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PEUT-ON, À BON DROIT, PARLER D UNE CONCEPTION AFRICAINE DES DROITS DE L HOMME?

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PARLER D’UNE CONCEPTION AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME?

par

Roger Magloire Koussetogue KOUDE Enseignant à l’Institut des droits de l’homme

de Lyon

L’Afrique nous donne aujourd’hui l’image d’un continent profondé- ment marqué par le déferlement de la violence et des violations massives des droits de l’homme (1). Cette image de l’Afrique qui se meurt nous est quotidiennement rapportée par les médias; qu’il s’agisse des massacres qui embrasent périodiquement la région des Grands Lacs; qu’il s’agisse des exécutions sommaires, arbitraires ou extrajudiciaires qui scandent la vie des dictateurs et autres autocrates assoiffés de pouvoir, de sang et d’argent; qu’il s’agisse des assassinats perpétrés en Afrique du Nord au nom d’un Islam intégral ou encore des drames successifs qui endeuillent les peuples du Soudan depuis bon nombre d’années déjà.

Ce pays (le Soudan), longtemps présenté comme victime d’un conflit, prétendument religieux, opposant le sud chrétien et

«animiste» au nord islamisé, a basculé dans un quasi-génocide qui se déroule dans le Darfour, en plein cœur du Dar el islam(2). C’est dire que les raisons ne font pas défaut quant à la justification des dérives criminelles des dirigeants africains qui n’hésitent pas à plon- ger les populations dans des conflits gratuits, aux conséquences généralement dramatiques : massacres, personnes déplacées, famine, épidémie, etc.

(1) Communication de Isaac Nguema lors du Colloque de Ouagadougou, La pro- motion et la protection des droits de l’homme à l’heure des ajustements structurels (Voy.

les actes du colloque pp. 189-203. Colloque organisé par l’Organisation mondiale con- tre la torture (Omct/Sos-Torture).

(2) On distingue dans la tradition musulmane le «Dar el islam» (domaine ou pays d’islam) du «Dar el harb», c’est-à-dire le domaine de la guerre, synonyme de chaos.

Or, le chaos soudanais aujourd’hui n’oppose plus seulement le nord musulman au sud chrétien comme c’était encore le cas jusqu’il y a peu; au contraire, il se déroule dans le Darfour, en plein pays d’islam. Cette situation correspond à laFitna, hantise sécu- laire des oulémas, les docteurs de la Loi; ce dont parle Gilles Kepel dans son dernier ouvrage: Fitna, Guerre au cœur de l’Islam (Gallimard, 2004).

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L’argument que les dirigeants africains et leurs idéologues déploient, à chaque fois qu’ils sont interpellés suite aux nombreuses violations dont ils se rendent coupables, est qu’il existe des spécifi- cités africaines en vertu desquelles la vie politique, la démocratie et le respect des droits de l’homme en Afrique ne devraient pas être de simples copies de ce qui se fait ailleurs, notamment en Occident.

Ce discours idéologique (3) tend à faire de l’Afrique une île, une Humanité à part; et des Africains non pas des hommes à part entière, mais des hommes entièrement à part, mettant ainsi cette partie du monde en marge de l’Humanité et de la communauté internationale. Mis dans un monde hors du monde, au nom d’une prétendue spécificité africaine, l’individu africain est ainsi livré à des vagues ininterrompues de violence de tous ordres et de tout aca- bit, au déni des droits, à la systématisation de la torture, au règne de l’impunité, du mensonge et de la corruption, véritable sport national dans de nombreux pays africains.

Les conséquences de cette politique criminelle sont évidentes : permanence et généralisation de la violence politique et sociale, ins- tabilité politique chronique et faillite de l’institution étatique, per- sonnalisation et autocratisation du pouvoir, d’où l’absence totale de transparence dans la gestion de la chose publique, institutionnalisa- tion de la corruption et de l’affairisme des agents de l’Etat qui s’accompagne des détournements des deniers publics et l’aggrava- tion de la dette publique extérieure, paupérisation sans cesse crois- sante des populations abandonnées à leur triste sort, etc.

Cette situation chaotique que connaît l’Afrique, pourvoyeuse d’images apocalyptiques que nous livrent à longueur de temps cer- tains médias, semble jeter un doute sur l’humanité des valeurs afri- caines et leur capacité à honorer l’homme. Comment faire admettre que l’Afrique est porteuse d’un humanisme et de valeurs positives, si les idéologies et les pratiques africaines mettent toujours ce con- tinent en marge de l’Humanité? Quel sens donner aujourd’hui aux fameuses valeurs et spécificités africaines dont les Africains sont si fiers? Face à une Humanité aujourd’hui saisie par le doute (voire la faillite) éthique, quelle est (quelle peut être?) la part de l’Afrique à la bourse internationale des valeurs ou au fameux «rendez-vous du donner et du recevoir» dont parlait Léopold Sédar Senghor?

Notre monde sort d’un siècle de grands progrès à l’occasion duquel des avancées extraordinaires ont été réalisées dans tous les

(3) Idéologie au sens arendtien du terme, c’est-à-dire la logique d’une idée.

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domaines du savoir et de la science, permettant à l’Humanité d’atteindre un niveau de développement sans précédent. Mais, nous sommes aussi les héritiers d’un siècle de désaffection, de crises à répétition et de barbaries diverses qui se sont illustrées par leur extraordinaire capacité d’abord à nier, puis à détruire l’homme. Le nazisme et le communisme (4) furent les deux figures marquantes de cette régression barbare qui a précipité l’Humanité dans l’abîme et l’a fait douter de son aptitude à la civilisation, créant ayant ainsi un véritable «malaise dans la civilisation»(5). C’est notre commune volonté de ne plus retomber dans le «mal absolu» qui nous a fait dire : «Plus jamais ça!»; volonté qui s’est concrétisée par l’adoption de la Déclaration des droits de l’homme en 1948, laquelle déclara- tion se veut universelle (6); c’est-à-dire applicable en tout temps, en tout lieu et à tous les hommes de notre planète par-delà les contin- gences historiques, culturelles, cultuelles ou autres. C’est cette même volonté d’honorer l’homme dans sa dignité singulière qui s’est poursuivie par l’adoption des deux Pactes de 1966 et de nombreux autres instruments juridiques internationaux en matière de droits de l’homme, touchant tour à tour tous les aspects de notre vie et toutes les catégories sociales (7).

Aujourd’hui, ce n’est pas tant l’existence des textes qui pose pro- blème mais leur pertinence, leur validité et leur opérabilité. L’actua- lité internationale, telle que nous la vivons, montre que le respect universel des droits de l’homme et de la dignité reste encore un principe axiologique, un idéal loin d’être atteint. Cette avancée dif- ficile des droits de l’homme, voire leur rejet dans certains contextes particuliers (ce qui peut s’expliquer objectivement) semblent donner du crédit aux thèses selon lesquelles les droits de l’homme seraient incompatibles avec certaines cultures dans lesquelles ils n’auraient jamais existé en tant que tels. En Afrique, de nombreux pays se sont longtemps opposés à la mise en œuvre et au respect des ins-

(4) Nous citons ici le communisme dans sa mise en œuvre stalinienne, notamment, qui n’est ni plus ni moins qu’une entreprise criminelle au même titre que le nazisme.

