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Prise en charge et prévention de l'asthme chez les enfants âgés de plus de cinq ans (Global initiative for asthma, mise à jour)

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mai-juin 2016

QUE SAIT-ON SUR L’ASTHME ?

Les définitions (symptômes, exacerba- tions, contrôle, paliers) sont communes aux diverses tranches d’âges au-dessus de cinq ans.

Comme plus tôt dans la vie, l’asthme provoque surtout un wheezing, une res- piration courte et une striction thora- cique. Ces symptômes sont dus à une bronchoconstriction et à un épaississe- ment des parois bronchiques. Il est pos- sible d’observer des variations du flux aérien chez l’individu normal, mais celles-ci sont beaucoup plus impor- tantes chez l’asthmatique.

Heureusement, la plupart des asth- matiques peuvent être traités et contrô- lés de façon satisfaisante : absence de symptômes diurnes et nocturnes ; utili-

sation faible ou absence d’utilisation des médicaments de secours ; vie et ac- tivité physique normales ; fonction res- piratoire normale ou proche de la nor- male ; absence d’événements sérieux (exacerbations ou crises d’asthme).

Chez les patients, en particulier ceux qui sont non ou mal contrôlés, les causes qui déclenchent les crises sont globalement les mêmes que chez les en- fants âgés de moins de cinq ans : infec- tions virales, allergènes domestiques (acariens pollens, blattes), fumée de ta- bac, exercice physique, stress. Chez cer- tains patients (principalement les adultes mais pas toujours), certains mé- dicaments comme l’aspirine, les anti-in- flammatoires non stéroïdiens (AINS), les bêta-bloquants sont des facteurs dé- clenchants.

Comme à tous les âges de la vie, le traitement procède par paliers adaptés

à chaque patient, compte tenu des mé- dicaments disponibles, de leur profil de sécurité et de leur coût. A tout âge, les corticoïdes inhalés (CI) sont la base du traitement de fond, car ils diminuent la fréquence et la sévérité des symptômes et le risque d’exacerbation. De nom- breux témoignages émanant de per- sonnes ordinaires ou hors du commun (comme les athlètes olympiques) mon- trent que l’on peut très bien vivre avec un asthme.

FAIRE LE DIAGNOSTIC D’ASTHME

Le GINA 2015 fournit un récapitulatif clinique (tableau I) du diagnostic de

L’asthme concerne environ 300 millions de personnes dans le monde et c’est un important problème de santé publique qui affecte tous les âges.

Depuis plus de trente ans, on observe une forte augmentation de sa pré- valence dans la plupart des pays, à l’origine d’une morbidité et de coûts de santé élevés. La mise à jour 2015 du GINA a pour but d’informer les pédiatres, les pneumologues et tous les médecins susceptibles de prendre en charge des patients asthmatiques. Elle est également desti- née aux divers professionnels de santé et peut être utile aux familles.

Cette mise à jour ne fait pas de distinction entre les enfants âgés plus de cinq ans et les adultes. Cette absence de distinction est justifiée car de nombreux points sont communs aux différents âges de la vie. Pour le diagnostic et la prise en charge de l’asthme chez les enfants âgés de cinq ans et moins, nous renvoyons le lecteur à l’article précédemment publié dans Médecine et enfance qui rendait compte de la mise à jour 2015 du GINA concernant cette tranche d’âge

(1)

.

G. Dutau,allergologue, pneumologue, pédiatre, Toulouse

(1)DUTAU G. : « Diagnostic et prise en charge de l’asthme chez les enfants âgés de cinq ans et moins : GINA, mise à jour », Méd.

Enf.,2016 ; 36 :57-62.

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mai-juin 2016

ments thoraciques à l’expiration (whee- zing), surtout en expiration forcée.

La toux isolée peut être un symptôme d’asthme (« toux équivalent d’asth- me »). Ce diagnostic sera retenu après avoir éliminé les autres causes de toux : syndrome ORL isolé (« post-nasal drip »), sinusite chronique, reflux gas- tro-œsophagien, bronchite à éosino- philes, dysfonctionnement des cordes vocales, ce dernier étant toutefois asso- cié à l’asthme dans 50 % des cas.

