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Estimation de la valeur du bois sur pied par la méthode des prix hédonistes : application aux ventes d’automnes
de l’ONF en Lorraine
Ahmed Barkaoui, Mahdi Heshmatol-Vaezin
To cite this version:
Ahmed Barkaoui, Mahdi Heshmatol-Vaezin. Estimation de la valeur du bois sur pied par la méthode
des prix hédonistes : application aux ventes d’automnes de l’ONF en Lorraine. 22 p., 2007, Documents
de Travail. INRA Laboratoire d’Economie Forestière (LEF), 2007-02. �hal-01189255�
Document de travail n° 2007-02
L L aboratoire d’ E E conomie F F orestière
Estimation de la valeur du bois sur pied par la méthode des prix hédonistes:
Application aux ventes d’automnes de l’ONF en Lorraine
Ahmed BARKAOUI
Seyed Mahdi HESHMATOL VAEZIN
Juin 2007
Estimation de la valeur du bois sur pied par la méthode des prix hédonistes :
Application aux ventes d’automnes de l’ONF en Lorraine.
Ahmed BARKAOUI
1Seyed Mahdi HESHMATOL VAEZIN
2Juin 2007
Document de travail du LEF n°2007-02
RésuméUn modèle de prix hédonistes du bois sur pied est spécifié et estimé à partir des données de l’ONF sur les grandes ventes d’automne en Lorraine en 1996. L’analyse des déterminants du prix du bois sur pieds a permis d’améliorer la modélisation existante en proposant une nouvelle spécification des variables. Une nouvelle forme fonctionnelle pour la prise en compte de la dimension et de nouvelles variables liées à la structure et à la sylviculture des peuplements ont été introduites. Après la phase d’estimation du modèle, des illustrations de la modélisation sont proposées concernant notamment l’incidence sur les prix de certaines variables comme la largeur moyenne de cerne ou l’intensité de prélèvement des coupes.
Mots clés : prix hédonistes, bois sur pied, Lorraine.
Abstract
Stumpage value estimation by hedonic prices method: Application to ONF autumn sales in Lorraine
A stumpage hedonic prices model is specified and estimated using ONF’s data on the 1996’s timber autumn sales in Lorraine. The analysis of stumpage price determinants allowed to propose a new model specification that improves former models. This specification uses a new functional form to take into account the tree dimension.
It also introduces new variables concerning stand structure and forest management. Finally, the modeling is used to illustrate the incidence on stumpage price of some variables like the ring width average or the average volume per acre harvested.
Key words : hedonic prices, stumpage, Lorraine.
Classification JEL : C25, D12, L15.
1 INRA-ENGREF, LEF, 14 rue Girardet, CS 14216, Nancy, F-54042 France, Email barkaoui@nancy- engref.inra.fr
2 Tehran University, Natural Resources Faculty (NRF), Shahid Chamran BLD, POBOX: 31585-4314, Karaj, IRAN, Email heshmat@nrf.ut.ac.ir
1. Introduction
Les décisions de coupe de bois en forêt dépendent du stade de croissance des arbres, mais également du prix que le producteur peut espérer de la vente. On observe souvent une diminution de l’âge d’exploitation avec la hausse du prix des bois. Cependant, ce constat n’est pas prouvé analytiquement d’une manière générale (Chang, 1983). Le prix des bois est susceptible d'influencer non seulement l'âge d'exploitation mais également la densité des peuplements, les scénarios d'éclaircie et les stratégies de production en général (Maugé, 1969, Peyron et al, 1995). Ainsi, la modélisation du prix des bois sur pied a une importance particulière pour le forestier qui doit gérer sa forêt dans les meilleures conditions économiques. Elle est également importante pour le décideur public qui voudrait déterminer le prix de retrait ou calculer les coûts d’opportunité d’aménagements sylvicoles particuliers - offrant, par exemple, plus de biodiversité – dans le but de construire les politiques forestières.
Deux approches différentes sont généralement utilisées pour modéliser le prix du bois : la méthode par l'aval - ou méthode de la valeur résiduelle - et la méthode par l'amont - ou méthode des prix hédonistes (Schuster et al, 1990). La première se base sur le prix des produits transformés et sur les coûts d'exploitation et de transformation considérés comme dépendant des caractéristiques du bois. Elle explique le comportement des acheteurs qui raisonnent plutôt sur le prix auquel ils espèrent vendre les produits transformés. En revanche, la seconde met l'accent sur le prix auquel les acheteurs les plus offrants (dans le cas de ventes aux enchères) ont payé et essaie de l’expliquer par les caractéristiques du bois et de la coupe.
Le bois est un produit caractérisé par une grande hétérogénéité en essence, en qualité et dans
les conditions d’exploitation. L’estimation de la valeur des lots de bois sur pied par l’approche
hédoniste s’est avéré particulièrement adaptée dans ce type de situation. Prescott et al (1990)
puis Puttock et al. (1990) ont utilisé cette méthode pour évaluer le prix du bois sur pied au
Canada. En France, Levy (1997), puis Bakouma (2002), ont spécifié des modèles des prix
hédonistes et les ont estimés à partir des ventes d’automne de l’ONF en Lorraine en 1996. A
partir de la même base de données, nous proposons dans cet article une spécification
améliorée et une estimation du modèle de prix. Cette spécification utilise une nouvelle forme
fonctionnelle pour la prise en compte de la dimension des arbres. Elle introduit également de
nouvelles variables liées à la structure et à la sylviculture du peuplement comme la proportion
en volume du bois de houppier, la largeur moyenne de cerne et la densité du prélèvement. Ce
modèle est volontairement général afin qu’il puisse être utilisé aussi bien dans le cas des
peuplements réguliers qu’irréguliers. Dans la section 2, après une analyse bibliographique sur
les déterminants du prix du bois sur pied, nous proposons une spécification adaptée aux
données lorraines. Les résultats de l’estimation du modèle retenu sont présentés dans la
troisième section. La quatrième et dernière section contient la conclusion.
2. La modélisation hédoniste du prix des bois sur pied.
Le modèle des prix hédonistes est une méthodologie de détermination du prix d’un bien à partir de ses caractéristiques. Elle suppose que le différentiel de prix entre les biens de même type constitue une information sur le prix implicite de ces caractéristiques. Cette méthode a été développée pour estimer le prix d’un bien hétérogène pour lequel il est difficile d’appréhender la demande par une fonction d’utilité classique. Le bois sur pied, en raison de la grande diversité de sa qualité, elle même liée aux conditions de production, est considéré par beaucoup d’économistes comme un bien différencié pour lequel la méthode des prix hédonistes est adaptée.