(5) Expression que nous empruntons volontiers à S. Freud.

(6) Conçue sur le modèle du traité international classique, la Déclaration des droits de l’homme de 1948 se veut «universelle» et à ce titre, parle de l’homme éternel (uni- versel donc!), indépendamment des contingences historiques, culturelles ou autres.

Le caractère universel de ce texte est parfois contesté et fait toujours l’objet de nom- breux débats…

(7) En plus des deux premières «générations» des droits de l’homme que l’on retrouve dans la Charte (onusienne) des droits de l’homme, il faut désormais ajouter une troisième, voire une quatrième «génération», sans oublier les textes spécifiques relatifs aux femmes, aux enfants, aux réfugiés et autres personnes déplacées, etc.

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truments juridiques internationaux en matière des droits de l’homme – auxquels ils ont pourtant librement souscrit –, et ce au nom de l’ «authenticité africaine»(8). Pour justifier cette opposition (ou plutôt leur mauvaise foi dans la mise en œuvre des engagements internationaux librement consentis), certains Etats, outre la souve- raineté nationale et la non-ingérence qu’ils agitent en permanence, vont jusqu’à prétendre que les droits de l’homme, tels que définis dans la Déclaration universelle de 1948, étaient contraires aux

«valeurs profondes africaines». Parfois, c’est la religion (l’Islam, notamment) qui est appelée en renfort pour le besoin de la cause (9).

Parallèlement à cette résistance au respect universel de la dignité humaine, résistance menée à coup de discours idéologiques par des Etats peu soucieux des droits de leurs citoyens, il y a en Occident un autre discours – idéologique lui aussi – qui prétend à l’exclusivité occidentale (10) des droits de l’homme présentés comme fruit de la seule philosophie des Lumières, ayant (toutefois) vocation à s’uni- versaliser, et donc, à s’exporter vers le reste du monde. Cette idée, outre le fait qu’elle est historiquement et scientifiquement fausse, contribue à accréditer la bonne vieille thèse de la sacro-sainte

«mission civilisatrice» de l’Occident (11), véritable pain béni pour les idéologues défenseurs des «Etats voyous»(12), bourreaux de leurs populations qui, très habilement, n’hésitent pas à crier au néo-colo- nialisme et à l’impérialisme, voire au terrorisme lorsqu’ils sont en situation de flagrant délit.

(8) Idée noble certes, visant à décomplexer l’homme africain, à lui restituer sa dignité et son identité bafouées, mais qui a très vite été pervertie par des hommes politiques eux-mêmes manipulés par une élite intellectuelle avide de pouvoir.

(9) Interpellé par la communauté internationale suite aux massacres des popula- tions et autres exactions commis dans le Darfour par les «Janjawid» (milices «arabes»

progouvernementales), le président soudanais Omar Hassan al-Bechir (au pouvoir depuis 1989 à la suite d’un coup d’Etat militaro-islamiste) a tout simplement dénoncé «un complot des croisés et des sionistes visant à attaquer l’islam», et a appelé les musulmans à défendre leur religion menacée.

(10) Voy. à ce sujet Orient Occident, la fracture imaginaire de Georges Corm (Paris, éd. La Découverte, 2002).

(11)Idem, p. 61. Voy. aussi L’Occident et les autres, l’histoire d’une suprématie de Sophie Bessis (éd. La Découverte & Syros, Paris, 2001, 2002)

(12) Nous employons ce terme «Etats voyous» pour désigner tous Etats qui vivent en marge de la légalité internationale, y compris en matière des droits de l’homme.

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I. – Qu’est-ce que les droits de l’homme?

Les droits de l’homme ne sont pas une production ex nihilo, comme l’on voudrait le faire croire. Il y a une histoire et une généa- logie des droits de l’homme qui, dans leur formulation actuelle, nous viennent de très loin. Diverses racines leur sont reconnues :

1. a Les droits de l’homme sont avant tout un discours sur l’homme, une représentation de l’homme par l’homme, définissant sa place et son statut dans la société. Ce sont les racines philosophi- ques des droits de l’homme qui seront peu à peu transcrites en règles juridiques.

1. b Les droits de l’homme sont, ensuite, une affirmation de la dignité humaine que l’on retrouve toujours dans tous les grands courants religieux. Certains courants insisteront sur le devoir de ser- vice, tandis que d’autres mettront en valeur la fraternité univer- selle.

1. c Les droits de l’homme sont aussi une stratégie de survie face à la violence, au totalitarisme et à l’injustice... C’est la volonté des hommes de choisir la vie plutôt que de se complaire dans la logique infernale de la violence meurtrière. A ce sujet, on peut citer quel- ques textes anciens comme le Code d’Hammourabi, diverses législa- tions d’Israël, le droit romain, les textes anglais tels que la Magna Carta, les Bills of Rights, et les grandes Déclarations (américaine de 1776, française de 1789 et onusienne de 1948). Ce sont là les racines juridiques des droits de l’homme.

Il y a enfin une quatrième source, celle qui a prévalu avant toute tradition écrite et juridique, que l’on trouve dans toutes les sociétés : ce qui constitue les racines coutumières des droits de l’homme. L’idée même de droit est une quête permanente des hom- mes et, le déploiement du droit dans son champ d’application qu’est la société vise à clarifier les règles et les modalités du vivre ensemble.

Le droit, entendu ici à la fois comme un ensemble de normes pro- clamées et dont le respect est garanti par des mécanismes y relatifs mais aussi, le droit comme pratiques profondément ancrées dans les mœurs.

Tout compte fait, les droits de l’homme sont un parti pris pour la vie et le vivre ensemble. Or, dans toutes les sociétés, dans toutes les cultures, il y a des codifications de la manière de vivre ensemble et des mécanismes de régulation ou de sanction y relatifs. En Afri- que, aujourd’hui comme depuis toujours, il y a un parti pris très

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prononcé pour le vivre ensemble et cela se vérifie à travers des valeurs que nous pouvons citer assez rapidement : la vie, l’esprit de partage, l’importance de la famille et du groupe, le sens de l’hospi- talité, la solidarité...

Si nous sommes d’accord que les droits de l’homme sont un parti pris pour le vivre ensemble d’une part et d’autre part, que les valeurs susmentionnées sont essentielles pour la vie en commu- nauté, nous ne saurions – sauf à nous contredire fâcheusement – exclure les droits de l’homme des cultures africaines, lesquelles ont une conception de l’homme bien précise, de sa dignité et de son sta- tut social. Toutes les cultures sont des architectures de réponses à l’ensembles des questions que l’homme se pose à lui-même, des questions qu’il pose à l’autre (singulier et pluriel) et, celles qu’il pose à l’univers qui l’englobe. Ainsi donc, si nous admettons que les cul- tures ont toutes développé une certaine conception de l’homme, de sa dignité et de son statut, nous pouvons en déduire que les droits de l’homme constituent – par-delà les fluctuations du temps et de l’espace, et donc indépendamment des contingences historiques et culturelles – un patrimoine culturel commun pour toute l’Huma- nité.