ÉVALUATION DU PATIENT ASTHMATIQUE

Il faut profiter de toutes les occasions pour évaluer les enfants asthmatiques, l’asthme. Le diagnostic repose sur une

histoire clinique faite de symptômes respiratoires variables (toux, wheezing, respiration courte, striction thoracique) et sur l’existence d’une réduction du flux aérien documentée par l’explora- tion fonctionnelle respiratoire (EFR) : débit expiratoire de pointe (DEP), volu- me expiratoire maximal par seconde (VEMS), capacité vitale (CV). Il faut sa- voir qu’il est plus facile de confirmer le diagnostic d’asthme avant d’avoir com- mencé le traitement que lorsque celui-ci est déjà mis en place. Les critères du diagnostic d’asthme sont résumés dans le tableau II.

L’examen clinique de l’asthmatique est souvent normal. Le symptôme le plus commun est la perception de siffle-

Tableau I

Algorithme du diagnostic de l’asthme

Patients avec symptômes respiratoires Les symptômes sont-ils typiques de l’asthme ?

Interrogatoire et examen cliniques détaillés pour le diagnostic d’asthme L’interrogatoire et l’examen cliniques sont-ils

compatibles avec le diagnostic d’asthme ?

Effectuer une spirométrie ou un débit expiratoire de pointe avec test de réversibilité

Les résultats sont-ils compatibles avec le diagnostic d’asthme ?

Traitement de l’asthme

Poursuivre l’interrogatoire et les examens à la recherche

d’autres diagnostics D’autres diagnostics sont-ils

confirmés ?

Répéter une autre fois ou prévoir d’autres examens Le diagnostic d’asthme

est-il confirmé ?

Envisager un essai de traitement pour le diagnostic le plus probable ou demander des investigations supplémentaires – Traitement

d’épreuve par CI et B2CA

– Evaluer la réponse – Tests de diagnostic

dans 1-3 mois

Traitement des autres diagnostics Urgence clinique et

autres diagnostics improbables

oui

oui

oui oui

non

non non oui

non

en particulier lorsqu’ils sont symptoma- tiques, après une exacerbation récente, lors d’une demande de prescription, etc.

Les points clés sont les suivants : – évaluer le contrôle : symptômes au cours des dernières quatre semaines ; identification des facteurs de risque ; mesure de la fonction respiratoire (avant de commencer le traitement,

Tableau II

Signes et symptômes pour porter le diagnostic d’asthme

1. Une histoire clinique faite de symptômes respiratoires variables

Les signes typiques sont le wheezing, la respiration courte, une sensation de striction thoracique, une toux

Les patients présentent souvent plusieurs de ces symptômes

Les symptômes varient dans le temps et en intensité

Ils sont plus importants la nuit

Ils sont provoqués par l’exercice, le rire, l’inhalation d’allergènes, souvent d’air froid, les infections virales (aggravation)

2. Réduction du flux aérien inspiratoireDiminution du rapport VEMS/CV (valeurs

normales > 0,70-0,80 chez l’adulte, > 0,90 chez l’enfant)

Rechercher une augmentation du flux expiratoire sous B2CA (tests de réversibilité de l’obstruction bronchique) :

– augmentation du VEMS > 12 % et 200 ml (> 12 % par rapport aux valeurs prédites chez l’enfant)

– variations diurnes du DEP > 10 % (> 13 % chez l’enfant)

– augmentation du VEMS > 12 % et 200 ml par rapport aux valeurs basales (> 12 % par rapport aux valeurs prédites chez l’enfant) après 4 semaines de CI en l’absence d’infection virale

Plus les variations sont importantes, plus le diagnostic d’asthme est confirméIl peut êre nécessaire de répéter les EFR au

cours des symptômes, tôt le matin ou après arrêt du traitement bronchodilatateurLa réversibilité peut être absente au cours

des exacerbations sévères

EFR : exploration fonctionnelle respiratoire.

VEMS : volume expiratoire maximal par seconde.

CV : capacité vitale. DEP : débit expiratoire de pointe. B2CA : bêta-2-agoniste de courte durée d’action. CI : corticoïde inhalé.

