus, cette notion nous semble pouvoir êae euristiquement étendue à la didactique du français comme discipline scientifique. Envisager la didactique du français sous cet angle permet de souligner er d'observer comment les pratiques de recherche qui la consti- tuent participent à une construction sociale progressive, évolutive, socio- historiquement et contextuellement marquée, mais aussi à la construction d'une configuration scientifique par différenciation d'autres configurations scientifiques contemporaines. L'émergence de la discipline l'illustre déjà : comme le relate la contribution de Bronckart, dans le contexte romand, la didactique du français a été marquée dès son émergence par des préoccupa- tions épistémologiques fortes dont on notera qu'en même temps qu'elles exploitent les apports de la psychologie expérimentale, de la psychologie du développement ou encore de la psycholinguistique des années 1970-80, en même temps qu'elles prennent appui sur la philosophie marxienne et sur les œuvres psychologiques de Vygotski et de Leontiev pour construire le projet d'une « approche totalitaire » de l'objet « langage », ces préoccupations conduiront à ce que la nouvelle approche se démarque de la psychologie ou des psychologies ambiante(s) pour s'ancrer, résolument, mais de manière autonome, dans les sciences de l'éducation. Un triple mouvement se trouve de la sorte aux fondements de ce qui deviendra la didactique du français que nous connaissons : - un positionnement épistémologique renouant avec une tradition à même de penser l'articulation entre les dimensions fondatrices de l'humain, en l'occurrence la tradition historico-culturelle ;

(5)

Ronveaux, Bruno Védrines

tera du compte rendu de relire les contribu- [Ue celles-ci creusent,

d sans doute restrictif, rer en résonance avec 'équipe genevoise de

11tifique

er d'abord les fonde- cupation permanente

otre propre réflexion ation, transposition,

107 ; Hofstetter &

·tout de la discipline Reuter et de Bishop ; nous semble pouvoir Lis comme discipline cet angle permet de 1erche qui la consti- ive, évolutive, socio- .ssi à la construction mtres configurations pline l'illustre déjà : contexte romand, la e par des préoccupa- lême temps qu'elles de la psychologie du années 1970-80, en marxienne et sur les

·construire le projet ces préoccupations :le la psychologie ou lt, mais de manière .ouvement se trouve

1actique du français wlogique renouant ltre les dimensions istorico-culturelle ;

Pour ne pas conclure : pistes ouvertes pour l'avenir de la discipline 2.45

- la formulation d'un projet théorique concrétisant cette « nécessité de prendre en considération, de manière équilibrée, les activités collectives, les processus de communication qui s'y déploient et les processus de représen- tation » (Bronckart, p. 21) ; - enfin, la centration sur le texte, ou sur les dimensions textuelles du langage, pour des raisons autant méthodologiques (se doter d'une unité d'analyse en adéquation avec le positionnement adopté et du projet formulé) que de pertinence linguistique et psychologique. Si l'un ou l'autre des ingrédients de ce triple mouvement (adhésion à la pensée marxienne, à l'école historico-culturelle, adoption du texte comme unité d'analyse ou comme entité structurante d'intervention didactique, etc.) peut être discuté, nuancé ou renforcé, comme le montrent les contributions de Bazerman et de Riestra, sa cohérence d'ensemble demeure exemplaire et reste en cela à la fois une source de questionnements sans cesse renouvelés et un modèle d'exigence scientifique pour des projets disciplinaires ou sous- disciplinaires actuels.

Le survol du déploiement ultérieur de la discipline scientifique « didac- tique du français » fait apparaître son caractère dynamique dont nous retiendrons deux dimensions, thématisées dans plusieurs contributions à cet ouvrage: celle du façonnage permanent sur les plans conceptuel/notionnel et théorique, et celle de l'intervention, de l'engagement sur le plan social et institutionnel'. La contribution de Nonnon les souligne d'emblée, en mettant en évidence les apports de Schneuwly aussi bien à « l'entreprise conceptuelle » qu'est la didactique qu'à sa facette de « praxis ancrée ».Se centrant notment sur le versant conceptuel, l'analyse de Nonnon du statut et de la redéfinition de la notion de transposition didactique est l'occasion de discuter les rapports entre transposition, transmission, circulation des savoirs, médiation et outils sémiotiques. Cette mise en réseau notionnelle nous intéressera ici surtout pour illustrer les incidences réciproques du point de vue de la reconfiguration des notions et des concepts : la transposition didactique ne se réduit pas à la transmission, mais relève davantage de la circulation des savoirs; la notion de savoir elle-même s'en trouve affectée car les savoirs sont saisis sous l'angle de la construction, de la transformation, de la transaction, de la médiation ; mais la transposition est aussi circu- lation entre contextes, ce qui met en avant la dimension créative inhérente à la conception des dispositifs et des outils de médiation ... Poursuivant sur la notion de transposition didactique et sur sa reconstruction dans les travaux de Schneuwly (et plus largement dans les travaux du GRAFE), Denizot relève l'articulation de cette notion à un autre réseau conceptuel, qui est celui de la sédimentation, de la forme scolaire, de la discipline. Cette