La première formulation théorique du modèle hédoniste est attribuée à Rosen (1974). Elle s’applique aux marchés des biens différenciés et cherche à définir les prix implicites que les acheteurs attribuent aux caractéristiques de ces biens. Puttock et al. (1990) et Prescott et al.
(1999) ont appliqué cette méthodologie au marché du bois sur pied. Si un lot est décrit par le vecteur de ses caractéristiques : X = ( X
1, X
2... . X
n) ,le prix auquel sera vendu le lot est une fonction hédoniste P(X) telle que : P ( X ) = P ( X
1, X
2... X
n) .
Une vaste littérature sur les caractéristiques qui déterminent le prix des bois sur pied a été développée depuis les années 1950. Dans une large gamme d'objectifs et de situations, cette littérature a mis en évidence les variables susceptibles d'influencer le prix des bois sur pied.
Ces variables peuvent être liées à l'offre comme les caractéristiques du peuplement, du bois, de la coupe et de la station. Elles peuvent également être liées à la demande comme la concentration des industries du bois, la localisation de la coupe et les variations saisonnières ou cycliques de la demande.
Malgré le nombre important des déterminants du prix, l’essentiel de la variation de clui-ci s'explique souvent par un petit nombre de variables. La catégorie des bois (essence, dimension, qualité), la localisation et les caractéristiques de la coupe sont les principaux éléments de la formation du prix des bois sur pied. De ce fait, le modèle statique de prix d'une essence donnée est souvent désigné par une relation prix-dimension qui intègre également d'autres déterminants dont, la qualité, la localisation du lot et la structure du peuplement.
La qualité du bois est une variable difficilement observable et souvent grossièrement
quantifiée dans les ventes de bois sur pied. En revanche, les variables qui explicitent la
structure et la sylviculture du peuplement sont de bons indicateurs de la qualité. En outre, les
variables liées à la structure et à la sylviculture du peuplement donnent un caractère général
au modèle de prix pour qu’il puisse être appliqué aux peuplements réguliers, irréguliers et en
conversion. Or, l'effet de la structure et de la sylviculture du peuplement sur le prix est très
peu intégré dans les modèles de prix. En outre, les études existantes ont souvent étudié l'effet
de la structure et de la sylviculture sur le prix du bois à travers des variables binaires comme
le type de coupe et le type de peuplement (Whiteman, 1991, Levy, 1997). Ce type de variable
englobe souvent l'effet de plusieurs facteurs sous forme d'une variable binaire. Par exemple,
Whiteman (1991) en étudiant la relation prix-dimension de diverses espèces de feuillus
conclut que, pour le même volume moyen, le prix des arbres issus d’une coupe d'amélioration
est 27 % inférieur à celui des arbres de la coupe définitive. Selon lui, ceci est principalement
dû au fait que le coût d'exploitation pour la coupe d'amélioration est plus élevé. En effet, une
coupe définitive comporte souvent des gros bois, à forte densité de prélèvement, comparée à
une coupe d'amélioration composée d'arbres de diamètres assez hétérogènes, à faible densité
de prélèvement. En étudiants le prix des bois sur pied pour le hêtre, Levy (1997) a montré
que, toutes choses égale par ailleurs, le prix au mètre cube des bois issus des peuplements taillis sous futaies est en moyenne de l'ordre de 19 euros plus élevé par rapport à ceux issus des peuplements réguliers. Selon Levy (1997) cette différence de prix s'explique par le fait que les arbres issus des taillis sous futaies ont souvent des cernes plus larges que ceux issus des peuplements réguliers. En spécifiant le modèle hédoniste à l’aide de variables continues telles la densité de prélèvement ou la largeur de cerne on obtient l’avantage de pouvoir les optimiser dans un modèle de gestion. En outre, une variable continue permet souvent une appréciation plus fine des déterminants de prix par rapport à des variables binaires.
Le prix du bois sur pied est entre autre déterminé par la dimension des arbres et leur qualité.
Pour arriver à une spécification du modèle hédoniste du prix des bois sur pied, nous allons d’abord voir comment les différentes caractéristiques des bois influent sur le prix en insistant sur la relation entre le prix et la dimension du bois et sur l’impact des variables de la structure et de la sylviculture sur le prix.
2.1 Relation prix - dimension
La dimension des arbres d'une essence donnée est un facteur prépondérant dans l'estimation du prix des bois sur pied. Elle est généralement appréciée par le diamètre des tiges. Avant d’intégrer cette caractéristique dans le modèle hédoniste, il est utile de présenter un aperçu sur les propriétés de la relation qui lie le prix du bois au diamètre des arbres. Celle-ci résulte de la relation qui lie le diamètre à l’usage du bois, au coût d'exploitation en forêt et au coût de production des produits finis.
La variation du prix des bois en fonction du diamètre peut être attribuée en grande partie aux industries qui les valorisent. La technologie des industries du bois permet une classification du bois selon la destination (trituration, sciage, tranchage). Pour une essence et une qualité donnée, l'usage et le prix du bois sont déterminés par le diamètre de l'arbre (Peyron, 1998).
Dans la pratique, le principal seuil de diamètre correspond au passage du bois de trituration (destiné à la pâte à papier et à la fabrication des panneaux en bois reconstitué) au bois d'œuvre destiné aux sciage, tranchage et déroulage. L'essence et la qualité sont moins importantes pour les bois de trituration (Caulfield et al., 1991), ce qui rend le prix au mètre cube peu sensible aux variations de diamètre contrairement au bois d'œuvre. Par ailleurs, la valorisation du bois d’œuvre dépend des possibilités technologiques. Par exemple, depuis la fin des années 1960, une nouvelle technologie de sciage des petits bois résineux a permis de valoriser des petits bois d'un diamètre de 20 à 30 cm (''Chip-N-Saw'') qui n'avaient auparavant d'autres débouchés que la trituration ou le chauffage (Badré, 1984). A défaut de cette technologie pour les feuillus, les bois d'un diamètre de 20 à 25 cm ne peuvent pas encore être classés comme des bois d'œuvre.