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mai-juin 2016 puis trois à six mois plus tard, puis pé-

riodiquement) ;

– préciser les particularités du traite- ment : existe-t-il des effets indésirables des médicaments antiasthmatiques, vé- rifier les techniques d’inhalation, insis- ter sur l’importance d’une bonne adhé- sion au traitement ;

– rechercher des comorbidités : rhinite, rhinosinusite, reflux gastro-œsopha- gien, obésité, dépression, anxiété…

Le GINA 2015 précise comment éva- luer le niveau de contrôle de l’asthme et les facteurs de risque d’évolution défa- vorable.

Pour le niveau de contrôle, on se fonde sur quatre critères :

– symptômes diurnes plus de 2 fois par semaine ;

– tout réveil nocturne pour asthme ; – nécessité de prendre un traitement de secours plus de 2 fois par semaine ; – toute limitation d’activité due à l’asthme.

L’asthme est bien contrôlé s’il n’existe aucun de ces symptômes, partiellement contrôlé s’il en existe un à deux, non contrôlé s’il en existe trois à quatre.

Avoir un ou plusieurs des facteurs de risque suivant augmente le risque d’exacerbation, même si le patient est bien contrôlé :

– mauvaise adhésion aux CI ; – technique d’inhalation incorrecte ; – forte utilisation des bêta-2-agonistes de courte durée d’action (B2CA) ; – VEMS < 60 % ;

– allergie alimentaire (2).

L’évaluation d’un patient non contrô- lé comporte :

– l’examen du patient en train d’utiliser son système d’inhalation ;

– la confirmation du diagnostic d’asthme ; – l’élimination des facteurs de risque potentiels ;

– la prise en considération d’un passage au palier thérapeutique supérieur.

En cas d’asthme sévère, il faut adresser le patient à un spécialiste s’occupant des asthmes difficiles à traiter et à équi- librer, dits « asthmes difficiles », qui existent à tous les âges.

PRISE EN CHARGE DE L’ASTHME

Le GINA 2015 reprend les grands prin- cipes du traitement (partenariat entre le patient, la famille et les dispensateurs de soins), le traitement visant à obtenir le contrôle de l’asthme tout en minimisant les risques médicamenteux (médica- ments de fond et traitement de secours, traitements non pharmacologiques, au- togestion de l’asthme). Un schéma en forme de cercle (« control-based mana- gement cycle ») illustre la trilogie « éva- luation-ajustement du traitement-éva- luation de la réponse à celui-ci ».

TRAITEMENT DE FOND INITIAL

Un traitement de fond régulier doit être commencé aussitôt le diagnostic porté.

L’administration précoce de CI améliore la fonction respiratoire. Le risque d’exa- cerbation est plus important chez les pa- tients qui ne prennent pas de CI. Plus tôt le patient est soustrait aux allergènes, meilleur est le pronostic. L’administra- tion de doses faibles de CI est recom- mandée dès lors qu’il existe des symp- tômes diurnes plus de deux fois par mois et des symptômes nocturnes plus d’une fois par mois. Si les jours avec symp- tômes sont majoritaires et que les réveils nocturnes dus à l’asthme surviennent une nuit par semaine ou plus, il faut dé- buter à un palier supérieur, avec des doses de CI moyennes ou fortes, asso- ciées ou non aux bêta-2-agonistes de longue durée d’action (B2LA). Un traite- ment par les corticoïdes oraux est indi- qué au début du traitement de l’asthme sévère non contrôlé, suivi par des doses fortes de CI, associées ou non aux B2LA.

Le tableau III indique des doses faibles, moyennes et fortes des divers CI.

PRISE EN CHARGE PAR PALIERS

Lorsque le traitement est mis en place, les décisions thérapeutiques sont basées Tableau III

Doses journalières de corticoïdes inhalés basses, moyennes, fortes (microgrammes)

Enfants 6-11 ans Adultes et adolescents

Corticoïde inhalé Dose basse Dose moyenne Dose forte Dose basse Dose moyenne Dose forte

Dipropionate de béclométasone (CFC) (1) 100-200 > 200-400 > 400 200-500 > 500-1000 > 1000 Dipropionate de béclométasone (HFA) (2) 50-100 > 100-200 > 200 100-200 > 200-400 > 400