r.-Cette dernière dimension n'étant pas sans lien avec le positionnement épistémologique évoqué ci-dessus et avec 1' inscription institutionnelle de la didactique du français en sciences de l'éducation.

(6)

Ecarerina Bulea Bronckart, Christophe Ronveaux, Bruno Védrines

« réélaboration de la théorie de la transposition didactique » est considérée comme « une forme de re-création, qui ouvre un dialogue avec la théorie de la "culture scolaire" »,arrière-fond dont la réélaboration didactique permet de penser un autre ensemble de processus (secondarisation, redéfinition, contamination, perméabilité, etc.), que Denizot rassemble sous la notion de scolarisation et qui conduisent, comme par un retour du balancier, à reques- tionner le savoir scolaire, dans ses multiples rapports et transformations.

La problématique du langage et de son triple statut, objet d'enseignement, outil d'enseignement et d'apprentissage et pratique transversale aux diverses disciplines scolaires constitue également un domaine de réélaboration conceptuelle, qui porte notamment sur les notions de genre textuel dans ses rapports à l'activité, à l'enseignement, à l'apprentissage, ou encore sur celle d'outil. C'est ce que montre la contribution de Jaubert et Rebière, qui fait apparaître la différence de statut des genres textuels selon le degré d'auto- nomie ou de contextualisation disciplinaire qui est accordé à ces derniers dans l'élaboration des dispositifs didactiques d'une part, dans les concep- tions de l'apprentissage d'autre part ; mais aussi la contribution de Plane qui réinterroge les définitions et critères de définition des notions d'outils et d'instrument, notamment dans leur rapport à l'écriture.

Ces mises en réseau différentes autour ou à partir de notions considérées comme des notions clés de la discipline alimentent évidemment la recons- truction, voire la recréation des notions elles-mêmes, mais elles conduisent en même temps à percevoir la didactique du français comme l'arène d'un jeu de rapports et d'interactions entre notions, comme le cadre disciplinaire qui à la fois rend possibles ces interactions et se voit reconfiguré par elles.

La dynamique de la discipline ne se limite évidemment pas à ce niveau théorique; elle est en même temps, et ce de manière structurelle, alimentée par la« praxis ancrée» (cf 3, infra).

Élargir le spectre :

de la didactique du français à 1 'histoire de 1 'école et retour Denizot entame son dialogue sur les apports de Schneuwly en confrontant sa réflexion didactique à une notion qu'elle a théorisée et mise en œuvre dans ses propres travaux: celle de« scolarisation», [elle] form[e] avec la notion de« "culture scolaire" un appareil conceptuel cohérent, [qui] pose à la fois la spécificité de 1' institution scolaire mais également sa créativité. » Deux aspects essentiels sont mentionnés ici : spécificité de l'institution et créativité. Et il nous semble que les deux auteurs sur ce point sont en plein accord. Il s'agit en effet de s'inscrire dans une perspective théorique qui, en insistant sur la complexité du processus de la transposition didac- tique, évite une conception caricaturale de la transmission. Elle refuse

(7)

tveaux, Bruno Védrines

1e » est considérée e avec la théorie de didactique permet .rion, redéfinition, e sous la notion de ,alancier, à reques-

t transformations.

t d'enseignement, ersale aux diverses de réélaboration re textuel dans ses u encore sur celle : Rebière, qui fait tle degré d'auto- :dé à ces derniers

dans les concep- ibution de Plane .otions d'outils et

rions considérées rrment la recons-

elles conduisent

~l'arène d'un jeu disciplinaire qui :par elles.