Finalement, la vraie question, à notre avis, n’est pas tant de savoir s’il existe une conception africaine des droits de l’homme, ce qui est une évidence de notre point de vue. D’ailleurs, peut-on, à juste titre, parler d’ «une conception africaine» des droits de l’homme au singulier, sachant qu’il y a en Afrique une immense plu- ralité culturelle? Seul le pluriel se justifie ici! La vraie question serait alors finalement de savoir : quelle est la pertinence (ou la non pertinence), la validité (ou la non validité) de la conception afri- caine des droits de l’homme? Quelle est la capacité des cultures afri- caines – qui réclament leur authenticité – à honorer l’homme? Les conceptions de l’homme qui se dégagent des cultures africaines sont-elles compatibles ou non avec notre conception commune, uni- verselle du même homme, telle qu’elle résulte de la Charte des droits de l’homme et autres instruments juridiques internationaux?

Pour répondre à la question initialement posée, à savoir : peut-on, à bon droit, parler d’une conception africaine des doits de l’homme?, il convient d’aborder le débat à partir d’une double approche, phi- losophico-anthropologique, pour mieux saisir la portée réelle des discours africains sur l’homme; la dimension juridique permettra, ensuite, de réfléchir sur l’ordre juridique africain tel qu’il résulte de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

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II. – Les discours africains sur l’homme et leurs fondements éthiques

Loin de viser un tour d’horizon exhaustif, trois catégories de droits nous semblent indispensables pour une meilleure exploration des possibilités des discours africains sur l’homme : le respect de la vie et du vivant, les droits à caractères socio-politiques et les fon- dements éthiques des discours africains des droits de l’homme. Trois niveaux d’approche permettent à notre sens, une meilleure appro- priation intellectuelle de ces droits (13) :

a. au premier niveau, il y a ce que l’on appelle les valeurs fonda- trices de toute culture, c’est-à-dire celles qui constituent le socle à partir duquel s’érige la vision du monde d’un peuple;

b. au deuxième niveau, il y a les valeurs régulatrices de l’existence collective et des institutions sociales. C’est l’ensemble des principes qui guident l’organisation de la vie communautaire pour en assurer la cohésion profonde;

c. au troisième niveau enfin, il y a les valeurs donatrices de sens (à la vie) et qui définissent l’orientation ultime de la destinée humaine.

A. – Les valeurs fondatrices

La vision traditionnelle africaine du monde est fondée sur le

«respect du sacré», c’est-à-dire tout ce qui touche au lien intime avec Dieu et le monde invisible. Parmi ces choses sacrées, il y a la per- sonne humaine, la vie et le vivant en général... L’homme appartient au monde divin et de ce fait, on ne peut impunément toucher à sa vie, à sa dignité ou à son humanité. Dans les pensées profondes afri- caines en effet, l’être humain est radicalement mis à part dans son statut transcendant et, l’interdiction de verser le sang humain est une prescription éminente sanctionnée solennellement. Le droit à la vie implique le droit à l’alimentation et dans bien des cas, cet accès à l’alimentation est présenté comme un droit immédiat et imprescriptible : par exemple, la liberté d’accès gratuit à l’eau et au puits; d’où le rituel de l’offrande de l’eau à l’étranger et au visiteur.

Aussi, dans bien des sociétés africaines, le passant pouvait se servir

(13) Communication de M. Ka Mana lors du séminaire international : Cultures afri- caines et droits de l’homme (Dakar-Sénégal, du 29 juillet au 1er août 2001); sémi- naire organisé par la Fédération de l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la tor- ture (Fi-Acat) . Voy. les actes du séminaire pp. 99-117

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directement de quelques épis de maïs ou de mil, des fruits des arbres situés dans un champ, etc. sans avoir à solliciter préalablement l’autorisation de qui que ce soit.

La deuxième valeur fondatrice touche à la solidarité anthropologi- que indéniable et à la non-discrimination: toute personne humaine est toujours une personne solidaire des autres. Ces liens, elle doit les conserver, les promouvoir, les enrichir et les protéger; ce qui impli- que le droit (devoir de) à l’hospitalité qui ne signifie pas vivre dans l’oisiveté ou la paresse. C’est le fameux système du don et du con- tre-don, du donner et du recevoir, du droit et du devoir qui sont l’une des structures axiales du comportement humain partout en Afrique depuis toujours. Les normes et les pensées africaines ont tendance à défendre les faibles; ce qui se vérifie dans les contes et la morale où le faible au départ arrive généralement gagnant. Ce qui se traduit aussi par un respect infini pour l’enfant, le vieillard, le malade, la personne handicapée, etc.

Le respect pour les personnes âgées, par exemple, est si fort et si présent que les vieillards ont une place prépondérante au point de glisser dans un système de gérontocratie. Ce droit des personnes âgées est fondé sur le fait qu’elles ont accompli l’Humanité : «Je juge une civilisation par la manière dont elle traite ses vieillards», a dit un jour Julius Nyerere; et la vieillesse est assimilée à la puis- sance. Quant à l’enfant, il est vénéré à tel point que la stérilité est assimilée à la malédiction. Et les femmes? Leur sort n’est hélas pas des meilleurs car, en Afrique comme ailleurs, la condition féminine a toujours été et reste aujourd’hui encore le revers de la médaille humaine, malgré les avancées considérables que l’on observe ça et là. Il convient de relever toutefois ici que l’Afrique reste de loin le continent où il y a eu dans l’Histoire le plus grand nombre de reines et de femmes au pouvoir.

A l’égard des malades, l’option africaine, contrairement à celle qui prévaut dans les pays riches, c’est le refus de laisser le malade seul, le refus de l’exclusion et le droit à la présence. C’est pourquoi les hôpitaux et autres centres de soins en Afrique sont davantage envahis par des gens bien portants que par les malades eux-mêmes.

Les Africains considèrent la maladie comme le mal absolu et la santé comme le bien des biens. La maladie est chez les Sara du Tchad, par exemple, l’un des trois ennemis de l’homme avec l’igno- rance et la honte tandis que les Bambara du Mali disent que la maladie est le seul et unique ennemi de l’homme. Quant aux fous ou ceux que l’on baptise comme tels, il suffit de citer ce dicton bur-

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kinabé pour se rendre compte de l’évidence de leurs droits au même titre que les autres : «Le fou est une personne humaine folle». A tout cela, on peut ajouter que dans les systèmes africains traditionnels, il existe des droits, même pour les esclaves, les captifs ou autres per- sonnes dont le statut est particulièrement fragile.