Le coût d'exploitation (abattage et débardage) des bois sur pied dépend de la condition de
terrain, de la structure du peuplement, de la densité, du volume et du diamètre moyen de la
coupe et de la méthode d'exploitation. Cependant, pour un système d'exploitation donné, le
coût moyen d'exploitation diminue de façon hyperbolique (Aldhous, 1986) ou exponentielle
(Cubbage et al., 1989) en fonction du diamètre de l'arbre. A partir d'un certain seuil, la hausse
du diamètre ne fait plus baisser le coût d'exploitation. L'effet du diamètre sur le coût moyen
d'exploitation, affecte la forme de la courbe prix-dimension dans son ensemble et notamment
dans son extrémité supérieure où le prix rejoint son asymptote horizontale (whiteman et al,
1991). Pour les petits arbres, le coût d'exploitation représente une grande partie du prix des
produits dérivés comme la pâte à papier alors que c'est plutôt l'inverse pour les gros bois. Par
conséquent, l'effet du coût d'exploitation sur le prix est également déterminant pour l'extrémité inférieure de la courbe prix-dimension où la valeur résiduelle du bois peut être nulle ou même négative.
L’effet du diamètre des arbres dans la production de sciages ou tranchage s’apprécie par le rendement de production qui est le rapport entre le volume du produit transformé et le volume du bois utilisé. Par exemple, la relation entre le rendement de sciage et le diamètre des grumes a une forme hyperbolique qui s’explique par la baisse des pertes au sciage. En outre, l'augmentation du diamètre permet de fabriquer des sciages ayant des dimensions - et donc des valeurs - plus élevés (Nautiyal, 1982, whiteman et al, 1991). L’effet du diamètre sur le rendement dépend donc essentiellement de la fonction de production. Pour le bois d'œuvre, la hausse du diamètre d'un arbre ou d'un ensemble d’arbres entraîne une hausse du rendement, une baisse du coût moyen de production, une hausse de la valeur des produits et donc une hausse du prix du bois sur pied. Cependant, à partir d'un certain seuil, la hausse du diamètre ne réduit plus le coût moyen de production. Ceci affecte donc la forme de la courbe prix- dimension dans son ensemble comme dans son extrémité supérieure où le prix reste constant quel que soit le diamètre. A partir de ce seuil (asymptote), le prix peut même baisser en raison de la baisse de la demande ou de la qualité du bois liée à certains problèmes comme le cœur rouge dans le cas du hêtre (Aldhous, 1983, Mitlin, 1987, Haaz, 2001). Dans ce cas, la relation n’est plus exclusivement imputée au diamètre mais à la corrélation avec la structure de la demande ou à la qualité du bois.
En résumé, la relation prix-dimension peut être représentée par une courbe qui prend une valeur constante au deçà d’un diamètre minimal puis une forme hyperbolique limitée par une asymptote horizontale. Cette relation a une incidence importante sur la spécification et l’estimation du modèle hédoniste puisqu’elle nécessite une modélisation non linéaire beaucoup plus délicate à mettre en œuvre.
2.2 Effets des variables liées à la structure et à la sylviculture sur le prix du bois sur pied La structure et la sylviculture d’un peuplement sont susceptibles d'influer sur les éléments qualitatifs des bois (la part de houppier, la hauteur à la base du houppier, l'élagage naturel de la grume etc.), d'une part, et sur les déterminants du coût d'exploitation (volume, densité et homogénéité en essence et en diamètre de coupe), d'autre part. La relation avec le prix des bois sur pied peut être schématisée à l’aide de la figure 1. Nous verrons, par la suite, comment certaines variables de la structure et de la sylviculture peuvent jouer sur les éléments qualitatifs et sur le coût d'exploitation du bois.
Figure 1 : Relations entre la structure de peuplement et le prix des bois 2.2.1 Incidences sur les éléments qualitatifs du bois
Structure et Sylviculture du
peuplement
Eléments qualitatifs du bois
Coût d’exploitation
Prix des bois sur pied
De nombreux auteurs (Godman, 1971 , Kellogg, 1990 , Saucier, 1990 , Cubbage,1990 , Dean,1999 , Groom et al, 2002 , Bastien et al., 2005) ont constaté que l'état qualitatif d'un peuplement résulte de l’historique de sa gestion et de l’environnement dans lequel croissent les arbres. Nous détaillerons par la suite l’incidence de certaines variables sur la qualité et donc sur le prix du bois sur pied. Si les variables concernant la structure et la sylviculture pratiquée (e.g. largeur moyenne de cerne, proportion du houppier…) ne sont pas toujours renseignées dans les cahiers de ventes, elles peuvent être mesurées dans les peuplements. En revanche, les effets de ces variables sont rarement indépendants et agissent simultanément, ce qui rend la construction des modèles du prix des bois sur pied plus délicate.
Proportion en volume du bois de houppier
Les lots de bois sur pied comportent des grumes ou tiges (hors houppier) d’un certain diamètre, constitués en bonne partie de bois d’œuvre et du bois de houppier. La distinction de ces deux catégories de bois est importante dans la formation du prix puisque l’essentiel de la valeur est capitalisée dans les grumes. En outre, la proportion en volume du houppier (ou de tige hors houppier) apporte une information supplémentaire sur la qualité du bois puisqu’elle est déterminée, entre autre, par le stade de développement de l'arbre et par l'histoire de la densité du peuplement pendant toute la période de la croissance de l'arbre (Dhôte et al. 2000).
Elle résume en quelque sorte l’histoire de la densité du peuplement. Selon Dhôte et al. 2000, la proportion en volume du houppier peut passer du simple au double des peuplements denses aux peuplements clairs.
Le prix au mètre cube de l'arbre ou celui du lot peut être calculé alors par la somme des produits de la proportion en volume de chacune des deux sous-ensembles par le prix correspondant. Ainsi, la proportion du bois de tige hors houppier à prix élevé est un facteur qui affecte fortement le prix des bois sur pied et donc la relation prix-dimension. La sylviculture et la structure du peuplement en influant sur la proportion en volume du bois de houppier affectent d'une façon important le prix au mètre cube d'un arbre comme celui d'un lot. Ce raisonnement inspire une nouvelle spécification du modèle de prix hédoniste. Elle consiste à distinguer la proportion du bois de houppier à prix faible et celle du bois de tige hors houppier à prix fort dans le modèle de prix. Cette distinction est possible avec les données de ventes du bois sur pied où les données sur le volume de tige hors houppier par classe de diamètre et le volume de houppier sont fournies séparément. Bien que la distinction, bois d'œuvre et bois de trituration (bois de houppier et petit bois) semble plus pertinente, elle est difficile à mettre en œuvre car les données correspondantes ne sont pas toujours fournies.