: pas à ce niveau 1relle, alimentée

retour en confrontant mise en œuvre form[e] avec la :ent, [qui] pose sa créativité. » fe 1' institution

point sont en :tive théorique

>osition didac- m. Elle refuse

Pour ne pas conclure: pistes ouvertes pour l'avenir de la discipline 247

une compréhension limitative de l'école envisagée avant tout comme un organe d'inculcation, un vecteur de soumission à des règles, un dressage des élèves ; cette appréciation négative s'inscrit à bien des égards et sous diverses formulations dans une représentation de l'école qui n'est pas sans rappeler le fameux panoptique évoqué par Foucault dans Surveiller et punir (1975), symbole d'une société disciplinaire qui ne tient que par le contrôle social. Si Schneuwly ne peut souscrire à une telle thèse, c'est parce qu'il a manifesté un intérêt constant pour l'objet enseigné, ses interactions et transactions avec l'objet à enseigner. Dans la même logique, comme le relève fort justement Denizot, il a régulièrement attiré l'attention sur « "l'inanité de concep- tions" qui poseraient "une identité possible, voire souhaitable" entre objet de savoir et objet d'enseignement» (p. 43).

C'est dans cet esprit que l'on peut comprendre la publication d'une série de textes en collaboration avec Hofstetter, dans lesquels les deux auteurs prennent leur distance critique avec un concept trop peu euristique, trop peu historique, trop peu processuel à leur sens, celui de forme scolaire ; plus précisément, ils en discutent l'usage communément répandu dans l'espace francophone, héritage principalement de l'orientation donnée par Vincent.

Pour mieux rendre compte de la réalité scolaire, ils en viennent ainsi à proposer de substituer au concept trop limitatif de forme scolaire celui de forme école (2017, 2018).

Pourtant, en lisant la contribution de Denizot une interrogation légitime vient à l'esprit sur le gain effectif d'une telle substitution : les réticences de Schneuwly et Hofstetter ne devraient-elles pas se dissiper avec les possi- bilités offertes par le concept de culture scolaire ? Et ce d'autant plus que ce dernier éviterait l'héritage théorique lié à l'usage de forme, terme qui selon Denizot « renvoie plutôt à une configuration - pédagogique et didactique - structurante » (p. 51). Il est en effet difficile de concilier le caractère statique de la structure et l'intention affichée de donner toute sa potentialité au caractère explicatif du processus historique. Or, précisément, pour Schneuwly et Hofstetter la forme telle qu'elle a été pensée dans forme scolaire n'est pas assimilable à celle visée dans forme école. Cette différence essentielle se revendique explicitement d'un tout autre courant de pensée que celui de Vincent et des publications qui s'inscrivent dans sa continuité.

Ils écrivent : « Le syntagme "forme école" [est] retenu par analogie à ceux de forme argent, forme prix, forme marchandise, forme capital, forme nation (Balibar, 1988). » Ils ajoutent: « [il] réfère plus explicitement à une insti- tution sociale délimitée qui se constitue et est constituée par les pratiques d'acteurs qui y agissent» (2018, p. 1). La référence renvoie donc à Marx et aux auteurs qui après lui ont poursuivi une telle réflexion- Sève par exemple qui montre les apports conséquents de Marx sur cette question par rapport à la philosophie d'Aristote, de Kant, voire même de Hegel. Pour donner une

(8)

Ecaterina Bulea Bronckart, Christophe Ronveaux, Bruno Védrines

idée de la portée des développements liés à cet intérêt profond et fécond, il cite « l'impressionnant enrichissement de vocabulaire », le foisonnement conceptuel dont la forme est 1 'occasion er le foyer dans 1 'œuvre de Marx. Il en vient ainsi à la conclusion que « la "forme formée" qui a l'apparence d'une pure configuration spatiale empreinte dans une matière, ne se comprend que comme produit d'une "forme formame.., qui est essentiellement processus temporel, logique de fonctionnement et développement d'une matière : la forme essentielle est essentiellement forme de mouvement[ ... ] » (1984, p. 224). <<Processus, forme de mouvement», on mesure à quel point cette analyse er cette compréhension du concept som aux antipodes d'une pensée statique ou de Ja recherche d'invariants structurels', er on voit mieux ce qui peut inréresser Hofscerrer et Schneuwly dans une telle définition pour leur propre domaine de recherche :la forme n'esc pas une structure, mais changement radical de perspective, une opportunité de penser de manière dialectique le processus lui-même dialectique à l'œuvre dans l'enseignement.