La troisième valeur axiale et fondatrice dans les sociétés africai- nes, c’est la vision cosmogonique et cosmologique africaine qui ins- crit l’homme dans le tout, lui imposant un respect strict de tous les éléments et de toutes les structures de la nature : il s’agit d’une exi- gence de survie collective où toute la créature jusqu’à la faune, la flore, etc. est amie. Ainsi, même avant de dépouiller un arbre d’une branche ou d’une écorce, le guérisseur ou le sculpteur africain se recueillait et demandait pardon à l’arbre d’avoir à le mutiler. Cette vision du monde crée l’unité de l’homme avec l’ensemble de ce qui existe, c’est-à-dire avec l’ordre global de la Création. D’où la res- ponsabilité de chacun et de tous vis-à-vis de la nature et de toutes les créatures.

B. – Les valeurs régulatrices

Ka Mana souligne cinq valeurs régulatrices de l’existence qui sont, en somme, cinq principes d’équilibre fondamentaux (14) :

1. La vie humaine est caractérisée par un lien étroit entre le visi- ble et l’invisible; c’est-à-dire, tout ce que nous faisons dans ce bas monde (visible) est toujours renvoyé dans le monde invisible. Toute la vision africaine de l’homme, de la vie et de la mort est basée sur ce lien entre le visible et l’invisible qui détermine le sens du sacré, de la solidarité et de l’unité de l’être.

2. L’existence humaine est aussi caractérisée par le lien entre l’individu et le groupe, la communauté et l’individu : on n’est réel- lement une personne que lorsque l’on est inscrit dans un lien de soli- darité, avec des responsabilités que l’on assume dans cette commu- nauté (15).

(14) Séminaire international Cultures africaines et droits de l’homme, communica- tion de M. Mana précitée.

(15) Nous le verrons plus loin, avec la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples dont l’une des originalités les plus marquantes, par rapport aux autres instruments juridiques régionaux, est le lien entre les droits et les devoirs de l’individu». Ce qui est loin d’être une simple position idéologique, comme l’on vou- drait parfois le faire croire...

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3. La troisième valeur régulatrice est le rapport entre la tradition et l’inventivité ou, disons, entre tradition et modernité, pour employer ce mot très à la mode. Nous sommes les produits d’une Histoire et cela fait de nous des hommes et des femmes responsables de nos tra- ditions et en même temps, des hommes et des femmes qui ont ou doivent avoir la capacité d’inventer l’avenir. Cette double position nous inscrit dans une relation intergénérationnelle en nous rendant responsables du passé et de l’avenir, responsables devant nos ancê- tres et devant les générations futures. Toute personne humaine res- ponsable se doit d’assumer cette double responsabilité.

4. Il n’y a pas de vie humaine possible si elle ne régule pas le lien entre la patience et l’urgence, c’est-à-dire entre la conviction que malgré les vicissitudes de l’Histoire, le mal n’aura pas le dernier mot et la conviction qu’il faut lutter et agir, hic et nunc, contre le mal au moment où il sévit dans la société des hommes.

5. Et enfin, il n’y a pas de vie humaine possible si elle ne régule pas le lien entre la vie et la mort. Il n’y a pas de vie sans mort ; de même qu’il n’y a pas de mort sans vie et c’est dans cet équi- libre entre les deux que se construit une véritable société humaine. Slimane Ben Slimane le dit à juste titre lorsqu’il écrit dans son Conseil de discipline, que « la valeur d’un peuple, c’est l’ensemble de ses morts et de ses vivants multipliés par l’interaction de l’Histoire ».

C. – Les valeurs donatrices de sens Deux niveaux de compréhension :

2.3. a D’abord, ce qui donne sens à une société consiste fon- damentalement à former des hommes et des femmes dignes de considération, pour reprendre cette expression chère, on le sait, à Amadou Hampaté Bâ. Toutes les cultures africaines ont dans leurs codes profonds le projet de faire de chaque homme et de chaque femme des personnes dignes de considération. Selon Amadou Hampaté Bâ, un homme digne de considération est avant tout un homme de « grande écoute », qui est sensible à ce qui lui vient du dehors et le nourrit. Il est aussi un homme de

« grande vision », qui ne pense pas la société sans une vision glo- bale en embrassant l’horizon des générations futures et de tout l’avenir de l’humanité. C’est aussi un homme du « grand langage », c’est-à-dire qui ne parle pas en vain mais qui prend la parole pour apporter quelque chose de fertile et de constructif, permet-

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tant à son interlocuteur de s’épanouir dans son humanité. Un homme digne de considération est, enfin, un homme du «grand agir », c’est-à-dire qui travaille dans la perspective du bien col- lectif et du bonheur de tous.

2.3. b Ensuite, vient la volonté de la société dont le projet est de devenir digne de l’humain : l’humain comme l’ensemble des liens que nous tissons pour être solidaires et, la solidarité elle-même comme capacité de compter les uns sur les autres pour construire une société meilleure pour tous. La solidarité est indispensable pour que la société avance, se développe et mette en valeur ses énergies créatives.

III. – Les droits à caractères socio-politiques

3. a La liberté d’expression : elle n’a pas toujours été assurée mais l’organisation de la parole, bien que privilégiant certaines catégories (anciens, hommes, clans princiers...), garantit néanmoins à la plu- part des groupes un espace de contribution. Dans certains cas, la parole est non seulement un droit mais un devoir auquel personne ne peut se soustraire.

3. b La liberté d’association qui est aussi très largement assurée et se manifeste dans une infinité de groupes et confréries de travail, de loisirs, d’activités artistiques, initiatiques, ésotériques ou de clas- ses d’âges, etc.

3. c La liberté de déplacement reste aujourd’hui encore l’un des droits les plus populaires et les plus assurés en Afrique, se tradui- sant par le mépris complet des frontières héritées de la colonisation, laquelle n’a pas tenu compte de certaines réalités culturelles et sociologiques. Ce n’est pas aujourd’hui seulement que l’Afrique est le continent des réfugiés...

3. d Le droit de propriété est essentiellement caractérisé par sa dimension communautaire et intergénérationnelle car, la terre, par exemple, ne se vendait pas mais devait être attribuée aux nouveaux arrivants : «Comment vendre la terre, disaient les anciens, puisqu’elle appartient à nos ancêtres desquels nous l’avons reçue, et que nous la gérons pour la transmettre à nos petits-enfants qui en sont les vrais propriétaires». Ce parti pris éthique implique la notion de corespon- sabilité intergénérationnelle avec des retombées bien évidemment

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positives sur le droit de l’environnement qui s’avère de plus en plus comme l’un des droits humains primordiaux (16).

IV. – Les fondements éthiques des discours africains sur l’homme

L’éthique africaine est fondée avant tout sur l’éminente dignité de la personne humaine qui trouve ses explications dans les mythes les plus anciens. L’homme a été créé par Dieu afin de devenir son interlocuteur;

ainsi, dans les injonctions des Anciens Egyptiens (17), il est dit :

«N’usez pas de la violence contre les hommes à la campagne comme en ville car ils sont nés des yeux du soleil, ils sont le troupeau de Dieu».

Une autre valeur à laquelle les sociétés africaines sont fort sensi- bles, c’est la justice, que les gens privilégient presque (d’ailleurs) à la liberté; même s’ils savent qu’il n’y a pas de justice sans liberté.