Cependant, la proportion du bois de houppier dans un lot est assimilable au bois de trituration et la proportion du bois de tige hors houppier (de diamètre à hauteur d'homme supérieur à un seuil critique compris en général entre 20 et 30 cm) est constituée, en bonne partie, de bois d'œuvre.
Etat de l'élagage naturel
Le nombre de branches vivantes et de nœuds est souvent un facteur important dans
l'appréciation de la qualité du bois destiné à des usages nobles. De nombreuses études
(Godman, 1971, Kellogg et al, 1988, Saucier, 1989, Dean,1999, Groom et al, 2002) ont
montré que la structure et la sylviculture du peuplement influent sur les éléments de qualité
des bois, surtout sur le nombre et sur la grosseur des nœuds et des branches vivantes. Groom
et al. (2002) ont évalué la qualité des grumes de pin (Pinus taeda), destinées au déroulage et
au tranchage, issues des peuplements irréguliers et réguliers (à régénération naturelle et à plantation) avec des densités différentes. Ils ont conclut que malgré l'élagage artificiel dès le jeune âge, les plantations intensives produisent des grumes de mauvaise qualité, en raison du nombre important de nœuds développés en début de croissance. En revanche, en raison d'un recouvrement permanent du sol, les grumes issues des peuplements irréguliers sont de meilleure qualité en termes de nombre et de grosseur de nœuds. Parmi les peuplements réguliers, ceux issus d'une régénération naturelle ont une qualité bien meilleure que ceux issus de plantations, alors que dans les plantations, la meilleure qualité appartient aux peuplements plus denses. En effet, plus la densité augmente, plus l'ombrage inter-arbres croît, plus l'élagage naturel s'effectue et donc plus le nombre et la grosseur de nœuds diminuent.
Godman et al (1971) ont montré que les défauts liés à l'élagage était 4 fois moins fréquents dans les peuplements très denses que dans ceux très clairs.
Largeur moyenne de cerne
La largeur moyenne de cerne d'un arbre est l'un des indicateurs qui a souvent été utilisé pour étudier l'effet de la structure et de la sylviculture du peuplement sur les propriétés mécaniques du bois (Narimani, 1983). Elle dépend fortement des différentes variables de taille, comme l'ampleur du houppier, la densité du peuplement et le statut social de l'arbre (Czudek, 1998).
L'effet de la largeur moyenne de cerne sur la qualité du bois est très différent selon l'essence.
Pour les résineux, les bois à cernes minces sont plus denses, plus résistants et généralement plus recherchés. En effet, plus la croissance est rapide et plus l'âge d'exploitation est faible, plus le pourcentage de bois de jeunesse sera élevé. Ceci correspond à des mauvaises propriétés mécaniques du bois. Ainsi, les bois de qualités A et B des résineux devraient avoir respectivement un accroissement moyen inférieur à 8 mm et 15 mm
1. Par exemple, le chêne issu de la réserve du taillis sous futaie possède moins de valeur que le chêne de futaie car les coupes périodiques modifient la vitesse de croissance des arbres ce qui n’est apprécié par l’industrie du bois qui préfère les arbres croissant régulièrement avec des cernes réguliers. En effet, la croissance lente et régulière chez le chêne correspond à un élagage naturel plus marqué, à faible pourcentage de bois final et donc à teinte relativement claire et à densité plus faible, ce qui correspond aux exigences des industries. En revanche, chez le hêtre, le bois à croissance rapide et régulière est fortement recherché (Narimani, 1983, Levy, 1997, Bastien et al. 2005, Becker et al. 2005, Nepveu et al. 1995). Selon la norme européenne de classement du bois de hêtre (AFNOR, 1997), la largeur moyenne de cerne (4 mm minimum) est l'une des conditions de classement du bois de meilleure qualité (A). Ceci est dû au fait que le hêtre à croissance rapide, présente les bonnes propriétés industrielles qui sont, entre autres : une moindre nervosité et déformation dans la production, moins de bois de tension
2(ou de traction) et un risque d'apparition de cœur rouge
3plus faible.
En ce qui concerne le hêtre, les acheteurs n'apprécient pas directement la largeur moyenne de cerne (alors que c'est parfois le cas chez le chêne). En revanche, il semble que cet aspect est pris en compte par la densité et la structure des peuplements d'où les bois proviennent. Pour les futaies régulières comme irrégulières, Bastien et al. (2005) ont montré que la largeur moyenne de cerne diminue très fortement avec la densité du peuplement. Les peuplements irréguliers sont en général moins denses que les peuplements réguliers. Par conséquent, les
1 ONF, 1996, cahier des clauses communes des ventes de bois façonnés, région Lorraine.
2 Il s'agit des bois sombres à vocation mécanique, formés sur la partie supérieure des tiges penchées ou recourbées afin de maintenir leur verticalité.
3 Le cœur rouge est un phénomène de vieillissement qui se constate chez les gros bois surtout lorsque la croissance est lente.
bois issus d'un peuplement irrégulier devraient avoir des cernes plus larges que ceux issus d'un peuplement régulier. Pour Levy (1997), c'est la raison pour laquelle le prix des bois issus d'un peuplement irrégulier (taillis-sous-futaie) est nettement supérieur au prix des bois provenant d'un peuplement régulier.
La forme mathématique de la relation prix - largeur de cerne devrait avoir une forme générale assez souple pour permettre une application à toutes les essences. En outre, le diamètre de l'arbre et la largeur de cerne sont corrélés entre eux. Ainsi, la largeur moyenne de cerne n'agit pas de façon autonome sur le prix des lots, mais plutôt en combinaison avec le diamètre moyen ce qui rend l'effet croisé de la largeur de cerne et du diamètre moyen plus pertinent que la largeur de cerne. Cependant, l’intégration de cet effet croisé pose le problème de la colinéarité. Une autre solution possible consiste à spécifier la largeur moyenne de cerne sous une forme multiplicative de la fonction prix-dimension. Si LC représente la largeur moyenne de cerne, une fonction mathématique à deux paramètres du type : f ( LC ) = exp( γ
1. LC . exp( − γ
2. LC )) présente une forme assez souple. Selon les valeurs des paramètres, elle peut être parabolique, croissante ou décroissante.