lls empruntent au texte de Sève trois caractéristiques des formes qui leur permettent de préciser la portée de ce qu'ils entenden.t par forme école : r. Elles font partie d'une formation sociale; 2. Elles constituent des pratiques qui, par la forme qui s'impose à ces dernières, deviennent ces formes ayant trouvé leur matériau adéquat ; 3· Elles sont fondamenralemenr historiques :

« comme elles se forment elles se transforment » (p. 230) et sont sujettes à métamorphoses (wx8, p. x). Et c'est la raison pour laquelle l'association de la forme école er de la division du rravaû leur semble pertinente (Schneuwly

& Hofsretter, 2017, p. 159).

I1 ne saurait donc êrre question de reflet mécanique encre une supers- tructure et une infrastructure, mais d'un ensemble de relations encre divers facteurs décenninancs, ce qui illustre parfaitement la nécessité de considérer la transposition didactique dans ses mouvemenrs descendants er ascendants.

I1 y a ici, en l'occurrence, un point de débat intéressant avec Reuter lorsqu'il écrie dans sa contribution à cet ouvrage que les réflexions de Schneuwly tendent à privilégier une conception des effets de la discipline qui seraient engendrés « mécaniquement (ou inéluctablement) [ ... ] identiques pour cous les élèves [ ... ] massivement positifs » (p.

62).

Cerces Reuter parle ici des disciplines et non de la forme scolaire, mais Thévenaz-Chriscen a bien montré que cette dernière «esc une relation d'enseignement/apprentissage particulière, const.ruite, médiatisée par des objers disciplinaires » (wo8, p. 35). Cet aspect apparaît es entiel, car la transmission passe par la médiation systématique d'objets enseignés par les disciplines. Ce qui s'enseigne est donc le résultat: d'un «système ouvert » dynamique, complexe et contra- dictoire, puisque le processus de la transposition didactique implique «des

2.-Sève observe d'ailleurs logiquement que le structuralisme s'inscrit dans une« culture radicalement non dialectique de la forme» (1984, p. 237 ).

(9)

lX, Bruno Védrines

rnd et fécond, il e foisonnement re de Marx. Il en pparence d'une e comprend que ment processus :l'une matière :

lt [ ... ] » (1984, quel point cette les d'une pensée

1 voit mieux ce définition pour structure, mais 1ser de manière l'enseignement.

formes qui leur tr forme école : :nt des pratiques :es formes ayant :nt historiques : :t sont sujettes à l'association de :nte ( Schneuwly ltre une supers- ons entre divers té de considérer ts et ascendants.

Reuter lorsqu'il s de Schneuwly iine qui seraient :dentiques pour Reuter parle ici Christen a bien lt/ apprentissage naires » (2.oo8, par la médiation Ii s'enseigne est .plexe et contra- : implique « des

dans une « culture

Pour ne pas conclure: pistes ouvertes pour l'avenir de la discipline 2.49

acreurs sociaux distincts, pris dans des enjeux socioinstitutionnels diffé- rents» (p. 307 ). L'article de Thévenaz-Christen, en se fondant sur une prise en compte attentive de robjet enseigné, illustre de manière très convain- cante la manière dont la transposition opère à la fois dans « l'inside » et

« l' outside » pour reprendre une expression au titre de Bazerman dans cet ouvrage (p. 67 ). Dans le même esprit, on peut dire comme le montre Bazerman, que l'une des préoccupations récurrentes de Schneuwly a été de comprendre comment le développement psychique

fait

l'histoire et comment l'histoire fait le développement. Dans ce parcours intellectuel, la lecture de Vygotski et la réflexion à partir de ses textes est un élément capital. Bronckart insiste particulièrement sur ce point évoquant un intérêt commun dès le début de leur carrière pour l'œuvre de Vygotski ; les textes de Bazerman (p. 67) et Nonnon (p. 31) apportent également leur regard sur la fécondité d'une telle lecture.