Budésonide (IPS)(3) 100-200 > 200-400 > 400 200-400 > 400-800 > 800

Nébulisations de budésonide 250-500 > 500-1000 > 1000

Ciclésonide (HFA) 80 > 80-160 > 160 80-160 > 160-320 > 320

Propionate de fluticasone (IPS) 100-200 > 200-400 > 400 100-250 > 250-500 > 500

Propionate de fluticasone (HFA) 100-200 > 200-500 > 500 100-250 > 250-500 > 500

Furoate de mométasone 110 220-< 440 440 110-220 > 220-440 > 440

Acétonide de triamcinolone 400-800 > 800-1200 > 1200 400-1000 > 1000-2000 > 2000

(1) CFC : chlorofluorocarbone (gaz propulseur). (2) HFA : hydrofluoroalkane (gaz propulseur). (3) IPS : inhalateur de poudre sèche.

(2)L’allergie alimentaire est un facteur de risque d’asthme aigu grave (AAG). Une étude cas/témoins a comparé 19 enfants (13 garçons), âgés en moyenne de 10 ans (1-16 ans), admis en uni- té de soins intensifs pour AAG nécessitant une ventilation artifi- cielle, à 38 témoins (2 témoins par patient) qui avaient présenté une exacerbation d’asthme sans risque vital. Les deux facteurs in- dépendants de risque d’asthme mortel étaient l’allergie alimen- taire (OR : 9,85 [1,04-93,27]) et les admissions fréquentes pour asthme (OR 5,89 [1,06-32,61]). Voir : Roberts G. et al., « Food aller- gy as a risk factor for life-threatening asthma in childhood : a case- controlled study », J. Allergy Clin. Immunol.,2003 ; 112 :168-75.

(4)

mai-juin 2016 sur un cycle où se succèdent évaluation,

ajustement du traitement et réévalua- tion selon la méthode des paliers. Les caractéristiques des principaux paliers sont les suivantes :

palier 1 : B2CA à la demande sans traitement de fond (symptômes peu fré- quents, pas de réveil nocturne, pas d’exacerbation au cours de l’année écoulée, VEMS normal) ;

palier 2 : CI à doses régulières et B2CA à la demande (l’option des anti- leucotriènes à la place des CI est moins efficace). L’association CI-B2LA amélio- re plus rapidement les symptômes et la fonction pulmonaire que les CI seuls, mais ne réduit pas le nombre des exa- cerbations. Au cours de l’asthme polli- nique isolé, commencer les CI dès le dé- but de la saison et les arrêter 4 se- maines après la fin de celle-ci (3);

palier 3 : stratégie « association fixe formotérol-CI à faible dose en poudre en traitement de fond et traitement de secours » versus stratégie « association fixe B2LA-CI à dose moyenne en traite- ment de fond et B2CA à la demande ».

Autres options : dose moyenne de CI ou, pour les enfant de six à onze ans, dose moyenne de CI ou faible dose de CI-B2LA ;

palier 4 : CI-formotérol en traitement de fond et traitement de secours, ou do- se moyenne de CI-B2LA en traitement de fond et B2CA à la demande. Autres options : tiotropium (4)par inhalation (à partir de dix-huit ans), théophylline re- tard (adultes). Chez l’enfant de six à on- ze ans, on conseille les CI à dose moyen- ne et la consultation d’un spécialiste ;

palier 5 : nécessité d’un avis d’expert pour l’éventuelle indication des anti-IgE (omalizumab). Autres options : tiotro- pium (à partir de dix-huit ans). Certains patients nécessitent un traitement par corticoïdes au long cours.

Plusieurs points clés sont importants dans la pratique quotidienne :

revoir les patients 1 à 3 mois après le début du traitement, puis tous les 3 à 12 mois par la suite ;

après une exacerbation, revoir le pa- tient dans la semaine qui suit ;

la fréquence des visites dépend de la

gravité de l’asthme, du niveau de contrôle, de la réponse au traitement, du niveau d’autogestion du malade ;

l’asthme étant une maladie aux symptômes variables dans le temps, il faut ajuster le traitement à la hausse si les symptômes s’aggravent malgré le traitement initial, ou à la baisse dans le cas inverse.