Coefficient de forme
La forme d'un arbre est un facteur important de la qualité et donc un déterminant dans la formation de prix. La forme des arbres est également susceptible d'être influencée par la structure et par la sylviculture du peuplement. Elle s'apprécie par divers coefficients basés sur la mesure du diamètre et de la hauteur à différentes découpes. L'un des plus simples est le coefficient de forme, comme étant le rapport entre le diamètre à mi-hauteur d
0.5et le diamètre à la hauteur d'homme d
1.3. Plus le coefficient de forme augmente, plus la décroissance moyenne métrique en diamètre diminue et donc plus la longueur des grumes et le rendement de transformation augmentent donnant plus de valeur aux arbres (Guttenberg, 1950 ; Steele, 1984). En général, le coefficient de forme augmente avec la densité.
2.2.1 Incidences sur le coût d’exploitation
Le coût d'un système d'exploitation dépend de la dimension des arbres, d'une part, et des éléments qui résultent de la structure et de la sylviculture du peuplement (densité de prélèvement, type de coupe etc.) d'autre part (Cubbage et al. 1989, Levy, 1997, South, 2003).
La densité du peuplement (volume sur pied par hectare), la densité du prélèvement (volume de bois sur pied à exploiter par hectare), le diamètre moyen de la coupe et la répartition des tiges par classe de diamètre et par essence affectent la productivité des systèmes d'exploitations et donc le coût d'exploitation.
En raison des coûts de déplacement
4et des coûts fixes des systèmes d'exploitation, la densité du prélèvement affecte le choix du système d'exploitation et les coûts fixes : plus la densité du prélèvement est grande, plus la productivité d'exploitation augmente, et plus le coût fixe moyen diminue. La densité du prélèvement est également susceptible d'expliquer, pour une grande partie, la différence de coûts d'exploitation des coupes partielles (amélioration) et totales (régénération) en futaie régulière et celles jardinées en futaie irrégulière.
Cependant, étant donnée l'hétérogénéité des coupes, notamment en diamètres des arbres qui les composent, la densité du prélèvement ne présente qu'une spécification partielle car il
4 Il s'agit des coûts liés au déplacement et à réinstallation d'un système d'exploitation d'une parcelle à l'autre.
existe une interaction entre le diamètre moyen des arbres et la densité de prélèvement (Cubbage et al, 1989). Plus le diamètre est grand, plus le volume par grume est important et plus l'efficacité d'exploitation en terme de volume exploité par unité de temps est grande. En outre, pour un diamètre moyen donné, plus la proportion en volume du bois de tige hors houppier est importante, plus l'effet de la densité du prélèvement sur le coût d'exploitation est fort. Ceci peut correspondre à la différence entre le système d'exploitation des petits bois (moins de 25 cm de diamètre) ou des bois de trituration, d'une part, et celui des gros bois (plus de 30 cm de diamètre), constitués en bonne partie de bois d'œuvre, d'autre part. Ils agissent donc différemment sur le coût d'exploitation.
En résumé, le coût d'exploitation dépend de la densité du prélèvement, de la dimension moyenne des bois et de la proportion du bois de tige hors houppier ainsi que de leurs interactions. Selon Cubbage et al. (1989), le coût moyen d'exploitation diminue d'une façon exponentielle en fonction du volume produit (densité du prélèvement fois le diamètre moyen).
De ce fait, la densité de prélèvement devrait entraîner une augmentation du prix du bois à un taux décroissant. La figure 2 représente le nuage de points du prix des lots en fonction de densité de prélèvement d’après les données des ventes de l’automne 1996 de l’ONF (voir la section $3.1 pour la présentation des données). Il est clair que la densité de prélèvement n’agit pas seule et indépendamment sur le prix mais en combinaison avec d’autres variables telles le diamètre moyen ou la proportion de bois de tige hors houppier (voir la section $3.2 pour la spécification du modèle retenu).
0 2 0 4 0 6 0 8 0
0 100 200 300
Densité du prélèvem ent (m 3/ha) Prix du lot (€/m3)
Figure 2 : Nuage de points de la relation entre le prix au mètre cube et la densité de prélèvement.
3- Estimation d’un modèle hédoniste du prix de bois sur pied
Sur la base des éléments théoriques sur les déterminants du prix de bois sur pied, nous proposons une spécification du modèle hédoniste susceptible d’améliorer l’estimation du prix. Le modèle proposé est estimé à partir d’une base de données constituée à partir d’une compilation d’informations sur les ventes d’automne de l’ONF de la région lorraine en 1996 : Levy(1997).
3.1 la base de données
La part des bois commercialisés en ventes publiques par appel à la concurrence (appel d'offres ou adjudication) représente une part importante du volume commercialisé par l’Office National des Forêts (ONF). Selon ONF (2006), ce mode de vente (adjudication) en 2005 représente 59 % du volume. La base de données dont on dispose s'inscrit dans ce mode de vente. Elle est composée d'une série transversale issue des grandes ventes d'automne (1996) de bois sur pied en Lorraine.
Les ventes qui nous intéressent sont majoritairement des lots de hêtre (le hêtre constitue en moyenne plus de 86 % du volume), issues des catalogues de vente de l'ONF à l'automne 1996 dans la région Lorraine. Cette base de données a été construite à partir des catalogues, puis complétée par des mesures supplémentaires sur le terrain (données dendrométriques et stationnelles) par Levy (1997). Levy (1997) et Bakouma (2002) ont utilisé cette base de données pour établir des relations prix-dimension. Les informations retenues portent sur 111 lots. Il s’agit des éléments suivants :
- Distribution du volume grume et du nombre de tiges par classe de diamètre - Volume total du houppier du hêtre et des autres résineux et feuillus, par lot - Nombre de tiges et le volume grume total pour les autres essences, par lot - Prix de vente de chaque lot
- Type de coupe (coupe d'ensemencement, coupe secondaire, coupe définitive et coupe d'amélioration)
- Type de peuplement (peuplement régulier, peuplement irrégulier de type taillis sous futaie) Les principales variables ainsi que leurs statistiques simples sont résumées dans les tableaux 1 et 2.