On notera en outre que poser le caractère sociohistorique disciplinaire qui caractérise un système scolaire ne signifie pas qu'il soit de manière inéluctable le reflet de l'idéologie fût-elle dominante de l'institution, car précisément il y a médiation (réfraction) par la transposition didactique.

C'est ce que Nonnon relève en prenant l'exemple des séquences sur les genres oraux qui

pouvaient au départ être perçues (peut-être par malentendu) comme relevant d'une transposition didactique classique (transposant pour la classe des savoirs sur Bakhtine, les genres sociaux, ou à travers ces références un répertoire didactique hérité de la rhétorique), Schneuwly a insisté depuis longtemps sur le fait qu'il s'agissait d'un outil, dont la visée était moins l'inculcation des genres eux-mêmes que la médiatisation suscitée par leur enseignement structuré et explicite. Cette fonction d'outil sémio- tique ad' abord été développée par rapport aux élèves, aux transformations psychiques que cette médiatisation peut induire par la distance même à la pratique spontanée, par le caractère volontaire et conscient de cet appren- tissage (p. 39 ).

Enfin, les effets de la discipline ne semblent massivement ni négatifs ni positifs en soi, mais plutôt multifactoriels en fonction des situations. Etc' est cette considération précisément qui conduit Schneuwly et Hofstetter à se démarquer d'une perspective trop peu dialectique à leur sens qui sous-tend la conception de la forme scolaire que l'on trouve développée dans les textes de Vincent, mais aussi dans l'entrée du Dictionnaire des concepts fondamentaux des didactiques (2.010 ). Ils relèvent que« L'élève apparaît avant tout comme contraint, forcé, assujetti. Le potentiel libérateur, émancipateur de l'école comme lieu de développement de la personne, l'une des fonctions de cette institution, imposée aussi de haute lutte dans des combats démocratiques,

(10)

Ecaterina Bulea Bronckarr, Christophe Ronveaux, Bruno Védrines

n'apparaît pas dans le texte » (2.017, p. 157). Une telle orientation du discours, marquée dans l'article en question3 par les termes « inculquer » et

«imposition »,ferait donc trop peu de cas à leurs yeux du potentiel émanci- pateur et donc du fait que dans la lutte des classes, il y ait bien eu lutte et que dans l'histoire sociale et politique des

xrxe

et

xxe

siècles, elle ne se

soit pas invariablement conclue par une victoire écrasante des dominants.

Sinon comment comprendre les avancées indéniables des combats démocra- tiques, des luttes syndicales, des multiples mouvements sociaux ? Le système scolaire des pays capitalistes modernes reste énigmatique si l'on ne prend en compte que l'un des deux pôles de ses contradictions, de sa tension.

L'ensemble de leurs travaux communs s'emploie à montrer qu'une vision de l'école comme instrument d'une politique à vocation essentiellement oppressive s'avère en fin de compte peu explicative. Une perspective histo- rique de la longue durée, une attention portée aux divers systèmes éducatifs et de nombreuses recherches empiriques+ permettent d'éviter une caractéri- sation abstraite de l'institution, de l'enseignant-e et de l'élève. La discipline et la forme école sont donc complexes et contradictoires, parce que parties prenantes de l'histoire elles ne sont pas déterminées vers une finalité inéluc- table, mais laissent ouvert - de par la complexité même du processus de la transmission qu'il s'agit d'analyser de manière rigoureuse donc nuancée -le champ des possibles.

En somme, à la lumière de ce débat autour de la forme école et de la discipline, on perçoit mieux une caractéristique essentielle du travail de Schneuwly tout au long de ses années de recherche : un effort constant de systématisation sans lequel il n'y a pas de pensée théorique et une prise en compte fine et curieuse des pratiques. Parvenir à dégager les grandes lignes de force en œuvre dans la longe durée et rester sensible aux réalités de l'objet enseigné tout en évitant un particularisme descriptif cantonné au local et au moment est un défi intellectuel auquel Schneuwly ne s'est pas dérobé.

Une discipline scolaire, le français, et un outil disciplinant, le texte

Le dernier volet de cette conclusion aborde la notion de « discipline scolaire ». Empruntant la notion à Chervel, Schneuwly définit la disci- pline comme« un cadre d'action qui définit des contenus d'enseignement

3.-Pour être précis, il faut noter que l'article comporte une partie « éléments d'éclai- rage » qui présente les caractéristiques majeures des travaux sur la question de la forme scolaire. Mais on notera que dans la partie« problèmes, questions, débats», il n'est pas fait mention d'une critique de la tendance restrictive du concept (vision négative de l'école), hormis l'unique et rapide indication renvoyant à Thévenaz-Christen (20o8).