Les paliers ascendantsvarient selon la nature de l’aggravation :

palier prolongé durant 2 ou 3 mois si les symptômes ou les exacerbations per- sistent depuis 2 ou 3 mois malgré le traitement de fond initial, après avoir écarté une technique d’inhalation incor- recte, une mauvaise adhésion au traite- ment, des facteurs de risque modi- fiables (tabagisme actif ou passif), une comorbidité (rhinite allergique) ;

palier court de 1 à 2 semaines en rai- son d’une infection virale intercurrente ou d’une exposition transitoire aux al- lergènes par exemple ;

ajustement du traitement au jour le jour par le patient lui-même.

Ces divers paliers doivent être précisé- ment transcrits sur le plan d’action écrit.

Les paliers descendantssont envisagés lorsqu’un bon contrôle de l’asthme est obtenu et se maintient depuis 3 mois.

L’objectif est de rechercher le traite- ment minimal utile pour contrôler à la fois les symptômes et les exacerbations, et minimiser le risque des effets indési- rables du traitement. Il faut choisir le moment approprié pour diminuer le traitement (en dehors de toute infec- tion, d’un voyage…), évaluer le statut respiratoire basal (effectuer une EFR), fournir un plan d’action écrit, indiquer la date de la prochaine consultation. La dose de CI pour les 2 à 3 mois à venir doit être comprise entre 25 % et 50 % de la dose précédente. Il ne faut jamais arrêter complètement les CI (chez l’ado- lescent ou l’adulte), sauf de façon tem- poraire si cela est nécessaire pour confirmer le diagnostic d’asthme (5).

CONTRÔLE DE L’ADHÉSION AU TRAITEMENT ET ÉDUCATION

Le GINA 2015 insiste sur l’importance de vérifier le bon maniement des sys-

tèmes d’inhalation et de s’assurer de l’adhésion du patient à son traitement, ces notions débouchant sur l’éducation de l’asthmatique, qui se fait (et se com- plète) à chaque visite.

L’entraînement à l’utilisation des systèmes d’inhalationsuppose : le meilleur choix pour chaque patient ; la vérification de la technique d’inhalation à chaque visi- te, plusieurs fois si nécessaire (voir www.ginasthma.org et www.admit- inhalers.org).

L’adhésion au traitement est capitale à obtenir, sachant qu’environ 50 % des patients ne prennent pas régulièrement leur traitement de fond tel qu’il est pres- crit. Il faut savoir que cette mauvaise adhésion au traitement de fond, asso- ciée à la persistance de symptômes et à un mauvais contrôle, peut être involon- taire (tendance à l’oubli, coût trop éle- vé, incompréhension) ou intentionnelle (absence de perception de l’importance du traitement, crainte des effets secon- daires, problèmes culturels, etc.). La mise au point 2015 donne des critères qui permettent d’identifier ces patients, parmi lesquels cette question qui peut être posée avec emphase par le méde- cin : « La plupart des patients ne pren- nent pas leur traitement inhalé exacte- ment comme il a été prescrit. Au cours des 4 dernières semaines, combien de jours par semaine avez-vous pris votre traitement : 0, 1, 2… ? ». Il est impor- tant d’apprécier les comportements et les croyances vis-à-vis de l’asthme. Il convient de signaler l’existence de quelques études sur les moyens de re- médier à une mauvaise adhésion au

(3)Le GINA 2015 aborde le traitement de l’asthme pollinique isolé. Conformément aux positions de certains pays anglo- saxons, il ne cite pas l’immunothérapie spécifique. Plus loin, il in- dique que, quoique les allergènes constituent un facteur déclen- chant chez les asthmatiques sensibilisés, les stratégies d’éviction sont complexes et coûteuses, et que certaines d’entre elles ne sont pas validées. Cela ne correspond pas à la position de plu- sieurs pays qui prônent l’immunothérapie spécifique vis-à-vis des pollens ou des acariens lorsque le traitement initial ne per- met pas de contrôler les symptômes de rhinite et/ou d’asthme allergique. Il en est de même pour l’éviction des acariens, qui doit s’inscrire dans le cadre d’une stratégie préventive globale.

(4)Bromure de tiotropium, antagoniste spécifique des récep- teurs muscariniques de longue durée d’action (Spiriva®).