Tableau 1 : statistiques simples des variables continues de la base des données
_________________________________________________________________________
Nom de
la variable Siginfication Moyen Ecart-type Min Max
Dg Diamètre moyen 49,03 12,23 16,75 75,91
H Hauteur moyenne 24,82 4,93 12,29 42,72
HE Homogénéité en essence (herfindahl) 0,74 0,18 0,37 1,00
H/Dg Rapport hauteur-diamètre moyen 0,52 0,10 0,33 0,93
SHE Homogénéité en essence (Shannon) 0,47 0,29 0,00 1,04 HD Homogénéité en diamètre (herfindahl) 0,13 0,06 0,00 0,33 SHD Homogénéité en diamètre (Shannon) 2,11 0,24 1,27 2,55
DP Densité de prélèvement 56,51 41,31 5,67 299,68
Sg Proportion de bois de tige 0,65 0,11 0,36 0,94
HF Hauteur de forme (CF x hauteur) 9,91 1,23 7,10 13,49
LDC Largeur de cerne 0,30 0,05 0,16 0,42
PH Proportion du hêtre dans le lot 0,85 0,12 0,56 1,00
debard Distance de débardage 254,17 156,79 100 1000
PBTige Proportion du bois de tige 0,65 0,11 0,36 0,94
PBHoup Proportion du bois de houppier 0,34 0,11 0,06 0,64 _________________________________________________________________________
Tableau 2 : statistiques simples des variables binaires de la base des données
__________________________________________________
Nom de
la variable Siginfication Moyen
AMEL Coupe d'amélioration 0,39
SEC Coupe secondaire 0,42
ENS Coupe d'ensemencement 0,05
DEF Coupe définitive 0,14
FR Peuplement régulier 0,56
FIR Peuplement irrégulier 0,44
BQ Bonne qualité 0,83
DC Division Commercy-Vaucouleurs 0,11
DV Division Vittel 0,14
DB Division Bar-Ligny 0,14
DN Division Nancy-Haye 0,14
DNE Division Neufchâteau 0,21
DE Division Epinal-Arche 0,26
___________________________________________________
La localisation des lots est définie par les 6 régions suivantes : Epinal-Arches (DE), Vittell (DV), Neufchâteau (DNE), Nancy Haye (DN), Commercy-Vaucouleurs (DC) et Bar-Ligny (DB). Les lots issus de la division Bar-Ligny (DB) et Commercy-Vaucouleurs (DC) sont majoritairement de type taillis-sous-futaie (44% des lot) et ceux issus des autres régions sont de type futaie régulière (56% des lots).
3.2 Spécification du modèle
Dans le modèle hédoniste, le prix total (PT) d’un lot est expliqué par la dimension des arbres et un ensemble de caractéristiques (X
1, X
2, … X
K) sur la structure du peuplement. Si les diamètres des arbres étaient distribués d’une manière uniforme dans tous les lots, la dimension pourrait être prise en compte par le diamètre moyen. Or l’hétérogénéité des lots en dimension, nous impose la prise en compte de l’ensemble des classes de diamètre. Pour cette raison, nous adaptons la spécification proposée par Jakson et McQuillan (1979) qui consiste à introduire une fonction prix-dimension H(D) dans le modèle hédoniste. Si on considère N classes de diamètre dans un lot, le modèle de prix s’écrit :
∑
∑
= =∗ +
∗
=
Kk
k k k i
N
i
i
V e g X
D H PT
1 1
) ( )
(
D
iétant le diamètre médian de la classe de diamètre i. Pour chaque caractéristique X
k, g
k(X
k) représente la transformation fonctionnelle choisie et e
kun paramètre à estimer. A partir de cette forme générique, nous allons intégrer les améliorations proposées dans la section précédente. Dans un premier temps, nous introduisons uniquement la composante dimension dans le modèle. Les autres caractéristiques seront introduites dans une seconde étape.
Introduction de la composante dimension en combinaison avec la part du houppier.
Les investigations sur la forme de la courbe prix dimension ont conduit à choisir un modèle
monomoléculaire (ou de Mitscherlich) à trois paramètres (Calvet, 1998). En ne considérant,
pour une classe de diamètre i, que les grumes d’un diamètre supérieur à un seuil d
m(constitué de bois d’œuvre), la fonction de prix au mètre cube s’écrit :
[ ]
[ 1 exp .( ) ]
. )
( D
iP
maxa D
id
mH = − − − où D
iest le diamètre médian de la classe de diamètre i, P
maxest un prix maximum (asymptote) et a un paramètre représentant la rapidité avec laquelle le prix au mètre cube tend vers P
max.
Le prix du bois de houppier et celui des arbres de diamètre inférieur au seuil d
m, qui sont assimilables au bois de trituration, est considéré constant et indépendant du diamètre. Si pour une classe de diamètre i, Vi représente le volume total du bois de la classe, Vgi celui des grumes (tige hors houppier) et P
hle prix au mètre cube constant du bois de trituration, le prix total P
iet le prix au mètre cube PU
idu bois de la classe de diamètre i s’écrivent :
( ) [ [
dm )] ]
c.(D i exp
1 max . gi .p gi V
i V V h . i p
P = − + − − −
[ ]
[ ]
[ p . 1 exp c.(D d ) ]
V . V V
1 V . p
PU
max i mi gi i
gi h
i
+ − − −
−
=
Le prix total du lot (PT) est obtenu en additionnant le prix des N classes de diamètre pondéré par le volume de chaque classe. De même, le prix au mètre cube (PU ) du lot est obtenu en divisant le prix total du lot par le volume total (VL) du lot :
[ ]
[ ]
[ ]
∑
∑
∑
=−
=+
=− − −
=
ni
m i gi
n
i gi n
i i
h
V V V p c D d
p PT
1
max 1
1
) .(
exp 1 . . )
.(
[ ]
[ ]
[ ]
− − −
+
−
=
= ∑ ∑
=
= n
i
m i L
gi L
n
i gi h
L
p c D d
V V V
V p
V PT PU
1
1
.
max. 1 exp .( )
1 . /
Introduction des autres caractéristiques du lot.
A la différence de l'approche de Jakson et McQuillan (1979) où le modèle hédoniste est toujours considéré comme une fonction additive des caractéristiques du lot, nous introduisant, comme cela a été proposé dans Whiteman et al. (1991), que certaines caractéristiques puisse agir sous forme multiplicative (comme par exemple la largeur moyenne de cerne) avec la composante dimension. Cette démarche est justifiée par le fait que les effets des autres caractéristiques qui sont étroitement liés à la grosseur des arbres n’agissent pas nécessairement d’une manière linéaire. La forme multiplicative permet d’appliquer les effets d’une manière homogène tout au long de la courbe prix-dimension. En revanche, la forme additive (effet croisé de la variable et du diamètre moyen) peut entraîner une surestimation du prix, notamment pour les gros diamètres.