4.-Parmi d'autres, on peut en citer deux qui ont mobilisé des équipes importantes et ont été codirigées par Schneuwly (2009, 2018).

(11)

veaux, Bruno Védrines

Ue orientation du s « inculquer » et . potentiel émanci-

~it bien eu lutte et ' siècles, elle ne se te des dominants.

:ombats démocra- ciaux ? Le système

~ si l'on ne prend ns, de sa tension.

:rer qu'une vision n essentiellement perspective histo- :ystèmes éducatifs iter une caractéri- lève. La discipline

parce que parties ne finalité inéluc- lu processus de la ionc nuancée -le me école et de la :Ile du travail de ffort const~nt de Le et une prise en les grandes lignes réalités de l'objet nné au local et au pas dérobé.

de « discipline définit la disci- : d'enseignement

« éléments d' éclai- juestion de la forme iébats »,il n'est pas (vision négative de -Christen (2oo8).

: importantes et ont

Pour ne pas conclure: pisres ouverres pour l'avenir de la discipline

censés transformer par leur appropriation les modes de penser, de parler et d'agir des élèves, et des moyens et démarches à disposition de l'enseignant» (Schneuwly, 2009). L'expression« modes de penser, de parler et d'agir»

fera école. Les travaux rassemblés dans ce volume attestent d'un question- nement à trois niveaux.

Premier niveau : la discipline scolaire français comme système de composantes (la « configuration disciplinaire », Reuter). Ce premier niveau questionne les éléments d'une discipline et comment ces éléments font système: quels sont les liens entre ces éléments (autonomie ou non du domaine de la grammaire pour travailler la compréhension des textes, aspect discuté par Riestra ou par Simard) ? ~els rapports hiérarchiques entre- tiennent-ils entre eux (priorité à la production de texte pour apprendre à lire, place de l'oral dans un système disciplinaire orienté tout entier sur l'écrit et l'orthographe, problème abordé par Nonnon; place de la ponctuation, abordée par Bain) ?

Deuxième niveau : la discipline scolaire comme travail qui se définit par la panoplie des instruments de cette discipline. Ce deuxième niveau questionne les manières de faire de l'enseignant lorsqu'il met à disposition des élèves des objets d'enseignement au moyen de dispositifs : quelle est l'unité de travail par laquelle un enseignant organise et structure son objet à enseigner? Par quels gestes spécifiques s'accomplit la transformation d'un objet à enseigner en objet enseigné (les gestes didactiques, Dufays) ?

Troisième niveau : la discipline scolaire est le produit d'une histoire.

Ce troisième niveau questionne les transformations de la discipline et les significations culturelles déposées par celle-ci dans ses objets : quelles traces du passé dans les formes et modèles d'aujourd'hui ( « culture scolaire », Denizot) ?

Ces niveaux de questionnement s'accompagnent d'un inlassable travail de mise à l'épreuve de l'empirie d'un appareil notionnel et méthodolo- gique spécifiquement didactique qui tend à s' autonomiser des métho- dologies des disciplines contributoires (l'herméneutique, l'analyse des interactions verbales, les mesures par les tests d'entrée et de sortie, etc.).

Des empiries importantes centrées sur l'objet d'enseignement, comme le montrent les contributions Garcia Debanc et De Pietro, explorées à l'aune d'une seule question: qu'est-ce qui s'enseigne en classe ? Un empan large qui s'étend sur plusieurs niveaux scolaires pour saisir les effets de la dis ci- plination. La création et théorisation d'outils de traitement des données:

le synopsis, l'approche multifocale, l'analyse de la tâche. La compa- raison comme démarche fondamentale pour rendre compte de la varia- bilité des facteurs spécifiquement didactiques dans la transformation des objets d'enseignement.