A cela, il faut ajouter la pitié et le pardon, valeurs humaines fon- damentales en dehors desquelles la jungle n’est pas loin (18).

Enfin, parmi les valeurs qui habitent les tréfonds des consciences africaines, on trouve la tolérance, l’acceptation presque incondition- nelle de l’autre, le respect de la différence qui implique que l’on est prêt à défendre farouchement sa propre différence et son identité.

En matière de religion par exemple, le libre choix de culte était garanti pour tous et, chaque clan ou tribu pouvait librement adorer son ou ses dieux, sans avoir à subir l’imposition d’une religion domi- nante ou à ambition universelle.

On peut dire que l’Etat bureaucratique et oppresseur n’a émergé en Afrique (19) que très tardivement en raison de plusieurs facteurs

(16) Communication du professeur Joseph Ki-Zerbo lors du colloque de Ouaga- dougou, La promotion et la protection des droits de l’homme à l’heure des ajustements structurels. Voy. les actes du colloque pp. 239-267. Colloque organisé par l’Organisa- tion mondiale contre la torture (Omct / Sos –Torture).

(17) Le Livre des morts des anciens Egyptiens contient des formules de confession négative au moment où le cœur de chacun est pesé devant le tribunal d’Osiris :

«Je n’ai pas causé de souffrance aux hommes; je n’ai pas usé de violence contre ma parenté; je n’ai pas fréquenté les méchants; je n’ai pas maltraité mes serviteurs;

je n’ai pas privé l’indigent de sa subsistance; je n’ai pas provoqué la famine; je n’ai pas tué ni ordonné le meurtre; je n’ai pas fait pleurer les hommes mes semblables; je n’ai pas provoqué de maladie parmi les hommes». In Livre des Morts des Anciens Egyptiens, G. Kolpaktchy, Stock + Plus, p. 213

(18) Voy. à ce sujet : Desmond M. Tutu, Il n’y a pas d’avenir sans pardon, Albin Michel, Paris, 2000

(19) Du moins dans sa partie subsaharienne!

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inhibiteurs parmi lesquels l’absence des armes à feu, le respect de la diversité qui exclut toute unification autoritaire et enfin, la rareté de l’imposition d’une religion unique aux prétentions universelles.

L’Etat africain, presque toujours, a été inter et trans-ethnique par un brassage des peuples et l’appareil qui met en œuvre le pouvoir a souvent été réduit au minimum, malgré les apparences géronto- cratiques dans les villages et autocratiques dans les royaumes et empires. Ce pouvoir a toujours comporté des mécanismes de limita- tions par le partage des compétences et la réalisation de l’Etat de droit (20).

Toutes ces descriptions peuvent paraître angéliques au vu des réalités actuelles où, les violations les plus graves mettent en péril les droits de l’homme pourtant reconnus traditionnellement, cultu- rellement, voire juridiquement à l’individu. C’est pourtant la con- ception africaine de l’homme, telle que nous venons de développer, qui est à l’origine de l’ordre juridique africain, notamment la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (21).

V. – La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples

(Ci-après dénommée la «Charte africaine»)

La Charte africaine affirme, dès le préambule, sa filiation à la Charte de l’Organisation de l’unité africaine (OUA, aujourd’hui Union africaine) aux termes de laquelle «la liberté, l’égalité, la justice et la dignité sont les objectifs essentiels à la réalisation des aspirations légitimes des peuples africains». Tenant compte des vertus des tra- ditions historiques et des valeurs de civilisation africaine qui doi- vent inspirer et caractériser toute réflexion en matière des droits de l’homme, la Charte africaine protège simultanément la personne et

(20) Communication du professeur Joseph Ki-Zerbo précitée.

(21) La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples est un vieux projet initié dès les indépendances africaines intervenues dans les années 1960. Mais il a fallu attendre la fin des années 1970 pour voir un début de concrétisation avec, notamment, la décision 115 (XVI) de la Conférence des Chefs d’Etat et de gouver- nement, en sa seizième session ordinaire tenue au Libéria (Monrovia, 17-20 juillet 1979). Cette décision visait l’élaboration d’un avant-projet de «Charte africaine des droits de l’homme et des peuples», prévoyant l’institution d’organes de promotion et de protection des droits de l’homme et des peuples. Le 26 juin 1981, lors de la dix- huitième Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) tenue à Naïrobi au Kenya, la Charte africaines des droits de l’homme et des peuples va être définitivement adoptée et entrera en vigueur le 26 octobre 1986.

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les peuples en instituant de façon originale les devoirs vis-à-vis de la communauté. L’affirmation des droits des peuples constitue une originalité africaine fondée sur l’idée que tous les peuples ont droit à l’existence et à l’autodétermination, idée largement répandue dans les pays du Tiers-monde dès les années 1950, notamment avec la conférence de Bandung (22) (1955).

Les droits et devoirs qu’énonce la Charte africaine se trouvent dans sa première partie, tandis que la deuxième partie est consacrée aux mécanismes de contrôle. Les devoirs consacrés par la Charte se répartissent en deux grandes catégories : les devoirs généraux vis-à- vis de la famille, de la société et de l’Etat d’une part (art. 27), et les devoirs spécifiques vis-à-vis de ses «semblables sans discrimina- tion aucune» (art. 28), d’autre part. Cependant, l’analyse approfon- die des droits de la personne protégés par la Charte ne dégage aucune originalité par rapport aux instruments juridiques interna- tionaux classiques tels la Déclaration universelle des droits de l’homme (1948), ou les Pactes internationaux de 1966. Ce que fait remarquer, d’ailleurs, Fatsa Ouguergouz, l’un des grands commen- tateurs de la Charte africaine, lorsqu’il écrit : «... les points de con- vergence entre celles-ci (la Charte africaine et la Déclaration univer- selle) l’emportent en effet nettement sur leurs différences (23)».

Cette opinion est partagée par Valère E. Yemet qui souligne, pour sa part, que «la majorité des normes de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples est reprise des autres instruments universels et régionaux des droits de l’homme»(24).

Il est certes difficile, dans le cadre limité de cette réflexion, d’évo- quer de manière exhaustive les questions suscitées par la Charte africaine. Toutefois, nous voulons ici mettre en relief les aspects les plus importants du système africain des droits de l’homme, notam- ment les questions de procédure, les principes «jurisprudentiels»

dégagés par la pratique «juridictionnelle» de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, ainsi que les perspectives qui découlent du Protocole de Ouagadougou de 1999, entré en vigueur

(22) Cette conférence est une étape décisive dans la lutte pour l’émancipation et l’autodétermination des peuples colonisés; elle a marqué le début des vagues succes- sives de décolonisation, principalement en Asie et en Afrique.

(23)F. Ougergouz, La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Une approche juridique des droits de l’homme, entre tradition et modernité, Paris, Puf, 1993, p. 67.

(24) V. E. Yemet, La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, Paris, l’Harmattan, 1996, p. 44.

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en janvier 2004, instituant une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.