(5)C’est un cas de figure peu fréquent, car la plupart de ces pa- tients ont un asthme reconnu. Une surveillance étroite doit être prévue ainsi que le traitement lors de la reprise (attendue) des symptômes.

(5)

mai-juin 2016 traitement : discussion des choix de

traitement et des doses avec le patient ; système de rappel des doses oubliées ; traitement de fond le plus simple pos- sible (une seule dose au lieu de deux) ; visites d’infirmières à domicile dans le cadre de programmes d’éducation de l’asthmatique et de sa famille…

TRAITEMENT DES FACTEURS MODIFIABLES

Afin de diminuer les risques d’exacerba- tions, le GINA 2015 cite en particulier : l’autogestion guidée par des plans écrits, qui doivent être précis mais com- préhensibles ; l’évitement de l’exposi- tion à la fumée de tabac ; l’éviction des aliments incriminés en cas d’allergie ali- mentaire. Les patients atteints d’asthme sévère doivent obligatoirement être vus par un spécialiste pour un suivi spéciali- sé (expectoration induite).

STRATÉGIES ET INTERVENTIONS NON MÉDICAMENTEUSES

Elles sont de nature à obtenir un meilleur contrôle : proposer un sevrage tabagique ; éliminer le tabagisme pas- sif ; encourager une activité physique régulière ; prévenir l’asthme d’effort.

Important : Le GINA 2015 considère que, bien que les allergènes constituent un facteur déclenchant chez les asthma- tiques sensibilisés, les stratégies d’évic- tion sont complexes et coûteuses, et que certaines ne sont pas validées. Cette pri- se de position va à l’encontre des me- sures de lutte (logiques) contre les al- lergènes intérieurs et extérieurs prati- quées dans plusieurs pays (dont le nôtre) avec des résultats tangibles.

PATHOLOGIES ET POPULATIONS PARTICULIÈRES

Les principales recommandations figu- rent dans le tableau IV.

EXACERBATIONS

Une exacerbation (anciennement en France « attaque d’asthme » ou « état de mal asthmatique ») est une aggrava- tion aiguë ou subaiguë des symptômes d’asthme. Elle peut inaugurer la mala-

die. Le traitement des exacerbations est un continuum depuis l’autogestion par le patient possédant un plan écrit jusqu’au traitement des symptômes plus sévères aux urgences d’un centre hospitalier.

Le GINA 2015 donne quelques indica- tions pour identifier les patients ayant un risque de mort par asthme : antécé- dents « d’asthme presque mortel » né- cessitant intubation et ventilation ; hospitalisation aux urgences pour asth- me au cours des 12 derniers mois ; uti- lisation peu fréquente de CI et/ou faible adhésion aux CI ; usage habituel et/ou arrêt récent d’une corticothéra- pie par voie générale ; utilisation ex- cessive de B2CA ; absence de plan écrit ; antécédents d’affection psychia-

trique ou problèmes psychosociaux ; allergie alimentaire confirmée chez un asthmatique.

PLANS D’ACTION ÉCRITS

Les plans écrits permettent de faciliter la prise en charge de l’asthme par le pa- tient lui-même (autogestion). Un plan écrit est basé sur l’évolution des symp- tômes et du DEP. Il doit inclure :

les médicaments habituels du patient ;

quand et comment augmenter les doses ;

quand commencer un traitement par les corticoïdes par voie générale ;

comment accéder aux soins en l’ab- sence de réponse au traitement.

Les patients qui ont des crises soudaines et graves, ou ceux dont les symptômes Tableau IV

Principales recommandations dans les cas particuliers

Pathologies Mesures principales

Rhinosinusite La rhinosinusite aggrave l’asthme. Chez certains patients, les corticoïdes intra-nasaux améliorent le contrôle de l’asthme.

Obésité L’asthme est plus difficile à contrôler chez l’obèse. Dès une diminution du poids de 5 à 10 %, le contrôle de l’asthme est amélioré.

Reflux gastro- Le GINA 2015 estime que le traitement d’un RGO asymptomatique œsophagien (RGO) n’améliore pas les symptômes d’asthme. Le traitement du RGO doit être

envisagé si le RGO le nécessite.

Anxiété et dépression Fréquentes chez les patients asthmatiques, elles aggravent l’asthme.