(12)

Ecaterina Bulea Bronckart, Chrisrophe Ronveaux, Bruno Védrines

Bibliographie bibliographiques

Hofstetter, R. (wu). La transformation de l'enfant en écolier (du 19' au milieu du 20' siècle): les« eurêkas »des sciences de l'homme naissantes, entre scientisme et romantisme: un « naturalisme» de l'enfance. Paedagogica Historica: Inter- national journal of the History ofEducation, 4S (I), 31-50.

Hofstetter, R. & Schneuwly, B. (2014). Disciplinarisation et disciplination consubs- tantiellement liées. Deux exemples prototypiques sous la loupe : les sciences de l'éducation et les didactiques des disciplines. In B. Engler (Éd.), Disziplin - Discipline (p. 27-46). Fribourg: Academie Press.

Hofstetter, R. & Schneuwly, B. ( 2017 ). Les manuels comme emblemes des reconfi- gurations disciplinaires de la forme école au I9' siee le. Essai historiographique.

paraître).

Hofsretter, R. & Schneuwly, B. (wr8). Métamorphoses et contradictions de la forme école au prisme de la démocratie. In Variations autour de la « forme scolaire » : mélanges offerts à André D. Robert (p. 27-49 ). Nancy : Presses universitaires de Nancy.

Reuter, Y., Cohen-Nazria, C., Daunay, B., Delcambre, I. & Lahanier-Reuter, D.

(wro). Dictionnaire des concepts fondamentaux des didactiques. Bruxelles: De Boeck.

Ronveaux, C. & Schneuwly, B. (2018). Lire des textes réputés littéraires : discipli- nation et sédimentation. Enquête au fil des degrés scolaires en Suisse romande.

Berne : Peter Lang.

Schneuwly, B. (wo7). Le« Français»: une discipline scolaire autonome, ouverte et articulée. In E. Falardeau, C. Fisher, C. Simard & N. Sorin (Éd.), La didac- tique du fançais : les voies actuelles de la recherche (p. 9-2 7). Sainte-Foy : Presses de l'université de Laval.

Schneuwly, B. (2009 ). « Socioculturel » : de l'utilité d'un terme polysémique pour redécouvrir des couches fondatrices de la didactique du français et pour esquisser des chantiers de recherche indispensables. In B. Daunay, I. Delcambre, Y. Reuter (Éd), Didactique du fançais, le socioculturel en question (p. 69-81).

Presses universitaires du Septentrion.

Schneuwly, B. & Dolz,]. (2009 ). Des objets enseignés en classe de fançais. Rennes : Presses universitaires de Rennes.

Schneuwly, B. & Hofstetter, R. ( 2017 ). Forme scolaire, un concept trop séduisant ? In A. Dias-Chiaruttini & C. Cohen-Azria (Éd.), Théories-didactiques de la lecture et de l'écriture (p. 153-167 ). Villeneuve d'Ascq : Presses universitaires du Septentrion.

Thévenaz-Christen, Th. (wo8). Au cœur de la forme scolaire, la discipline.

L'exemple du français parlé. Revue suisse des sciences de l'éducation, JO, 299-324.

Références

Documents relatifs

D'autres mesures vont dans le bon sens : en décidant la création, sur plusieurs années, de mille deux cents places de semi-liberté, la chancellerie a indiqué clairement qu'il

Avec cinq graduations intermédiaires au minimum, celui-ci donne 40 configurations possibles qui incluent les deux qui viennent d’être mentionnées.. Pour L variant de 24

La cour a estimé que la rétractation du vendeur et le retrait du bien de la vente avait eu pour effet de rendre sans objet la première décision de préempter de la SAFER et que, par

Non seulement les femmes enceintes dont la consommation d’alcool serait problématique sont très rares dans les consultations[15], mais surtout aucun professionnel du suivi de

Le « criminel », pas plus que la victime, n’est qu’affaire de droit ; si celui-ci énonce, en conséquence d’un usage toujours instable, la criminologie, a à faire,

Des facteurs extrinsèques tels que le rôle de l’enseignant ou des notes obtenues inter- viennent dans l’éveil de l’intérêt ou dans l’intérêt actuel et confirment

L’enjeu est donc crucial, et c’est pour réfléchir à l’avenir de la Zone euro que le Centre de compétences Dusan Sidjanski en études européennes a réuni

Tout ce qui peut faire obstacle sur les voies biliaires tels que des obstacles au niveau du pancréas ou des ganglions au niveau du hile hépatique, peut se traduire par un