A. – Les procédures régionales africaines des droits de l’homme

La Charte africaine a créé une «Commission africaine des droits de l’homme et des peuples» (ci-après dénommée la Commission afri- caine), placée sous la tutelle de la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement de l’Organisation de l’unité africaine (OUA, aujourd’hui Union africaine). Le Protocole de Ouagadougou de 1999, institue une «Cour africaine des droits de l’homme et des peuples», un peu à l’image de la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg. Si la Commission africaine, dont la mission et les moyens sont extrêmement limités, a pu mené une activité

«juridictionnelle» importante, dégageant une abondante

«jurisprudence» africaine en matière des droits de l’homme et des peuples, la Cour africaine se doit d’être une véritable juridiction au service de la Charte.

S’inspirant de la tradition africaine du consensus et du règlement à l’amiable, la Charte africaine laisse le libre choix aux Etats parties de trouver les solutions les plus satisfaisantes aux violations des droits de l’homme, soit par voie de négociation, soit par voie de recours devant la Commission et la Cour (25). Ces possibilités de recours sont aussi ouvertes aux individus et organisations, sous réserve de remplir un certain nombre de conditions (Chapitre III de la Charte : «Les autres communications», articles 55 et 56). Aux ter- mes de l’article 47 de la Charte, «si un Etat partie a de bonnes rai- sons de croire qu’un autre Etat également partie à cette Charte a violé les dispositions de celle-ci, il peut appeler par communication écrite, l’attention de cet Etat sur la question». Il s’agit de la fameuse procé- dure dite de «communication-négociation» par laquelle l’Etat auteur de la communication peut exiger de l’Etat mis en cause des expli- cations ou déclarations écrites contenant des indications suffisam- ment adéquates susceptibles de résoudre le problème évoqué. L’arti- cle 48 accorde un délai de 3 (trois) mois, laissé à la discrétion des

(25) Dans la Charte africaine, il est question de simples «communications» entre Etats parties ou «autres communications» (entendez, communications individuelles et/ou non-gouvernementales). Le Protocole de Ouagadougou est plus audacieux et parle de «requêtes» (art. 5, alinéa 3 et art. 8); il est même question de «plainte»

(art. 5, alinéa 1.c) et que«les audiences de la Cour sont publiques» (art. 10), sauf exception.

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Etats concernés, afin de régler leur «litige» dès lors que l’un vien- drait à interpeller l’autre dans le cadre de la «surveillance collective» de la Charte.

Quant on sait que les Etats ont tendance à préférer les mauvais arrangements aux bons procès, on ne pouvait pas s’attendre à des recours en cascade qui conduiraient les Etats parties à se mettre mutuellement et publiquement en cause. Dans la plupart des cas, les parties en «litige» ne peuvent que s’arranger à trouver des solu- tions de consensus dans les meilleurs délais, à moins que le but de la manœuvre ne soit que politique, visant à discréditer l’autre par- tie pour des raisons autres que celles liées spécifiquement aux vio- lations des droits de l’homme. Dans tous les cas, il n’y a pas de sanctions prévues à l’égard de l’Etat fautif car, aux termes des arti- cles 52 et 53 de la Charte, «... après avoir essayé par tous les moyens appropriés de parvenir à une solution amiable fondée sur le respect des droits de l’homme et des peuples, la Commission établit, dans un délai raisonnable à partir de la notification visée à l’article 48, un rapport relatant les faits et les conclusions auxquelles elle a abouti. Ce rapport est envoyé aux Etats concernés et communiqué à la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement».

La question est cependant de savoir quelles peuvent être la légi- timité et surtout, l’opposabilité à l’égard des tiers concernés, d’un règlement à l’amiable concluant à une satisfaction mutuelle des Etats (26)? La Commission, dont la vocation est de promouvoir les droits de l’homme et des peuples sur le continent africain et de garantir le respect de l’ordre juridique africain en la matière, peut- elle se permettre de rejeter un compromis entre Etats qui aboutirait à détourner l’esprit même de la Charte dont elle est la gardienne?

A partir du moment où la négociation bilatérale exclut les victimes de la procédure, pourrait-on, à bon droit, exiger d’eux le respect d’une décision qui, somme toute, lèserait doublement leurs droits?

C’est alors ici, précisément, que se pose la question de l’interpréta- tion de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

Cette interprétation ne se doit-elle pas d’être téléologique, c’est-à- dire, viser en permanence ce qui justifie la Charte à savoir, non pas les intérêts politiques et diplomatiques des Etats, mais la protection des droits de l’homme et des peuples en Afrique?

(26)J.-D. Boukongou, «Le système africain de protection des droits de l’homme», Communication à la VIème session de cours du Cycle «N. Kenne», Yaoundé (Came- roun), 12-31 juillet 2004.

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B. – La «jurisprudence» de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples

En essayant d’ajouter la corde juridictionnelle à son arc, la Com- mission africaine (27), a mené une importante activité qui laisse dégager quelques principes pouvant être considérés comme jurisprudentiels; de ce fait, elle peut inspirer le travail de la jeune Cour africaine. Dans plusieurs affaires soumises à sa compétence, la Commission a parfois fait preuve de beaucoup d’audace en se livrant à une interprétation exhaustive et téléologique de la Charte africaine et, à l’occasion, cette instance s’est donnée une certaine marge de manœuvre qui ne lui était pas initialement reconnue.

Ainsi a t-elle conclut dans l’affaire Ken Saro-Wiwa qu’elle «a été chargée par la Charte de l’obligation positive de prévenir la violation des droits de l’homme» (§43) (28) et que «la Charte africaine a été éla- borée et a reçu l’adhésion volontaire des Etats africains désireux d’assurer le respect des droits de l’homme sur ce continent. Une fois ratifiée, les Etats parties à la Charte sont légalement liés par ses dis- positions. Un Etat qui ne veut pas respecter la Charte africaine aurait dû ne pas la ratifier. Une fois légalement lié, cependant, l’Etat doit respecter la loi au même titre que l’individu» (§48) (29).

De ce qui précède, chaque Etat partie à la Charte doit sans excu- ses s’acquitter de ses obligations y relatives et ne peut, de ce fait même, s’arc-bouter à la souveraineté nationale pour violer impuné- ment les droits de l’homme. Aussi, la Commission ne se contente pas des droits issus de la Charte mais souscrit à une large interprétation de la notion d’engagement de l’Etat. Ainsi, dans l’affaire Gaëtan Bwampamye (Avocats sans frontières) contre le Burundi, la Commis- sion a fait remarquer que «le Burundi a ignoré les engagements des cours et tribunaux à se conformer aux normes internationales en vue d’assurer un procès équitable» (§30). Position assez constante de la Commission qui sera réaffirmée dans deux autres affaires à savoir l’affaire Legal Ressources Foundation contre la Zambie et l’affaire relative aux militaires nigérians condamnés à mort par le régime du général Sani Abatcha.