Nous avons utilisé une fonction exponentielle dans la forme multiplicative avec la fonction
prix-dimension. La fonction exponentielle joue le rôle d'un coefficient neutre (de valeur1) si
la valeur de la variable multiplicative est nulle. Autrement, ce coefficient agit selon la valeur
des paramètres estimés. Evidemment, le coefficient multiplié par la fonction, H(Di), peut affecter uniquement le prix au mètre cube du bois de tige hors houppier ou le prix au mètre cube du lot. Ainsi, selon ces deux possibilités, on peut utiliser respectivement les formulations suivantes :
[ ]
[ ]
[ ] ∑
∑
∑
∑
=
= +
=
=
+
− − −
+
−
=
mj
j j j n
i
m i gi
p
m j
j j n
i
gi
f X S b c D d e g X
S a
PU
1 1
1 1
1
. 1 exp( ). . . 1 exp .( ) . ( )
[ ]
[ ]
[ ] ∑
∑
∑
∑
+ = = ==
+
+ − − −
−
=
mj
j j j n
i
m i gi
n
i gi p
m j
j
j
X a S S b c D d e g X
f PU
1 1
1 1
2
exp( ). . 1 . . 1 exp .( ) . ( )
(m) étant le nombre de variables introduites de manière multiplicative. Les modèles proposés correspondent à des faisceaux ou des réseaux de courbes prix-dimension selon les variables qui représentent la part de bois de tige hors houppier, la largeur moyenne de cerne du lot et la densité du prélèvement. Ils sont assez généraux pour être appliqués à des lots hétérogène en essences et en dimensions et n'importe quelle structure du peuplement.
3.3 Estimation du modèle
Le modèle spécifié est non linéaire et nécessite des procédures d’estimation spécifique. Les méthodes des moindres carrés non linéaire permettent d'ajuster aux données, un modèle non linéaire prédéfini en minimisant la somme des carrés des écarts de l’ajustement. Les algorithmes de maximisation sont plus difficiles dans le cas non linéaire et se basent sur des méthodes itératives. La procédure du logiciel SAS avec l’algorithme itératif de Marquardt a été utilisée. A partir de la spécification explicite des dérivées premières et secondes du modèle par rapport aux paramètres et des valeurs initiales, la procédure détermine les valeurs des paramètres qui permettent une convergence par itérations successives vers l’optimum.
La sélection entre les différentes spécifications possibles ne peut pas être automatisée comme dans le cas du modèle linéaire. Des nombreuses estimations réalisées ressortent le pouvoir explicatif des deux variables suivantes :
- Le Croisement de la densité du prélèvement, de la proportion du bois de tige hors houppier de diamètre 30 et plus et du diamètre moyen.
- Le croisement de la largeur moyenne de cerne et du diamètre moyen.
L'effet de la structure et de la sylviculture sur les éléments qualitatifs sont donc expliqués par la proportion du bois de tige hors houppier et la largeur moyenne de cerne. La densité du prélèvement quant à elle explique le déterminant de prix lié au coût d'exploitation. Nos investigations n’ont pas permis de faire ressortir un effet significatif pour les variables sur la localité des lots, ni pour celles sur la distance de débardage.
Nous procédons par la suite en intégrant les deux variables significatives. Seules les
paramètres significatifs à un niveau de confiance de 5% sont retenus dans les modèles. A
parité du degré de liberté, la discrimination des modèles ainsi obtenus a été faite à l'aide du
R² ajusté, de l'écart-type résiduel et de la statistique de Fisher. Comme attendu, la
spécification additive de la largeur de cerne est moins performante que les spécifications
multiplicatives. En revanche, la spécification de la largeur de cerne sous une forme
multiplicative du prix du bois de tige hors houppier est apparue plus performante. De la
même façon, la spécification additive de la densité de prélèvement est statistiquement plus performante que la spécifications multiplicative. La variable qui représente le croisement de la densité de prélèvement, du diamètre moyen et de la proportion du bois de tige de diamètre supérieur à 30 cm a été introduite sous une forme de fonction minimum. Ce choix a été suggéré par la forme du nuage de points dans la diagramme constitué par le prix et cette variable. Ce nuage de points a la forme d’une courbe qui augmente jusqu’à un seuil et devient constante au delà. Le modèle final retenu est le suivant :
[ ] [ [ [ ] ] ]
[
3 4]
1 2
1 1
), 30 .
. .(
) .(
exp 1 . . .
) . exp(
. . exp 1
.
e P PBTige g
DP e
d D c b
S LC e LC
e S
a PU
D Min
n
i
m i gi
n
i gi
+
− − −
− +
−
= ∑ ∑
=
=
Les résultats de l’estimation sont résumés dans le tableau 3. Le coefficient de détermination
5R² de l’estimation est égal à 97.3 %. La qualité d'ajustement du modèle mesurée par la statistique de Fisher
6est de 55.2 ce qui correspond à une probabilité d'erreur de moins de 1 pour 1000. Enfin, l’écart-type résiduel
7du modèle est égal à 8,82 euro. Les performances du modèle sont nettement meilleurs que celles du modèle estimé par Levy(1997) sur les mêmes données qui avait un coefficient de détermination de 92.2 % et un l'écart-type résiduel 12.3€.
Tableau 3 : Le résultat de l'estimation du modèle
Paramètre Estimation t-student Signification des paramètres
a 14,3763 2.1825* Coordonné à l'origine (constante)
b 76,5581 3,5428** Prix maximal du bois de tige hors houppier c 0,0397 2.4356** Rapidité de tendance vers le prix maximal dm 26,4656 14,2143** Diamètre minimal du bois d’œuvre
e1 1,0914 2,1357* Effet de la largeur moyenne de cerne
e3 0,0035 2,6516* Effet de la densité de prélèvement et de la part du bois de tige de diamètre supérieur ou égal à 30 e4 14,4667 3,432** paramètre de la fonction minimum sur la densité
de prélèvement
___________________________________________________________________________
* Significatif à un niveau de confiance de 5 %
** Significatif à un niveau de confiance de 1%
L’étude des résidus du modèle estimé (figure 3) montre une forme groupée et centrée avec une légère hétéroscédasticité associée à un écart-type résiduel de 8,82 € et une espérance nulle. Cette hétéroscédasticité peut être est liée à l'absence de variables plus explicites sur la qualité du bois pour les grands diamètres.
5 La statistique R² est le rapport entre la variation expliquée par le modèle et la variation totale de la variable expliquée.
6 La statistique F et le résultat de l'analyse de variance ne sont interprétables qu'en présence d'une constante dans le modèle (même non significative).
7 L'écart-type résiduel est la racine carrée de la variance expliquée (variabilité du modèle divisé par le nombre de paramètre moins un) et la variance résiduelle (rapport entre la somme des carrés des résidus et le degré de liberté) du modèle.