L’avis d’un spécialiste peut être nécessaire pour distinguer les symptômes d’anxiété et ceux de l’asthme.

Asthme à l’aspirine L’imputation d’une exacerbation à la prise d’aspirine ou d’AINS sera confirmée par un test de provocation dans un centre spécialisé comportant une unité de réanimation. L’éviction (aspirine, AINS) est indispensable. Le traitement est basé sur les CI, mais les corticoïdes par voie générale peuvent être nécessaires. Une désensibilisation peut être efficace.

Allergie Le GINA 2015 estime que l’AA est rarement la cause principale d’un alimentaire (AA) asthme. Par contre, une AA confirmée est un facteur de risque d’asthme

grave et de décès par asthme. Un bon contrôle de l’asthme est capital.

Les patients doivent avoir un plan écrit de traitement de l’anaphylaxie comportant des mesures d’éviction et l’injection IM d’adrénaline.

Chirurgie Un bon contrôle de l’asthme est indispensable avant une intervention chirurgicale. Les patients recevant des CI à forte dose depuis longtemps ou ayant pris des corticoïdes per os plus de 2 semaines au cours des 6 derniers mois doivent recevoir une injection d’hydrocortisone durant l’intervention pour diminuer le risque d’insuffisance surrénalienne.

(6)

Tableau V

Prise en charge en première intention des exacerbations de l’asthme

Patient se présentant avec une exacerbation aiguë ou subaiguë

Evaluer le patient – Est-ce de l’asthme ?

– Rechercher des facteurs de risque de décès par asthme – Estimer la sévérité de l’exacerbation

Exacerbation sévère

Le patient parle uniquement en faisant des mots, est assis penché en avant, est agité ; rythme respiratoire > 30/mn ; utilisation des

muscles respiratoires accessoires ; pouls > 120/mn ; SaO2en air ambiant < 90 % ;

DEP 50 % des valeurs prédites ou des meilleures valeurs du sujet

Exacerbation avec risque vital Somnolence, confusion ou silence respiratoire

Transfert urgent en unité de soins intensifs En attendant, donner B2CA par inhalation et

bromure d’ipratropium, O2, corticoïdes par voie générale

Exacerbation légère ou modérée Le patient parle en faisant des phrases, préfère

être assis plutôt qu’allongé, n’est pas agité ; rythme respiratoire accéléré ; absence d’utilisation des muscles respiratoires accessoires ; pouls 100-120/mn ; SaO2en air

ambiant 90-95 % ; DEP > 50 % des valeurs prédites ou des meilleures valeurs du sujet

Commencer le traitement

– B2CA : 4 à 10 bouffées par chambre d’inhalation à répéter toutes les 20 mn pendant 1 h

– Prednisolone : 1 mg/kg au maximum 50 mg/j chez l’adulte, 1-2 mg/kg au maximum 40 mg/j chez l’enfant

– Contrôle de la SaO2(si possible) : cibler 93-95 % chez l’adulte, 94-98 % chez l’enfant

Continuer le traitementavec les B2CA à la demande Evaluer la réponse au bout d’une heure (ou plus tôt)

Evaluation en vue du retour au domicile – Symptômes : amélioration, B2CA non nécessaires

– DEP : amélioration et > 60-80 % des valeurs personnelles ou des valeurs prédites

– SaO2> 94 % en air ambiant – Ressources adéquates au domicile

Dispositions pour le retour au domicile – Traitement de secours : à poursuivre à la demande

– Traitement de fond : selon le cas, à commencer ou à passer au palier supérieur ; évaluer la technique d’inhalation et l’adhésion au traitement

– Prednisolone : à poursuivre 5-7 jours chez l’adulte, 3-5 jours chez l’enfant

– Visite de suivi à programmer dans 2 à 7 jours

Suivi

– Traitement de secours : à poursuivre à la demande

– Traitement de fond : continuer à la dose la plus élevée à court terme (1-2 semaines) ou à long terme (3 mois) en fonction du type de l’exacerbation

– Facteurs de risque : vérifier et corriger les facteurs de risque modifiables qui ont pu contribuer à l’exacerbation, y compris la technique d’inhalation et l’adhésion au traitement

– Plan d’action : est-il compris ? est-il utilisé de façon appropriée ? nécessite-t-il des modifications ?