(27) Initialement et statutairement, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples est une instance de consultation et de promotion des droits de l’homme et des peuples en Afrique. La Commission s’est progressivement dotée d’une compétence «juridictionnelle» au gré des affaires dont elle a été saisie, soit dans le cadre des communications interétatiques, soit dans le cadre des rares «autres communications».

(28) Communication 154/96.

(29)Idem.

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Dans la première affaire, la Commission en est arrivée à la con- clusion selon laquelle «les articles 60 et 61 recommandent à la Com- mission dans son rôle d’interprétation et d’application de la Charte, de «s’inspirer du droit international relatif aux droits de l’homme et des peuples» tels que reflétés dans les instruments de l’OUA et des Nations Unies ainsi que d’autres principes de fixation de normes internationales (art. 60). Il est également demandé à la Commission de prendre en considération d’autres conventions internationales et pratiques africaines conformes aux normes internationales» (§58).

Dans la seconde affaire (30), la Commission a clairement exprimé sa position en soulignant qu’elle se «fonde sur les précédents juridiques de plus en plus nombreux créés par ses décisions prises sur presque quinze ans environ; elle doit également se conformer à la Charte afri- caine, aux normes internationales des droits de l’homme définies dans la Charte qui comprennent les décisions et commentaires généraux des organes des Nations Unies créés par traités (art. 60). Elle doit éga- lement tenir compte des principes de droit définis par les Etats parties à la Charte africaine conformément aux normes et critères internatio- naux (art. 60)» (§24).

Aussi, la Commission estime qu’un changement de régime, par exemple, n’exonère pas l’Etat qui a fait l’objet d’une communica- tion car, la Commission traite les communications en statuant sur les faits allégués au moment de la présentation de la communica- tion. Par conséquent, un changement de régime ou même des amé- liorations positives significatives relatives aux droits de l’homme et à la vie politique en général ne saurait soustraire un Etat de sa res- ponsabilité pour les faits qui lui sont antérieurement reprochés sur la base d’une communication. Tel est le sens de la décision de la Commission dans l’affaire Media Rights Agenda contre le Nigeria, estimant que «même si la situation s’est améliorée, de manière à per- mettre la libération des détenus, l’abrogation des lois offensantes et la lutte contre l’impunité, la position reste inchangée en ce qui concerne la responsabilité du gouvernement... pour les actes de violation des droits de l’homme perpétrés par ses prédécesseurs»(31).

Il est vrai que la Commission ne peut se saisir d’une affaire que si toutes les possibilités de recours au niveau interne étaient préa- lablement épuisées. Ce principe d’épuisement des recours internes«évite que la Commission ne devienne un tribunal de pre- mière instance, une fonction qui ne lui est pas dévolue et pour laquelle

(30) Communication 218/98, §24.

(31) Communication 224/98, §37.

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elle ne dispose pas de moyens adéquats»(32). Cependant, et à plu- sieurs reprises, la Commission a tenu à donner le contenu de ce con- cept qui prête souvent à confusion. Pour la Commission, «il serait incorrect d’obliger les plaignants à user des voies de recours qui ne fonctionnent pas de façon impartiale et qui ne sont pas tenues de sta- tuer conformément aux principes de droit. Le recours n’est ni adéquat ni efficace»(33). C’est dire que l’on ne saurait exiger des plaignants l’épuisement «des voies de recours internes qui, en termes pratiques, ne sont ni disponibles ni pratiques»(34).

Cette position constante de la Commission découle de l’interpré- tation selon laquelle «sur des cas de violations graves et massives des droits de l’homme, étant donné l’ampleur et la diversité des violations alléguées et le grand nombre de personnes impliquées, la Commission considère que les voies de recours internes ne doivent pas être épuisées»(35). La Commission rejette ainsi toute interprétation lit- térale du concept d’«épuisement des voies de recours internes» car, estime t-elle, on ne peut pas absolument «exiger que la demande d’épuisement des recours internes s’applique littéralement aux cas où le plaignant se trouve dans l’incapacité de saisir les tribunaux natio- naux pour chaque plainte individuelle»(36). De même, lorsque les violations ayant fait l’objet de la communication relèvent des agents de l’Etat, ayant agi pour le compte d’un gouvernement qui les protège, les recours présumés disponibles n’ont aucun intérêt. La Commission estime aussi que lorsque les victimes des violations sont décédées, «il est évident qu’aucune voie de recours internes ne peut apporter une solution satisfaisante pour les plaignants»(37). Même si une telle possibilité existait, «l’exécution des victimes a définitivement forclos un tel recours»(38).

Enfin, la Commission récuse le principe d’épuisement des voies de recours internes dès lors qu’il n’y a aucune assistance judiciaire adé- quate assurée alors qu’elle est nécessaire. Ainsi, dans l’affaire Ken Saro-Wiwa précitée, la Commission a souligné que le fait de harceler les avocats de la partie civile, de les menacer dans leur vie privée et/ou professionnelle, jusqu’à les pousser à renoncer aux poursuites

(32) Communication 74/92, §28; affaire contre le Tchad .

(33) Communication 60/91, affaire Constitutional Rights Project c. le Nigeria.

(34) Communication 71/92, affaire RADDHO c. la Zambie.

(35) Communication 27/89, 46/91, 49/91 et 99/93 jointes, affaire relative à l’expul- sion des Burundais du Rwanda en 1989.

(36) Communication 74/92, §30.

(37) Affaire Ken Saro-Wiwa précitée, §6.

(38) Affaire Forum of Conscience c. la Sierra Leone. Communication 223/98, §15.

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engagées, etc. est une violation manifeste de la Charte africaine qui prive les plaignants d’une bonne administration de la justice et de la possibilité d’épuiser les voies de recours internes (39). Cette déci- sion de la Commission est une confirmation de l’interprétation adoptée en 1993 dans l’affaire Constitutional Rights Project précitée où la Commission a conclu à la violation de la Charte dès lors que

«pendant le procès, l’avocat de la défense a été harcelé et intimidé à tel point qu’il a été obligé de se retirer de la procédure».

C. – La protection de l’intégrité physique et morale de la personne

Le droit à la vie est sans doute le premier des droits de l’homme car c’est celui par lequel la jouissance des autres droits est possi- ble. A ce sujet, la Commission s’est prononcée à plusieurs reprises et notamment dans l’affaire Forum of Conscience précitée : « Le droit à la vie est la base de tous les autres droits. C’est la source dont découle les autres droits, et toute violation injustifiée de ce droit équivaut à une privation arbitraire », a t-elle conclu (40) (§ 20). Dans l’affaire Ken Saro-Wiwa, également précitée, la Commission a con- clu que « la protection du droit à la vie, aux termes de l’article 4, empêche l’Etat responsable de laisser délibérément une personne mourir en cours de détention », (§ 32). Aussi, le gouvernement ne peut, sous quelque motif que ce soit, procéder à des exécutions alors que la Commission a requis des mesures conservatoires dans une affaire pendante devant elle : « Si un gouvernement peut exécu- ter les personnes dont les communications sont en cours devant la Commission avant que cette dernière n’ait pu prendre une décision, la procédure des communications devient insignifiante (...). La seule pratique logique qui est utilisée par tous les systèmes interna- tionaux des droits de l’homme, est de demander aux Etats d’éviter le préjudice irréparable » (§ 44).