Figure 3 : Analyse des résidus du modèle estimé
Pour apprécier la supériorité du modèle proposé en termes d’intégration des classes de diamètre et de la proportion en volume du bois de tige hors houppier, nous avons comparé ses performances par rapport aux modèles suivants :
Modèle 1 : La dimension des arbres est considérée à travers le diamètre moyen
Modèle 2 : Toutes les classes de diamètre sont intégrées, mais la variable « proportion en volume du bois de tige hors houppier du lot » est omise.
Modèle 3 : La dimension des arbres est considérée à travers le diamètre moyen et la variable
« proportion du bois de tige hors houppier du lot » est omise.
Tableau 4 : Comparaison des statistiques des différents modèles estimés
__________________________________________________________________
Modèle
Proposé Modèle 1 Modèle 2 Modèle 3
Ecart-type 8,82 9,20 9,84 10,43
Statistique de Fisher 55,19 49,35 40,91 34,48
degré de liberté 104 104 104 104
La comparaison des estimations de ces trois modèles (tableau 4) montre que, toutes choses étant égales par ailleurs, l'intégration de toutes les classes de diamètre par rapport au seul diamètre moyen, a amélioré la qualité d'ajustement (baisse de l'écart-type résiduel de 4 % et hausse de la statistique F de 12 %). La comparaison des statistiques du modèle 2 et du modèle proposé laisse clairement apparaître, toutes choses étant égales par ailleurs, l'effet important de l'intégration de la proportion en volume du bois de tige hors houppier sur la qualité d'ajustement. Elle fait diminuer l'écart-type du modèle de 10 % et fait augmenter la statistique de Fisher de 35 %. Plus la part du bois de tige hors houppier est importante, plus le prix du lot est important. Il est donc attendu que cette variable affecte d'une manière importante la qualité d'ajustement du modèle. Enfin, la comparaison du modèle 3 et du modèle proposé montre l'effet combiné des deux particularités du modèle (baisse de l'écart type résiduel de 15 % et augmentation de la statistique de F de 60 %). Ainsi, selon ces résultats, le modèle proposé présente une meilleure qualité d'ajustement.
3.4 Quelques illustrations du modèle
Une première illustration consiste à comparer les valeurs de quelques paramètres estimés du modèle avec l’ordre de grandeur des paramètres habituellement utilisés par l'Office National des Forêt (l'ONF). On peut constater, par exemple, que le diamètre marginal (D
m) en dessous
-20 -10 0 10 20
20 30 40 50 60 70 80
Prix estimé
Résidus
duquel l'arbre est classé comme bois de trituration, est estimé à 27 cm dans notre modèle.
Cette valeur est compatible avec la classification des feuillus par catégorie de diamètre, appliquée par l'ONF où les petits bois (en négligeant le bois de feu considéré ici comme bois de trituration) ont un diamètre inférieur ou égal à 27,5 cm. La comparaison du prix moyen du bois de trituration renforce également la pertinence du modèle. Ce prix est estimé à 14,4 € avec le modèle. Il est comparable au prix moyen national des petits bois (de diamètre inférieur ou égal à 25 cm) de 12 € calculé par l'ONF pour l’année 1995-96.
Une seconde illustration consiste à vérifier l’ajustement du modèle estimé au nuage de points de la base dans le diagramme (diamètre moyen, prix au mètre cube). Dans le graphique 4, la courbe prix dimension est obtenue à partir du modèle estimé en faisant varier le diamètre moyen et prenant les valeurs moyennes pour les autres variables (part du bois de tige=65% ; densité du prélèvement=68 m
3/ha).
Figure 4 : Relation entre le prix au mètre cube et le diamètre de l'arbre, estimé à partir de l'ensemble des données
Pour mieux visualiser la correspondance du modèle avec le nuage de points, nous distinguons dans le nuage de point les lots où la part du bois de tige est inférieur à 60% de ceux où il est supérieur ou égal à 60% (figure 5). Les courbes calculées à partir du modèle s’ajustent encore plus étroitement avec les nuages de points. Cependant, il reste évidemment des différences qualitatives interindividuelles et inter-peuplement, jouant surtout pour les gros arbres, qui sont pas prédites par le modèle.
10 30 50 70 90
10 20 30 40 50 60 70 80
Diamètre moyen (cm)
Prix au mètre cube (euros/m3)
10 35 60 85
10 30 50 70
Diam ètre m oyen (cm )
Prix au mètre cube du lot
Part de la tige > 0,6 Série4
Part de la tige < 0,6 Série3
Figure 5 : Relation entre le prix au mètre cube et le diamètre moyen selon deux valeurs pour la variable sur la proportion du bois de tige (hors houppier)
Enfin la troisième illustration consiste à mesurer l’effet des variables de structure retenues sur le prix au mètre cube du bois. Il est possible de calculer le prix implicite des variables (caractéristiques) en dérivant la fonction hédoniste, mais nous nous contenterons ici d’illustrer graphiquement l’incidence de la largeur de cerne et de la densité de prélèvement. Dans la figure 6, trois courbes ont été tracées pour des largeurs de cerne de 2,5mm, 3,5mm et 4,5mm.
On constate alors qu'à un diamètre de 60 cm, le prix augmente de 19 % lorsque la largeur moyenne de cerne passe de 2,5 mm (62 €/m3) à 4,5 mm (74 €/m3).
Figure 6 : Effet de la largeur moyenne de cerne sur le prix du bois
L’effet de la densité peut être illustré par l’effet croisé de la densité du prélèvement, du diamètre moyen, et de la part du bois tige hors houppier de diamètre 30 et plus. Cette variable croisée est susceptible de refléter la différence entre le prix des bois sur pied issus d'une coupe de régénération (ayant une forte densité du prélèvement composé de gros bois) et ceux issus d'une coupe d'amélioration (à faible densité du prélèvement composé de bois moyens et petit bois) ainsi que la différence de la densité de coupe suivant différents régimes sylvicoles.
Dans la figure 7, nous avons comparé les courbes prix-dimension de coupes très intensives et extensives (200 contre 50 m3/ha).
10 30 50 70 90
10 20 30 40 50 60 70 80
Diamètre moyen (cm)
Prix au mètre cube (euros/m3)
LC 4,5 mm LC 3,5 mm LC 2,5 mm
10 30 50 70
10 30 50 70
Diamètre moyen (cm)
Prix au mètre cube (euros/m3)
Forte densité du prélèvement Faible densité du prélèvement