Amélioration

Aggravation

Aggravation

DEP : débit expiratoire de pointe. B2CA : bêta-2-agoniste de courte durée d’action.

mai-juin 2016

(7)

mai-juin 2016 s’aggravent rapidement, devront se

rendre immédiatement dans une unité de soins urgents ou chez leur médecin.

Les modifications conseillées dans les plans d’action écrits comportent :

une augmentation de la dose des CI (plus ou moins importante, jusqu’à 2 000mg/j) ;

une augmentation de la dose des mé- dicaments symptomatiques (qui peut aller jusqu’à 4 fois les doses) ;

la mise en place d’une corticothérapie par voie générale (enfants : 1-2 mg/kg/j, sans dépasser 40 mg/j, pendant 3 à 5 jours).

PRISE EN CHARGE EN PREMIÈRE INTENTION, AU CABINET

OU À L’HÔPITAL

Le GINA 2015 recommande les actions suivantes :

estimer la sévérité de l’exacerbation en commençant le traitement par B2CA et oxygène (si disponible) : dyspnée (possibilité pour le patient de pronon- cer des phrases ou seulement des mots), rythme respiratoire, rythme cardiaque, SaO2, DEP ;

vérifier s’il existe ou non une anaphy- laxie ;

vérifier s’il ne s’agit pas d’une autre cause que l’asthme, par exemple corps étranger bronchique, embolie pulmo- naire, défaillance cardiaque ;

commencer le traitement avec des

doses répétées de B2CA (habituelle- ment par aérosol doseur et chambre d’inhalation), des corticoïdes oraux, une oxygénothérapie (si disponible), tout en contrôlant le DEP si c’est pos- sible ;

évaluer fréquemment la réponse au traitement et mesurer la fonction respi- ratoire au bout d’une heure ;

maintenir la SaO2entre 93 % et 95 % chez l’adulte et l’adolescent et entre 94 % et 98 % entre six et douze ans ;

ne pas utiliser d’antibiotiques en rou- tine pour une exacerbation.

L’évaluation de la réponse à ce traite- ment et la surveillance du patient per- mettent de savoir s’il faut envisager une hospitalisation (tableau V).

En cas d’exacerbation sévère :

organiser le transfert aux urgences ou en unité de soins intensifs ;

administrer immédiatement des B2CA, du bromure d’ipratropium (6)par inhalation, de l’oxygène et des corti- coïdes par voie générale ;

chez les patients qui ne répondent pas à ce traitement intensif initial, une perfusion IV de magnésium peut être envisagée (7).

SUIVI APRÈS EXACERBATION

A la suite d’une exacerbation, il faut re- voir la prise en charge, car sa survenue traduit un échec thérapeutique dont il faut rechercher les causes : détecter les

raisons de l’exacerbation (reprise de l’interrogatoire du patient) ; rechercher des facteurs modifiables (tabagisme) ; expliquer (réexpliquer) les buts des traitements et vérifier les techniques d’inhalation ; revoir et réviser l’écriture du plan d’action.

Il faut savoir qu’en cas d’hospitalisation l’adhésion au traitement par CI ou corti- cothérapie orale peut chuter à 50 % une semaine après le retour au domicile !

CONCLUSIONS

Pour une maladie comme l’asthme qui affecte jusqu’à 25 % de la population, les modalités de prise en charge se précisent constamment. Pourtant le contrôle de l’asthme est loin d’être satisfaisant, pour des raisons qui tiennent aux patients (défaut d’observance et d’adhésion aux traitements) mais aussi aux médecins (défaut d’information). La mise au point 2015 du GINA, disponible sur internet, est un outil de qualité pour tous les mé- decins qui ont des patients asthmatiques, enfants de plus de cinq ans et adoles- cents, à prendre en charge. 첸

L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec la rédaction de cet article.

(6)Bromure d’ipratropium : antagoniste spécifique des récep- teurs muscariniques de courte durée d’action (Atrovent®).

(7)La mise au point du GINA se termine par un glossaire des classes de médicaments antiasthmatiques auquel le lecteur pourra se reporter (www.ginasthma.org).

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