La Commission est constante dans sa position par rapport à l’intégrité physique de la personne. Ainsi, a t-elle conclu à la vio- lation de la Charte africaine dès lors, par exemple, qu’un indi- vidu a été détenu dans une cellule sordide et sale dans des con-

(39) Affaire Ken Saro-Wiwa précitée, §26-30.

(40) Cette position de la Commission, quoique très claire dans sa formulation, manque d’audace et de précision par rapport à la question fondamentale de la peine capitale. La Commission ne la récuse pas formellement : elle dit tout simplement que

«toute violation injustifiée équivaut à une privation arbitraire»; ce qui signifie, a con- trario, que toute «atteinte justifiée» à la vie d’autrui serait juste ou légitime!

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ditions inhumaines et dégradantes. Le fait d’être détenu sans motif et de façon prolongée constitue en soi une atteinte grave à l’intégrité physique et morale de la personne. Il en est de même de la privation du droit de recevoir des visites et d’accéder aux soins, qui constituent un traitement inhumain et dégra- dant (41). Pour la Commission, l’expression « peine ou traitement cruel, inhumain et dégradant » doit être interprétée exhaustive- ment de manière à inclure la protection la plus large possible contre les abus, tant physiques que mentaux. Dans l’affaire Media Rights Agenda(42), elle a retenu la violation de l’article 5 de la Charte contre le Nigeria dont les autorités ont laissé un détenu pendant cinq mois (147 jours très exactement) enfermé sans prendre une douche.

Enfin, la Commission insiste sur le fait que la Charte africaine ne permet pas une dérogation aux obligations du traité en raison des situations d’urgence. Ainsi, même « une situation de guerre civile au Tchad ne peut être invoquée pour justifier la violation par l’Etat ou son autorisation de violation de la Charte africaine »(43). La Charte africaine consacre deux types d’obliga- tions, à savoir l’abstention et l’action : le premier type d’obliga- tions (obligations négatives) interdit aux Etats parties de porter atteinte aux droits de l’homme et des peuples, tandis que le deuxième type d’obligations impose aux Etats le devoir (obliga- tions positives) de tout mettre en œuvre pour assurer le respect par tous de ces droits. Pour la Commission, même si les viola- tions des droits ne sont pas imputables aux agents de l’Etat, le seul fait de laisser faire et de rendre la situation propice au non- respect des droits contenus dans la Charte africaine, constitue en soi une violation coupable de ladite Charte. La responsabilité de l’Etat peut être engagée dès lors qu’il y a violation des disposi- tions de la Charte, « même si l’Etat ou ses agents ne sont pas les auteurs directs de cette violation »(44).

VI. – En guise de conclusion

Les droits de l’homme ont toujours existé partout et existent dans toutes les sociétés comme l’une des expressions humaines les

(41) Affaire Huri-Laws c. Nigeria. Communication 225/98, §40.

(42) Communication 224/98, §70.

(43) Communication 74/92, §36.

(44)Idem, §35.

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plus constantes car, toutes les fois où l’homme a été exposé à la violence, à l’abus de pouvoir ou à l’injustice, il s’est dressé pour les endiguer en créant différents systèmes ou mécanismes appro- priés. L’histoire récente des droits de l’homme le montre bien : c’est dans des contextes de contestation des pouvoirs absolus et d’injustices diverses que les mutations les plus profondes et les plus décisives ont été opérées, qu’il s’agisse de la Révolution fran- çaise avec la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ou, avant celle-ci, la Déclaration américaine d’indépendance, pour ne citer que qu’elles. Plus proches de nous, c’est après les horreurs absolues dont se sont rendus coupables les nazis et leurs collaborateurs que la communauté mondiale, après le « Plus jamais ça », a adopté la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, puis la Convention internationale de 1949 contre le géno- cide.

Exclure l’Afrique de l’héritage des droits de l’homme est une démarche non seulement fausse intellectuellement, mais impertinente : comment croire et accepter que ce continent, qui a connu tant de malheurs dans son histoire ancienne et récente, ait ignoré au cours de son existence mouvementée les droits de l’homme si essentiels pour toute société humaine ? De même, peut- on objectivement prétendre – et sans se contredire gravement – que les valeurs telles que le respect de la vie et du vivant, la soli- darité et l’hospitalité, la tolérance et l’acceptation inconditionnelle de l’autre, etc., qui imprègnent profondément les consciences afri- caines et qui sont si essentielles pour les peuples d’Afrique depuis toujours, sont contraires aux droits de l’homme tels que nous les défendons aujourd’hui à travers les instruments juridiques internationaux ?

Il est vrai que la souveraineté nationale et internationale récemment – etparfois chèrement – acquise a toujours servi de paravent à de nombreux Etats africains qui se livrent régulière- ment et impunément à de graves violations des droits de l’homme. Ce qui n’est d’ailleurs pas une exception africaine...

Cependant, l’évolution actuelle montre qu’il est de plus en plus illusoire de s’arc-bouter sur la souveraineté étatique pour échap- per aux sanctions relatives aux violations. Car, si l’Etat reste aujourd’hui encore le principal acteur de la scène politique (et juridique) internationale, il n’est plus le seul : la souveraineté

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étatique est certes un principe assis sur un roc, mais un principe qui vacille (45) !

Le système africain des droits de l’homme, loin d’être irréprocha- ble, est en train de faire son chemin avec les difficultés que l’on con- naît. Cependant, c’est un processus irréversible... L’entrée en vigueur depuis janvier 2004 du Protocole de Ouagadougou instituant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples est un pas de plus vers un véritable ordre juridique et judiciaire africain des droits de l’homme. Les droits de l’homme – on le sait maintenant – ne sont pas un «déjà-là», mais plutôt un «devoir-être» ou – plus radicalement encore – une espérance, c’est-à-dire une action pour aujourd’hui mais surtout, un geste pour l’à-venir.

Lyon, le 17 octobre 2004

(45) La souveraineté étatique doit aujourd’hui compter avec la souveraineté de l’individu affirmée à travers l’inviolabilité de sa dignité. Le droit (ou devoir) d’ingé- rence humanitaire et, les opérations onusiennes de maintien de la paix, la création récente de la Cour pénale internationale, etc., illustrent l’évolution actuelle qui tend à atténuer l’extrême rigueur du sacro-saint principe westphalien de la souveraineté de l’Etat. Aussi, l’intervention militaire sous commandement américain en ex-You- goslavie en 1999 pour mettre fin à une politique qui avait tout l’air d’un projet de purification ethnique, l’arrestation puis le transfert de M. Milosovic devant le Tribu- nal pénal international pour l’ex-Yougoslavie à La Haye, etc., montrent bien que la souveraineté étatique est de plus en plus contestable; en tout cas lorsqu’elle sert à justifier les pires violations des droits de l’homme, lesquels ont quasiment rang de morale universelle aujourd’hui.

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